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31/05/2013

Vive l'inertie !

Il ne fait pas bon être bon élève dans le champ social. Et on ne compte plus les enthousiastes de la première heure qui doivent affronter les sarcasmes et sourires goguenards des désabusés professionnels qui, n'ayant jamais été nulle part, sont revenus de tout. Cela avait commencé avec les 35 heures. Ceux qui s'étaient inscrits dans la loi de 1998, avaient réduit le temps de travail et maintenu les salaires, cherchaient encore comment regagner les surcoûts de 11,4 % générés par leur décision, quant la deuxième loi votée en 2000 leur fit comprendre qu'en ne faisant rien, et en restant à 39 heures, le surcoût était de 2,5 % de salaire et pouvait se rattraper en un an, deux maximum. Et l'on nous refait le coup avec le DIF. Ceux qui ont été proactifs et ont développé des politiques innovantes vont devoir soit replier les gaules, soit trouver les ressources en interne lorsque l'on obligera les OPCA à réorienter leurs financements vers les demandeurs d'emploi et le compte personnel de formation.

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Tout se passe comme si le législateur prenait un malin plaisir à décourager les initiatives, à favoriser l'inertie et finalement à donner raison à tous les pisse-froids qui ont toujours d'excellentes raisons de manquer d'imagination. Peut être que le jour où l'on se préoccupera de faire des textes pour accompagner les proactifs, pour encourager l'innovation, pour récompenser la créativité et non pour contraindre, imposer, sanctionner les récalcitrants et finalement tomber dans un jeu de dupe où chacun tient la barbichette de l'autre (je t'impose mais pas trop, je fais ce que tu m'imposes mais en faisant semblant), peut être alors que cela ira un peu mieux. On ira toujours plus vite en essayant d'accélérer le mouvement qu'en tentant de faire bouger l'inertie.

30/05/2013

Innovation classique

Ingres est répertorié parmi les peintres classiques : excellente maîtrise du dessin, application minutieuse dans la préparation des fonds, positionnement précis des détails, disparition de toute trace de la brosse après qu'elle soit passée sur la toile, le digne héritier de son maître David. Oui mais voilà, sous ce classicisme d'apparence apparaît l'innattendue et incongrue innovation : les corps s'allongent, les os s'assouplissent, les positions défient les lois physiques, les représentations débordent leurs personnages. Picasso ne s'y était pas trompé qui construisit un dialogue avec Ingres à travers le temps.

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Ingres - La source

Si l'on peut innover dans le classicisme, il arrive également que l'on fasse l'inverse. Lors de sa visite à l'usine Bosch de Rodez, François Hollande a salué un accord entre la direction et les syndicats qu'il a qualifié de "bel exemple" du dialogue social et qu'il a placé dans la ligne des objectifs poursuivis par le contrat de génération. Sans doute sa lecture de l'accord, ou du résumé que lui en ont fourni ses conseillers, a-t-elle été rapide. L'accord de compétitivité est surtout marqué par 116 départs en préretraite, soit l'inverse du maintien dans l'emploi des seniors voulu par le contrat de génération, qui sera de ce fait classé au rang des mesures qui persistent à vouloir le bonheur d'autrui malgré lui, et l'exacte politique de ressources humaines conduite depuis plus de 40 ans : maintenir la situation de ceux qui restent en diminuant  les coûts par des mesures d'âge. Pour le coup, très classique mais bien peu innovant.

29/05/2013

Plus vite, plus haut, plus fort

Vous faisiez quoi vous le 5 juin 1983 ? vous ne vous souvenez pas ? (si vous étiez né...). Moi j'avais planté tous mes bouquins de droit, mes polycopiés, mes notes, mes résumés, mes plans en deux parties, mes angoisses devant le nombre de cours séchés, mes exaspérations de ne devoir solliciter que ma mémoire pour répondre aux sempiternelles questions de cours, bref, j'avais fait un break pour regarder Noah en faire trois et remporter Rolland Garros. Quel pied ! Mais en revoyant la finale, rediffusée ces jours derniers pour le trentième anniversaire, grosse surprise : j'ai cru visionner un ralenti. Des balles molles, des coups qui passent trois mètres au dessus du filet, des joueurs statiques (pourtant quels athlètes Noah et Wilander) qui attendent que la balle arrive à eux, des frappes qui partent trois secondes après le rebond de la balle, bref un jeu qui ne permettrait pas de passer le premier tour aujourd'hui. Et pourtant, que c'était beau.

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Aujourd'hui, le centième mondial tape trois fois plus fort, la balle va deux fois plus vite et elle décoiffe le filet à chaque échange. Bien sur, c'est vrai dans tous les sports et la comparaison d'époque, en matière sportive, n'a pas grand sens. Coppi, Merckx et Hinault ne batailleront jamais côte à côte dans un col des pyrénées et comparer leur vitesse d'ascension est absurde. Sauf à démontrer que vient le moment où la performance va un peu au-delà de l'humain, un peu au-delà des limites, et que pour aller encore plus vite, plus haut, plus fort, il faut un peu plus de potion magique, de pillule mystère, de muscle artificiel, de sang oxygéné et de corps trafiqué.

Et du coup, on peut se demander si les mêmes potions, ou leurs variantes, n'accompagnent pas ceux qui voient proliférer les informations à traiter, s'accroître sans fin la circulation de l'information, se raccourcir à l'infini les délais, monter toujours plus haut les objectifs, taper encore plus fort les managers, eux-mêmes aux abois et qui ne rêvent que d'être aux abris. Alors, tout augmente ma pov'dame ? oui, sauf les impôts bien sur !

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28/05/2013

Auberge allemande

Je ne sais pas si Jean-Emmanuel Ray a été voir l'auberge espagnole, le film de Cédric Kaplish. Mais je sais qu'il interdit aux étudiants du Master en Développement RH, à la Sorbonne, de faire leur voyage d'étude annuel au Sud de la Loire. Il faut quand même rester sérieux : un voyage de travail cela s'organise en Suède, en Autriche, aux Pays-Bas, au Danemark, même pas en Grande-Bretagne (les pubs !) et surtout pas en Italie, en Espagne, en Grève -pardon en Grèce- ou au Portugal, il y a suffisamment d'acquis sociaux (congés payés, RTT) pour aller faire un tour dans ces pays là. Et les statistiques lui donnent raison : l'Allemagne a accueilli en 2012 un million d'immigrés alors que l'Espagne et les autres perdent leur jeunesse. Car là se trouve le phénomène nouveau. Si les immigrants des pays d'Europe centrale demeurent majoritaires, les espagnols, les italiens, les grecs ont rejoint l'Allemagne par dizaines de milliers. Attention le Nord, le Sud arrive !

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Jeune européen se préparant à entrer dans une bodega

Je ne sais pas si le fait de priver les pays du Sud d'une main d'oeuvre qualifiée pour l'utiliser à produire des biens de consommation qui seront revendus à ces mêmes pays au risque d'aggraver leur déficit constitue un cercle économique vertueux. Par contre, cet appel d'air allemand, qui  devrait  s'amplifier ces prochaines années pour des raisons démographiques, aura au moins le mérite de contribuer à développer les bodegas en terres anglo-saxonne, ce qui changera un peu de la fête de la bière (mais non c'est pas pareil). Du coup, on peut continuer à apprendre l'espagnol, on pourra bientôt s'en servir en Allemagne. Olé !

27/05/2013

Jeunes et démissionnaires

La DARES vient de publier une analyse des cas de rupture de CDI (les fins de CDD et de missions d’intérim sont exclues) en fonction de l’âge. Une occasion de vérifier que la démission demeure, de très loin, le premier motif de départ de l’entreprise…sauf pour les salariés de 55 ans et plus, pour lesquels les licenciements sont plus nombreux que les démissions et les ruptures conventionnelles bien plus importantes que dans les autres catégories d’âge. Ce qui nous permet deux confirmations : la première c’est que l’assurance-chômage finance bien des préretraites puisque les licenciements de salariés post 55 ans reflètent moins un acharnement soudain des employeurs que la persistance de pratiques de préretraites qui ont la vie dure depuis 40 ans, soit deux générations. La deuxième confirmation c’est que plus on avance en âge et moins on démissionne, d’où des taux de licenciement plus élevés. Ce qui démontre que lorsqu’il y a une rotation rapide du personnel, il y a moins de licenciements. Par contre, dès lors que les départs volontaires sont plus rares, le taux de licenciement augmente.

 

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Les chiffres de la DARES permettent également de constater que les licenciements économiques demeurent, à tous âges, beaucoup moins nombreux que les licenciements pour motif personnel et que chez les moins de 40 ans, la démission et la rupture conventionnelle, soit les départs volontaires, représentent plus de 75 % des cas de rupture.

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Bien sur, les tableaux présentent des moyennes et masquent toujours les cas particuliers. Car il y a au moins un actif de 76 ans qui n’est pas prêt de démissionner ni de prendre sa retraite, c’est Jean-Baptiste Thiérrée. Créateur avec son épouse Victoria Chaplin, du Cirque Invisible, qui se donne à voir au Théâtre du Rond-Point jusqu’au 15 juin prochain, il produit, dans la lignée d’Alexandre Calder qui animait encore son Cirque de bout de fils de fer à plus de soixante ans, un spectacle tout en créativité, inventivité, poésie et sans recours à l’informatique, tout en mécanique et en finesse. Si vous voulez goûter à ce que le monde d’avant produisait de meilleur, courez y vite : voir son visage, c'est rire.

26/05/2013

Jour de marché

Les hommes politiques nous expliquent régulièrement que le pays réel, les vrais gens, LES français, comme ils disent, c'est sur les marchés qu'on les rencontre. C'est d'ailleurs là que Jérôme Cahuzac est allé vérifier qu'il devait s'abstenir, au moins pour cette fois. C'est au marché, comme autrefois au comptoir des bistrots, que les véritables préoccupations, les sujets d'intérêts, inévitablement s'expriment. La voilà la vraie vie, ce pourquoi on ne fait pas le marché comme on fait ses courses au supermarché. On prend le temps, on se laisse aller, on est disponible, on écoute, on discute. Pour ma part, le plus grand plaisir est d'entendre parler espagnol. C'était fréquemment le cas à Toulouse ou Montauban, et cela arrive encore parfois, plaisir décuplé, au marché d'Aligre.

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Ce matin donc, à l'heure de la fin du déballage, des dernières installations, des premiers clients, lorsque la foule n'est pas encore compacte, lorsque l'on va lentement par choix et non par piétinement, un sujet revenait inlassablement de l'étal de fruits et légumes au fromager en passant par le bazar, le bouquiniste ou le marchand de fleurs. Une même information circulait plus vite que les marchandises ne s'échangeaient. La manif du jour sur le mariage pour tous ? non, pas un mot, rien, nada. La psychose du terrorrisme après les attaques de militaires ? que nib, silence radio, personne pour renchérir. Le chômage qui étreint le pays et se répand inexorablement ? à peine présent dans les commentaires. Le temps pourri qui ruine le moral, décuple les ventes de prozac et de gateaux sucrés ? même pas. Le sujet, le vrai sujet, celui qui passionnait ce matin tout un chacun, c'était la montée des marches à Cannes par DSK, tout sourire au bras de sa nouvelle compagne. Et si vous pensez que j'essaie de vous faire marcher, allez y voir vous même, il est encore temps.

24/05/2013

L'accord des pas d'accord

La décision était attendue depuis quelques mois, car elle pouvait couper court au développement de la rupture conventionnelle. La question posée à la Cour de cassation était en effet de savoir si une rupture conventionnelle homologuée pouvait être conclue entre un salarié et un employeur dans un contexte de conflit. Répondre par la négative aurait eu pour conséquence que seuls les bons amis pouvaient négocier librement les modalités de fin de leur contrat de travail : pour les autres, il ne restait que l'unilatéral, à savoir la démisssion ou le licenciement. La Cour de cassation n'a, fort heureusement, pas emprunté cette voie.

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Edward Munch - La Bagarre - 1932-1935

Dans une décision rendue jeudi 23 mai, elle a décidé qu'une situation conflictuelle ne s'opposait pas, par principe, à la conclusion d'une rupture conventionnelle. Il est donc possible de sortir d'un conflit par la négociation, ce qui redonne vie à l'adage selon lequel un bon accord vaut mieux qu'un mauvais procès. Sont ainsi transposés au niveau individuel, les accords collectifs de fin de conflit.

Toutefois, la Cour de cassation rappelle que, s'agissant d'une rupture négociée, aucune partie ne doit imposer sa volonté à l'autre ou faire pression sur le consentement de l'autre. Par conséquent, il n'est toujours pas possible de menacer un salarié de licenciement pour l'engager ensuite dans une procédure de rupture conventionnelle : un tel acte ferait risquer la nullité à l'accord de rupture. Après l'envoi de la convocation à l'entretien préalable, il faut donc oublier la rupture conventionnelle et ne surtout pas négocier  pendant l'entretien de licenciement. Négocier en situation de conflit oui, sous pression non.

Cass.Soc 23 mai 2013 RC.pdf

23/05/2013

Salud Giuseppe

On ne fait pas l'amour, c'est lui qui nous fait

(André Hardellet)

 


22/05/2013

Ali Gattaz et les 40 milliards

J'en suis resté baba. Doublement baba d'ailleurs. D'abord parce que voir Pierre Gattaz, le candidat donné favori à la présidence du MEDEF, prendre la plume pour signer une tribune dans Le Monde consacrée à la formation professionnelle, c'était rien moins qu'évident. La seconde en lisant la dite tribune. Car, comme d'autres, j'ai du me pincer, relire et rerelire pour être bien sur de n'avoir pas rêvé. Après les fantaisistes 30 milliards de la formation que Sarkozy voulait récupérer, voici que le peut être futur patron des patrons explose toutes les limites en invitant les partenaires sociaux à mieux utiliser les 40 milliards d'euros gérés paritairement. Rappelons que les OPCA en gèrent 6 fois moins (6,5 milliards) et que même en grattant quelques millions dans les dépenses de l'UNEDIC, on reste loin du compte. Décidément, le trésor imaginaire caché dans la grotte secrète n'en fini pas d'alimenter tous les fantasmes. Donnons vite le sésame à chacun pour qu'il puisse aller vérifier qu'en fait de trésor, il faudra repasser.

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Ali Baba au théâtre de la Criée à Marseille

Toutefois, le contenu de la tribune  conduit à absoudre cette approximation. Pour une fois, ne nous est pas servi le couplet sur l'Education nationale qui est incapable de former les bons professionnels dont les entreprises ont besoin. Au contraire, ce discours est dénoncé comme à la fois naïf et irréaliste. Que l'Education nationale donne les fondamentaux et la curiosité de tout (ah, la curiosité de tout, mais comment la faire entrer dans les programmes se demande l'inspecteur général perplexe...) et les entreprises s'occuperont des professionnels. Certes cela ressemble à un Yalta où la coopération est peu présente, mais c'est certainement mille fois mieux qu'une fausse coopération basée sur la méfiance, voire la défiance, réciproque. Et puis concentrée sur les fondamentaux, l'Ecole pourra ainsi garantir que chacun saura lire, écire et compter....au moins jusqu'à 40.

Réformer la formation professionnelle.pdf

21/05/2013

Sortir des statuts

Lors de sa visite aux autoproclamés pigeons, François Hollande a annoncé son souhait de voir se développer un enseignement à l'entrepreunariat dès le collège, moyennant quoi il eût presque droit à une standing ovation. Voici donc l'école sommée de préparer les élèves à devenir des chefs d'entreprise. Encore un effort et Raymond Barre et son fameux : "Les chômeurs n'ont qu'a créer leur entreprise" redeviendra d'actualité. Mais surtout, voilà le type d'annonce qui repose sur deux supercheries. La première est qu'il faudrait un enseignement particulier pour devenir chef d'entreprise : que l'on sache la mission première de l'éducation est de participer à ce que chacun soit autonome, libre et responsable. Cela doit coller avec la fonction de dirigeant sans qu'il soit besoin d'en rajouter. La seconde supercherie est, qu'encore une fois, on ne raisonne qu'en terme de statut.

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Alfred Pellan - Collage - 1939

Car qu'est-ce qu'un entrepreneur ? si certains dirigeants d'entreprise sont des entrepreneurs, tel n'est pas le cas de tous (les héritiers, les rentiers, les investisseurs, les gestionnaires, etc.). Et considérer que seuls les entrepreneurs entreprennent, c'est oublier un peu vite que des millions de salariés entreprennent tous les jours dans le cadre de leur activité et qu'un nombre aussi important de bénévoles entreprennent dans le cadre d'activités associatives et/ou militantes. Bref, si l'on veut préparer nos chères têtes blondes à être créatives, imaginatives, autonomes, entreprenantes, responsables et pleines d'initiatives, il vaudrait mieux ne pas s'en tenir à leur bourrer le crâne d'économie et de gestion. Mais plutôt leur suggérer  qu'il  faut toujours aller voir derrière les statuts.

20/05/2013

Le père, le fils...

Pas nécessaire d'être croyant,  en ce jour de Pentecôte, pour accueillir tout ce qui vient du ciel, même si ce n'est pas le Saint-Esprit  !

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19/05/2013

Prendre langues

Le débat suscité par l'introduction de cours en anglais à l'Université est consternant. Consternant de constater que les défenseurs de cours en anglais y voient principalement l'intérêt d'attirer des étudiants étrangers et de mieux préparer les étudiants français au monde des affaires. Consternant de voir que les opposants considèrent que c'est en refusant toute autre langue que le français qu'on le défend le mieux. En ce dimanche pluvieux, il faut beaucoup de sérénité pour résister à l'envie de les noyer tous. Mais il y a peut être mieux à faire : leur rappeler que se tiendra à Toulouse le 26 mai prochain, comme tous les ans depuis 1992, le Forom des langues à l'occasion duquel tous les métèques sont invités à se retrouver place du Capitole.

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Les promoteurs de l'anglais à l'Université pourraient y découvrir que la langue ne se réduit pas à sa dimension communicationnelle et que toute langue est une anthropologie car c'est par le langage que l'homme se construit, se pense et créé. Les défenseurs du français conçu comme seule langue d'enseignement pourraient y découvrir que l'on transmettra davantage de valeurs en enseignant plusieurs langues dès le primaire qu'en réintroduisant, comme si c'était le problème, des cours de morale au collège. Mais pour cela il faudrait que les uns et les autres admettent le postulat du forom des langues : toutes les langues doivent être placées sur un pied d'égalité et dès lors leur apprentissage simultané ne s'en trouve que facilité. Pour apprendre la langue, il vaut mieux prendre langues.

Forom des langues du Monde.pdf

18/05/2013

Le droit, c'est pas naturel

J'ai toujours eu du mal avec la notion de droit naturel qui me paraît relever de l'oxymore : dès lors qu'il y a droit, nous ne sommes plus dans l'état de nature mais dans la construction sociale. Pas d'autre droit que le droit positif. Même si la notion a pu servir de fondement conceptuel aux droits de l'homme, inaliénables et imprescriptibles, elle relève d'un essentialisme porteur de tous les dangers. En assignant l'individu à une nature préétablie, on l'enferme dans un déterminisme comme la mouche dans une toile d'araignée. C'est pourquoi la loi sur le mariage entre personnes de même sexe, promulguée ce jour, est une loi de liberté bien davantage qu'une loi d'égalité. Liberté de choix, et liberté de devenir. Car on a beau naître complet, on est ce que l'on devient. Et l'on peut espérer que la multiplication des modèles familiaux et leur banalisation, constituera par l'exemple la meilleure éducation à la tolérance. Car comme dirait Simone, on ne naît pas homosexuel(le), on le devient.

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Clovis Trouille - Rêve claustral - 1952

17/05/2013

De la main

De tradition et par nature, l'Etat en France, a rarement la main amie, au sens où l'amitié établit de fait une égalité entre ceux qui se l'accordent  mutuellement. L'Etat, autrement dit ceux qui agissent en son nom, a toujours conservé, nonobstant la République, une main royale qui peut à l'occasion être une main bienveillante, mais qui n'est jamais une main amie car elle se refuse à connaître l'égalité. L'Etat, comme le Roi, se pense et se veut d'une nature unique et primordiale.

Il ne fait pas de doute que la Conférence sociale qui se tiendra les 20 et 21 juin est une main tendue aux partenaires sociaux. Certains esprits critiques croient y reconnaître la main du noyé sous le poids du chômage qui guette la corde que voudront bien lui tendre les acteurs sociaux. Fausse impression, comme toujours l'Etat organise un dialogue au cours duquel sa main indiquera bien plus le chemin à suivre qu'elle ne s'ouvrira amicalement pour une invitation  où tout peut se dire et tout est envisageable, faute de quoi il n'est point d'amitié.

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Main de Blaise Cendrars

Dans le domaine de la formation professionnelle, en effet, les dés sont apparemment jetés. Comme l'a encore répété  Hollande lors de sa conférence de presse, après que Sapin ait annoncé la couleur, il s'agira de réorienter les fonds de la formation vers ceux qui sont considérés comme prioritaires : les salariés les moins qualifiés et les demandeurs d'emploi. Pour ce faire, il suffit de rappeler aux partenaires sociaux que l'obligation légale de financement de la formation est une taxe fiscale et qu'il revient donc à l'Etat de décider de son affectation de principe, les modalités de mise en oeuvre pouvant être déléguées. Car l'Etat aime bien la délégation qui voit le délégataire faire ce qu'on lui dit, voire dicte. Dans ces conditions, l'enjeu de la Conférence sociale se réduira à choisir entre  embrasser la main à laquelle on va obéir ou bien refuser de le faire et se préparer à la gifle qui en résultera.

Blaise Cendrars, dont les oeuvres autobiographiques viennent de paraître en Pléiade accompagnées d'un très bel Album, écrivait beaucoup. Il inscrivait parfois en bas de ses lettres "avec ma main amie", la seule qui lui restait et qu'il offrait sans partage, car il avait lui, le sens de l'égalité.

16/05/2013

Diable !

Le diable est dans les détails paraît-il. Cela signifie qu'il surgit souvent là où on ne l'attend pas, ce qui est bien le moins lorsque l'on prétend à un minimum de diabolisme. Après l'adoption définitive par le Parlement, mardi dernier, de la loi de sécurisation de l'emploi, on pourrait bien s'apercevoir que ce ne sont pas les mesures les plus médiatiques, tels les accords compétivitité emploi, qui auront l'impact le plus important. Il est une disposition, qui concerne toutes les entreprises ayant une représentation du personnel, qui est de nature à modifier sensiblement la donne des relations sociales : la mise en place de la base de données unique d'information (BDU) à destination des représentants du personnel. Voilà un diabolique surgissement qui fera figure de calvaire pour bien des responsables ressources humaines.

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Félicien Rops - Le calvaire - 1882

Dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi, deux ans pour les entreprises de moins de 300 salariés, devra être constituée  une base de donnée actualisée en permanence et tenue à disposition des représentants du personnel, dont le contenu sera précisément fixé par un décret à paraître. Le détail qui tue, c'est que devront figurer dans cette base de données, les informations relatives aux deux années passées, ce qui ne pose guère de problème, mais également aux trois années à venir. Autrement dit, toutes les entreprises vont devoir annoncer et actualiser leurs prévisions de chiffre d'affaires, d'activité, d'emploi, de masse salariale, d'investissement, de formation, etc. pour les trois années à venir. Jamais une telle exigence de prévision chiffrée n'a été imposée aux entreprises. Car l'exercice se révèlera redoutable à l'usage : qui annoncera ses véritables objectifs à trois ans et en tirera les conséquences prévisionnelles ? mais si tel n'est pas le cas, qui se retrouvera en flagrant délit de mensonge pour avoir publié des prévisions linéaires alors que des décisions stratégiques étaient envisagées ? et comment assumer une prévision non linéaire pour les années à venir ? le casse tête ne fait sans doute que commencer. Un calvaire vous dis-je.

15/05/2013

Ici les autres : on est là !

Réunion matinale qui finit tardivement, un peu de marche pour reprendre ses esprits et passage à table dans une des brasseries où la convivialité du service attire plus sûrement que le cuisinier. Les tables ont déjà commencé à se vider. En face de moi, trois hommes et une femme traitent manifestement de sujets sérieux. La femme parle peu. Deux des hommes s'en vont, le troisième reste seul avec sa collègue. Elle se met à lui parler tandis qu'il sort son smartphone et lit ses mails. Au bout d'un moment, il répond pour faire croire qu'il écoute. Je me replonge dans mon gazpacho (excellent) et la lecture du canard enchaîné, qui m'apprend que pendant la réception des organisations syndicales par le premier ministre, lundi après-midi, la majorité des ministres présents pianotaient sur leurs smartphones et tablettes devant des syndicalistes partagés entre la stupéfaction et la consternation.

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Le Caravage - Narcicce - 1599

Tout ceci me rappela une anecdote, recueillie lors du recrutement d'étudiants pour le Master de l'IGS à Toulouse. Je demandai à un étudiant ce qu'il retenait des petits boulots qu'il avait effectué pour gagner un peu d'argent. Se référant à une activité de vendeur en boulangerie exercé pendant quelquqes mois, il me répondit : "J'en retiens que l'on peut me parler uniquement avec des gestes pour me montrer ce que l'on veut acheter, tout en continuant à parler au téléphone et sans jamais m'avoir adressé la parole ni même regardé". Comme dirait Hannah Arendt, de la violence ordinaire en milieu ordinaire.

14/05/2013

Non, bob, t'es pas tout seul !

Quand on demandait à Francis Bacon si tel peintre n'avait pas influencé son travail, il répondait invariablement : "j'ai été influencé par tellement de peintres que c'est bien possible". La même réponse aurait pu être obtenu de Picasso, d'Ingres et finalement de tout ceux qui font véritablement de la peinture. Il faut nous y résoudre, nous sommes des éponges. Même, ou plutôt, surtout, cette grande tige d'Alain Garrigue, dont on comprend mieux du coup certaines peintures.

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Alain Garrigue - Eponge, mode d'emploi - 2001

Consciemment, inconsciemment, par volonté, par goût, par désir, par fascination, par obligation, par la contrainte, par le plaisir, tous les jours nous épongeons mots, images, émotions, connaissances, odeurs, sensations, raisonnements, relations, visions, rêves, actions, en un mot tout ce que nous vivons. Eponger, certes, et pourquoi pas de bon coeur. Mais pourquoi faire ? la véritable question est moins dans ce que nous épongeons que dans ce qui ressort lorsque nous pressons l'éponge. Que va nous livrer la magique alchimie de l'individualité, de notre singularité ? qu'allons nous faire, nous abstenir de faire, essayer de faire, rêver de faire, ne pas vouloir faire ou faire en sorte de ne pas faire ? C'est parce que la réponse à cette question est toujours une surprise, que je prends toujours autant de plaisir, depuis 25 ans, à être formateur, éponge au milieu des éponges. Et c'est ainsi que Bob l'éponge est grand !

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11/05/2013

Pas si Clot !

Je ne serai plus en Bretagne lundi 13 mai, et c'est bien dommage car je me serai rendu avec plaisir à la Conférence donnée par Yves Clot à Quimper sur le thème du travail. Yves Clot, c'est ce psychologue qui veut en finir avec les risques psychosociaux, ce qui ne peut évidemment qu'attirer mon attention, moi qui conseille à mes clients de ne pas traiter les risques psychosociaux. Et puis, c'est un psychologue qui a des réflexes de sociologue : celui de toujours repartir du terrain et, en l'occurence, du travail. Enfin, j'aime bien la manière dont Yves Clot critique la définition du stress, en la trouvant un peu courte. Pour mémoire, l'ANI du 2 juillet 2008 définit le stress comme le sentiment qu'a le salarié de ne pas disposer des ressources suffisantes pour réaliser ses activités. En considérant que cette définition ne renvoie qu'à la fragilité du salarié, Clot commet sans doute une erreur. Le manque peut être le fait de l'organisation qui ne fait pas correspondre les moyens et les résultats attendus. La définition ne met donc pas la pression que sur l'individu.

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Mais là où Clot apporte un plus, c'est en complétant la définition par les situations dans lesquelles ce que l'on demande au salarié entre en contradiction avec ce qu'il considère être comme le comportement du bon professionnel. Les risques pour la santé du salarié deviennent d'autant plus importants que la prescription perd son sens ou que les comportements prescrits sont monovalents (vendre !). En d'autres termes, plus directs, les boulots de cons ou qui sont faits à la con, sont plus dangereux que toute autre situation. Et Clot ajouterait sans doute, d'autant plus si on prend les gens concernés pour des cons, ce qui dans son langage devient le déni de tout conflit sur le sens ou les modalités du travail.  Car la clé de la santé au travail, c'est la capacité reconnue à chacun de pouvoir faire valoir son propre professionnalisme. Qu'il travaille sur l'individu ou le collectif, Clot a manifestement le souci de la liberté de chacun et la crainte de l'enfermement dans une prescription déprofessionnalisante. En cela, il n'est pas si Clot.

10/05/2013

Voir encore

C'est ce que je fais qui m'apprends ce que je cherche (Pierre Soulages)

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Ne cherchez pas à voir la réalité, c'est avant que la réalité existe (Yves Tanguy)

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Son langage est un mot de passe vers la lumière du jour (Roland Penrose à propos d'Yves Tanguy).

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Si quelqu'un a des oreilles, qu'il voie, si quelqu'un a des yeux, qu'il entende (Jean Arp)

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Chère imagination, ce que j'aime surtout en toi, c'est que tu ne pardonnes pas (André Breton).

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09/05/2013

A l'Ouest

Homme libre, toujours tu chériras la mer

 

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