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01/08/2015

Sondages et liberté

Dans le magnifique musée de la presse, ou du journalisme, le newseum, il est possible d'exprimer ses opinions sur des sujets d'actualité. Par exemple, sur la décision de la Cour suprême des Etats-Unis, située à quelques encablures de là, de considérer comme illégale toute restriction par les états à la possibilité de se marier entre personnes du même sexe. J'ai voté avec une petite pastille bleue, vous la voyez ? 

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Au second sondage, je n'ai pas voté. Les avis étaient d'ailleurs plus partagés sur le fait de savoir si le drapeau confédéré, autrement dit le drapeau de guerre des Etats sudistes, symbole aujourd'hui de la persistance du Sud pour certains, et de l'esclavage, la ségrégation et le racisme pour d'autres, de savoir si ce drapeau donc pouvait continuer à être affiché dans l'espace public. Et là les avis sont plus partagés. 

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Même s'il est difficile d'interpréter la volonté qui se trouve derrière chaque point coloré, il semble que la désapprobation de l'affichage de ce symbole du passé l'emporte, mais que l'attachement aux libertés conserve un attrait puissant, y compris la liberté de dire ou faire ce qui est moralement condamnable. Car la liberté a ceci de singulier qu'elle est nécessairement radicale. Toute entrave en constitue la négation. Dans un pays où le premier amendement de la Constitution garantit 5 libertés fondamentales pour les citoyens : la liberté de la presse, la liberté d'expression, la liberté de religion, la liberté d'assemblée et la liberté de pétition ; toute restriction à une de ces libertés est considérée comme une atteinte aux droits individuels. C'est pourquoi l'on trouve des américains qui, en tant qu'héritiers des Lumières mais aussi de Voltaire, se battront toujours pour que chacun puisse exprimer toute opinion, quelle que soit sa nature. Et trouveront normal de défendre le droit d'afficher un drapeau dont la vue les choquera pourtant. Et ce n'est pas un paradoxe, mais une grande rigueur au contraire. 

26/05/2013

Jour de marché

Les hommes politiques nous expliquent régulièrement que le pays réel, les vrais gens, LES français, comme ils disent, c'est sur les marchés qu'on les rencontre. C'est d'ailleurs là que Jérôme Cahuzac est allé vérifier qu'il devait s'abstenir, au moins pour cette fois. C'est au marché, comme autrefois au comptoir des bistrots, que les véritables préoccupations, les sujets d'intérêts, inévitablement s'expriment. La voilà la vraie vie, ce pourquoi on ne fait pas le marché comme on fait ses courses au supermarché. On prend le temps, on se laisse aller, on est disponible, on écoute, on discute. Pour ma part, le plus grand plaisir est d'entendre parler espagnol. C'était fréquemment le cas à Toulouse ou Montauban, et cela arrive encore parfois, plaisir décuplé, au marché d'Aligre.

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Ce matin donc, à l'heure de la fin du déballage, des dernières installations, des premiers clients, lorsque la foule n'est pas encore compacte, lorsque l'on va lentement par choix et non par piétinement, un sujet revenait inlassablement de l'étal de fruits et légumes au fromager en passant par le bazar, le bouquiniste ou le marchand de fleurs. Une même information circulait plus vite que les marchandises ne s'échangeaient. La manif du jour sur le mariage pour tous ? non, pas un mot, rien, nada. La psychose du terrorrisme après les attaques de militaires ? que nib, silence radio, personne pour renchérir. Le chômage qui étreint le pays et se répand inexorablement ? à peine présent dans les commentaires. Le temps pourri qui ruine le moral, décuple les ventes de prozac et de gateaux sucrés ? même pas. Le sujet, le vrai sujet, celui qui passionnait ce matin tout un chacun, c'était la montée des marches à Cannes par DSK, tout sourire au bras de sa nouvelle compagne. Et si vous pensez que j'essaie de vous faire marcher, allez y voir vous même, il est encore temps.

18/05/2013

Le droit, c'est pas naturel

J'ai toujours eu du mal avec la notion de droit naturel qui me paraît relever de l'oxymore : dès lors qu'il y a droit, nous ne sommes plus dans l'état de nature mais dans la construction sociale. Pas d'autre droit que le droit positif. Même si la notion a pu servir de fondement conceptuel aux droits de l'homme, inaliénables et imprescriptibles, elle relève d'un essentialisme porteur de tous les dangers. En assignant l'individu à une nature préétablie, on l'enferme dans un déterminisme comme la mouche dans une toile d'araignée. C'est pourquoi la loi sur le mariage entre personnes de même sexe, promulguée ce jour, est une loi de liberté bien davantage qu'une loi d'égalité. Liberté de choix, et liberté de devenir. Car on a beau naître complet, on est ce que l'on devient. Et l'on peut espérer que la multiplication des modèles familiaux et leur banalisation, constituera par l'exemple la meilleure éducation à la tolérance. Car comme dirait Simone, on ne naît pas homosexuel(le), on le devient.

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Clovis Trouille - Rêve claustral - 1952

13/04/2013

Dans les rues

Soleil revenu, premières floraisons, douceur de l'air, week-end, que de bonnes raisons, comme s'il en fallait, pour musarder et se laisser aller au plaisir de la découverte, par exemple de cette flèche friponne dont la vigueur salue la nouvelle saison.

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Printemps symbole de vie, au point que même la mort devient un divertissement.

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Mais tout le monde ne consacre pas son temps libre à baguenauder dans les rues. Il en est qui ont le sens de l'engagement collectif, et qui au cas où nous ne l'aurions pas remarqué, le font savoir.

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Mais la promenade hasardeuse n'est pas sans danger. Elle peut, brusquement, vous faire basculer dans l'interpellation métaphysique au détour d'une rue.

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Une fois résolue la question du sens, il faudra encore se confronter à d'étranges affirmations qui mériteraient d'être soumises à l'expérimentation.

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Et comme si le hasard prenait un malin plaisir à perturber tous nos repères, voici un ferme rappel de ce que le futur est imprévisible.

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C'est peut être pour cela que, sous réserve d'une traduction non garantie, il est si important d'avoir un bureau pour recueillir les idées utiles et introuvables. Gageons que l'employé chargé d'enregistrer de telles idées a moins de travail que celui qui serait chargé des idées inutiles et courantes.

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Et comme le hasard est malicieux, il ne manque pas de faire un clin d'oeil à l'actualité et à l'adoption du mariage pour tous. Pour ceux qui penseraient qu'il n'y a qu'un modèle familial, voici la preuve que l'on peut être sage-femme et beaupère ! Bonnes balades à tous.

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12/02/2013

Prométhéen !

C'est peu de dire que la démission du Pape est un moment de pur bonheur. Non pas parce que Benoît XVI quitte la fonction, on ne peut souhaiter le départ d'un Pape qui écrit aussi bien sur l'eros, le corps et l'âme (c'est ici), mais parce que cet acte est une bouquet d'ambivalences et de subtilités. Tout d'abord, il est amusant de percevoir l'embarras de ceux qui pensent que le Pape doit se soumettre à Dieu et aliène sa personne à la fonction et en même temps font leur le dogme de l'infaillibilité pontificale. Pour eux, le geste est une contradiction insoluble. Ensuite, on peut sourire également de l'humilité contenue dans le geste, celui qui renonce aux honneurs et se retire, mais aussi le formidable orgueil dont il est porteur : j'ai regardé Dieu dans les yeux, et j'ai choisi de reprendre ma liberté !

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Heinrich Fueger - Prométhée offrant le feu aux hommes

Et s'agissant de liberté, il est désormais impossible  à quiconque d'expliquer que sa démission a été refusée. On pourra lui répondre en rigolant que même Dieu ne peut rien devant celui qui veut vraiment démissionner. Mais le plus important est sans doute la démonstration que la volonté peut faire son lit de la nature, ou de ce qui se prétend tel. Toute la tradition, sinon la règle canonique, s'opposeait à la démission du Pape. Et pourtant, son geste, celui qui met la liberté de l'homme avant  l'ordre établi, s'impose. S'il avait voulu fournir un argument en faveur du mariage entre personne de même sexe, le Pape n'aurait pu trouver meilleure démonstration. Benoît XVI démissionnant, c'est Prométhée qui offre le feu aux hommes et sa bénédiction à tous les affranchis. Amen !

28/01/2013

Pendant ce temps, en Russie...

Alors que s'ouvre aujourd'hui l'examen du projet de loi sur le mariage sans distinction de sexe, en Russie les lois se multiplient pour réprimer l'homosexualité. Pour le converti qu'est Depardieu, chantre de la Russie, de ses dirigeants et de sa douceur de vivre, cela devrait rappeler quelques souvenirs, du temps des Valseuses, autant dire du monde d'avant.


Quant à moi, cela me rappelle qu'il y a quelques années, à un client qui partait à la retraite et que j'amais bien, j'avais envoyé un livre de Doisneau, avec ce petit mot : si jamais vous venait la tentation d'un bilan,  demandez vous simplement si vous avez été fidèle à l'enfant qui est en vous. On constatera que l'enfant en Depardieu, qui était très présent, a disparu. Si tout le monde prend de l'âge, sans rien y pouvoir, personne n'est obligé de veillir, question d'état d'esprit.

27/01/2013

Clémence et le Gay savoir

Le débat a toujours été vif sur la nature du droit : une  construction sociale contingente, déterminée par le contexte et les modalités de sa production, ou un travail de mise en forme de lois ou de droits conformes à la nature humaine et de ce fait pouvant prétendre à l'universalisme ? En ce jour de manifestation pour le mariage sans distinction de sexe, puisqu'il ne s'agit ni de tous se marier ni de ne marier que les gays, la question n'est toujours pas tranchée.

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Sur le strict débat juridique et les modifications du Code civil, on se contentera ici de renvoyer à ce qui a été dit ailleurs par plus compétent sur la question (voir ici). En observateur de l'actualité sociale, on fera simplement remarquer que la mobilisation était plutôt réussie et que les communautés masculines, notamment,  étaient très présentes.

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Et qu'il ne manquait pas de bonnes volontés pour préserver l'avenir.

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Sinon, pour faire pièce à l'argument selon lequel la question n'intéresserait qu'une petite partie de nos concitoyens, certains slogans rappelaient que le mariage sans distinction de sexe était une question pour laquelle tout le monde peut se sentir concerné, sans pour autant être impliqué. Ceux à qui la différence échapperait se souviendront que dans l'omelette aux lardons, la poule est concernée et le cochon impliqué.

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Puisque la manif passait devant le jardin du Luxembourg, les organisateurs auraient pu la placer sous les auspices de Clémence Isaure, experte en Gay savoir du nom de la plus ancienne société de lettres du monde occidental fondée à Toulouse en 1323, le Consistori del gay saber (consistoire du gai savoir), aujourd'hui Académie des Jeux Floraux. La belle Clémence, fille des Troubadours et de l'amour courtois,  protectrice de la poésie et des contrepèteries aurait pu ainsi donner  aux amoureux en guise de bénédiction la violette de Clémence et promettre à ceux qui voudraient entraver cette liberté la violence de Clémette. Mais en ces temps médiatiques, la radicalité n'a pas bonne presse et l'on se quitta en un consensuel et apaisant slogan.

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13/01/2013

Manif !

Jour de manif aujourd'hui. La CGT  et FO contre l'accord sur la sécurisation de l'emploi ? l'ensemble des organisations syndicales pour réaffirmer, en ces périodes de chômage de masse, qu'il ne suffit pas de dire que l'emploi est prioritaire mais qu'il faut en tirer les conséquences ? les acteurs de l'économie réelle qui protestent contre les conséquences de la financiarisation de l'économie ? mais non, juste une manif pour que le mariage ne soit pas possible entre personnes du même sexe. Gageons que l'on ne lira pas sur les pancartes cette proclamation de Picabia : " Dieu a créé le concubinage, Satan le mariage".

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Picabia et Cendrars - Tremblay sur Mauldre - 1923

04/01/2013

C'est déjà demain

Puisqu'il faut revenir à l'actualité, et que le Gouvernement a présenté les projets de loi qu'il entend faire voter au premier semestre, allons-y. Pour le projet de loi sur l'emploi, on attendra la semaine prochaine et la reprise des négociations entre les partenaires sociaux. C'est un autre projet que le hasard de nos promenades nous fit croiser.

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En Espagne, le mariage entre personnes du même sexe est possible depuis 2005. Il souleva les mêmes débats qu'en France, il y eût les mêmes manifestations pour et contre où chacun se compta, l'Eglise (ou plutôt les Eglises car sur les sujets de société elles se retrouvent aisément) mena le combat contre la loi, mais finalement le texte fût voté et les personnes du même sexe purent non seulement se marier mais, bien évidemment, exercer les droits associés : adoption, héritage ou droit à pension.

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Aujourd'hui, la situation s'est banalisée. Certains ont bien tenté de rallumer le combat lors du retour du Parti Populaire au pouvoir, mais l'histoire et l'expérience montrent que sur les sujets de société il y a rarement des retours arrières en régime démocratique. Et pour les couples du même sexe, le droit à la différence devient peu à peu un droit à l'indifférence. Ce qui n'exclut pas la couleur. Olé !

06/12/2012

Il va falloir s'y habituer

Il n'est pas rare que l'environnement se modifie sans que l'on en prenne véritablement conscience. Si notre propre quotidien n'évolue pas, ou peu, il est tentant de considérer que rien ne change non plus ailleurs. Manifestement les employeurs n'ont pas encore intégré la portée des positions prises par la Cour de cassation en matière de maintien de l'employabilité du salarié. Mais les décisions commencent à s'accumuler et à créer un paysage nouveau auquel il va bien falloir s'habituer, comme devront prochainement s'habituer au mariage gay même ceux qui ne souhaitent pas y recourir (rassurons les, il s'agira d'une liberté et non d'une obligation).

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New-York - 2011

Dans l'affaire jugée le 21 novembre dernier, un magasinier reprochait à son employeur de ne l'avoir formé que 5 jours en trente ans d'activité. La réponse de l'employeur tient en deux arguments : d'une part l'obligation d'adapter le salarié ne m'oblige pas à faire des formations inutiles et la formation de 5 jours était suffisante, et d'autre part le salarié ne fait état d'aucun préjudice résultant de l'absence d'autres formations. Perdu. Lorsqu'un emploi ne nécessite que très peu de formation et qu'il est tenu pendant une longue période, l'entreprise doit permettre au salarié cantonné à des tâches répétitives de préserver une employabilité plus large (C. trav., art. L. 6321-1). Et d'autre part, le fait de ne pas avoir été formé constitue en lui-même un préjudice. On pourra trouver la jurisprudence rigoureuse, elle n'est que la conséquence d'un contenu d'emploi restreint et non évolutif. Et il va falloir que les entreprises s'y habituent car, dans ce domaine comme d'autres, il n'y aura pas de retour en arrière.

Cass. soc. 21 novembre 2012 - Obligation d'adaptation.pdf

17/11/2012

Soutenir les cochons

Les manifestations se multiplient, non pas en France où il ne s'agit ce jour que d'un aéroport à la campagne ou du mariage pour tous (il suffirait au lieu de manifester de retenir la proposition de Jérôme Leroy du mariage avec tous, voir ici), mais dans le Sud. Chez ces cochons de sudistes, selon l'humour anglo-saxon qui ne voit que PIGS (Portugal, Italy, Greece, Spain) au sud de la City. En passant, retenir le mot cochon comme une insulte confirme le peu d'aptitude à la gastronomie et à la contemplation de la nature chez certaines populations. Manifestations au Sud donc et particulièrement en Grèce. Les voyages en train étant propices à la lecture, la rencontre d'un déplacement et de l'actualité mit dans mes mains "Premiers regards sur la Grèce" d'Henry Miller, qui ressemble sur la couverture à Giscard d'Estaing matiné de singe chinois.

 

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La lecture de ces courtes notes de voyage (en nos temps stressés, il est toujours utile de rappeler qu'un livre est court si on souhaite le faire partager) rappelle ce que l'on pressentait. A savoir que si la Grèce rentre dans le rang, c’est toute l’Europe qui basculera à l’Ouest Atlantique et le Sud sera à jamais un paradis perdu. L’homme ne sera de passage sur cette  terre que pour revêtir son costume de consommateur addicté et d’agent économique à l'irrationalité contrôlée par les potions délétères (publicité, pharmacopée, discours d’experts, …) qui achèveront de tuer en lui toute imagination.

"Le jour où ils accepteront le harnais, les Grecs cesseront d'être Grecs. Mais seuls les Anglais, totalement insensibles à ce qui est autre, à ce qui est différent, pourraient croire pareille absurdité" écrit Miller.

Car comment vivre sans projeter sur ce qui nous entoure une vision fantasmatique qui permet de faire émerger la poésie du réel aussi sûrement que le vin du Sud apporte le bien-être, la joie et la conversation comme le dit Miller.

En Grèce « tout est légendaire, fabuleux, incroyable, merveilleux et pourtant vrai. Tout commence et s’achève ici ». On dirait un télégramme reçu ce jour des alentours d'Epidaure "l'endroit le plus parfait de tous ceux que j'ai contemplé jusqu'ici". Il s'agit juste d'un rappel rédigé pour nous en Novembre 1939.

13/09/2012

Créativité juridique

Pour les adultes, comme pour  les jeunes élèves, lorsque l'on fait un travail technique, parfois ingrat, le meilleur moyen de le valider est de le faire fonctionner à la fois sur les sujets qui s'y rapportent, mais également sur d'autres, sans rapport apparent, pris au fil de l'actualité. Et dans le fil en ce moment il y a le mariage, ou plutôt l'union civile à trois qui a été reconnue au Brésil. Pour travailler sur le fait qu'il n'y a pas de vide juridique et que le droit a eu une réponse pour chaque situation, c'est un bon point de départ. Car il se trouve, ce n'est pas grave bien évidemment, que les journalistes ne lisent pas ce blog. Où alors ils se contentent de regarder les photos. Du coup on peut entendre et lire que cette union a été possible grâce à un vide juridique : la loi ne précisant pas que le mariage est réservé à deux personnes, il est donc possible pour trois. Un quatuor aurait d'ailleurs déjà saisi la notaire qui a enregistré la première union.

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Nouvelles unions, nouveaux bébés ?

En réalité, la Constitution brésilienne reconnaît comme famille "une union stable entre un homme et une femme". Avec une définition semblable, la Cour de cassation en France a estimé que le mariage était réservé aux couples hétérosexuels, respectant la lettre du texte. L'esprit du carnaval a du souffler sur la Cour suprême brésilienne car les magistrats cariocas ont estimé eux que cette définition de la famille avait valeur d'exemple mais n'était pas exhaustive. Ce n'est donc pas un vide juridique, dont on répète qu'il n'existe pas (voir ici ou ) qui a permis l'union du trio mais la créativité des juges. Car voilà la seconde démonstration que nous fournit cet exemple : à partir des mêmes textes, les juges français et brésiliens ont pu prendre des décisions totalement opposées. Preuve, s'il en fallait, que le juge peut décider ce qu'il veut et construire le raisonnement adéquat ensuite. Apparemment les managers ont apprécié, à l'exception du juriste de l'entreprise qui se montra plus réservé. Un petit tour au Brésil peut être ?

28/05/2011

Chronique de week-end : l'énigme des noces enfantines

L’enfance est un temps long. Eternel. Cette éternité arrive de toujours. Sur ces visages singuliers, peu de marques du temps. Le parchemin du corps est encore vierge, le livre de la vie demeure ouvert. Et pourtant les regards ne trompent pas. Ils disent la manière dont est vécue l’enfance. Ebahi devant le monde tel qu’il va, déjà intégrée à la vie sociale la plus conventionnelle, peu prêt, au contraire, à jouer le jeu théâtral de la société, rebelle devant ces adultes  peu crédibles, ou soucieuse, déjà, de leur plaire. Cet enfant là, venu d’on ne sait où, pétri d’histoire collective et tout entier singulier, cet enfant là ne meurt jamais.

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Il est parfois enfoui, oublié, refoulé, perdu même. En un tel cas, l’adulte est triste, son destin est celui d’un homme sans ombre qui cherche en vain pourquoi sa vie ne lui paraît jamais ressembler à ce qu’il souhaiterait. Etre fidèle à l’enfant que l’on était, ce n’est pas s’immobiliser en une posture définitive, et encore moins faire place à l’infantilisme. C’est laisser la part d’enfance vivre et s’épanouir, lui offrir mouvement et transformation et en faire le catalyseur de nos choix.

Mis en rang et parés pour la noce, ces enfants de 1938, ne savent pas encore que les plus belles amours sont enfantines. Et encore moins, tout séparés que sont ici les filles et les garçons, qu’il faudra accorder le masculin et le féminin  d’un homme avec le féminin et le masculin d’une femme  pour former un couple. Et plus important encore, que toute union est aussi celle de nos enfances. Mais laissons pour l’instant tout cela, aujourd’hui c’est jour de noces. Vive la mariée !

11/02/2011

Société du contrat

Près d'un tiers des familles sont des familles recomposées. Corrélativement, le nombre de mariages et de PACS ne cesse d'augmenter. Et alors ? alors on peut y voir un signe que notre société évolue de la norme de l'institution vers celle du contrat. Tout étudiant en droit apprend que le mariage a une double nature. Celle d'institution, le mariage ayant un régime préétabli auquel on adhère, et celle de contrat, l'adhésion s'effectuant par une double volonté, expresse et commune. Il ne s'agit donc pas d'un contrat dont les termes sont librement définis et dont on pourrait revisiter à loisir le contenu, mais d'une adhésion contractuelle à une institution. Le contrat de mariage ne règle d'ailleurs que les questions financières, il ne définit pas le mode de relations entre époux qui sont déterminées par la loi et non négociables, au moins au plan juridique. Il est dès lors logique que si, entre les conjoints, la dimension contractuelle prend le pas sur l'institution, le nombre de ruptures ne peut qu'augmenter. Et à l'évidence, la dimension institutionnelle du mariage se perd au profit de sa dimension plus contractuelle. Comme Eros et Psyché s'opposèrent à la colère des Dieux pour faire prévaloir leur amour interdit.

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François Picot - Eros et Psyché - 1817

Si ce bouleversement a lieu dans la vie privée, il ne peut être absent de la vie publique et de la vie sociale. Et lorsque l'on parle du déclin des institutions (Eglise, Armée, Ecole, Entreprise, Etat,...) il s'agit sans doute moins d'un rejet global que d'une demande d'évolution de la relation, d'une contestation de l'autorité descendante, de l'organisation pyramidale, de la prescription sans explication, de la vérité hiérarchiquement et institutionnellement établie, bref d'un certain ordre social. Et d'une demande, quel que soit son rang, sa place et sa fonction, a être traité sur un plan égalitaire dont la traduction est la relation contractuelle. Or, l'institution est un repère simple à la pratique aisée, puisque tout est prédéterminé, alors que le contrat suppose de renégocier régulièrement, de partager le pouvoir, de voir redéfinie sa légitimité, de n'avoir comme acquis que sa capacité de persuasion, de considérer que tout compromis n'est pas de la compromission, de ne plus aborder les problèmes en terme de tort/raison mais de solution à construire, etc. Bref, le contrat est d'une pratique plus coriace que l'institution. Le paradoxe est que l'institution contestée est aussi recherchée pour la protection qu'elle offre : étant prédéfinie, elle offre des garanties à qui ne peut ou ne sait négocier et sa stabilité peut rassurer. On aura compris que la question n'est pas d'opposer l'institution au contrat, mais de faire évoluer celle-ci pour laisser plus de place à celui-là.