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06/09/2017

Pandore et les branches

La primauté des accords de branche sur les accords d'entreprise dans quelques domaines clés était une demande forte des organisations syndicales et l'un des (rares) motifs de satisfaction mis en avant par leurs représentants à l'issue de la phase de concertation. Il n'aura pas été nécessaire d'aller au bout des 159 pages d'ordonnances pour constater qu'en fait de primauté, le verrouillage ressemblait bel en bien à un déverrouillage. En effet, si l'article L. 2253-1 nouveau élargit bien le nombre de sujets qui relèvent a priori de la branche, il contient une disposition qui change tout. Là où le code du travail actuel interdit de déroger aux dispositions de branche, il prévoit que les accords de branche prévalent sur les accords d'entreprises, sauf si ceux-ci assurent des garanties au moins équivalentes. Autrement dit, si la primauté de la branche reste le principe, rien n'impose de respecter à la lettre ses dispositions dès lors que les salariés, globalement, ne sont pas lésés. Amusant de constater que ceux qui ont supprimé les "avantages acquis" parce que la notion était trop compliquée à manipuler, viennent de créer les "garanties au moins équivalentes" qui promettent quelques noeuds dans les cerveaux des DRH, syndicalistes, juristes de tout poil qui devront trancher le sujet. 

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La branche se trouve ainsi mise en concurrence avec des dispositions autres que celles qu'elle aura prévue et qui seront décidées au niveau de l'entreprise. On voit bien la difficulté dès lors que les 11 sujets concernés sont loin d'être mineurs : classification, formation, prévoyance mais également durée du travail ou nouvelles possibilités de définir le cadre des CDD qui n'est donc pas expressément réservé à la branche contrairement à ce qui avait été indiqué. Comme quoi, en matière juridique, fi de la communication et des promesses, la vérité est dans le texte et les usages que l'on peut en faire. Et dans ce domaine, il n'est pas dit que l'article L. 2253-1 n'ait pas ouvert une belle boîte de Pandore. 

12/07/2017

On ferme !

Non ce n'est pas l'annonce de la pause estivale pour voguer vers d'autres horizons, il s'agit de la fermeture du dialogue conduit par le Gouvernement pour réformer le code du travail, avec une méthode qui ressemble étrangement à celle que l'on avait connu avec Sarkozy sur l'air du : "J'ai raison, donc vous avez tort". C'est ce que le Ministère du Travail explique aux organisations syndicales à propos de la fusion des instances représentatives. Après avoir annoncé que la fusion serait le principe dans toutes les entreprises, mais avec la possibilité d'y déroger, soit par décision de l'employeur (pour les plus petites), soit par accord collectif, pour les autres, voici maintenant que le ministère annonce que la fusion sera obligatoire et qu'il sera impossible d'y déroger. Circulez, passez votre chemin, il sera fait selon notre volonté. 

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On nous avait pourtant vanté les mérites de l'accord d'entreprise, la possibilité pour chacun d'adapter le droit à sa situation, les limites de la règle unique, valable pour tous alors que la diversité des entreprises était si grande. Et bien il faudra maintenant se faire à l'inverse et accepter que les gouvernants puissent avoir raison contre tous et imposer une règle unique qui ne tiendra aucunement compte des situations particulières et fera le bonheur de tous contre eux mêmes, puisque toutes les organisations syndicales et la grande majorité des DRH sont opposés à la mesure. Et comme toujours, les artisans de tout ceci n'ont aucune idée des modalités pratiques de la fusion : car si l'instance est unique pour discuter de tous les sujets, comment la mettre en place dans les grandes organisations où l'on a besoin d'un comité d'entreprise au niveau central, mais de délégués du personnel ou de CHSCT plus près du terrain ? on avait entendu que pragmatisme, liberté, souplesse, responsabilité prévaudraient, il faut bien constater que l'on a pour l'instant plutôt de la contrainte, du vertical et du dogmatisme. Autrement dit, pas vraiment du neuf. 

13/11/2015

Individuel vs indivision

Il faut se souvenir que c'est une organisation syndicale, la CFDT en l'occurrence, qui est à l'origine de la création de l'entretien professionnel newlook. C'est à dire de l'obligation pour toute entreprise de faire un point avec chaque salarié sur ses possibilités d'évolution futures. Un entretien pour parler de l'avenir qui, dans sa version gestionnaire a pour fonction l'anticipation et dans sa version juridique l'obligation de bonne foi dans le partage de l'information sur l'évolution que pourrait prendre la relation de travail. Il faut s'en souvenir car l'on rencontre des entreprises dans lesquelles les organisations syndicales sont en opposition avec le principe même de ce type d'entretien, refusant notamment que la gestion des ressources humaines s'exerce principalement au travers des procédures individualisées (entretien d'appréciation, entretien d'évolution, rémunération à la performance, etc.), considérées comme mettant à mal le collectif et l'intérêt général. 

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On peut donc rencontrer cette situation, pas si saugrenue, d'organisations syndicales demandant à l'employeur de ne pas mettre en place l'entretien professionnel, et partant de ne pas respecter la loi. Bien évidemment, une telle demande n'est pas susceptible d'exonérer l'entreprise de ses responsabilités. Mais la question ici est moins dans le respect de la règle que dans son contenu. Dès lors que l'on décline les obligations des employeurs en fixant le détail de leurs modalités, dès lors que l'on codifie des modalités de gestion des ressources humaines, on s'expose bien évidemment au risque d'avoir un processus décalé de certains contextes. Par exemple, quel intérêt d'avoir des entretiens individuels lorsque 80 % des salariés exercent le même métier au sein de l'entreprise (entreprises de transport urbain par exemple). La voie de l'information collective ne serait-elle pas plus appropriée ? Si l'on raisonne par analogie, on s'aperçoit que même en matière de licenciement, l'entretien individuel s'efface parfois au profit de procédures collectives. 

A vouloir plaquer un mode de gestion unique sur toute réalité, et à vouloir introduire dans la législation les modalités de mise en oeuvre d'obligations, plutôt que de s'en tenir à l'obligation de résultats et de laisser la liberté des moyens, on s'expose à ce trop fréquent décalage entre la règle et les contextes de mise en oeuvre qui au final nuisent à sa crédibilité et à son effectivité. 

17/06/2015

Boomerang

Lorsque j'explique que les stratégies syndicales me demeurent incompréhensibles sur le CPF, on me répond souvent que c'est parce qu'il y en a pas. Mais non, stratégie il y a, la même que sur le DIF : interdire que l'on utilise le droit d'un salarié pour faire des formations en relation avec l'activité parce que cela relève du plan. Ce qui pouvait conduire à la situation du salarié qui souhaite se développer dans sa fonction, demande une formation en DIF et s'entend répondre par son DRH que l'accord de branche ne lui permet pas d'accepter sa demande. Et sur le CPF, on en rajoute une couche : puisque la formation doit être certifiante, ce sera du diplômant et puis c'est tout. Et pas question de prendre sur les listes (au moins au niveau interprofessionnel car dans quelques branches ce n'est pas un problème) des certifications non diplomantes de l'inventaire. Résultat on a ce paradoxe que ce sont les organisations syndicales qui bloquent le plus l'utilisation du CPF au motif de protéger les salariés de la concupiscence de leur employeur, toujours prêt à leur faire les poches et à les spolier. Pour l'instant, on voit pourtant davantage de salariés se plaignant de ne pouvoir utiliser leur droit que de salariés qui sont soumis à des pressions insoutenables de leur entreprise pour utiliser le CPF sur des formations obligatoires. 

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Et de restrictions en restrictions, on se retrouve mi-juin avec très peu de fonds engagés pour sur les 800 millions d'euros disponibles au titre de 2015. Résultat ? et bien Rebsamen va écrire aux OPCA pour leur indiquer que, conformément à la décision du COPANEF, ils pourront utiliser les fonds du CPF pour la professionnalisation (autrement dit des certifications non diplomantes majoritairement, dans le cadre du plan de formation) et pour les plans de formation des entreprises de moins de 50 salariés. En conclusion, pour ne pas risque de financer des formations du plan de formation, on bloque tout et on se retrouve au final à financer...des formations du plan de formation. Sauf que dans le CPF c'est le salarié qui décide et pour la professionnalisation et le plan c'est l'employeur. Très joli coup de boomerang qui conduit à confier à l'entreprise des fonds qui devaient servir à financer un droit des salariés par peur de financer l'entreprise ! comprenne qui pourra. Peut être faudrait-il enfin réfléchir à une autre option : ouvrir massivement le dispositif, créer l'habitude de son utilisation, diffuser la culture de la formation et faire pression devant le succès pour dégager des ressources supplémentaires. Bref construire sur des dynamiques plutôt que sur des restrictions. Après dix ans d'options perdantes, il serait peut être temps d'en faire le constat et d'essayer autre chose. 

13/04/2015

Tout...ou rien (todo o nada)

Depuis plusieurs années, le plus souvent avec Jean-Marie Luttringer, j'ai soutenu l'idée qu'il fallait débarrasser la formation de son encadrement fiscal et faire une place plus grande à la négociation collective. En 2004, on aurait pu penser que le cap allait être franchi : raté, l'accord entre les organisations n'était pas suffisant et le gouvernement laissa tomber l'affaire. En 2013, la courte majorité de l'ANI du 14 décembre 2013 permit la loi du 5 mars 2014, la défiscalisation du plan et l'ouverture d'un espace inédit pour la négociation collective. Au rugby on sait que créer des espaces c'est bien, mais que cela ne sert à rien s'il n'y a pas l'essai au bout. Alors, un an après, essai ou pas ? 

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Un premier constat au vu des accords signés : dans l'industrie (métallurgie, chimie, pharmacie...) et les services financiers (banques, assurance,) pas d'appel des grands espaces. Pas plus de conventionnel que que de ballons envoyés à l'aile par le Béziers des années 70. Et les autres ? c'est ici que la ligne d'essai s'éloigne et que le french flair en prend un coup. Dans le bâtiment, l'accord propose la mise en place d'une contribution conventionnelle de 0,2 %. Pas assez estiment les syndicats majoritaires qui s'opposent à l'accord. Dans le sanitaire et social, l'accord prévoit 0,35 % de mutualisation obligatoire et 0,65 % d'obligation d'investissement. Soit un doublement de l'obligation légale. Pas assez estiment les syndicats, unanimes, qui ne signent pas l'accord. Face à ce tout ou rien, le pari de la démocratie sociale et du développement d'un régime conventionnel de financement de la formation est mal engagé, pour ne pas dire déjà perdu. Il porte en germe la liquidation de la gestion paritaire et trace pour les OPCA un destin d'opérateur des politiques publiques. On aimerait se tromper et penser que la créativité de certains secteurs, comme l'intérim, pourrait servir d'exemple. Mais force est de constater que plus on avance, plus la ligne d'essai recule. 

03/10/2014

Mal armée

La décision prise par la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) le 2 octobre nous amène à nous replonger dans le Code de la Défense où l'on peut lire ceci : "Les militaires jouissent de tous les droits et libertés reconnus aux citoyens. Toutefois, l'exercice de certains d'entre eux est soit interdit, soit restreint". Magnifique enchaînement dialectique : vous jouissez de tous les droits mais pas de tous. Avouons-le, la contradiction n'était pas tenable. C'est ce qu'ont relevé les juges européens en considérant que la France ne pouvait purement et simplement interdire toute activité syndicale à un militaire. 

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Membres du syndicat créé par F.H Fajardie au sein de l'armée chinoise

La disposition censurée par les juges est la suivante : "L'existence de groupements professionnels militaires à caractère syndical ainsi que l'adhésion des militaires en activité de service à des groupements professionnels sont incompatibles avec les règles de la discipline militaire.". Cette discipline n'étant pas explicite, on aurait tout de même aimé savoir quelle règle disciplinaire imposait qu'un collectif ne puisse défendre ses intérêts, on comprend aisément que dans la grande muette, il s'agit surtout de la fermer. Et bien les juges viennent de l'ouvrir. 

24/03/2014

Une voie médiane

J'avais eu l'occasion de signaler sur ce blog l'inconciliable position de deux chambres de la Cour de cassation. La chambre sociale, qui considérait que la suspension du contrat de travail ne suspendait pas le mandat d'un représentant du personnel, et la chambre civile, en charge des affaires de sécurité sociale, qui considérait que pendant un arrêt maladie l'exercice d'un mandat était impossible au regard du droit de la sécurité sociale. Les contentieux dans ce domaine étaient récurrents et méritaient qu'une solution soit trouvée; Elle vient de l'être, par un arrêt rendu par la Chambre mixte qui devrait apporter une solution définitive en adoptant une position médiane. 

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A la recherche de la voie du milieu

La Cour de cassation commence par confirmer que la suspension du contrat ne suspend pas le mandat. Puis elle confirme également que le droit de la sécurité sociale s'oppose à l'exercice de toute activité pendant un arrêt maladie. Elle trouve toutefois la voie médiane en posant en principe qu'il appartient au médecin traitant, seul compétent pour apprécier l'état de santé du salarié, d'autoriser ou non l'exercice d'un mandat de représentation pendant l'arrêt maladie. Voici donc ouverte pour les médecins la possibilité de rendre légal l'exercice d'un mandat de représentation pendant l'arrêt maladie. De fait, la Cour valide la possibilité d'un cumul entre l'indemnisation des heures de délégation et l'indemnisation de l'arrêt maladie, qui n'ont pas le même objet, comme elle a déjà validé le cumul entre IJSS et indemnité de congés payés. Pour les représentants du personnel il s'avère donc que cette voie médiane est tout sauf une voie de garage. 

Cass. Soc Arrêt maladie Heures de délégation.docx

03/07/2013

Dédoublement

La loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin généralise, pour les entreprises de plus de 5000 salariés, l'élection de représentants des salariés au sein du Conseil d'Administration, ou de surveillance. Il y en aura 1 si le conseil compte moins de 12 membres, 2 s'il y en a plus de 12. Même minoritaires, ces administrateurs nouveaux auront le droit de vote. Ils participeront à tous les conseils, auront accès aux informations et contribueront aux débats. Jouer ce rôle sera tout sauf évident. Pas facile en effet de concilier les relations interpersonnelles, qui peuvent devenir cordiales, la fonction de représentation des salariés et le rôle d'administrateur. Le risque de schizophrénie est bien réel.

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Je me souviens d'un secrétaire de CE et de CCE, délégué syndical central, représentant au conseil d'administration et divers autres mandats au nom d'un syndicat qui était le syndicat unique, avec une forte tradition d'opposition, au sein d'un groupe industriel. Les patrons de l'entreprise étaient des américains. Ils emmenèrent le syndicaliste au siège aux Etats-Unis, à Saint-Louis, passèrent beaucoup de temps avec lui, l'associant à tout, lui montrant tout. Le syndrôme du journaliste "embedded" et l'inverse de la confrontation frontale, dans laquelle il aurait été plus à l'aise. Un monde nouveau, des logiques qui ont leur cohérence et au final un positionnement personnel de plus en plus difficile à construire. Pour sortir du dilemne, le syndicaliste trouva comme solution de renoncer à ses mandats permanents, et de consacrer au moins une journée par semaine à son activité : remplir des sacs, les charger dans les camions, faire fonctionner les machines, assurer le nettoyage et la maintenance. En équipe au milieu des autres salariés. Pour prévenir le risque de dédoublement, rien de mieux que de se donner comme objectif de faire des liens entre les mondes.

16/05/2013

Diable !

Le diable est dans les détails paraît-il. Cela signifie qu'il surgit souvent là où on ne l'attend pas, ce qui est bien le moins lorsque l'on prétend à un minimum de diabolisme. Après l'adoption définitive par le Parlement, mardi dernier, de la loi de sécurisation de l'emploi, on pourrait bien s'apercevoir que ce ne sont pas les mesures les plus médiatiques, tels les accords compétivitité emploi, qui auront l'impact le plus important. Il est une disposition, qui concerne toutes les entreprises ayant une représentation du personnel, qui est de nature à modifier sensiblement la donne des relations sociales : la mise en place de la base de données unique d'information (BDU) à destination des représentants du personnel. Voilà un diabolique surgissement qui fera figure de calvaire pour bien des responsables ressources humaines.

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Félicien Rops - Le calvaire - 1882

Dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi, deux ans pour les entreprises de moins de 300 salariés, devra être constituée  une base de donnée actualisée en permanence et tenue à disposition des représentants du personnel, dont le contenu sera précisément fixé par un décret à paraître. Le détail qui tue, c'est que devront figurer dans cette base de données, les informations relatives aux deux années passées, ce qui ne pose guère de problème, mais également aux trois années à venir. Autrement dit, toutes les entreprises vont devoir annoncer et actualiser leurs prévisions de chiffre d'affaires, d'activité, d'emploi, de masse salariale, d'investissement, de formation, etc. pour les trois années à venir. Jamais une telle exigence de prévision chiffrée n'a été imposée aux entreprises. Car l'exercice se révèlera redoutable à l'usage : qui annoncera ses véritables objectifs à trois ans et en tirera les conséquences prévisionnelles ? mais si tel n'est pas le cas, qui se retrouvera en flagrant délit de mensonge pour avoir publié des prévisions linéaires alors que des décisions stratégiques étaient envisagées ? et comment assumer une prévision non linéaire pour les années à venir ? le casse tête ne fait sans doute que commencer. Un calvaire vous dis-je.

29/03/2013

Indémodable club des cinq

Comme la série était publiée dans la bibliothèque rose, j'ai longtemps considéré que le Club des cinq, c'était pour les filles. Et je m'en tenais aux romans d'aventure de la bibliothèque verte (James Oliver Curwood, Jules Verne, etc.). Et puis ce Club des cinq qui ne sont que quatre, c'est le chien Dagobert qui fait le cinquième, cela entre mal dans la rationalité des jeunes garçons. Mais un jour, j'ai quand même ouvert un des titres, et j'ai commencé à lire. Par défaut d'autre lecture ? pour aller y voir par moi-même ? parce que la petite gitane sur la couverture était piquante ? je n'en ai strictement aucun souvenir, juste que j'ai ensuite englouti tous les titres. Et reste le souvenir qu'à dix ans on est plus malin que les adultes, ce qui est toujours vrai tant les adultes ont souvent le chic de s'alourdir au fil des ans, et que les filles, c'est tout de même plus intéressant que les garçons. Surtout les petites gitanes malines.

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Le Club des cinq et les gitans est paru en 1966. Un an avant que le Ministère du Travail n'accorde une présomption de représentativité aux 5 Confédérations Syndicales : CGT, CFDT, CGT-FO, CFTC et CFE-CGC. Celles là même dont la représentativité est régulièrement contestée par ceux qui connaissent peu la chose syndicale, ou qui feignent de ne pas la connaître. Car la représentativité, comme nous le rappelle la loi du 20 août 2008, est basée non pas sur le nombre d'adhérents (sinon les partis politiques seraient moins représentatifs que les syndicats), mais sur l'audience électorale. Et celle-ci vient d'être mesurée au cours des quatre dernières années. Plus de 5 millions de salariés se sont exprimés et l'audience ainsi calculée donne les résultats suivants :

ORGANISATION

AUDIENCE ELECTORALE

CGT

CFDT

CGT-FO

CFE-CGC

CFTC

UNSA

SUD

26,77

26

15,94

9,43

9,30

4,26

3,47

Soit une représentativité maintenue pour le Club des cinq (puisqu'il fallait obtenir au moins 8 % des voix au niveau interprofessionnel) et quelques efforts encore à faier pour les deux autres confédérations. Et à ceux qui seraient tentés par le "tout ça pour ça", les 5 mêmes organisations restant représentatives, on fera juste remarque qu'elles viennent de passer d'une représentativité octroyée à une représentativité obtenue par le vote, ce qui disqualifie le procès en légitimité. Ce souci étant réglé, vous pouvez profiter du week-end pascal pour vous replonger dans les aventures de Claudine et de ses amis.

19/03/2013

Chauve ou Souris

C'est intéressant la chauve-souris. Voyez mes ailes, je suis oiseau, voyez mon poil, je suis souris. Elle n'a pas à choisir la Chauve-Souris. Elle cumule les qualités : une ouïe de sonar, une vision nocturne hors-pair (et non, elles ne sont pas aveugles) et un odorat de compétition. Agaçant les gens qui cumulent comme cela des aptitudes à tout. C'est peut être pour cette raison qu'elles ont longtemps été persécutées et qu'elles continuent à effrayer.

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Albert Penot - La Chauve-Souris - 1880

Elle a agacé ses confères syndicaux à vouloir cumuler les qualités la CGC. En tant qu'unique confédération syndicale catégorielle, elle bénéficie d'un mode de calcul de représentativité qui ne porte que sur le second collège (ou le second et le troisième lorsqu'il en existe trois). Mais pas sur le premier qui regroupe les ouvriers et les employés. Forte d'une représentativité de 35 % calculée sur l'ensemble de l'entreprise, le syndicat CGC d'une société entendait pouvoir signer seule un accord d'entreprise non catégoriel. Saisi par la CGT, le juge s'y oppose : quand bien même son score serait supérieur à 30 % au niveau de l'entreprise, en ayant fait le choix d'être catégorielle, la CGC ne peut signer seule un accord d'entreprise. Pas question de faire sa Chauve-Souris et de calculer des représentativités variables selon les circonstances. Catégorielle tu es, catégorielle tu resteras. Si la décision de la Cour d'appel de Versailles est limpide (CA Versailles), reste à savoir ce que la Cour de cassation dira sur la question.

18/03/2013

Gelé

Pas un pas qui ferait crisser la neige. Pas un engin à moteur à l'horizon. Pas de pépiements d'oiseaux, toujours blottis dans leurs abris. Pas encore de lent goutte à goutte des premières fontes. Rien. De nouveaux paysages dessinés au crayon blanc, un silence inattendu, un temps à l'unisson qui devient immobile tant il ne se passe plus rien. S'il n'y avait certaines situations dramatiques, on en viendrait à souhaiter ces périodes qui bousculent tous les rythmes et toutes les habitudes. Qui nous encouragent à d'autres perceptions. Qui nous laissent dans un temps figé, gelé.

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Est-ce que ces campagnes pétrifiées ont inspiré les magistrats de la Cour de cassation ? Il faut le croire car ils ont rendu le 13 février une décision qui créé un très proustien temps suspendu entre deux élections. Il s'agissait de déterminer si, dans les entreprises dotées de plusieurs établissements qui élisent leurs représentants à des dates différentes, il fallait calculer en continu la représentativité syndicale ou bien uniquement en début de cycle. C'est cette seconde option qu'ont retenu les juges. Ce n'est donc qu'au bout de quatre ans, que l'on reprocèdera au calcul de représentativité des organisations syndicales. Ce qui renforce d'autant l'enjeu du premier tour des élections, car leurs résultats figeront une situation pour 4 ans. Quelles que soient les évolutions ultérieures et les élections intermédiaires.

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Peu importe que la neige ait fondu, que les routes soient de nouveau praticables, que ce véhicule englouti par la mousse blanche retrouve sa conductrice, rien ne changera jusqu'à ce qu'un nouveau cycle électoral complet ne soit entamé. Les juges, maîtres du temps à défaut d'être maitres du temps.

Cass. Soc 13 Février 2013 Représentativité Syndicale.pdf

16/11/2012

Franchir le seuil

Les obligations sociales des entreprises sont assujetties à des effets de seuil. L'employeur de moins de 10 salariés n'a pas les mêmes obligations que celui qui en compte plus de 50 ou plus de 300 ou plus de 1000 pour ne retenir que les principaux seuils sociaux. Dans le cadre de la négociation sur la sécurisation de l'emploi, les organisations patronales souhaitent réduire les effets liés aux seuils. Elles proposent pour cela de différer l'application des obligations nouvelles et de réduire ces obligations en dessous de certains seuils. C'est reproduire en pire ce que l'on souhaite éviter, car si les obligations sont réduites, elles inciteront d'autant moins à franchir le seuil, serait-ce avec un effet différé.

Il est pourtant vrai que les seuils ont de quoi faire peur, notamment celui de 50 salariés qui est, de loin, celui qui est le plus coûteux pour l’entreprise, dans des proportions qui peuvent s’avérer exorbitantes. Ainsi, le passage à plus de 50 salariés entraîne la mise en place d’un Comité d’entreprise (0,2 % masse salariale pour le fonctionnement, plus temps de réunion, plus temps de délégation, plus le financement des activités sociales…), mais également de la participation obligatoire, soit  le reversement d’une partie du résultat aux salariés, la possibilité d’avoir jusqu’à 5 organisations syndicales, la mise en place d’un CHSCT, le recours à un PSE en cas de licenciement économique, etc.  A dissuader effectivement le mieux disposé des chefs d’entreprise, et ce qui aboutit à une surreprésentation des entreprises de moins de 50 salariés et au final à priver les salariés de certains droits. Au final, personne n'est véritablement gagnant.

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Mais voyons les choses autrement. Plutôt que de remonter les seuils ou différencier encore plus les obligations, ne serait-il pas possible de les lisser en instaurant soit des règles communes à toutes les entreprises (par exemple la participation dès le premier salarié), des instances de représentation simplifiées pour toutes les entreprises et des  moyens proportionnels à la taille (par exemple des crédits d’heures augmentant proportionnellement au nombre de salariés plutôt que fixes à partir de seuils…). S'il est effectivement urgent de mettre en chantier la question des seuils sociaux, il est peut être encore plus important de faire simple et intelligent, c’est une tentation à laquelle ni les négociateurs ni le législateur ne devraient normalement résister, même si on constate qu'ils persistent souvent à faire l'inverse.

Et pour tous ceux qui trouveraient ces histoires de seuil un peu arides, vous pouvez avec le week-end qui s'annonce franchir le seuil du jardin avec André Hardellet, la réalité prendra tout de suite une autre dimension.

30/10/2012

Vider les chaises

On en a désormais la certitude, c'est une entreprise d'éradication de certaines organisations syndicales qui est à l'oeuvre, et la Cour de cassation vient y prêter la main d'une curieuse manière. La loi du 20 août 2008 qui a profondément modifié les règles de représentativité des organisations syndicales, repose sur le principe que c'est lors des élections professionnelles que se mesure la représentativité, tant dans l'entreprise qu'au niveau des branches ou de l'interpofession. Les résultats globaux de représentativité sur ces deux derniers niveaux seront connus de manière officielle en 2013. Et au niveau de l'entreprise, les résultats de l'élection déterminent le poids de chaque organisations syndicale, rompant avec le principe d'égalité qui a prévalu pendant des décennies. Le législateur a également fait le choix de réserver aux organisations ayant deux élus au comité d'entreprise la possibilité d'y désigner un représentant syndical. La Cour de cassation, après le Conseil constitutionnel, vient de confirmer que cette règle ne portait pas atteinte au pluralisme syndical. C'est sur ce sujet que la Cour de cassation en rajoute une couche.

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Dans une décision du 24 Octobre 2012, les juges de la Cour suprême décident en effet qu'un accord ne peut prévoir qu'une organisation syndicale ayant moins de deux élus au CE conserve la possibilité d'y désigner un représentant. Selon les magistrats, la condition de disposer de deux élus est d'ordre public absolu. Rappelons que le rôle du représentant syndical est assez passif : il participe au CE sans voix délibérative. Mais il permet à son organisation d'être au courant des débats, ce qui est toujours utile lorsque ladite organisation n'a pas d'élus au CE, et ce qui est parfaitement inutile lorsqu'elle en a, deux a fortiori. La Cour de cassation a donc privilégié la solution qui ne sert à rien. Ou plutôt à une chose. A donner toujours plus de moyens aux organisations majoritaires et toujours moins aux autres. Cela s'appelle une volonté de vider les chaises et de réduire par tous les moyens le nombre d'organisations et le nombre d'élus. Le dialogue social s'en portera mieux paraît-il. On demande à voir.

Cass. Soc. 24 Octobre 2012.pdf

13/03/2012

De l'engagement

La CGT a officiellement exprimé sa position pour la prochaine élection présidentielle en indiquant pour qui elle ne voterait pas. Le même jour, Laurence Parisot dans une interview aux Echos, annonçait tout aussi clairement, même s'il ne s'agit pas d'un communiqué du MEDEF, pour qui elle ne voterait pas. Si les positionnements politiques ne surprennent guère, leur expression a suscité force commentaire. Les vieilles rengaines sur la politisation des syndicats sont rebrandies. Les représentants de la démocratie sociale doivent-ils prendre position lorsqu'il s'agit de démocratie politique ? en droit, s'il est interdit à un syndicat de poursuivre des objectifs politiques, l'intervention politique est reconnue comme un moyen de défendre les intérêts des adhérents. L'engagement n'est donc pas une fin mais peut être un moyen.

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Ai Weiwei

D'ailleurs, tout le monde devrait se réjouir que chacun souhaite et puisse s'engager. La démocratie se porte mieux lorsque les citoyens s'engagent que lorsqu'ils négligent de le faire. Et l'engagement d'un seul peut parfois faire des émules à l'exemple d'Ai Weiwei.

Non l'engagement n'est pas un problème, sauf si l'on considère qu'il est impossible d'avoir des relations, de travailler efficacement, voire de cotoyer ceux qui ont d'autres engagements que les notres. Cette vision ostracisée de la société où l'on ne pratiquerait que l'entre soi endogamique est une véritable plaie. Je me souviens qu'un des premiers à me faire confiance lorsque j'ai débuté mon activité, était un représentant patronal à la réputation sulfureuse, autrement dit il fleurait l'extrême-droite. En réalité, il baignait dans des cultures de droite très diversifiées dont il faisait une anarchiste synthèse personnelle tout en aimant l'ordre et le cérémonial. Mais cela il m'a fallu du temps pour le découvrir. La vérité d'un individu n'est quasiment jamais dans son apparence.

L'engagement devrait être un acte aussi normal et banal que le fait de cotoyer avec plaisir ceux qui pensent autrement que nous. Manifestement nous n'en sommes pas là et ici j'adresse un salut personnel à Marc Ferracci qui refusa la semaine dernière un débat avec moi parce que j'avais osé écrire tout le mal que je pensai du rapport sur la formation professionnelle qu'il a coproduit pour l'Institut Montaigne (voir ici). Et au plaisir d'une prochaine rencontre, avec un peu d'engagement !

06/01/2012

De la liberté syndicale

Les partenaires sociaux viennent de tenir la 17ème séance de négociation sur la modernisation du paritarisme. Il en reste 2. Au terme de 19 réunions, peut être sera-t-il possible de fixer quelques principes qui pourront s'appliquer aux organismes paritaires qui ont en charge la gestion d'une activité d'intérêt général. Dans les quelques points d'achoppement subsistant, figure le recours à des audits externes pour évaluer l'action des organismes paritaires. Pour certaines organisations, cette évaluation externe manque de légitimité et ne saurait remettre en cause des choix politiques. Circulez, rien à évaluer. On peut penser que c'est l'une des raisons majeures qui ont conduit au recul du paritarisme dans notre pays ces dernières années : l'incapacité des partenaires sociaux à s'imposer la transparence et l'évaluation, le recours permanent à l'argument du "politique" pour s'affranchir de toute exigence d'efficacité et au final la conviction que disposant d'une légitimité naturelle, les organisations représentatives d'employeurs et de salariés n'auraient pas à se légitimer par leurs résultats. C'est cette conviction qui constitue le somnifère qui anesthésie le paritarisme pendant que l'Etat procède à sa lente mais certaine liquidation. Suggérons aux responsables syndicaux de bien regarder cette image.

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Anna Karina est une femme libre. Elle peut donc faire face, avoir le regard direct et assumer pleinement ce qu'elle fait, en toute liberté. Libre et donc responsable, libre parce que responsable. Et pour avoir le regard de la liberté il ne faut pas craindre le regard d'autrui.

La liberté  des organisations patronales et syndicales ne se trouve pas dans l’opacité ou dans le dogme de la légitimité naturelle qui ne s’évaluerait que lors des élections sur le modèle politique. La démocratie sociale, ce n’est pas une forme bis de la démocratie politique, ce sont d’autres pratiques et d’autres responsabilités. Car rendre des comptes c’est être responsable, être responsable c’est exercer sa liberté.

26/05/2011

Du nomadisme syndical

Comme les équipes sportives, le paysage syndical connaît des périodes de transfert. La valse des étiquettes n'est pas un mercato, quoi que, mais il n'est pas rare de voir un élu, ou un syndicat, se désaffilier pour se réaffilier ailleurs. La Cour de cassation a rendu le 18 mai dernier plusieurs décisions pour affirmer quelques principes. Tout d'abord, solution ancienne, le nomadisme syndical ne fait pas perdre leur mandat aux élus. Sécurité des élections et liberté syndicale obligent, l'élu FO qui passe à la CGT devient un élu CGT. Pour autant, le fait qu'il ait été élu sous l'étiquette FO n'est pas sans conséquence. D'un double point de vue.

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André Masson - Un nomade à Paris

Tout d'abord, le syndicat qui a été élu sous une étiquette confédérale ne peut apporter son score à une autre confédération. En l'espèce, un syndicat affilié à la CFTC qui a obtenu plus de 10 % des voix aux élections et se trouve donc représentatif, adhère à l'UNSA, qui n'a pas franchi ce seuil. L'UNSA ne devient pas représentative et la CFTC le reste si elle dispose d'une section syndicale ou en remet une en place. Solution logique qui fait prévaloir l'étiquette sur la personne, dès lors que seules les organisations présentent des candidats et que la représentativité est calculée sur le total des voix de la liste et non des candidats.

Ensuite, les nouveaux élus, qui siègent sous leur étiquette nouvelle, permettent-ils à l'organisation nouvelle de désigner des représentants syndicaux au Comité d'entreprise, cette désignation étant assujettis à la condition d'y avoir deux élus. Réponse négative. Il faut avoir deux élus sous sa bannière pour pouvoir procéder à cette désignation.

Voilà donc un nomadisme sans beaucoup d'effet : si les nomades siègent sous les couleurs de leur nouvelle organisation, ils ne lui apportent aucun des avantages liés à l'élection elle-même. C'était la contribution de la Cour de cassation a la dépersonnalisation de la démocratie sociale. Que ne lui confie-t-on la démocratie politique.

01/03/2011

Il pleut sur l'arroseur

Semée au début des années 80, l'individualisation des relations de travail a prospéré aussi rapidement qu'un plant d'OGM dans la plaine alluvionaire de la Garonne. Objectifs individuels, augmentations individuelles, missions spécifiques, entretiens individuels, droit individuel à la formation, négociations individuelles des départs, compétences individuelles...le collectif a peu à peu disparu du paysage, sous couvert d'une reconnaissance de l'individu placé au centre. Au centre de quoi ? assez souvent de la gestion de situations que l'organisation ne sait plus traiter et qu'elle renvoie vers le dernier maillon, le salarié, dont on s'étonne ensuite qu'il puisse être faible. Le droit du travail n'a pas échappé, pourquoi l'aurait-il fait ?, à ce mouvement. La promotion du contrat de travail et sa capacité de résistance à la règle collective en est la marque. Les juges viennent d'en administrer une nouvelle preuve, qui pourrait bien faire des thuriféraires du management individualisé des arroseurs arrosés.

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Par deux décisions rendues le 19 janvier 2011 (Cass. soc., 1 ; Cass. soc., 2), la Cour de cassation vient de condamner pour discrimination syndicale des entreprises qui n'avaient pas organisé d'entretien individuel pour des représentants du personnel et, pour l'un d'entre eux, avaient réduit son accès à la formation. De technique manageriale, l'entretien individuel devient ainsi un droit pour le salarié, même pour celui qui n'exerce pas d'activité du fait de ses mandats. De quoi parler ? de ses compétences, de sa capacité à reprendre une activité, de sa situation comparée au sein de l'entreprise, de sa carrière, etc. Pas de son mandat ni de sa performance. Mais il reste de quoi faire. Gérard-Lyon Caen avait écrit il y a quelques années un opuscule intitulé "Le droit du travail, une technique réversible". Il y démontrait le passage d'un droit protecteur du salarié à une technique de management. Et bien voilà que le juge se met à faire exactement l'inverse.

15/10/2010

Quand la CGC voit double

Le Conseil Constitutionnel a tranché le 7 octobre dernier : les dispositions du Code du travail adoptées spécialement pour la CGC ne sont pas inconstitutionnelles. De quoi s'agit-il ? depuis la loi du 20 août 2008, les organisations syndicales ne sont représentatives dans l'entreprise que si elles obtiennent au moins 10 % des suffrages exprimés lors du premier tour des élections du comité d'entreprise. Cette réforme, qui a pour objectif de légitimer les syndicats par le vote et d'assurer ainsi leur capacité à conclure des accords engageant les salariés, a été contestée par les syndicats "minoritaires" qui voient leur représentativité menacée. Normalement, les 10 % s'apprécient au niveau de l'entreprise. Sauf pour la CGC, d'où le recours, qui du fait de sa nature catégorielle, voit sa représentativité appréciée uniquement dans le ou les collèges (deuxième et/ou troisième) dans lesquels elle peut présenter des candidats. Dérogation inacceptable pour FO qui est à l'origine du recours. Pour le Conseil constitutionnel, la disposition ne fait pas problème et ne créé pas une inégalité car elle concerne un syndicat catégoriel et ne mesure une représentativité qui ne vaut que pour les salariés appartenant aux collèges concernés. Cette précision n'exclut toutefois pas que le calcul de représentativité pour la CGC soit double.

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B.M.C - Taureau mort et son double

En effet, la CGC peut demander un calcul de représentativité uniquement dans le collège cadre ou bien dans le collège cadre et le collège techniciens agents de maîtrise, qui sont les collèges dans lesquels elle peut statutairement présenter des candidats. Dans ce cas, si elle atteint 10 % elle est représentative mais uniquement pour les salariés appartenant à ce ou ces collèges. Elle ne peut donc pas conclure d'accord couvrant tous les salariés de l'entreprise. Par contre, si elle obtient, serait-ce à partir des résultats dans un seul collège, plus de 10 % au niveau de l'entreprise, malgré son caractère catégoriel elle peut prétendre représenter l'ensemble des salariés puisque la loi ne fixe aucun minima par collège dans ce cas. Avantage du syndicat catégoriel qui peut jouer soit uniquement sur sa catégorie, soit au niveau de toute l'entreprise si son poids catégoriel est suffisant. Seule restriction : la CGC ne peut présenter de candidats dans le premier collège sans perdre cet avantage de la double représentativité. En effet, si elle présente des candidats dans tous les collèges, elle n'est plus par définition une organisation catégorielle.

Et voilà comment une organisation à qui certains promettaient disparition avec la réforme de 2008 se trouve au contraire dans une situation plus confortable que d'autres organisations, notamment celle qui lui contestait ce droit à une double représentativité. Dans l'arène de la représentativité, tous les taureaux ne sont donc pas égaux. Reste à souhaiter de belles corridas !

29/06/2010

Village gaulois

L'article 1er de la loi du 27 décembre 1968 l'affirme sans ambage : "L'exercice du droit syndical est reconnu dans toutes les entreprises dans le respect des droits et libertés garantis par la Constitution de la République, en particulier de la liberté individuelle du travail". Pour tous ceux qui ont baigné dans les aventures d'Astérix, la formule ne peut que susciter l'interrogation : "Toute la Gaule est occupée...", "Toute ? non car un petit village Gaulois résiste encore et toujours à l'envahisseur". Le remake des Gaulois et César se rejouera à partir du 7 juillet à l'Assemblée nationale lors de l'examen de la loi relative au dialogue social dans les TPE. Le naturel, que l'on croyait disparu, est bien vite revenu : politiciens et représentants patronaux (pas tous heureusement) ont fait entendre leurs voix pour dire leur désaccord avec l'idée de faire entrer les syndicats dans les petites entreprises. Jean-François Copé l'a clairement affirmé : pour la première fois il ne votera pas un texte du Gouvernement. Le Village doit rester Gaulois et l'envahisseur syndical aux portes de l'entreprise.

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La négociation à l'époque du Village Gaulois
Deux générations n'y auront donc pas suffi. Syndicat est toujours synonyme d'ennemi et dialogue social de conflit. L'inévitable crispation qui résulte de l'absence de dialogue ne pourra d'ailleurs que renforcer et justifier cette approche conflictuelle. Mais, nous dit-on, il faut laisser les patrons de PME et leurs salariés vivrent tranquillement leurs relations cordiales qui ne pourront être que perturbées par les trublions syndicaux. Voilà un argument de poids. Laissons donc le Village Gaulois vivre sa vie et les bienheureux penser que tout finit toujours par un banquet.
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