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20/03/2017

Tous les morceaux du puzzle

Dans une campagne électorale, le temps consacré à la réflexion sur les projets est souvent le parent pauvre, la stratégie, l'organisation, la communication et l'action politique consommant l'essentiel du temps et de l'énergie. Et pour un sujet considéré comme aussi complexe, confus et difficile à appréhender que la formation professionnelle, on comprend que le temps du diagnostic soit rapide et les propositions finalement peu opérationnelles au-delà de quelques déclarations de principe. Ainsi, tout le monde s'accorde pour renforcer et développer l'alternance, même si les modalités peuvent différer d'un candidat à l'autre. Une exception toutefois, le projet de Macron qui porte une énième réforme de la formation professionnelle, reprenant quasiment en bloc les analyses de Marc Ferracci et de l'Institut Montaigne mâtinées des Colloques sur l'emploi de Bercy. On trouvera ci-dessous la synthèse des débats de l'époque qui reste d'actualité. 

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Mais le risque récurrent c'est d'avoir une fois de plus une réforme qui parte d'une analyse étroite de la formation professionnelle, à partir de son fonctionnement propre. Autrement dit, ce n'est pas en réformant sans cesse le moyen que l'on va améliorer le résultat. On peut toujours reprocher à la formation professionnelle d'être inefficace, tant que les entreprises préfèreront recruter sur le marché externe des candidats déjà formés plutôt que de faire l'investissement interne, elle a peu de chances de s'améliorer, quelle que soit la tuyauterie mise en place. C'est moins aux conditions de production de la formation qu'il convient de s'attacher, qu'à l'usage possible de la formation dans les pratiques de régulation du marché du travail, dans les pratiques de gestion des ressources humaines et dans les articulations entre formation initiale et continue. Bref, il faudrait prendre le temps du systémique et cesser de focaliser sur la formation (qu'il serait d'ailleurs urgent de dérèglementer pour favoriser l'élargissement des modes de production de la compétence) pour se préoccuper de réunir tous les morceaux du puzzle. Pour ceux que l'analyse intéresse, elle se poursuit ICI

Seminaire Bercy Loi 2014.pdf

31/08/2016

C'EST LA RENTREE, IL EST SORTI

Ce mercredi 31 août, paraît la deuxième édition du GRAND LIVRE DE LA FORMATION, dans lequel votre serviteur ouvre et ferme le ban, entendez a rédigé l'introduction et la conclusion. Et pour varier les plaisirs, vous pourrez lire les contributions de nombre d'autres auteurs, puisque l'ouvrage est collectif. L'introduction, c'est la genèse socio-historique de notre système de formation, la conclusion, c'est l'évolution du droit de la formation vers un droit de la compétence et même un droit de la reconnaissance de la compétence. Mais peut être pourrez vous lire quelques bonnes feuilles sur ce blog d'ici ce week-end. Juste pour donner envie. 

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Et pour ceux à qui le mastodonte ferait peur, vous pouvez aussi aller voir comment inventer le monde de demain, ce qui après tout est le projet de la formation,  dans Macha ou l'évasion, de Jérôme Leroy (Editions Syros). Avec ces deux bouquins dans votre cartable, elle est pas belle la rentrée ? 

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23/03/2015

Sur la corde raide

Inconfortable situation des OPCA qui se trouvent placés, depuis l'entrée en vigueur de la réforme de la formation professionnelle, sur la corde raide des nouveaux équilibres à construire. Equilibre entre une mission de service public et de service aux entreprises, équilibre entre les logiques de branche et les logiques transverses, équilibre entre la politique nationale et les déclinaisons régionales...et tout ceci dans un contexte de réduction de moyens. Pourtant, il existe une possibilité de permettre aux OPCA de traverser avec un peu de sérénité cette zone de turbulence. Il suffit d'utiliser les marges de manoeuvre offertes par la règlementation qui plafonne les frais de gestion des OPCA mais pas leurs frais de mission. Encore faut-il le vouloir. 

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Wilhelm Simmler - La corde raide

C'est en premier lieu aux partenaires sociaux qu'il appartient d'indiquer quelle fonction ils donnent à un outil paritaire, faute de quoi on se demande à quoi sert le paritarisme de gestion. Et c'est en second lieu à la DGEFP d'utiliser les marges de manoeuvre règlementaires et de ne pas s'en tenir à une approche purement comptable et malthusienne des OPCA. A la manière dont on utilise la technique, on voit vite où se situe le projet politique. Pour plus de détail, on se reportera à l'interview donné à l'AEF, tout en précisant qu'il faudrait peut être presser le pas car on ne peut rester indéfiniment sur la corde raide. 

Interview AEF.pdf

06/10/2014

Portrait

Un peu surpris par la demande, je me suis prêté au jeu bien volontiers. Avec un peu d'appréhension tout de même, car à raconter un peu, autant dire ce qui compte. Et qu'est-ce qui compte, 27 ans après avoir créé le Cabinet de consultant comme une blague de potache, car en choisissant le nom de Willems Consultant, je venais incognito de créer le Cabinet WC ! Ce qui compte vraiment ? le souci de préserver ma  liberté, l'inaptitude au salariat tout autant que l'inaptitude à manager, les rencontres surtout de ceux qui voyaient mon avenir mieux que je ne pouvait l'imaginer, la continuation du sport dans le travail, l'incroyable plaisir de se demander, tous les jours, quelle rencontre nouvelle on va faire, des tours de France et des embardées dans quelques autres pays, au Nord, au Sud, à l'Est, mais surtout au Sud, les avions de 6h du matin, longtemps, le plaisir de l'épuisement physique, le désir de frénésie et de lenteur, les chemins de traverse, et la rencontre un jour, qui change tout et justifie tout. Epouser une cliente n'est certes pas un grand moment de déontologie, mais c'est un grand moment de bonheur. 

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Mais je ne vais pas redoubler le portrait écrit par Nicolas Deguerry, que je remercie de son écoute et de la bienveillance de sa plume. C'est paru dans Inffo-Flash et pour la peine, il va falloir que je recommence à m'abonner !

Portrait Centre Inffo.pdf  

08/04/2013

Du vide

Dans le nouveau concours Lépine ouvert par le report d'une nouvelle réforme de la formation à l'automne, l'Institut Montaigne est un impétrant persévérant. D'autant plus persévérant que les propositions sont les mêmes que celles formulées il y a quelques mois : supprimer le (soit disant) "Payer plutôt que former" et le remplacer par un crédit d'impôt, censé être incitatif puisque d'autant plus élevé que les formations seront qualifiantes et que les salariés appartiendront à des catégories peu formées. Cette contribution aurait pu alimenter le débat lancé par Liaisons Sociales sur la suppression de l'obligation fiscale relative au plan de formation. Lorsque l'on procède à une suppression, la question est de savoir si ce que l'on met à la place, serait-ce le vide, est meilleur que ce que l'on a supprimé. Comme Rothko supprimant le sujet pour mieux le mettre face au miroir coloré qui lui est présenté.

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Rothko - White over red

Or le crédit d'impôt est une substitution de médiocre qualité, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, il agit dans une logique purement individuelle, contrairement à la contribution fiscale qui procède à une mutualisation, soit le calcul individuel contre la logique de solidarité. Ensuite, il ouvre la porte à tous les effets d'aubaine, en finançant sans distinction ce que l'on fait sur incitation et ce que l'on aurait de toute façon réalisé. Enfin il ouvre la porte de l'optimisation fiscale, et l'on connaît les dérives du crédit d'impôt recherche avant de constater celles du crédit d'impôt compétivitité. Même si cela fera travailler les consultants, il y a peut être mieux à faire. Par exemple, créer une obligation conventionnelle de négocier un taux de mutualisation par branche, pour trois ans. Ce qui renforcera le dialogue social sur la formation et mettra en place non une obligation uniforme mais des contributions basées sur des diagnostics. Ou encore introduire dans le code du travail, de manière plus explicite, les responsabilités sociales de l'employeur au regard de la qualification des salariés en s'inspirant de la jurisprudence de la Cour de cassation. Ou enfin en se demandant s'il ne faudrait pas une obligation qui se réduit à proportion que l'effectif augmente, ce qui changerait un peu des logiques d'alourdissement des charges lorsque l'on embauche. Et pour ceux qui prendront la peine de lire les deux documents joints, vous constaterez que l'Institut Montaigne mérite son dictionnaire des idées reçues (voir ici). Comme disait Montaigne, le vrai : "Il faut avoir un peu de folie si l'on ne veut pas avoir plus de sottise".

Suppression du 0,9 %.pdf

Institut Montaigne - Formation, Emploi, Compétitivité.pdf

11/10/2011

Le Ron Ron des RF

 Le GARF vient de réaliser son enquête annuelle sur les responsables formation. Entreprises et Carrières en rend compte dans son n° 1063 sous la plume de Laurent Gérard. L'image que les Responsables Formation ont d'eux-même est plutôt bonne. La fonction se professionnalise, et manifestement se satisfait de la complexité de la formation qui renforce son expertise. C'est peut être ici que le bât blesse : fort de la maîtrise de son domaine professionnel, qu'il est bien le seul à comprendre, le responsable formation reproduit cette complexité sur tout ce qui l'entoure et garantit ainsi son champ d'expertise. Tout roule pour le Responsable Formation. A tel point que cela ronronne même parfois, comme le chantent les Crystals.

 

Car la question semble moins aujourd'hui de gérer la formation et sa complexité, que de dépasser la formation pour travailler sur le professionnalisme, quels que soient les moyens de la professionnalisation, de ne plus raisonner sur des besoins de formation mais sur l'accompagnement des performances et des personnes, ne plus s'enfermer dans la formation comme réponse quasi-exclusive à la professionnalisation mais développer des ingénieries de professionnalisation qui articulent la formation avec d'autres moyens, de peser sur le contenu réel des emplois, de faire disparaître la complexité pour proposer des solutions simples, d'arrêter d'informer et de former les managers sur les dispositifs et de les recentrer sur les questions qui relèvent de leur métier et non de celui du RF, de passer d'une ingenierie financière à une ingenierie économique de la professionnalisation. Bref au lieu de s'installer dans la fonction, de la dépasser par le haut et sortir du Ron Ron.

GARF-Metier-RF002.pdf

05/09/2011

Cherchez l'erreur

Publicité parue dans la revue Philosophie du mois de Septembre pour un Master de Philosophie, à finalité professionnelle et orienté vers le journalisme. A priori plutôt alléchant. Et pourtant la publicité est scandaleuse. Cherchez l'erreur :

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Non, l'erreur n'est pas de trouver Christophe Barbier parmi les intervenants (quoi que...). Elle figure en haut à droite de la publicité, comme un coup de tampon bureaucratique qui vous signifie que votre visa est périmé. Il s'agit de la mention "Licence de philosophie exigée". Ainsi, on ne peut faire de Master Professionnel que si l'on a suivi le chemin balisé des études universitaires de licence. La VAP est envoyé aux oubliettes et la VAE aux lieux d'aisance. En 2011 donc, il continue à se trouver des universitaires prétendument sérieux qui parviennent à affirmer incompétence et fermeture d'esprit tout en proposant de développer la notre, de compétence, et d'ouvrir les notres, d'esprits.

Je me souviens des soirées passées à l'Institut Catholique de Toulouse, à écouter des pères en robe penser à voix haute et en public. L'orgue accompagnait parfois ces soirées.

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L'orge de l'Institut Catholique de Toulouse

Ces soirées et conférences étaient ouvertes à tous, et la parole y jouissait d'une liberté sans entrave. Faut-il que les temps aient changé pour que l'on réserve à ceux qui ont universitairement appris à penser le soin de venir penser professionnellement. Et que l'on considère qu'il n'est d'autre lieu qu'un enseignement de licence pour développer les capacités qui permettront de suivre le Master. Les responsables d'un tel programme ont réussi le tour de force de démontrer en un seul acte, que les objectifs affichés ne peuvent à l'évidence pas être atteints. Triste aveu à vrai dire.

Sinon, bonne rentrée à tous les bambins qui vont subir leur première leçon de morale de la part d'adultes dont on se demande bien certains jours au nom de quoi ils la professent.

27/05/2011

Bonheur des autres

Mais non nous ne vivons pas dans un monde de brutes. Il y a des milliers de biens intentionnés qui ne pensent qu'au bonheur...des autres. Par exemple, le Responsable formation qui va dépenser une énergie considérable pour que les salariés puissent partir en formation,  utiliser leur DIF et s'intéresser à leurs compétences. Ou alors le Responsable ressources humaines qui va rendre service au manager en lui mettant à disposition une information complète sur la formation et un guide très détaillé à propos du DIF. Mais aussi les OPCA qui inondent les entreprises d'information sur les dispositisf de formation pour qu'elles soient mieux informées. Est-ce que le salarié a le désir de formation ? est-ce que le manager est disponible pour partager la technicité du responsable formation ? est-ce que l'entreprise a vraiment besoin de ces dispositifs que l'OPCA voudrait lui faire découvrir ? pas la peine de poser la question, la réponse est présupposée et la parole des intéressés, qui ne savent pas ce qui est bon pour eux, superflue. Et après, vous vous étonnez que les salariés, les managers et les entreprises vous envoient paître en vous demandant de les laisser vivre !

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Matisse - Le bonheur de vivre

Voilà des enquêtes qui vous disent que le DIF est un échec parce que 10 % seulement des salariés l'utilisent. Comme si 100 % était un objectif réaliste. Voilà des responsables ressources humaines qui se plaignent du peu d'intérêt des managers pour les ressources humaines. Et de leur propre intérêt pour le travail des managers, ils en sont satisfaits ?

On connait la formule : "Gardez moi de mes amis, mes ennemis je m'en charge". Et si certains veulent faire le bonheur d'autrui, on leur conseille humblement de commencer par demander à ces autruis où ils mettent leur bonheur.

DIF ENTREPRISES ET CARRIERES.pdf

15/04/2011

Le labyrinthe et le Minotaure

Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours (FPSPP) est un hybride : né de la négociation sociale sur injonction du Gouvernement, il est paritaire mais n'engage ses financements que s'il conclut une convention à cette fin avec l'Etat. Le FPSPP n'a pas bonne presse : les entreprises le connaissent mal, lui versent leur écot et s'en défient, les OPCA le redoutent même s'ils les attire. Le FPSPP est au coeur d'un labyrinthe financier dont seuls quelques spécialistes arrivent à sortir, avec difficulté. Bref, le FPSPP est un Minotaure : hybride, mal aimé et au centre du labyrinthe.

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 Maître du Labyrinthe, le Minotaure recevait chaque année son écot sous forme de jeunes gens que la ville d'Athène lui livrait. Aucun n'en revenait. Et ici, cesse l'analogie. Le FPSPP renvoie vers les OPCA les sommes prélevées chaque année, sous réserve des ponctions opérées par l'Etat qui résiste peu au désir infantile de piquer dans les caisses dès qu'il les aperçoit pleines.

Dans leur excellent travail déjà présenté hier, Valérie Grasset-Morel et Laurent Gérard se sont aventurés dans le labyrinthe des circuits financiers. Et ils nous en livrent le fil d'Ariane sous forme de tableau des sommes versées par les OPCA et FONGECIF et des fonds récupérés par les mêmes. Et l'on s'aperçoit, sans véritable surprise, qu'en volume, ce sont les OPCA et FONGECIF les plus importants qui récupèrent, largement, le plus de financement. Certes, le fléchage vise les salariés et non les organismes et a priori ce sont bien des salariés prioritaires qui sont bénéficiaires des fonds. Mais uniquement ceux qui sont dans le champ des organismes les plus performants pour récupérer les financements du FPSPP.

Voici donc le fil d'Ariane :

OPCA et FPSPP.pdf

Et pour ceux qui, comme moi, ont un faible pour le Minotaure, un petit souvenir :

14/04/2011

Marché ouvert tous les jours

Sous la double signature de Valérie Grasset-Morel et Laurent Gérard, Entreprise et Carrières publie un excellent article sur le "Mercato" des OPCA. La loi du 24 novembre 2009 supprimant tous les agréments à la date du 31 décembre 2011, tous les OPCA sont tenus de redéposer un dossier de demande d'agrément avant le 1er septembre. Les conditions d'agrément étant plus restrictives, notamment au niveau de la collecte minimale qui passe de 15 à 100 millions d'euros, le nombre d'OPCA pouvant être réagréé s'en trouve diminué, objectif affiché du Gouvernement. D'une quarantaine le nombre d'OPCA (hors FONGECIF) pourrait passer à une vingtaine. L'article fait le point sur les opérations de rapprochements, fusions, absorption, etc. Et rappelle que le marché qui vient de s'ouvrir n'a pas vraiment la douceur de celui peint par Gauguin sous d'autres latitudes : plus l'échéance s'approche plus les tensions s'avivent, les positions se crispent et, parfois, les épithètes volent bas. Remercions donc Gauguin de nous offrir un instant de sérénité, qu'il ne tient qu'à vous de prolonger.

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Gauguin - Ta Matete : le marché - 1892

Dans le mercato des OPCA, deux éléments ne doivent pas être perdus de vue :

- le mercato est moins celui des OPCA que celui des branches professionnelles. En effet, il appartient à chaque branche de désigner ou non l'OPCA de son choix pour gérer le développement de la formation pour ses entreprises et salariés. Et les regroupements effectués autour de certains OPCA pourraient voler en éclat devant l'offre disponible. On ne peut empêcher les branches professionnelles de faire le tour des étals pour vérifier la fraîcheur des poissons ;

- la date du 1er septembre n'est pas une date ultime. Si c'est à cette date que les OPCA doivent déposer une demande d'agrément pour les secteurs qui les ont choisis, ce choix peut toujours être remis en cause ultérieurement par la dénonciation de l'accord de désignation ou d'adhésion. Et un nouveau choix peut intervenir.

Le mercato qui agite le monde de la formation ne prendra donc pas fin cette année. Il est ouvert de manière permanente. Et d'autant plus ouvert que les OPCA, assujettis à plus de transparences par la loi du 24 novembre 2009, devront publier leurs comptes et leurs résultats, ce qui permettra d'apprécier leur performance et les services rendus aux entreprises et aux salariés. On pourra donc refaire le tour des étals à l'envie : le marché est désormais ouvert tous les jours.

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13/04/2011

Pompe à trou

Certes, il s'agit d'un temps que les moins de vingt ans n'ont vécu qu'à travers les rétrospectives dont la télévision est friande. C'est celui de la voix de Claude Piéplu, de l'animation à moindre frais, de l'absurde plus léger que celui de lonesco ou de Camus et de l'Umour à la Jacques Vaché. Car les shadoks ne sont pas humoristiques, ils ont de l'Umour, comme le tank de la guerre de 14. Et ils pompent en professant leurs savantes devises.

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Les Shadoks ont leur ancêtre, le Sapeur Camember, qui sous la plume de  Christophe, creuse un trou pour enfouir des ordures, puis un second trou pour enfouir la terre du premier trou, puis un troisième trou pour enfouir la terre du second, etc. Si Camember est simplet, ses supérieurs sont stupides qui sont incapables de se faire comprendre de lui, ne tenant jamais compte de qui il est.

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Qui n'a eu le sentiment d'être un Shadok pompant avec d'autant plus d'entrain que la tâche n'a aucun sens et que le moindre relâchement permettrait de s'en apercevoir, ou d'être tel le Sapeur soumis à des injonctions absurde d'une hiérarchie dotée d'une stupéfiante méconnaissance du terrain ?

Dans une chronique écrite pour l'AEF, Hubert Landier nous décrit l'organisation en machine folle qui n'est plus qu'une pompe à faire des trous.

Le management par les Shadocks.pdf

20/10/2010

La rémunération doit-elle être juste ?

Rassurez-vous, la rentrée n'a pas déjà dissipé tous les effets bénéfiques de l'été et il ne s'agit pas ni de savoir si le salaire doit être conforme aux règles ni la paie correctement effectuée. Il s'agit de savoir si le système de rémunération d'une entreprise et la justice ont à faire ensemble. En d'autres termes, les salariés attendent-ils d'un système de rémunération qu'il soit juste ? et un système juste a-t-il plus d'effets sur la motivation, l'efficacité, l'implication, la fidélité qu'un système qui le serait moins ? à toutes ces questions il ne pourra être répondu dans cette courte chronique qui prétend tout de même livrer quelques éléments de réflexion.

Le cabinet Mercer a publié le 4 octobre dernier son enquête de rémunération France 2010 (voir Entreprise et Carrières n° 1019). On y apprend, notamment, que la part accordée aux augmentations individuelles -dont le taux median varie entre 1,5 % et 2 %- est désormais supérieure à celle des augmentations générales -taux médian entre 1,3 % et 1,5 %. Selon Bruno Rocquemont, responsable des enquêtes et rémunérations chez Mercer, cette primauté des augmentations individuelles s'inscrit dans la logique d'une gestion des talents et permet d'éviter les effets de saupoudrage. Sur ce dernier point, il faudrait élargir le regard : sous couvert d'individualisation, on connaît les managers qui "font tourner" et récompensent individuellement sur quelques années...l'intégralité ou quasiment de leur équipe faisant échec aux systèmes individualisés. Mais notre sujet était la justice.

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Salvador Dali - Lame de Tarot - La justice

Transportons nous dans le monde judiciaire : vous êtes juré d'assise, le procès touche à sa fin, aucune preuve matérielle n'a été apportée de la culpabilité et vous n'avez face à vous que quelques éléments troublants mais pas de certitude. Est-ce que vous condamnez ou est-ce que vous acquittez ? en d'autres termes, pensez-vous qu'il vaut mieux prendre le risque d'un innocent en prison ou d'un coupable libre ? Si vous penchez pour la première hypothèse, l'étude de Mercer vous confortera : il vaut mieux ne pas augmenter tous les salariés selon leur travail mais uniquement quelques uns (l'individualisation supposant que certains ne soient pas augmentés), alors que si vous penchez pour la seconde hypothèse, vous préfèrerez augmenter plus largement pour ne sanctionner aucun des salariés ayant fourni des efforts, au risque de rémunérer certains qui en ont peu fourni. Quand à savoir si en prédéterminant une enveloppe limitée il est possible de n'augmenter que les salariés qui le méritent mais sans en oublier aucun, sur le papier c'est déjà difficile mais dans le cadre d'une prise de décision manageriale cela finirait par relever du hasard. Il vous reste aussi la possibilité de considérer que justice et rémunération n'ont rien à faire ensemble.

19/01/2010

Pressé ? non rapide !

Petite bousculade dans les couloirs du métro, erreur d'appréciation sur les vitesses respectives, excuses.  Mais l'interpellation fuse, lourde d'une aggressivité qui s'exprime d'autant mieux qu'elle semble vouloir ne pas apparaître : "Vous êtes pressé ?", réponse dans l'élan, qui emprunte l'insolence à la jeunesse : "Pressé ? non, rapide". Le rythme du corps est de l'esprit, voilà la grande affaire. Votre façon de "corporer", autrement dit de mettre votre corps et votre esprit, car indissociables sont ces deux là, en rythme en dit long sur vous. Votre premier discours. Voyez le rythme chez le placide De Kooning et vous aurez une idée de ce que Sollers nomme une impassible agilité subtile.

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De Kooning - La visite - 1967

Quel est le rythme d'application d'une loi ? juridiquement, un jour franc après sa publication Je suis toujours surpris par ceux qui considèrent que la loi n'existe vraiment que lorsque décrets, voire circulaires sont venus en préciser la portée. Pour la loi du 24 novembre 2009 sur l'orientation et la formation professionnelle, et sans doute bien d'autres, il faudra s'y faire : l'essentiel des dispositions s'appliquent sans délai, notamment une grande partie des règles nouvelles qui concernent les OPCA. Et pourtant le mode d'emploi n'est pas fourni ? prenons l'habitude de porter la vie un peu au-delà du montage de placards IKEA et d'agir de manière autonome, c'est à dire libre et responsable. Sur l'application de la loi aux OPCA, voir ci-dessous l'interview parue dans Entreprise et Carrières.

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05/03/2008

Le contrat de travail contient une obligation de GPEC

Obligation d'adaptation: l'arrêt de la Cour de cassation du 23 octobre 2007 "complète le dispositif de GPEC" (Jean-Pierre Willems, Consultant Ressources Humaines)

Par une décision du 23 octobre 2007, la Cour de cassation condamne une entreprise à indemniser deux salariés qui n'ont suivi que trois jours de formation en 12 et 24 ans d'ancienneté. Cette indemnisation s'ajoute à l'indemnisation pour rupture injustifiée de leur contrat de travail, la Cour y voyant la violation d'une obligation spécifique, l'obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi (Cass. Soc., 23 octobre 2007, n°06-40.950 FS-PB Soulies et a. c/Syndicat l'Union des opticiens. "Cette décision est à la fois une confirmation et une évolution qui vient compléter le droit de la gestion des compétences", analyse Jean-Pierre Willems, juriste en droit social et consultant en ressources humaines. Il répond aux questions de L'AEF.

L'AEF. En quoi cet arrêt est-il une confirmation?

Jean-Pierre Willems. La Cour de cassation a affirmé très tôt, dès l'arrêt Expovit du 25 février 1992, que l'entreprise est soumise, en vertu de l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail, à une obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leurs emplois. Cette décision a été prise sur le fondement de l'article 1134 du Code civil et avant même que l'obligation d'adaptation n'intègre le Code du travail.

Certaines entreprises y ont vu une création ex nihilo de la Cour de cassation et ont reproché à la Cour de disposer de manière générale, et ainsi de se substituer à la loi. Cet argument a été rejeté, les juges affirmant qu'ils ne faisaient que constater une obligation incluse dans le contrat de travail lui-même (Cass. Soc., 13 février 2001, n°98-45.464).

De la même façon, si la décision du 23 octobre 2007 se réfère à un article du Code du travail qui n'était pas en vigueur au moment des faits, ce n'est pas en faisant jouer rétroactivement le texte mais en postulant que celui-ci ne fait que traduire une obligation incluse dans le contrat de travail. En d'autres termes, l'article L. 930-1 du Code du travail ne serait qu'un rappel pédagogique d'une obligation qu'il ne créé pas car inhérente à la nature même du contrat de travail.

L'AEF. A-t-on d'autres exemples de création d'une obligation contractuelle ?

Jean-Pierre Willems. Oui. En matière de sécurité, la Cour de cassation, dès 2002 avec l'arrêt Everite, a soumis les entreprises à une obligation de sécurité de résultat incluse dans le contrat de travail. Cette jurisprudence a été constamment confirmée depuis, notamment dans l'arrêt de la Cour de Cassation, Chambre sociale du 13 décembre 2006, n°05-44.580 FS-PB Sté Valentin traiteur c/Fargeot.

L'AEF. Qu'est-ce qui fonde la création d'obligations contractuelles?

Jean-Pierre Willems. Essentiellement le pouvoir de direction. L'employeur a la maîtrise du contenu des emplois, de la stratégie de l'entreprise, de son organisation, etc. Le travail salarié demeure juridiquement un travail subordonné, c'est-à-dire un travail prescrit à la fois dans ses objectifs et dans ses modalités. De ce fait, la nature même du contrat de travail plaçant le salarié sous la responsabilité de l'employeur implique que ce soit l'entreprise qui assume, en premier lieu, une obligation de maintien des compétences et de garantie de la sécurité des salariés.

L'AEF. L'employabilité est-elle donc une responsabilité exclusive de l'entreprise?

Jean-Pierre Willems. Non. L'entreprise a une responsabilité première mais le contrat de travail est un contrat avec des obligations réciproques. Dès lors que l'employeur fournit les moyens de l'adaptation, ou de la sécurité, le salarié se doit de s'en saisir et de les utiliser. Les juges ont la même sévérité que vis-à-vis des entreprises pour les salariés qui refusent des formations, ne font pas d'effort d'adaptation ou ne respectent pas les règles de sécurité. La responsabilité est donc partagée mais elle part en premier lieu de l'entreprise, ce qui est dans la nature du contrat de travail.

L'AEF. Contrairement à ce que certains craignaient, le DIF n'a donc pas inversé la responsabilité de l'initiative en matière de formation?

Jean-Pierre Willems. Non. L'initiative n'est pas un critère pertinent d'identification du DIF. C'est l'accord entre l'entreprise et le salarié qui permet de caractériser le DIF. Le salarié peut prendre l'initiative de demander à suivre une formation dans le cadre du plan ou du CIF. Ce n'est pas la demande qui est le critère pertinent mais la nature de la décision. C'est ce qui permet aux entreprises de faire des propositions aux salariés pour l'utilisation de leur DIF: cette initiative ne fait pas obstacle à l'utilisation du DIF, dès lors qu'il y a accord.

L'AEF. Doit-on conclure de la décision du 23 octobre 2007 de la Cour de cassation que l'entreprise est soumise à une obligation générale de formation?

Jean-Pierre Willems. Non, ce n'est pas le sens de la décision. Les juges condamnent l'employeur qui ne s'inquiète pas du risque d'obsolescence des compétences des salariés. La finalité, pas le moyen utilisé. L'entreprise aurait pu prouver qu'elle avait permis une évolution des compétences par d'autres moyens que la formation. En l'occurrence, faute de traçabilité, les juges ne retiennent que les actions de formations suivies. On ne peut que conseiller aux entreprises d'élargir la traçabilité et de faire évoluer leurs plans de formation vers des "plans de professionnalisation" dans lequel n'apparaissent pas uniquement les formations mais également les autres actions mises en oeuvre pour l'évolution des compétences des salariés: polyvalence, tutorat, parrainage, enrichissement des activités, etc.

L'AEF. Quelles sont les limites de la responsabilité de l'employeur en matière de gestion des compétences?

Jean-Pierre Willems. L'article L. 930-1 du Code du travail tel que résultant de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social vise l'obligation d'adaptation au poste et la capacité à occuper un emploi. L'article L. 932-2 auquel il s'est substitué ne portait que sur l'adaptation des salariés au poste de travail et l'évolution de leurs emplois. L'évolution de la terminologie traduit une extension du champ de responsabilité qui est dorénavant double: tant que le salarié est présent dans l'entreprise, la référence est l'emploi occupé. Si l'entreprise envisage la rupture du contrat de travail, la référence est le même type d'emploi sur le marché du travail. À l'employabilité interne en cours de contrat succède l'employabilité externe lorsque le contrat prend fin.

L'AEF. Que recouvre aujourd'hui le "droit de la compétence"?

Jean-Pierre Willems. Il recouvre deux constructions jurisprudentielles: l'obligation d'adaptation telle que consacrée par l'arrêt du 23 octobre 2007 et les conditions posées par les tribunaux en matière d'appréciation de l'insuffisance professionnelle du salarié. De multiples arrêts, depuis 2002 notamment, ne permettent à l'employeur de reprocher un défaut de compétence que s'il est imputable au salarié et ne vient ni d'objectifs hors d'atteinte, ni de la situation du marché ou de l'environnement, ni de carences dans les moyens fournis par l'entreprise, ni d'un défaut d'accompagnement du salarié en matière d'évolution des compétences. Le contrôle est donc à la fois très précis et très rigoureux.

Ces deux constructions sont complétées par deux textes de référence: l'article L. 930-1 du Code du travail, qui rappelle l'obligation individuelle incluse dans chaque contrat de travail de gérer les compétences et l'employabilité des salariés, et l'article L. 320-2 qui impose une négociation triennale en matière de GPEC et de mesures d'accompagnement, dont la formation. C'est un ensemble d'une grande cohérence qui est dorénavant en place et qui a comme conséquence pratique qu'une entreprise ne peut prendre de décision négative concernant l'emploi ou la compétence d'un salarié (qu'il s'agisse d'un licenciement ou d'une moindre rémunération pour performance insuffisante), que si elle a elle-même satisfait à ses obligations.

 

29/02/2008

Interview AEF - Accord du 11 janvier 2008

L'accord sur la modernisation du marché du travail "pose des bases pour la construction d'un statut social de l'actif" (Jean-Pierre Willems)

Jean-Pierre Willems

Le marché du travail est-il vraiment modernisé par l'accord du 11 janvier 2008? "Les négociateurs avaient fixé la barre haut: poser les fondements d'un meilleur fonctionnement du marché du travail autour d'une flexi-sécurité à la française. En clair, des ruptures de contrat de travail facilitées contre de meilleures garanties sociales pour accompagner la mobilité du salarié", analyse Jean-Pierre Willems, consultant en droit social et en ressources humaines. "L'objectif est-il atteint? Au vu du contenu de l'accord, on peut acter que le premier pas est fait mais qu'il reste encore du chemin." Jean-Pierre Willems répond aux questions de L'AEF.

L'AEF. L'accord sur la modernisation du marché du travail est-il un accord "cadre" qui pose des principes et renvoie à des négociations, ou bien contient-il des dispositions véritablement applicables?

Jean-Pierre Willems. La quasi-totalité des dispositions de l'accord renvoient soit aux pouvoirs publics, soit aux négociations interprofessionnelles à venir (assurance-chômage, formation professionnelle…), soit aux négociations de branche. Mais il serait restrictif de considérer qu'il ne s'agit que de pétitions de principes dénuées de portée propre. Le texte a valeur d'accord, il fixe des objectifs à atteindre, il prend des engagements et permet de donner le sens des réformes à venir. Si l'on voulait une référence juridique, on pourrait dire qu'il s'agit d'un préambule qui va structurer toute une série de textes. Et l'on sait la portée que les juges confèrent aux préambules, à commencer par celui de la Constitution.

L'AEF. Est-il possible d'illustrer cette portée pratique du texte?

Jean-Pierre Willems. À deux reprises, le texte insiste sur le rôle déterminant de l'organisation du travail en matière de développement des compétences et de qualification des salariés (article 6) et d'emploi des seniors (article 9). On pourrait voir là, couplé à la jurisprudence récente de la Cour de cassation sur l'obligation pour l'entreprise de maintenir l'employabilité des salariés (Cass. Soc., 23 octobre 2007), un risque juridique certain pour les entreprises qui font le choix de créer des postes de travail monotâches ou pauvres en contenu. Cette affirmation pourrait signer l'acte de décès d'une certaine forme de taylorisation.

L'AEF. Les possibilités de rupture du contrat de travail sont-elles véritablement assouplies par l'accord?

Jean-Pierre Willems. Trois dispositions concernent l'assouplissement des ruptures: les durées des périodes d'essai, la rupture conventionnelle et le CDD (contrat à durée déterminée) de projet. Concernant les périodes d'essai, il sera nécessaire de renégocier les conventions collectives (plus de 300!) qui souvent prévoient des périodes plus courtes. L'effet me paraît donc limité. Concernant la rupture conventionnelle, elle existe déjà et constitue le mode de rupture majoritaire des CDD, notamment des contrats en alternance. La nouveauté est qu'elle sera assortie d'indemnités et ouvrira droit à l'assurance-chômage. Elle devrait donc réduire, c'est l'objectif, les "faux licenciements transactionnels". Il s'agit essentiellement d'une mise en conformité du droit avec les faits.


Quant au CDD de projet, il ne s'agit que d'un motif supplémentaire de recours et il faut souligner que les CDD de longue durée constituent des contrats qui ne placent pas le salarié dans une situation défavorable (on pourrait prendre l'exemple des sportifs professionnels), le licenciement économique étant impossible, ainsi que tout autre licenciement, sauf faute grave. Et en cas de rupture injustifiée, le salarié peut prétendre à l'intégralité des salaires en jeu, soit jusqu'à trois ans. Il n'est pas certain, donc, que ce contrat limite les risques juridiques pour les entreprises.

Au chapitre des ruptures, notons tout de même que l'accord met un point final à tout projet de contrat type CNE (contrat nouvelles embauches) ou CPE (contrat premières embauches) en rappelant l'exigence de la convention de l'OIT (Organisation internationale du travail), à savoir que tout licenciement soit justifié.

L'AEF. Qu'en est-il des contreparties à ces assouplissements sur les ruptures?

Jean-Pierre Willems. L'innovation majeure du texte, celle qui répond le mieux à l'objectif de sécurisation des parcours professionnels, est la portabilité. Poser le principe que des droits issus du contrat de travail peuvent survivre au contrat et continuer à bénéficier au salarié constitue une avancée majeure, comme celle de considérer que les moyens de formation des salariés et des demandeurs d'emploi doivent être articulés et non juxtaposés.

L'AEF. Comment se traduit en pratique la portabilité?



Jean-Pierre Willems. Le modèle est manifestement ce qui a été négocié dans la branche du travail temporaire: la possibilité d'avoir une prévoyance entre deux missions et de pouvoir bénéficier d'un accès à la formation entre deux missions pour les travailleurs intérimaires. La prolongation de la prévoyance au-delà du contrat de travail, couplée à la possibilité de bénéficier du DIF (droit individuel à la formation) au-delà du contrat, créé pour les salariés un statut social qui n'est plus enfermé dans les bornes du contrat. À lui seul, ce principe justifiait, me semble-t-il, la signature du texte par les organisations syndicales.

L'AEF. Pour le DIF, est-ce le passage d'un droit attaché au contrat de travail à un droit personnel?

Jean-Pierre Willems. Non, pas tout à fait. Le DIF demeure acquis dans le cadre du contrat, c'est son utilisation qui est élargie. Il y aura passage à un droit personnel quand toute personne en activité, quel que soit son statut, pourra capitaliser 20 heures de formation par an. Par contre, il s'agit pour les entreprises d'un début de traduction financière des crédits d'heure acquis au titre du DIF. Tout salarié ayant vocation à quitter l'entreprise un jour, il va devenir nécessaire de provisionner les heures capitalisées au titre du DIF. Voilà qui devrait sérieusement "booster" la mise en oeuvre du DIF, même si le risque financier demeure limité (0,5% de la masse salariale pour 20 heures par an, proratisé en fonction du turnover).

L'AEF. Quel bilan final tirer de cet accord?

Jean-Pierre Willems. Il s'agit d'un vrai accord dans la mesure où chacune des parties peut considérer qu'elle a fait des concessions. S'il n'est pas "révolutionnaire" et ne réglera sans doute pas à lui seul la question de la flexi-sécurité, il pose des bases saines pour la construction d'un statut social de l'actif qui ne soit pas exclusivement lié à l'existence d'un contrat de travail.

 

La suppression de l'obligation légale (Entreprise et Carrières)

La suppression de l'obligation légale était envisagée par l'ANI du 5 décembre 2003, une négociation devant aborder la question du passage d'une obligation fiscale à une obligation conventionnelle. Cette suppression de l'obligation légale ne signifie évidemment pas la fin de toute obligation de financement de la formation mais le passage à un véritable dispositif de gestion paritaire.

L'interview donnée à Entreprise et Carrières explique pourquoi la suppression de l'obligation légale peut être envisagée et quelles seraient ses conséquences.

InterviewEntrepriseetCarrièreSuppresiondel'obligatiolégal...