23/06/2009
C'est écrit où ?
La question est récurrente. Lorsque j'annonce à un client qu'il est possible de prendre telle décision ou d'engager telle action, le besoin de sécurité submergeant et irrépréssible qui caractérise nos sociétés occidentales reprend le dessus : "vous êtes certain que c'est possible ? mais c'est écrit où ? vous avez un texte qui confirme ce que vous dites ?".
Oui, bien sur, et non, bien sur. Non car comment imaginer qu'il pourait y avoir un texte qui liste, ou pire autorise, chacune de nos actions. Oui bien sur car, à l'époque où l'on avait pleinement conscience du fait que le droit est de la littérature, c'est-à-dire au 18ème siècle, on s'attachait à fixer les principes dans une langue claire. Le texte en question est l'article 5, pas le plus souvent cité, de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen : "La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.". Le principe est la liberté et non l'interdiction. Inutile donc de chercher les textes indiquant que l'on peut : il faut plutôt se demander quel texte interdit, si tel est le cas. En réalité, n'est pas juriste celui qui se pose la question de savoir quel texte autorise : celui-là relève du juriste tel que peint par Arcimboldo.
Alors évitez de poser la question : "Quel texte m'y autorise ?" et demandez-vous plutôt si vous avez un doute : "Quel texte me l'interdit ?". Ensuite ? si c'est écrit nulle part, foncez !
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : droit, management, juriste, loi, déclaration des droits de l'homme
22/06/2009
Légalité intelligente
Fête de la musique, même à Paris il y a des Bodegas et des bandas. Celle-ci met de l'ambiance dans le quartier Saint-Paul. Un instrument attire mon attention : sur le cuivre un sticker avec la mention "Légalité intelligente" ! Photo et réflexions : qu'est-ce qu'une légalité intelligente ? sans doute une légalité non envahissante, qui ne régit que le strictement nécessaire (et non qui prétend tout régler de nos vies), qui est synthétique et très travaillée (faire chaque loi comme si l'on rédigeait la déclaration des droits de l'homme pourrait être la consigne donnée au législateur), qui est élaborée à partir de cas qu'elle généralise car telle est sa fonction (et non une loi pour chaque cas) et qui n'est pas modifiée avant que d'être appliquée. Soit à peu près systématiquement l'inverse de ce que font nos législateurs depuis plusieurs décennies.
00:30 Publié dans DES IDEES COMME CA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fête de la musique, loi, législation, ressources humaines, travail, emploi
17/06/2009
Le temps des bilans
Le législateur a créé le bilan de compétences, qui devait permettre au salarié de disposer d’un véritable droit à l’orientation, ce qui aurait notamment supposé que le bilan n’oscille pas entre horoscope et cartographie des goûts personnels voire miroir de l’âme du jour. Les partenaires sociaux ont créé l’entretien professionnel, qui devait permettre à l’employeur de livrer au salarié un diagnostic prévisionnel sur son emploi et sa situation dans l’entreprise, ce qui aurait supposé qu’il ne soit pas absorbé par l’évaluation des performances et ne se résume pas à un recueil de souhaits des salariés. Les partenaires sociaux viennent de créer, ou d’essayer de créer du fait de l’opposition de trois syndicats à l’ANI du 3 mars 2009, le bilan d’étape professionnels. Ce bilan, qui ne peut être réalisé par la hiérarchie directe, doit permettre tous les cinq ans à l’employeur et au salarié d’envisager l’avenir professionnel du salarié au sein de l’entreprise. Le projet de loi de réforme de la formation professionnelle s’est emparé du bilan d’étape professionnel pour en poser les fondements, le contenu devant être fixé par décret. Emoi des partenaires sociaux qui s’écrient : le bilan est à nous, c’est nous qui devons le définir. Mais les mois passent et la négociation sur ce sujet n’a guère avancé après l’échec de début mars.
Entretien professionnel, bilan de compétences, bilan d’étape professionnel, nous sommes donc dans le temps des bilans pour, comme dirait un homme politique, trouver dans le passé les racines de l’avenir. Quelle cohérence entre ces trois actions ? elle n’est pas difficile à établir : l’entretien relève de la hiérarchie directe et envisage la professionnalisation dans le cadre de la fonction – le bilan d’étape professionnel relève de l’entreprise, mais pas de la hiérarchie directe, et envisage la professionnalisation dans le cadre de l’entreprise – le bilan de compétences ne relève pas de l’entreprise et envisage la professionnalisation au-delà de l’entreprise. Peut être le temps est-il venu d’acter ces distinctions et de repenser le contenu de ces trois actions. Le temps du passage à l’acte en quelque sorte.
00:05 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : formation professionnelle, réforme, bilan d'étape professionnel, bilan de compétences, entretien professionnel, ani
16/06/2009
Déformation initiale
En cas de licenciement pour motif économique, les entreprises sont tenues de rechercher un reclassement pour les salariés. Cette recherche peut conduire l’employeur à proposer une formation permettant le reclassement du salarié. Pour fixer les limites de cette obligation, la Cour de cassation use de la formule suivante : « Si l’employeur est tenu de fournir au salarié une formation permettant son reclassement, il n’est pas tenu de lui fournir la formation initiale qui lui fait défaut » (en dernier lieu : Cass. Soc., 10 mars 2009). Pour les juges, fonctionnaires passant des concours à l’issue de formations sanctionnées par des diplômes, le défaut de formation initiale est donc un handicap que le salarié subira toute sa vie durant, et que l’employeur n’a pas à combler. Déformation initiale de ceux pour qui la formation initiale est tout ?
Les juges sont des femmes et des hommes de culture, n’en doutons pas. Peut être peut-on attirer leur attention sur le fait que la formation initiale n’est pas tout à travers quelques exemples : celui d’Yves Tanguy notamment qui appris la peinture…en peignant et en regardant autour de lui. Alors peut être pourront-ils envisager que la compétence s’acquiert par d’autres voies que la formation initiale et que renvoyer l’individu à sa formation initiale est une bien sommaire manière de mettre en cases ce qui n’est guère fait pour y entrer : la personne humaine.
00:24 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cour de cassation, licenciement économique, obligation de reclassement, formation, yves tanguy
10/06/2009
Déraisonnable
La Cour de cassation vient, dans une décision du 4 juin 2009, de juger déraisonnable une période d'essai d'un an prévue par la Convention collective nationale du Crédit Agricole. La caisse qui avait recruté un chargé d'affaires, n'avait fait qu'appliquer les dispositions conventionnelles qui prévoyaient pour cette fonction une période de stage d'un an, tenant lieu d'essai. La légitimité de la pratique paraissait donc établie : pas tant que cela d'après les juges. Une durée d'essai d'un an n'est pas raisonnable au regard des exigences de la convention n° 148 de l'Organisation Internationale du Travail qui prévoit que la période d'essai doit avoir une durée raisonnable.
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : période d'essai, jurisprudence, cour de cassation, crédit agricole
09/06/2009
Le droit fragmenté
Le 19 mai 2009 a été signé un avenant à l’ANI du 11 janvier 2008 qui créé la rupture conventionnelle. Cet avenant précise un point qui fait débat et vient compléter le PV d’interprétation établi en janvier : lors de la rupture conventionnelle, l’indemnité qui est due au salarié est l’indemnité légale de licenciement ou l’indemnité conventionnelle de licenciement si elle est plus favorable ce qui n’est pas très compliqué avec une indemnité légale fixée à 1/5ème de mois par année d’ancienneté, soit 1 mois de salaire par tranche de cinq ans.
Ce texte qui clarifie un point litigieux de la rupture conventionnelle, est toutefois la source d’un droit fragmenté. Or, si la fragmentation peut trouver sa place dans l’art, comme le pensait Novalis et comme le montre Anna Toscana dont les photos recadrent et recréent villes et statues, elle est peu opportune en droit.
En effet, les signataires de l’ANI du 19 mai 2009 ont prévu que cette disposition ne s’appliquerait qu’aux ruptures conventionnelles postérieures à la signature de cet accord, ce qui peut se comprendre en terme de sécurité juridique mais beaucoup moins si l’on affirme qu’il ne s’agit que de clarifier une intention qui existait déjà en janvier 2008 et figurait dans le texte initial. Et par ailleurs, l’ANI du 19 mai 2009 ne sera applicable qu’après son extension, qui pourrait d’ailleurs être la véritable date de l’obligation pour les entreprises, et ne concernera que les salariés des entreprises du commerce, de l’industrie et des services, à l’exclusion des secteurs de l’économie sociale, des professions libérales et de l’agriculture, et plus largement de toutes les professions non représentées par le MEDEF, la CGPME et l’UPA. L’exclusion concernera donc environ 30 % de salariés, qui relèvent de la seule loi et non des ANI, sachant que la loi ne prévoit que le versement de l’indemnité légale. Cette fragmentation du droit, qui contribue à son illisibilité et au final à son ineffectivité, conduit à constater une fois de plus que si un principe peut souffrir exception, à multiplier les exceptions on détruit le principe.
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rupture conventionnelle, ani, indemnité de licenciement, contrat de travail, droit du travail
05/06/2009
Dans le rouge
L'entreprise a toujours connu une croissance à deux chiffres, supérieure à celle de son secteur, depuis au moins 10 ans. Il s'agit d'une belle réussite. Elle est sortie récemment du capitalisme totalement familial pour se donner les moyens d'investir. Prévenez David Vincent, les investisseurs sont déjà là ! et cela modifie un peu la donne : l'action a baissé, le dirigeant s'en émeut. Il en est même catastrophé car l'action ne reflète plus la valeur de son entreprise. Je lui dis que toutes les actions ont baissé, mais évidemment l'ennui du voisin ne console pas du sien. Je lui demande comment va l'activité. Il me répond désespéré : on est dans le rouge !
00:47 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, économie, licenciements, crise financière, plan de sauvegarde
04/06/2009
Enfantin
Le référentiel a été publié au mois de mai 2009. Il comporte dix domaines de compétences :
Agir de manière éthique et responsable ; Maîtriser la communication orale dans son contexte professionnel ; Maîtriser les connaissances métier et avoir une bonne culture générale ; Concevoir et mettre en œuvre ses activités ; Organiser le travail et son environnement de travail ; Prendre en compte la diversité des interlocuteurs ; Evaluer les résultats de son activité ; Maîtriser les TICE ; Travailler en équipe et coopérer avec les partenaires ; Se former et innover notamment par l’analyse et le partage de ses pratiques.
Si les formulations ont été, légèrement, revues pour généraliser les compétences, il n’en reste pas moins que ces dix domaines de compétences pourraient constituer les domaines de référence pour toute activité. A charge ensuite de donner un contenu contextualisé et une traduction concrète en fonction des métiers. Mais de quel métier s’agit-il ? de celui d’enseignant d’école maternelle. Après avoir brocardé l’Education nationale pour son incapacité à définir un référentiel de compétences pour ses enseignants (voir chronique du 20 avril dernier), il convient de saluer ce référentiel qui pourrait utilement servir de base à tout référentiel de compétences.
Me revient cette anecdote de Roland Penrose à propos de son fils Anthony qui s'écria en voyant le tableau de sa mère, Lee Miller, peint par Picasso : "Maman !". En l'on se dit que lorsque l'on est capable de peindre pour les enfants, on peut le faire pour les adultes. La maxime vaut sans aucun doute pour la formation. La définition d'enfantin ? capacité à produire, véritablement, en jouant, véritablement.
15:49 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : référentiel, compétence, education nationale, ingenierie de formation, enseignant, picasso, lee miller
30/05/2009
Un peu de lecture pour le week-end
Week-end de Pentecôte. Travail ou pas ? les jardins de Chaumont sont une belle destination. Fêter l'anniversaire d'un ami un beau prétexte, mais en faut-il, pour prolonger le week-end. Pour ceux qui passent par ce blog, un peu de lecture : une analyse du projet de loi sur la formation professionnelle publiée dans la Semaine Juridique Social. SemaineJuridiqueSocial.pdf
On peut adopter la position de la Liseuse.
« Les cavales qui m'emportent, m'ont entraîné Aussi loin que mon cœur en formait le désir, Quand, en me conduisant, elles m'ont dirigé Sur la voie renommée de la Divinité, Qui, de par les cités, porte l'homme qui sait. J'en ai suivi le cours; sur elles m'ont porté, Attelés à mon char, les sagaces coursiers. Des jeunes filles nous indiquaient le chemin. L'essieu brûlant des roues grinçait dans les moyeux, Jetant des cris de flûte. (Car, de chaque côté, Les deux cercles des roues rapidement tournaient), Cependant que déjà les filles du Soleil, Qui avaient délaissé les palais de la Nuit, Couraient vers la lumière en me faisant cortège, Écartant de la main les voiles qui masquaient L'éclat de leur visage. Là se dresse la porte Donnant sur les chemins de la Nuit et du Jour. Un linteau et un seuil de pierre la limitent.
Quant à la porte même, élevée vers le ciel, C'est une porte pleine, aux battants magnifiques, Et Diké aux nombreux châtiments en détient Les clefs, dans les deux sens contrôlant le passage Pour la séduire et la gagner, les jeunes filles Usèrent à son endroit de caressants propos, Afin d'habilement la persuader d'ôter, Rien qu'un petit instant, le verrou de la porte. La porte bascula, ouvrant un large espace Entre les deux battants, en faisant pivoter
Les gonds de bronze ciselé sur leurs paumelles Retenus par des clous et d'épaisses chevilles. C'est alors que, par là, tout droit, les jeunes filles Poussèrent à s'engouffrer le char et les cavales Sur la route déjà tracée par des ornières. La déesse avec bienveillance me reçut. Elle prit ma main droite en sa main et me dit :
Jeune homme, toi qui viens ici, accompagné De cochers immortels, portés par des cavales, Salut! Car ce n'est point une Moire ennemie, Qui t'a poussé sur cette voie (hors des sentiers Qu'on voit communément les hommes emprunter), Mais Thémis et Diké. Apprends donc toutes choses, Et aussi bien le cœur exempt de tremblement Propre à la vérité bellement circulaire, Que les opinions des mortels, dans lesquelles Il n'est rien qui soit vrai ni digne de crédit; Mais cependant aussi j'aurai soin de t'apprendre Comment il conviendrait que soient, quant à leur être, En toute vraisemblance, lesdites opinions, Qui toutes vont passant toujours. »
00:53 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : pentecôte, week-end, formation, travail, daphnée, apollon, parménide, lecture
29/05/2009
Ouvrir les yeux
En ces périodes de production industrielle des licenciements pour motif économique, il est permis de s’interroger sur une formule récurrente utilisée par la Cour de cassation en matière d’obligation de rechercher un reclassement avant de procéder au licenciement. Selon les juges, l’employeur doit proposer au salarié tout emploi disponible, dans la même catégorie ou dans une catégorie inférieure. Dans l’esprit du juge, il n’est même pas envisagé que le reclassement puisse s’effectuer sur une qualification supérieure. Belle méconnaissance de la réalité de l’emploi en France : nombre de salariés occupent aujourd’hui des emplois qui sont de qualification inférieure à leur qualification personnelle. En d’autres termes, nombre de salariés sont en capacité d’effectuer des activités d’un niveau supérieur à celles qu’ils exercent.
10:00 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : licenciement économique, crise, reclassement, cour de cassation, jurisprudence, salarié, licenciement
28/05/2009
Le silence des lois
Le Parlement vient d'annoncer que le projet de loi sur l'orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie ne serait pas examiné au mois de juin comme prévu mais au mieux en juillet et sans doute fin septembre. La loi annoncée pour le début d'année 2009 est donc bien partie pour n'être adoptée qu'en fin d'année. La faute à l'encombrement du calendrier parlementaire nous dit-on. Il est vrai qu'à faire une loi après chaque fait divers, on génère chez les députés un épuisement professionnel qui le dispute à l'insatisfaction du travail bâclé. Nietzsche remarquait déjà que la quantité d'informations que l'on demande à l'étudiant d'ingurgiter ne lui laisse guère le temps de penser.
00:05 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : réforme, formation professionnelle, orientation professionnelle, projet de loi, parlement
25/05/2009
La loi de l'improbabilité
En ces temps d'incertitude économique, plus encore qu'en d'autres temps, il est demandé à la prévision de nous rassurer et de chasser nos doutes. Quel temps fera-t-il demain ? quand repartira la croissance ? que nous dessine l'avenir ? les prévisionnistes de tout poil, de l'économiste mathématicien assis sur sa science à la voyante qui lit en vous mieux que vous même, ont de beaux jours devant eux (ce n'est pas une prévision). Avant de faire tourner les modèles mathématiques qui nous garantiront que cela ira mieux demain, ou pire comme le dirait l'OMS qui a déjà annoncé trois fois l'apocalypse au cours des douze derniers mois, prenons le temps d'une expérience.
Placez dans un chapeau 100 papiers numérotés de 1 à 100. Faites tirer un papier par une personne normalement rationnelle. Le 27. Demandez-lui quelle était la probabilité de tirer le 27 : 1 sur 100. Et de ne pas le tirer : 99 sur 100. Que dit-on d'un évènement qui a 99 chances sur 100 de se produire : qu'il est probable. Et de celui qui a 1 chance sur 100 : qu'il est improbable. Concluez-en qu'entre l'évènement probable et l'improbable, c'est ce dernier qui est survenu.
08:12 Publié dans DES IDEES COMME CA | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : mark brusse, improbable, prévision, gpec, ressources humaines
22/05/2009
Comment vous formez-vous ?
Je ne vais jamais en formation...sauf pour être formateur. Au cours du séminaire organisé jeudi 14 mai 2009 par Jean-Marie Luttringer sur l'apport de la jurisprudence au droit de la formation, je songeai soudainement que je n'allai jamais en formation. Mais que j'avais plaisir à avoir un échange avec Marie-Laure Morin, toulousaine et conseillère à la Cour de cassation (l'usage à la Cour est de dire conseiller même pour les femmes, mais bon, les usages en ce domaine...) et que cet échange excitait ma réflexion et mon désir de découverte, et qu'au final après quelques heures de débat, j'avais l'agréable sentiment d'avoir appris énormément et surtout de m'être ouvert de nouveaux champs de réflexion, avec de nouvelles et bien belles clés des champs. Echanges entre pairs, travail de réflexion, recherche et lecture des bons auteurs (ce qui est une autre manière d'échanger), travail de conceptualisation, mise en situation de production, analyse des productions réalisées....les manières de se former ne manquent pas et la conversation socratique comme mode pédagogique n'est pas vraiment une nouveauté. Ecire, ou peindre, c'est aussi une manière d'apprendre.
00:05 Publié dans PEDAGOGIES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : formation, apprentissage, pédagogie, expérience, fragonard
20/05/2009
La fausse peur du macramé
Lors de l'entrée en vigueur du DIF, et encore aujourd'hui, combien de fois ais-je entendu des responsables formation ou ressources humaines me dire : "Le DIF, aucun intérêt à le promouvoir pour récolter des demandes de formation en macramé". Le sous-entendu est double. D'une part les salariés sont incapables de s'intéresser à leur job et d'autre part tout salarié demeure un soixante-huitard qui rêve d'aller faire du macramé en Lozère ou au Larzac. Faut-il préciser la perplexité, au départ car ensuite ce fut plutôt de l'accablement puis de la colère, face à ces réactions qui témoignent, et c'est peut être le pire, d'un profond désintérêt pour le terrain et partant d'une grande méconnaissance des individus.
Après cinq ans de fonctionnement du DIF, les pratiques démentent largement la peur du macramé : l'essentiel des formations suivies en DIF concerne le métier du salarié ou les métiers de l'entreprise et les formations "exotiques" sont très marginales sinon inexistantes.
00:10 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dif, formation, macramé, compétence, insuffisance professionnelle, ressources humaines
19/05/2009
A nos représentants
La démocratie politique et la démocratie sociale, qui s'affrontent souvent ces temps-ci, ont ceci en commun qu'elles reposent sur la représentativité. J'avais eu l'occasion sur ce blog de constater qu'aux élections prud'homales de décembre 2008 le taux de participation avait été comparable à celui des élections politiques. La comparaison serait d'ailleurs encore moins flatteuse pour le politique s'il fallait comparer avec le taux de participation aux élections européennes. La publication par la CFDT du chiffre de ses adhérents en 2008 nous fournit une nouvelle occasion de comparer démocratie politique et sociale. Le nombre des adhérents de la CFDT en 2008 est de 814 000, sur 16 millions de salariés. Rappelons que l'UMP représente moins de 300 000 adhérents et le PS moins de 200 000. Ce qui signifie que les deux premiers partis de France ne représentent à eux deux qu'à peine plus de 50 % de la première organisation syndicale française. Et demeurent moins importants que la seconde, le CGT, qui revendique environ 600 000 adhérents.
Le sinistre Goebbels disait qu'un mensonge répété mille fois devenait une vérité. Le fait ( le jugement est effectivement présenté comme un fait) que les syndicats ne soient pas représentatifs a bien été martelés sur toutes les ondes, écrit dans tous les journaux. Ramené à la représentativité politique, qui doit se calculer sur un corps électoral d'environ 35 millions de citoyens pouvant voter, la représentativité syndicale est pourant correcte puisque le ration adhérents/population concernée est de l'ordre de 10 % pour l'adhésion syndicale alors qu'il n'est que de 2 % pour l'adhésion politique. Mais l'on continuera à denier aux partenaires sociaux une représentativité pourtant mieux assurée que celle des politiques qui hurlent au loup. Pour ne pas voir celui qui les guette ?
00:09 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cfdt, ump, parti socialiste, représentativité, adhérents, démocratie
18/05/2009
Du bon usage du matelas
A l'occasion des Trophées du DIF organisés le 19 mars dernier, DEMOS a réalisé une enquête auprès de plus de 1100 salariés pour mieux identifier leur connaissance du droit individuel à la formation et surtout l'usage qui en est fait. Il ressort de cette enquête que nombre de salariés n'utilisent pas le DIF...parce qu'ils le thésaurisent : "je garde mon crédit, on ne sait jamais", "je n'utilise pas mes heures, je pourrai en avoir besoin", "je peux peut être faire autre chose que ce qui m'est proposé", "je ne veux pas utiliser mon crédit pour n'importe quoi"...L'épargne l'emporte sur la consommation et la capitalisation sur l'utilisation. Or, le crédit DIF n'est pas un crédit d'argent mais de temps, et il s'appauvrit si on ne l'utilise pas. En effet, le compteur étant plafonné à 120 heures, il est nécessaire de consommer de manière régulière si l'on ne veut pas perdre des heures. En d'autres termes, c'est l'épargne qui fait perdre du crédit et non la consommation.
00:05 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : demos, dif, formation, épargne, rentier, crédit
15/05/2009
Visite à Freud
Le Musée de l'Hospice de la Comtesse, à Lille, présente jusqu'au 12 juillet une exposition intitulée Hypnos, images et inconscients en Europe (1900-1949). La découverte de l'inconscient, le pouvoir des rêves, la libération de la parole et des gestes, pas seulement en art, la circulation et fécondation des idées à partir de l'Europe centrale, creuset d'innovation et d'imaginaire, et jusqu'à Paris où les surréalistes, notamment, trouveront matière à s'emparer de l'inconscient pour donner corps aux mots d'ordre de Rimbaud "changer la vie" et de Marx "changer le monde" qui pour eux ne faisaient qu'un. Spirites, médiums, peintres, photographes, dessinateurs, écrivains, toutes les oeuvres exposées ont en commun d'avoir été emportées par la vague de la liberté.
00:05 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hypnos, lille, freud, lapsus, drtikol, ressources humaines
14/05/2009
L'AFPA à la pêche
Le législateur a parfois, mais si, de l'humour. Environ une fois par an. Après le choix du premier mai 2008 pour l'entrée en vigueur du nouveau code du travail, le projet de loi sur la formation professionnelle qui vient d'être présenté au Parlement retient la date du 1er avril 2010 pour le transfert des personnels de l'AFPA chargés de l'orientation professionnelle au sein de Pole Emploi. Nul doute que les salariés concernés, totalement opposés à la mesure et qui voient dans les premiers mois de fonctionnement de Pole Emploi des raisons supplémentaires de justifier leurs réticences, apprécieront à sa juste mesure le poisson annoncé.
11:38 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afpa, projet de loi, réforme, formation professionnelle, orientation, service public, emploi
13/05/2009
Vite et bien
L’artisan qui lira le titre de cette chronique pourra être choqué : vite et bien ne vont pas ensemble, le travailleur honnête associe depuis Lafontaine patience et longueur de temps. Le vite fait bien fait sent le petit malin qui bâcle, plus ou moins habilement, mais qui ne travaille pas vraiment. Le véritable labeur requiert du temps, dont la patine est la marque de la conscience et de la peine.
Et pourtant, Picasso, Masson, Pollock, Yves Klein, Matisse, Van Gogh,…
Le rapport au travail est depuis l’origine du salariat un rapport au temps, et demeure fondamentalement un contrôle du temps. Combien d’entreprises ont conclu avec leur encadrement des conventions de forfaits en jours, censées reposer sur l’autonomie des salariés dans l’organisation de leur temps de travail, sans rien changer à leurs pratiques manageriales de gestion des temps, des présences, et de mesure de l’investissement personnel par le temps passé. Le management par objectif n’est souvent qu’une cautère sur la jambe de bois du manager demeuré ancré dans le modèle industriel et taylorisé de la gestion des temps. Et l’on voit les comptes rendus d’activité, les fiches de temps, les outils de planification, etc. envahir l’espace, et le temps, des salariés. Ce paradoxe pourrait traduire l’impossibilité de dépasser l’oxymore du salarié subordonné et autonome. Il suffirait pourtant d’identifier les champs respectifs de la subordination et de l’autonomie. Le pouvoir de direction peut s'exercer sur la finalité et les moyens à utiliser (manières de faire) et laisser au salarié la liberté, et donc la responsabilité, de son temps. Tiens ? Liberté ? et si le véritable problème était dans l'insupportable que constitue la liberté d'autrui ? vite, des salariés libres et responsables.
Et pour finir, Malcolm de Chazal : "La pensée voyage à la vitesse du désir"
00:05 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : temps de travail, forfait en jours, cadres, autonomie, travail, artisan, vitesse
11/05/2009
Apprendre à désapprendre
Dans la chronique du 6 mai, Proust nous invitait à prendre du recul à partir de l’Odalisque d’Ingres et de l’Olympia de Manet, d’abord opposées par la critique avant de devenir sœurs dans l’excellence. Il constatait également que l’expérience sert rarement de leçon. Une découverte de ce week-end permet de se reposer la question : voyez-vous dans l'Odalisque et l'Olympia ci-dessous des horreurs ou des banalités ou bien de nouveaux chef d'oeuvres qui prendront place aux côtés des précédents ?
Julieth Mars Toussaint expose à la Galerie Guigon à Paris des toiles inspirées de chefs d’œuvre de la peinture que l’artiste se réapproprie avec une grande liberté qui n’exclut pas une totale fidélité. Manifestement, chez lui les leçons du passé sont assimilées. Elles ne conduisent ni à la reproduction ni à l’inhibition mais au contraire favorisent une liberté extrême qui s’exprime avec une force et une vigueur incroyables.
Julieth MARS TOUSSAINT dispose d'une solide formation historique et académique. Pour aller sur sa propre voie il a du apprendre à désapprendre ce qu'il savait.
Construction/Déconstruction/Reconstruction, voilà un chemin fécond pour la création. Dans les cursus de formation, on peut construire, c'est bien. Déconstruire est nécessaire mais s'en tenir à cela est désastreux. Reconstruire n'est pas possible si les deux étapes précédentes n'ont pas été respectées. Proust aurait aimé Julieth MARS TOUSSAINT.
Un détail pour conclure : le prénom de Julieth lui a été donnée par sa mère après qu'elle eut déjà perdu deux garçons avant ou à leur naissance. Un ancien consulté lui avait dit : donne à ton futur garçon un nom de fille, il ne mourra pas. Sa peinture est là pour nous prouver que Julieth MARS TOUSSAINT est vivant et bien vivant.
00:05 Publié dans PEDAGOGIES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : julieth mars toussaint, galerie, guigon, manet, ingres, odalisque, olympia, proust