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01/05/2013

Menteurs !

Non, non, non. Il ne s'agit pas d'un  blog consacré à DSK, Cahuzac, Guéant ou quelques autres qui démentent laborieusement ce dont on les accuse, tout en avouant en partie, mais tout de même pas trop. Non, ce n'est pas un débat sur le mensonge en politique et la question de savoir, ultime défense du compteur en Suisse, si une promesse électorale non tenu est un mensonge plus ou moins condamnable qu'une fraude fiscale. Non il ne s'agit pas de tout cela. Mais bon Dieu, de quoi alors ? juste d'une petite phrase que les avocats insèrent à la fin des transactions,  en jargonnant le plus possible, car cela fait sérieux, ou incompréhensible ce qui d'ailleurs revient au même.

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Nathalie Pirotte - Menteur/Menteur - 2008

Cette petite phrase dit en substance qu'en application de l'article 2044 du Code civil la transaction règle toutes les questions passées, présentes et à venir liées à l'exécution ou à la rupture du contrat de travail. Autrement dit, circulez il n'y a plus rien à voir, tout est réglé par le contrat et le juge n'est plus le bienvenu. Sauf que le juge s'invite souvent tout seul et n'a nul besoin d'être désiré pour intervenir. En l'occurence, la Cour de cassation refuse toute validité à de telles clauses et s'en tient au principe : la transaction ne règle que les litiges qu'elle vise expressément. Autrement dit, toutes les demandes portant sur des litiges qui ne sont pas précisément identifiés dans la transaction (avec les prétentions des parties et leurs concessions), sont recevables et ne peuvent se voir opposer la clause générale selon laquelle tous les litiges sont éteints. Que les juristes ne cherchent pas, il n'y a pas de manière de se protéger contre TOUT litige et le risque de contentieux est permanent. Ah si, il y a bien une protection contre les recours en justice : avoir respecté ses obligations. C'est bien plus efficace qu'une formule juridique dénuée de toute portée. Et cela évite de mentir.

Cour_de_cassation_civile_Chambre_sociale_24_avril_2013.pdf

23/04/2013

Coup d'essai

Chaque année, le stand SHOOT s'installe à l'entrée des rencontres photographiques d'Arles. Vous avez quatre essais pour atteindre le coeur de cible. Lorsque vous réussissez, la balle déclenche la prise de la photographie et vous voici figé à jamais dans la position du tireur debout. Un petit air rétro plane sur ce dispositif, surtout lorsque l'essai a lieu sous la blanche lumière du début d'après-midi dans le Sud-Est. Cette année là, contrairement aux années précédentes, les quatres balles s'inscrivirent quasiment au même endroit. L'essai sera renouvelé l'année prochaine.

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La Cour de cassation a rappelé à plusieurs reprises les règles qui régissent la rupture de la période d'essai (voir ici). Mais manifestement ses messages peinent à être entendus. Recruté au mois de mai, un salarié est absent pour maladie de juin à août, puis de nouveau à partir de mi-septembre. L'entreprise rompt sa période d'essai au cours de ce deuxième arrêt. Comme souvent, l'employeur confond l'absence d'obligation de motiver la rupture de la période d'essai et la possibilité de rompre pour tout motif. En réalité, un seul motif permet de rompre l'essai, c'est d'ailleurs pour cela que la motivation n'est pas obligatoire : le fait que le salarié ne fait pas l'affaire. L'employeur aurait au moins pu se souvenir que la maladie ne permettant pas d'apprécier les compétences du salarié, elle autorise la prolongation de la période d'essai. Cela lui aurait évité une décision qui n'était manifestement pas un coup de maître.

Cour de cassation 10 Avril 2013 - Essai.pdf

03/10/2012

La séparation des amis

C'est bien connu, c'est lorsque tout va bien que l'on se sépare. Vous êtes heureux dans votre couple ? divorcez ! vous partagez une amitié d'enfance ? renoncez-y ! vous vous plaisez dans votre travail ? allez voir ailleurs ! Vous aurez la bénédiction des magistrats pour ce faire. Tout empêtrés qu'ils sont dans leur appréhension de la rupture conventionnelle, les juges de Cours d'Appel nous délivrent quasi-unanimement le message selon lequel toute situation de litige entre l'employeur et le salarié interdit de recourir à la rupture par accord mutuel. Vous n'en pouvez plus de votre travail ? ne négociez pas une rupture conventionnelle vous dit le juge, démissionnez. Votre manager vous harcèle ? ne proposez pas au DRH de mettre fin à cette situation par une rupture conventionnelle, elle serait nulle. Vous venez de recevoir deux avertissements et vous trouvez que c'est trop ? ne proposez pas une séparation amiable, la démission vous tend les bras. On se demande parfois à travers quel prisme les juges appréhendent les relations de travail si seuls les bons amis peuvent faire le choix de se séparer en bénéficiant des avantages de la rupture conventionnelle.

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Les bons amis

Dans une décision du 16 juin 2012, la Cour d'appel de Versailles a ainsi déclarée nulle une rupture conventionnelle intervenue après que le salarié ait reçu deux avertissements. La Cour d'appel de Reims (16 mai 2012) a estimé qu'un litige en cours devant les Prud'hommes interdisait de se mettre d'accord pour rompre le contrat de travail. Et ainsi de suite. Seule la Cour d'appel de Montpellier (16 novembre 2011) a posé en principe que le litige n'était pas un obstacle à la décision commune de séparation. Une fois de plus, la lumière vient du Sud.

Il n'en reste pas moins qu'il serait urgent que la Cour de cassation fixe une doctrine claire. Qu'elle considère comme nulle toute rupture intervenue dans un contexte de litige, et c'est la petite mort programmée de la rupture conventionnelle. Qu'elle n'en fasse pas un principe mais s'attache uniquement à vérifier la validité du consentement donné par le salarié et nous aurons fait un pas de plus vers la reconnaissance que le salarié n'est pas un incapable majeur.

07/02/2012

Pas touche les congés !

La Cour de Justice des Communautés Européennes poursuit son travail d'harmonisation des droits des salariés au niveau européen. N'en déplaise à ceux qui ne voient dans l'Europe qu'une machine bureaucratique dont la boussole est constituée par la concurrence, le libre-échange et les marchés financiers, il se trouve quelques juges à  Luxembourg pour rappeler que l'Europe ce sont aussi des règles et garanties en matière sociale qui doivent bénéficier à tous les européens. Dans une affaire jugée le 24 janvier dernier (CJUE, aff. 282/10, Dominguez), la Cour rappelle que tout salarié doit bénéficier de 4 semaines de congés payés par an, et que ce droit n'est pas conditionné, dans les textes européens, par le fait d'avoir travaillé. Impossible donc de proratiser les congés payés d'un salarié qui, pendant la période de référence, a eu un congé maladie. Vous rentrez de congé ? prenez vos congés !

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Robert Doisneau - Congés payés

C'est déjà la CJUE qui avait rappelé que les congés maladie ne pouvaient faire perdre des jours de congés payés acquis et qu'il fallait les reporter au-delà de la période de maladie. Voici une nouvelle étape : les congés payés ne sont pas la contrepartie du travail mais un droit inaliénable auquel doit avoir accès tout salarié, quand bien même n'aurait-il pas travaillé. Il va donc falloir reparamétrer les logiciels de gestion de la paie et arrêter de proratiser les congés payés des salariés malades. Au passage, ceux qui persistent à proratiser les jours de RTT des salariés en forfait jour lorsqu'ils sont malades et que la Cour de cassation avait déjà rappelé à l'ordre, trouveront ici l'illustration que le droit a repos peut être indépendant du travail. Ce n'était pas ainsi que l'on raisonnait jusque-là, il va falloir s'y habituer.

10/07/2011

DIF et rupture du contrat de travail

Le droit étant de la littérature, le choix des mots est capital : "Ce qui se conçoit bien, s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément". Il faut bien constater que le législateur ne concevait qu'approximativement le DIF lorsqu'il a voté la loi de 2004 mais également celle de 2009. D'où quelques approximations qui ne facilitent guère sa mise en oeuvre. En matière de rupture du contrat de travail, les parlementaires ont fait le choix de donner la même appellation (portabilité) à l'utilisation du DIF avant la rupture du contrat et à son utilisation postérieurement à la rupture du contrat. C'est une erreur. Dans le premier cas il aurait fallu parler de solde des droits au DIF avant le départ du salarié, puisqu'il ne s'agit pas encore de portabilité mais de faire bénéficier le salarié de la possibilité d'user du DIF avant la fin du contrat. Dans le second cas, il s'agit véritablement de portabilité, que le législateur a fait le choix de préférer à la transférabilité (reprise du crédit par un nouvel employeur).

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Gilbert Garcin - La rupture - 1999

De même, indiquer que le salarié a droit au DIF en cas de faute grave mais qu'il doit présenter sa demande pendant le préavis n'est pas faire preuve d'une grande logique. Enfin, laisser croire que les OPCA paieront systématiquement le DIF portable en même temps que l'on demande à POLE EMPLOI de donner un avis sur la demande laisse songeur.

Sur tous ces sujets, vous trouverez ci-dessous un document de synthèse qui fait le point sur l'utilisation du DIF avant la rupture du contrat de travail ou après celle-ci en fonction des différents cas de rupture. Est également précisé que les entreprises doivent remettre dans tous les cas un certificat mentionnant les heures de DIF portable, même quand le salarié n'a pas droit à la portabilité puisqu'il ne peut appartenir à l'employeur de juger de l'ouverture, ou non, du droit à portabilité. Logique, mais peu évident en pratique pour le salarié qui, non informé sur les conditions mais uniquement sur le crédit, peu penser que son droit est ouvert. Bref, pour tenter d'y voir plus clair, un tableau de synthèse sur la rupture du contrat de travail et le DIF. Bonne lecture.

DIF ET RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL.pdf

28/03/2011

Yes Week-end !

Le garçon de café travaillait en semaine. Et cela lui convenait fort bien. Cela durait depuis dix ans. Et cela lui convenait fort bien. Son nouvel employeur lui demanda de venir travailler le dimanche. Cela ne lui convenait plus du tout. Et il ne vint pas. S'arrachant à sa condition de garçon de café tel que le décrit Sartre, il décide d'éprouver sa liberté et continue à travailler en semaine. Le licenciement pour faute grave ne tarde pas, ni le contentieux. La Cour d'appel donne raison à l'employeur : les horaires relèvent de l'autorité de l'employeur et un café est autorisé à ouvrir le dimanche, promu au rang de jour ordinaire. Ce raisonnement ne satisfait pas la Cour de cassation qui censure la décision : le garçon de café avait bien droit à son week-end.

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Qu'invoque la Cour pour se prononcer ? le fait que le salarié qui en a régulièrement bénéficié ne peut être privé du repos le dimanche. En d'autres termes, la Cour de cassation a considéré que la pratique ininterrompue du travail en semaine, bien que ne figurant pas dans le contrat, n'en était pas moins contractuelle. Et oui, le droit est ainsi fait : on trouve dans le contrat des informations non contractuelles (la mutuelle ou la convention collective par exemple) et en dehors du contrat des clauses contractuelles non écrites. Voilà qui ne facilite guère la lecture des contrats, mais permet de préserver ses week-ends. Yes !

 Travail du dimanche.pdf

14/03/2011

Le juge sinusoïdal

Edgar Faure, en bon centriste, a établi de manière définitive que ce n'est pas la girouette qui tourne mais le vent. Un vent d'Autan puissant a du souffler sur la Cour de cassation qui vient de modifier de manière spectaculaire sa position en matière de modification du contrat de travail. Jusqu'alors, le juge considérait que toute décision de l'employeur ayant un impact sur la rémunération (montant ou mode de calcul) supposait l'accord du salarié. Et notamment, le juge imposait que les objectifs, lorsqu'ils déterminaient une part de rémunération variable, soient fixés par accord entre l'employeur et le salarié, ce qui n'était pas nécessairement le cas lorsque les objectifs n'étaient utilisés que pour manager la performance, sans entrer dans la base de calcul de la rémunération.

Saisie par un salarié dont l'entreprise a révisé unilatéralement les objectifs qui servent à calculer sa rémunération, la Cour d'appel de Grenoble applique la jurisprudence de la Cour de cassation. A tort lui dit celle-ci qui établit une nouvelle règle : les objectifs relevant par principe du pouvoir de direction, ils sont fixés unilatéralement même lorsqu'ils impactent la rémunération. Les seules conditions sont d'informer le salarié en début de période de réalisation des objectifs et de fixer des objectifs réalistes. Tant pis pour la COur d'appel qui a raisonné de manière linéaire, alors que, branchée sur courant alternatif, la Cour de cassation produit des raisonnements en forme de sinusoïde.

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On ne peut trouver meilleur exemple pour illustrer que le juge décide absolument ce qu'il veut, et qu'ensuite il construit le raisonnement qui lui permet de justifier sa décision. En l'espèce, la décision aurait pu être exactement inverse avec la même rigueur juridique. Rappel que le droit n'est pas une science exacte mais de la littérature, qu'aucun contentieux n'est jamais gagné, et donc perdu, d'avance et qu'il faut parfois un certain flegme pour accueillir certaines décisions, lequel flegme est plus facile à pratiquer pour le commentateur que pour les parties concernées. Bonne semaine à tous.

Cass-08-44-977-remuneration-variable.pdf

17/02/2011

Toubon, tout faux

C'est souvent un cheval de bataille des syndicalistes qui y voient un acte de résistance. Il est vrai qu'Astérix a beaucoup façonné la mémoire collective et donc les comportements. Il s'agit de l'emploi du français dans l'entreprise. A l'appui, la loi Toubon de 1994  qui impose l'usage du français pour la rédaction du contrat de travail et tout document nécessaire au salarié pour l'exécution de son travail, notamment ceux qui comprennent une obligation. La Cour d'appel de Versailles a assuré la promotion de la loi Toubon en condamnant le 2 mars 2006 la société GE Medical Systems à 580 000 euros de dommages intérêts pour usage de documents en anglais. Visant à protéger à la fois la langue française et les salariés, la loi Toubon a choisi de prescrire les moyens et non le résultat et ce faisant, il est possible qu'elle ait tout faux en s'inscrivant dans cette tradition française de la prescription/sanction qui est décidément prégnante. Pour avoir une idée de la voie à suivre, on ne peut qu'inviter le législateur a aller faire un tour à la Prima de las lengas, ou Forom des langues, qui se tient tous les ans à Toulouse, et en 2011 le 29 mai prochain.

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Pour atteindre l'objectif de protéger les salariés contre un texte qu'ils comprennent peu ou mal, plutôt que d'imposer le français, ce qui ne garantit rien on en conviendra, il aurait été possible de poser la condition que toute entreprise doit s'assurer de la compréhension par les salariés des documents qu'elle leur transmet. Peu importe que les dits documents soient rédigés en français, anglais, chinois, arabe, wolof ou swaïli. Mais l'entreprise doit s'assurer que la langue utilisée est comprise par le salarié. Ce qui laisserait aux entreprises la possibilité d'utiliser toute langue, sous réserve de former les salariés à sa connaissance. Plutôt que des obligations fiscales désuètes qui n'obligent à rien, l'obligation de s'assurer d'une compétence garantit mieux la situation du salarié. A l'heure où l'on s'interroge sur la pratique de l'anglais en maternelle, il est curieux de s'assurer que dans l'entreprise seul le Français est usité. Imposer une langue unique pour la préserver plutôt que d'ouvrir la possibilité d'en apprendre plusieurs, c'est ce qui s'appelle agir à contre courant. Presque 20 ans plus tard, Toubon a toujours tout faux.

31/01/2011

Quand la GPEC sert à quelque chose

L'entreprise connaît une restructuration. Elle signe un accord de GPEC dont le but est de mettre en oeuvre le choix de la restructuration qui est présentée comme une obligation incontournable. En l'occurence, l'accord indique que les situations individuelles seront prises en considération et que les salariés qui le souhaitent seront accompagnés pour changer de fonction. Questionnée par l'employeur une salariée exprime son choix de ne pas en changer, de fonction. L'employeur ne s'y oppose pas, mais modifie  pourtant unilatéralement les fonctions de la salariée, avant de lui imposer la signature d'un avenant à son contrat de travail. Saisissant l'occasion ainsi fournie, la salariée quitte l'entreprise et prend acte de la rupture de son contrat de travail. Le Conseil des prud'hommes puis la Cour d'appel de Dijon lui donnent raison : l'employeur n'ayant pas respecté les termes de l'accord de GPEC qu'il a signé, il en résulte un comportement déloyal et une rupture du contrat de travail à ses torts exclusifs.

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Gael Chapo - Trahison n° 23 - 2006

La lecture des accords de GPEC laisse souvent dubitatif : condensé de déclarations d'intentions, de processus ressources humaines et d'actions manageriales, sa portée juridique n'est guère évidente. Relevant de la catégorie du droit mou, l'accord de GPEC fait souvent figure d'objet juridique non identifié. Rendons grâce au juge de transformer la prose gestionnaire en engagement juridique sanctionnable. Et de la manière la plus spectaculaire qui soit puisque le manquement aux engagements de l'accord permet à un salarié  de prendre acte de la rupture aux torts de l'employeur (dans le cas d'espèce, six mois de salaire sont attribués à la salariée). On imagine la situation si tous les salariés se mettent à rechercher dans les accords seniors, travailleurs handicapés, égalité professionnelle, GPEC donc et autres, les arguments qui leur permettront de rejouer cette version moderne de "Prends l'oseille et tire toi" ou si l'on préfère le vénérable Jean de Lafontaine : "Vous avez signé, et bien exécutez maintenant". La semaine ne sera pas de trop pour que chacun se plonge dans les dits accords pour voir ce qu'ils recèlent d'opportunité. Bonne lecture !

accordGPEC-CourAppelDijon.pdf

18/01/2011

Pas d'essai pour la neige

L'hôtelier est rompu à l'usage des contrats saisonniers. Il en a encore conclu plusieurs pour la saison, dont un avec une serveuse embauchée le 1er janvier avec une période d'essai de dix jours. Le 8 janvier, la neige ayant déserté, et les clients avec, la station de sports d'hiver, il est mis fin par l'hôtelier à la période d'essai. Tempête judiciaire s'en suit : la salariée conteste la possibilité de rompre la période d'essai pour ce motif. Avec raison selon la Cour de cassation qui censure une décision qui n'est pas fondée sur un motif inhérent à la personne du salarié (Cass. soc., 10 décembre 2010). Tempête sous le crâne de l'employeur qui se demande comment il convenait de s'y prendre et pourquoi il ne peut pas librement rompre une période d'essai. Laissons passer la tempête de Turner avant de lui répondre.

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William Turner - Tempête de neige - 1842

Pourquoi n'est-il pas possible de rompre une période d'essai pour absence de neige ? parce que la période d'essai a pour seule finalité d'apprécier les compétences du salarié (C. trav., art. L. 1221-20) et qu'elle ne peut être rompue que pour ce motif à l'exclusion de tout autre. D'ailleurs, les règles relatives au licenciement ne peuvent s'appliquer pendant une période d'essai (C. trav., art. L. 1231-1).

Que convenait-il de faire ? si l'employeur voulait gérer l'aléa de la neige, il ne devait pas prévoir de période d'essai. Il aurait ainsi pu licencier pour un motif économique, au bout de huit jours. Ou bien, il devait proposer un CDD de courte durée, renouvelable. Ou encore, il devait attendre la fin de la période d'essai avant de licencier. Mais prévoir une période d'essai, signifie que l'on garantit l'emploi du salarié pendant cette période, sauf si son comportement s'avérait inapproprié avant le terme même de la période d'essai. Et voilà que l'on découvre que la période d'essai, loin d'être la période de totale précarité que l'on imagine souvent, est en fait une garantie d'emploi stable pendant l'essai pour pouvoir apprécier les compétences du salarié. En clair, avec la période d'essai, l'employeur annonce qu'il va prendre son temps pour apprécier le salarié et sécurise le contrat pendant ce laps de temps. Il n'est pas certain que cette définition juridique de l'essai soit exactement celle qui prédomine dans les représentations. C'est pourtant celle que les tribunaux semblent déterminés à faire prévaloir.

21/10/2010

Rupture conventionnelle, pas de bluff !

La rupture conventionnelle du contrat de travail connaît un succès croissant depuis sa création en juin 2008. Nous serions désormais sur une base de 150 000 ruptures conventionnelles par an. Contrairement aux affirmations, pas toujours désintéressées, de certains avocats, la rupture conventionnelle constitue bien la modalité de rupture du contrat de travail qui offre la plus grande sécurité juridique c'est-à-dire qui prête le moins le flanc à la contestation. C'est donc elle qu'il faut privilégier si l'on préfère un bon accord à un mauvais procès. Encore faut-il réunir deux conditions pour la sécuriser : traiter l'intégralité des droits du salarié et l'informer complètement sur sa situation post-rupture.

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MarieJnn - Rupture

Pour les droits du salarié, on prendra soin de passer en revue tous les droits en cours ou à venir et de déterminer leur mode de règlement : salaires dus, jours de RTT, jours de congés payés, utilisation ou non du DIF avant la rupture, commissions à venir, primes venant à échéance après la rupture (proratisation ou non), versements ultérieurs le cas échéant de l'intéressement et de la participation, clause de non concurrence, dispense ou pas de travail avant la fin du contrat, etc. Pour ce faire, il sera nécessaire d'établir un contrat listant tout ces points et de ne pas se contenter du formulaire de l'administration qui sert à l'enregistrement mais pas à fixer toutes les conditions de la rupture.

Pour l'information complète du salarié, il est nécessaire de l'informer sur ses droits dans le cadre de la rupture : traitement fiscal et social des sommes versées à l'occasion de la rupture, délai de carence pour l'assurance-chômage, montant des indemnités d'assurance-chômage, impact de la rupture sur d'autres droits du salarié (notamment en matière d'assurance sur les crédits immobiliers : selon que le contrat vise une indemnisation par l'assurance chômage ou une perte d 'emploi due à un licenciement, la garantie pourra jouer ou non).

Dès lors que toutes ces conditions sont respectées, et que l'on conduit donc une négociation globale et loyale, la rupture conventionnelle constituera bien le mode de rupture du contrat de travail le plus sécurisé...quant à la rupture. Car rien n'exclut qu'un salarié saisisse les prud'hommes pour demander le paiement d'heures supplémentaires ou la réparation d'un préjudice moral du fait d'un harcèlement. Mais un contrat qui interdirait au salarié tout recours concernant l'exécution et la rupture du contrat de travail, cela n'existe pas, et lorsque cela existe, c'est du bluff.

13/10/2010

Pas de motif, un seul motif

Le droit du travail oblige parfois l'employeur à motiver ses décisions, notamment en matière disciplinaire ou de licenciement. Mais ce principe n'est pas général et certaines décisions, qui pourtant font grief au salarié ce qui justifierait, sur le principe, qu'il puisse en connaître les raisons, n'ont pas à être motivées. Pourquoi cette différence ? avançons une explication sans avoir vérifié si elle ne comportait pas de contre-exemple. Deux lois relativement récentes ne font pas obligation à l'employeur de motiver sa décision qui doit pourtant être écrite. Elles nous permettent peut être de comprendre pourquoi certaines décisions n'ont pas à être motivées : parce qu'il n'existe qu'un seul motif possible. L'unicité du motif est un thème cher à Jean-Pierre Balagué, peintre toulousain.

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Jean-Pierre Balagué - Sans titre - 2004

La loi du 25 juin 2008 a réformé le droit de la période d'essai en prévoyant une rupture possible par l'employeur sous la seule condition de respect d'un préavis mais sans motivation. Pourquoi ? parce que le seul motif possible de la rupture d'une période d'essai est une évaluation négative des compétences du salarié dans son travail, ce qui est l'objet même de la période d'essai (C. trav., art. L. 1221-20). Si le salarié prouve que d'autres motifs sont à l'origine de la rupture (motif économique notamment ou motif non inhérent à l'appréciation de ses capacités), la rupture sera considérée comme abusive. Un peu antérieure, la loi du 4 mai 2004 a introduit dans le code du travail le droit individuel à la formation (DIF) conçu par les partenaires sociaux. Ce droit nécessite un accord entre l'employeur et le salarié pour pouvoir être mis en oeuvre. Si l'employeur refuse une demande de DIF il n'a pas, légalement, à motiver ce refus. Pourquoi ? parce que le seul motif de refus possible est un désaccord sur la formation choisie par le salarié. Il n'est en effet pas question pour l'employeur de nier le DIF mais simplement d'en négocier la mise en oeuvre. Dès lors, en cas de refus, inutile pour le salarié de s'entêter à représenter des demandes similaires. Mieux vaut inverser la proposition et demander à l'employeur quelles sont les formations pour lesquelles il est prêt à accepter une demande de DIF. Ce qui renverra l'entreprise à l'obligation de décider d'une politique de DIF qu'elle doit présenter tous les ans au comité d'entreprise. Certaines conventions collectives imposant la motivation, les entreprises ont tout intérêt à s'en tenir au motif légal. En effet, un refus fondé sur une absence de budget ou un refus de financement de l'OPCA pourrait être criticable car étranger au seul motif légalement prévu. Et l'on constate qu'absence de motivation ne signifie donc pas totale et discrétionnaire liberté de décision.

06/10/2010

Identité professionnelle

La Gare Saint-Sauveur de Lille, superbe lieu consacré à la création sous de multiples formes, présente une exposition consacrée aux migrants. Ce qui permet de constater qu'il existe en Afrique de nouveaux éléphants.

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Pour la majorité des migrants, l'ailleurs n'est pas connu, il n'est peut être même pas rêvé. Certains sont tirés au sort par leur famille pour partir et pourvoir à la survie du groupe familial. S'ils échouent, ils ont pour consigne de ne pas revenir.

 

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L'exposition est présentée sur des balles de papiers à recycler, murs dérisoires souvent infranchissables car pour beaucoup les "papiers" demeureront inaccessibles.

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Sont également présentés des documents témoignant de la présence de travailleurs étrangers dans l'économie française. Et au détour d'un ballot de papier, ce document, certificat de travail datant de la fin des années cinquante.

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Comme sur beaucoup de certificats de travail, ce qui choque c'est la qualification. Ici il est attesté que le salarié a été employé en qualité de M2. Au plan juridique, l'entreprise confond la classification et la qualification. La première est un positionnement conventionnel, la seconde est la définition du périmètre de travail prévu contractuellement. Au plan symbolique, le désastre est encore plus grand puisque l'individu est réduit à une codification. La série "Le prisonnier" n'existait pas à l'époque mais on aurait compris que les salariés refusent d'être des numéros. On pourra toujours arguer que dans le milieu industriel, cette codification fait sens et que, comme les appellations d'OS ou d'OP elles renvoient à des univers professionnels identifiés. Il n'en reste pas moins que la qualification contractuelle c'est aussi une identité professionnelle, constitutive d'une identité sociale. Et que désigner l'individu par une codification abstraite c'est perdre de vue sa singularité. L'exposition sur les migrants évite cet écueil : elle présente des destins singuliers racontés par eux-mêmes. Et toute migrant commence son histoire en débutant par son prénom et son nom. La migration est un phénomène social, mais c'est surtout un ensemble de destins. Le fait que la qualification soit collective ne doit pas la conduire à nier, dans sa définition, les individus qui en sont titulaires.

01/09/2010

Justice de Toulouse

Mais quelle mouche a donc piqué la Cour d'appel de Toulouse ? que l'on en juge : un particulier embauche un jardinier et promet d'embaucher sa femme pour s'occuper de ses enfants à compter d'une date déterminée par les parties, ainsi que les conditions d'emploi (durée du travail, salaire). Un litige survient ensuite et la salariée n'exécute pas le contrat. Elle démissionne aux torts de l'employeur et demande des dommages intérêts. La Cour d'appel de Toulouse déboute la demanderesse au motif qu'il n'y a pas de contrat de travail en l'absence de contrat écrit et de début d'exécution de la prestation. Ils ne voient dans l'affaire que la rupture d'une promesse d'embauche. Faut-il que les juges viennent du nord de la Loire pour oublier que si la parole est facile dans le Sud, elle n'est pas sans valeur et engage celui qui la donne. Ici, dire c'est faire, comme dirait La Bible (mais si : au commencement était le verbe). Heureusement, il est des toulousains qui sont montés à Paris, comme le dossier envoyé à la Cour de cassation.

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Clémence Isaure au Jardin du Luxembourg

Nous n'avons pas vérifié si la conseillère toulousaine siégeait ce jour-là à la Cour, mais ce ne serait que justice. La Cour de cassation donc, sensible à l'honneur sudiste, affirme que l'engagement, dont la preuve est rapportée, constitue bien un contrat même en l'absence d'écrit et de début d'exécution de la prestation (Cass. soc., 12 juillet 2010). Il en résulte une prise d'acte justifiée par le comportement de l'employeur et des dommages et intérêts à percevoir par la salariée qui peut revendiquer cette qualité bien qu'elle n'ait pas travaillé. Car la toulousaine ne se trompait pas en prétendant que ce n'est pas le travail qui définit le salarié.

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Clémence Isaure au Jardin du Luxembourg

30/06/2010

Le juge et la formation

Kouzen o
Siw pa metem lekòl
Ma fè jandam aretew

Ce chant Vaudou Haïtien signifie à peu près ceci : Kouzen (dieu de l'agriculture) si la culture du sol t'empêches de me  mettre à l'école, je te ferai traduire en justice. Ce chant, de tradition orale, est rapporté par Claude Dauphin. L'illettrisme ne fait donc pas obstacle à la conscience du droit à l'éducation pour tous et de la possibilité de recourir au juge pour le faire reconnaître.

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Frantz Zephirin - Tambour Rada
On ignore si les juges se livrent, dans le secret des alcoves de délibéré, à des cultes vaudou. Mais si l'on doutait qu'ils ont eux aussi conscience que la formation pour tous est un droit qui ne saurait être mis en échec par l'illettrisme,  la décision de la Cour de cassation du 2 mars 2010 pourrait nous rassurer. Pour mieux apprécier la portée de cet arrêt, la Chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF met en perspective 25 ans de jurisprudence en matière de formation professionnelle et de contrat de travail, ou comment le juge après s'être occupé de la formation de ceux qui ont une carrière commence à s'intéresser à la formation de ceux qui n'en ont pas.

09/03/2010

Seul Dieu ne fait pas de contrat

Soeur Marie-Carmen adopte la condition de moniale et effectue pendant 18 mois divers travaux pour la communauté à laquelle elle appartient : cours de solfège, ménage, cuisine, garde d'enfants à domicile, etc. Au terme de la période elle quitte la communauté et demande le paiement de son travail. Stupéfaction ! l'association lui oppose son engagement religieux. Que nenni répond la Cour de cassation. L'association n'a ni le caractère d'une association cultuelle, en clair une église, ni le statut de congrégation religieuse. Dès lors, et par nature, il est jugé que le seul lien avec Dieu ne peut prévaloir sur les conditions d'exercice d'une activité pour une association (Cass. soc., 20 janvier 2010). Et voici la nonne dotée d'un salaire pour son travail au profit de l'association, et non de Dieu.

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Clovis Trouille - La religieuse Italienne

Le droit du travail a ceci de particulier qu'il ne peut être écarté par la volonté des parties. Dès lors que les conditions ne sont pas réunies, la règle ne peut être invoquée. Ainsi, pas de service religieux au profit d'une association qui n'est qu'une association de fidèles. De même, pas de bénévolat, même pas le dimanche, au bénéfice d'entreprises commerciales. On se souvient de ces salariés ouvrant bénévolement une librairie un dimanche au mois d'avril 2009 et qui entendaient pouvoir le faire librement. Làs, le tribunal les condamna à 10 000 euros d'amende par jour ouvré "bénévolement". Et voilà comment des bénévoles qui n'en sont pas en viennent à payer leur bénévolat. Limite à la liberté ? Oui, comme toujours dans un Etat de droit : avant de négocier il faut vérifier quel est le champ du négociable. Seul Dieu ne négocie pas, mais son Etat n'est pas celui du droit.
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Wiliam Blake - Dieu

 

 

30/09/2009

La fin des mobilités groupe imposées

Il ne s'agit pas d'une annonce du PDG de France Télécom, mais d'une décision de la Cour de cassation qui concerne la société Renault. Difficile toutefois de ne pas faire un lien direct avec la vague de suicides chez l'opérateur de téléphonie. Par un arrêt du 23 septembre 2009, la Cour de cassation vient de décider que les clauses de mobilité groupe étaient nulles, le salarié ne pouvant accepter par avance un changement d'employeur. En matière de mobilité, l'équilibre des mobiles de Calder est donc meilleur que celui des contrats de travail contenant un engagement de mobilité dans les filiales du groupe.

 

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Calder - Mobile

Utilisant sans la citer la théorie du contrat d'adhésion, c'est à dire celui qui n'est pas vraiment négocié mais imposé compte tenu de la disparité de situation des parties, la Cour de cassation définit strictement le cadre de la nullité : il s'agit des clauses qui imposent une mutation au sein d'un groupe ou d'une unité économique et sociale, donc entre des structures juridiques distinctes. Par contre, n'apparaissent pas mises en cause les mutations au sein d'établissements d'une même entreprise, si la clause prend le soin de lister tous les établissements concernés par la mobilité afin que le salarié puisse mesurer la portée de son engagement. Et ainsi se poursuit, au rythme de l'actualité, le renforcement de la nature contractuelle des relations de travail. Conséquence ? le management négocié et non imposé. Sous couvert de technique juridique, une révolution, y compris pour le PDG de France Télécom.

23/09/2009

Liberté

La Cour de cassation, dans une décision du 16 septembre 2009, censure une clause figurant dans un contrat de travail à temps partiel, qui imposait à une salariée de demander à son employeur l'autorisation de prendre un autre emploi. Une telle restriction à la liberté du travail ne peut être justifiée que par un intérêt légitime de l'entreprise et doit être limitée dans ses modalités à la protection de cet intérêt.

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Joan Miro - Liberté des libertés 3

Cette décision rappelle la stricte limitation par les juges des clauses d'exclusivité. Non un salarié ne doit pas consacrer tous ses efforts et toutes ses ressources à l'entreprise. Il peut librement travailler ailleurs dès lors qu'il n'y a pas de conflit d'intérêt entre l'activité seconde et l'activité principale. La seule chose que l'employeur peut imposer est une obligation d'information pour qu'il soit en mesure de juger de cet éventuel conflit d'intérêt. Mais une clause qui exigerait une autorisation préalable pour exercer une activité serait dépourvue de validité. Et si conflit d'intérêt il y a, l'employeur doit sommer le salarié d'y mettre fin avant de prendre une sanction. Et c'est ainsi que les juges protègent les libertés du salarié d'exercer une activité professionnelle autre que celle qui le lie à l'employeur.
En une période où fleurissent les activités complémentaires, soit sous statut de salarié soit dans le cadre du statut d'auto-entrepreneur (plus de 100 000 mille déclarations depuis le début de l'année), il était important qu'une telle liberté soit réaffirmée.

09/06/2009

Le droit fragmenté

Le 19 mai 2009 a été signé un avenant à l’ANI du 11 janvier 2008 qui créé la rupture conventionnelle. Cet avenant précise un point qui fait débat et vient compléter le PV d’interprétation établi en janvier : lors de la rupture conventionnelle, l’indemnité qui est due au salarié est l’indemnité légale de licenciement ou l’indemnité conventionnelle de licenciement si elle est plus favorable ce qui n’est pas très compliqué avec une indemnité légale fixée à 1/5ème de mois par année d’ancienneté, soit 1 mois de salaire par tranche de cinq ans.

Ce texte qui clarifie un point litigieux de la rupture conventionnelle, est toutefois la source d’un droit fragmenté. Or, si la fragmentation peut trouver sa place dans l’art, comme le pensait Novalis et comme le montre Anna Toscana dont les photos recadrent et recréent villes et statues, elle est peu opportune en droit.

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Anna Toscano - Statue F

En effet, les signataires de l’ANI du 19 mai 2009 ont prévu que cette disposition ne s’appliquerait qu’aux ruptures conventionnelles postérieures à la signature de cet accord, ce qui peut se comprendre en terme de sécurité juridique mais beaucoup moins si l’on affirme qu’il ne s’agit que de clarifier une intention qui existait déjà en janvier 2008 et figurait dans le texte initial. Et par ailleurs, l’ANI du 19 mai 2009 ne sera applicable qu’après son extension, qui pourrait d’ailleurs être la véritable date de l’obligation pour les entreprises, et ne concernera que les salariés des entreprises du commerce, de l’industrie et des services, à l’exclusion des secteurs de l’économie sociale, des professions libérales et de l’agriculture, et plus largement de toutes les professions non représentées par le MEDEF, la CGPME et l’UPA. L’exclusion concernera donc environ 30 % de salariés, qui relèvent de la seule loi et non des ANI, sachant que la loi ne prévoit que le versement de l’indemnité légale. Cette fragmentation du droit, qui contribue à son illisibilité et au final à son ineffectivité, conduit à constater une fois de plus que si un principe peut souffrir exception, à multiplier les exceptions on détruit le principe.

16/03/2009

Repentir tardif

Le délai pour contester un licenciement est passé au mois de juin 2008 de 30 ans à 5 ans. Même si le raccourcissement est spectaculaire, il paraît de peu de portée tant les contentieux interviennent traditionnellement très rapidement après la fin du contrat de travail. Tel n'était pas le cas dans une affaire jugée le 4 février 2009 : trois ans après avoir démissionné, un salarié demande à ce que cette démission soit requalifiée en licenciement aux torts de l'employeur, la démission ayant été causée par le défaut de paiement de commissions. L'employeur fit valoir dans le contentieux que le repentir du salarié était bien tardif. S'il avait vraiment eu des griefs, il les aurait exprimé plus rapidement : la demande devait être jugée comme infondée car tardive et uniquement fondée sur le désir d'obtenir des dommages et intérêts indus.

 

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Miss Tic - Repentir-Rementir

Pour la Cour de cassation, le délai de trois ans ne peut être un argument valable : le juge doit vérifier s'il existait, ou non, des griefs précédant la rupture ou existant au moment de la rupture. Tel était bien le cas en l'espèce, le salarié ayant présenté de nombreuses réclamations, non satisfaites, pour obtenir le paiement de commissions. En présence de réels motifs de litiges existant au moment de la rupture, le juge qui admet leur bien fondé doit procéder à la requalification.

La décision du salarié d'entamer un contentieux, dès lors qu'elle demeure dans les délais de prescription, lui appartient et ne saurait être jugée comme rapide ou lente : à chacun son rythme. Quelques heures peuvent parfois paraître des siècles, admettons qu'en l'espèce ces trois années auront paru bien courtes au salarié.