18/07/2012
En attendant le loup
La Conférence sociale qui s'est tenue au début du mois de juillet s'est donnée pour objectif de tracer un nouveau chemin pour le dialogue social. Mais il ne faudrait pas confondre la méthode, qui n'est jamais que la carte, et le territoire sur lequel se trouvent les véritables obstacles à surmonter. Comme le petit chaperon rouge doit choisir entre le chemin de l'aiguille et celui de l'épingle, le Gouvernement et les partenaires sociaux ne pourront se contenter de la méthode et devront in fine en venir au droit. Car toute l'histoire du petit chaperon rouge ne trouve de sens que dans la confrontation avec le loup.
Kukuxumusu
Viendra donc le moment où le droit frappera à la porte et où il s'agira de faire les véritables choix. Car si la méthode montre le chemin, elle ne nous indique en rien le comportement à avoir avec le loup.
Pour la liste des questions qui devront être résolues et qui pourraient faire que sous couvert de ne pas réformer on modifie en profondeur notre système de formation professionnelle, on peut se reporter à la chronique écrite avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF sur les suites de la Conférence Sociale dans le champ de la formation professionnelle.
00:35 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, DROIT DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : conférence sociale, droit, formation, dialogue social, chaperon rouge, loup, méthode, travail, emploi
17/07/2012
Le temps d'avant
C'était le temps d'avant. D'avant que l'homo economicus ne réduise l'humain à l'état d'agent économique. D'avant que les commerces soient ouverts tous les jours de l'année, comme vient de le décider la communauté de Madrid. Avant que l'horizon de l'individu ne soit borné par les centres commerciaux et les galeries marchandes. Dans le temps d'avant, la liberté de l'esprit passait par celle du corps et supposait que l'on ait le temps de s'abandonner.
Dans le temps d'avant, les parents accompagnaient les enfants lors de dimanche après-midi proustiens où le temps passait plus lentement qu'à tout autre moment. Et dans cet intervalle, il suffisait de regarder pour voir et sentir la grâce.
Et dans ce temps mêlé d'ennui et de plaisirs, pouvaient s'épanouir les premières expériences qui constituent profondément les êtres. Il faut prendre le temps pour être là lorsqu'une petite fille dévoile le dessous de ses jupes.
Ce temps d'avant, c'était les dimanches où les parents de la petite fille ne faisaient pas commerce et ceux du petit garçon ne couraient pas les boutiques. Ils avaient mieux à faire : regarder la vie se déployer devant eux. Ils ne comprenaient même pas ce qu'est un agent économique. C'est vous dire si c'était vraiment le temps d'avant.
01:52 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dimanche, travail, espagne, crise, madrid, emploi, chômage, économie, fille, liberté
13/07/2012
Qui sait ?
L'homme de gauche, qui dort les bras croisés sur sa mallette, s'est peut être levé très tôt. Il a sans doute parcouru en train puis en métro des distances longues au milieu de banlieues improbables de villes longues. Il est arrivé tôt à son travail qu'il a entrepris sur un rythme intense. Les dossiers sont complexes, les exigences multiples, l'énergie nécessaire immense. Il n'a guère pris le temps de manger. Il a fini tard. Puis il a marché jusqu'au métro et repris le chemin long qui le mène à son appartement étroit. Il est tard, c'est le dernier métro, il dort. Rentré chez lui, il saluera son épouse puis ira se coucher.
L'homme du milieu, qui dort les mains croisées sous sa sacoche, s'est peut être levé tôt. Son bagage est lourd. A l'intérieur, des instruments de mesure du bruit. Il travaille pour la Mairie et mesure l'intensité des bruits lorsque des habitants se plaignent de pollutions sonores. Il est en jean car son travail se déroule essentiellement dehors. Aujourd'hui, il mesurait les bruits près d'un chantier puis il a déjeuné de quelques makis sur une place arborée. Il a mesurée le bruit des feuilles des grands arbres que le vent secouait. Il a été surpris par le nombre de décibels. Il a été surpris aussi par une jeune fille qui riait en le regardant faire et plus encore quand il s'est aperçu que s'était sa petite amie. Elle l'a entraîné pendant une heure dans un love hôtel. Culpabilisé d'avoir abandonné son travail pendant un temps, mais secrètement heureux de s'être offert ce luxe inouï, il est retourné à la mairie. Puis il a accompagné ses collègues de bureau dans plusieurs bars et ils ont bu du saké. Il est sorti juste à temps du dernier bar pour prendre le dernier métro. Maintenant il dort.
Le troisième homme fait semblant de lire, mais il dort aussi. A-t-il travaillé ou a-t-il fait semblant également toute la journée ? c'est lui qui a pris la photo et m'a raconté l'histoire de ses deux covoyageurs qu'il croise tous les matins. Mais au final, il m'a indiqué qu'il ne savait plus très bien si c'était celui de gauche ou celui du milieu qui mesurait les bruits, ou si ce n'était pas un troisième qui n'est pas sur la photo. Il se demande même s'il n'a pas rêvé cette histoire. Qui sait ? et vous, en regardant la photo, vous savez ?
22:05 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : japon, métro, travail, poésie, boulot, histoire, rêve
11/07/2012
La réforme ne peut pas tout
La phrase de Jospin face aux salariés de Vilvorde après la décision de la direction de fermer le site : "L'Etat ne peut pas tout", a durablement traumatisé la classe politique. Elle a hanté pendant 5 ans Nicolas Sarkozy qui n'a cessé d'agir, elle a sans doute été présente dans l'esprit de François Hollande lorsqu'il a créé le Ministère du redressement productif. Que l'on puisse agir ou pas, il n'est plus question de laisser penser que l'on agit pas au maximum de ce qu'il est possible. Au risque de l'agitation, du mouvement brownien et de finir par créer un mouvement perpétuel qui est le plus droit chemin vers un immobilisme de fait, à l'instar de la rotation de la terre qui ne la ramène jamais qu'à son point de départ.
Magritte - Le mouvement perpétuel - 1935
La Conférence sociale a, semble-t-il, échappé à ce traumatisme, tout au moins sur le champ de la formation professionnelle. Pas d'annonce de grande réfome, pas de projet de loi salvateur, pas de velléité de penser qu'il suffira d'un texte. C'est déjà ça et c'est comme au rugby : ce n'est pas en modifiant sans cesse les règles que l'on améliore la qualité du jeu. Reste que le pari fait est celui de la confiance : confiance dans la capacité des acteurs à se mobiliser, confiance dans l'action de terrain, confiance dans la collaboration qui doit s'instaurer dès lors que chacun agit dans son rôle. La confiance responsabilise celui auquel elle est donnée. A ce titre, si la balle n'est pas que dans le camp des partenaires sociaux, c'est à eux aujoud'hui de démontrer que cette confiance trouve un écho dans la conscience qu'ils ont d'avoir un rôle à jouer qu'ils doivent assumer pleinement. Car le credo de l'Etat "qui peut tout" a parfois trouvé une oreille attentive chez des organisations patronales et syndicales pour lesquelles il constituait un confort appréciable. Fini donc la réforme, chacun à son poste et souquez ferme !
23:47 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : reforme, conférence sociale, formation, mouvement, syndicats, patronat, travail, emploi
09/07/2012
Au rythme de la technique
A l'heure où l'on range les minitels dans des cartons qui prendront le chemin de l'oubli dans un coin des caves et greniers, à l'heure où trois ministres se mobilisent parce qu'un opérateur téléphonique a brutalement cesser de relier les conversations entre elles, à l'heure où l'on découvre que nous évoluons au rythme de la technique, prenons le temps du retour arrière. Il y a 25 ans, lorsqu'un client me demandait de manière urgente une consultation, j'avais le temps de l'écrire, de l'imprimer, de la poster et d'attendre qu'elle soit reçue pour en reparler. Un bon rythme. Puis, les clients m'ont demandé de leur faxer le document et me rappelaient lorsqu'ils l'avaient lu. Aujourd'hui ils me demandent de leur envoyer le document par mail tandis que nous parlons et le lisent pendant que nous finissons de parler. A chaque évolution technique, l'homme est un peu plus expulsé du temps de circulation de l'information.
Le fil qui relie les hommes, ancêtre de l'onde
A ceux qui glosent sans fin sur la génération Y et ces jeunes zappeurs incapables de se concentrer plus de trois minutes sur un même sujet, on rappellera juste que toute génération vit avec son temps, qui n'est pas celui de la précédente. Sollicités de toute part, comment pourraient-ils échapper à la prodigieuse accélération technologique qui nous saisit entièrement ? dans son livre intitulé "La lenteur" Kundera écrit que "La vitesse est la forme d'extase dont la technique a fait cadeau à l'homme". Pas facile dans ces conditions de trouver l'extase dans la lenteur. Essayez quand même, c'est l'été.
01:32 Publié dans DES IDEES COMME CA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lenteur, vitesse, technique, kundera, technologie, orange, bug, minitel, travail
05/07/2012
Eté
C'est l'été et quelques orages ou pluies d'été ne nous gâcheront pas le plaisir. L'été c'est le moment d'échapper à la morosité, à la dette, à l'austérité, aux éléments de langage et aux désagréments de tous ordres. Comme on est pas aux Etats-Unis et que le harcèlement moral ou sexuel n'est pas constitué lorsque l'on invite un collègue d'un autre sexe à prendre quelques minutes au soleil, n'hésitez pas.
Mais si vous préfèrez le silence et la fréquentation des auteurs qui sont quasiment devenus vos amis, c'est bien aussi. Dans tous les cas, passez à l'acte, et vite. La rentrée c'est demain.
02:03 Publié dans DES IDEES COMME CA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : été, parcs, jardins, travail, soleil, rentrée, invitation, collègue
21/06/2012
En route pour la Conférence
Farid al-Din Attar est un poète perse du XIIème siècle dont l'oeuvre la plus connue est la Conférence des oiseaux. Réunis à l'instigation de La Huppe, trente oiseaux se mettent en quête de leur Roi. Le voyage sera initiatique comme il se doit et lorsqu'ils rencontreront leur souverain, ils l'entendront dire : "Le soleil de ma majesté est un miroir. Celui qui se voit dans ce miroir y voit son âme et son corps.". Autrement dit, on ne voyage jamais que vers soi-même. Novalis, dans les Disciples à Saïs, nous délivre le même message : celui qui parvient à soulever le voile de la princesse Isis ne voit que son propre visage.
Farid al-Din Attar - La Conférence des oiseaux
La Conférence Sociale programmée les 9 et 10 juillet prochains est le second grand rendez-vous du quinquennat qui débute après le Conseil Européen de la fin juin. Elle permettra à l'Etat, ainsi qu'aux Régions dans le domaine de la formation professionnelle, de définir avec les partenaires sociaux les domaines qui relèvent de la loi et de la négociation, de définir les périmètres d'autonomie de chacun et les terrains de collaboration. Dans ce rendez-vous avec l'ensemble des partenaires, chacun a rendez-vous avec lui-même pour savoir quelle part d'autonomie il est prêt à revendiquer ou à accepter. Autonomie cela signifie liberté d'agir et donc responsabilité. Si les partenaires sociaux souhaitent véritablement que fonctionne la démocratie sociale, les voici donc à l'heure de prendre toutes leurs responsabilités. La 8ème et dernière chronique du Cycle des Carnets de campagne, écrite avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF, identifie les contours de ce que pourrait être l'autonomie des partenaires sociaux en matière de formation professionnelle et les thèmes qui pourraient être inclus dans le calendrier de travail qui sera élaboré au cours de cette Conférence.
00:27 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : conférence sociale, formation, oiseaux, politique, économie, travail, éducation, dialogue social
20/06/2012
Le poids du téléphone
Il travaille dans une de ces entreprises du CAC 40 qui figure régulièrement en tête des enquêtes sur les entreprises dans lesquelles on aimerait travailler. Il a des responsabilités importantes, un attachement fort à l'entreprise, au travail, au business. Et il sort en souriant un étrange objet de sa poche, qu'il me montre en me disant : "Mes enfants se foutent de moi lorsqu'ils voient avec quoi je travaille". L'objet est un modèle de téléphone portable qui est au Blackberry ou à l'Iphone ce que les dinosaures sont aux oiseaux, un ancêtre très lointain.
"C'est ton téléphone professionnel ?
- Oui, je viens d'informer mon boss et mes collègues que je souhaitai avoir un téléphone qui ne me serve qu'à téléphoner et j'ai trouvé ce modèle, il est un peu lourd mais au moins il n'a pas d'autre fonction que le téléphone ;
- tu fais une allergie à la modernité ? un coup de blues ? une nostalgie soudaine devant le temps qui passe ? ou tu essaies de voir si ce petit engin peut servir de machine à remonter le temps ?
- non, j'ai juste souhaité débrancher.
Eugène Gabritschevsky - Ce qui nous retient
- tu expérimentes le droit à la déconnection ?
- ce n'est plus une question de droit mais de santé. Plus de mail à traiter le dimanche pendant le repas familial, plus de relance étonnée qu'un message envoyé à 23 heures n'ait pas eu de réponse dans le quart d'heure, plus d'arrêt sur la route des vacances pour participer à une conf'call, plus de bruits d'oiseaux chaque fois qu'un mail ou un texto arrive, et de toute façon avec cet engin cela prend 20 minutes pour taper deux lignes donc je n'en envoie plus...
- tu fais ça depuis longtemps ?
- trois mois, depuis que j'ai changé de manager et que j'ai pu aborder cette question avec lui, ce qui n'était pas possible avec le précédent ?
- et ça va ?
- à ton avis ?
- à voir ton sourire, j'en conclus qu'il y a un créneau pour les téléphones rétros qui ne font que téléphone
- t'as raison, parce que dans tout ça il y a quand même une chose qui m'embête : il est un peu lourd."
00:06 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : téléphone, portable, mail, travail, burn-out, stress, vie privée, déconnection
14/06/2012
Tina or not Tina
Dans le dernier numéro d'Entreprises et Carrières, daté du 12 juin, un monsieur que je ne connais pas mais qui se nomme Jean-Pierre Basilien et dirige des études à Entreprise et Personnel, think thank patronal comme on dit, nous explique, ou plutôt nous rappelle que la France ne pourra éviter de libéraliser son marché du travail, trop rigide. L'argument est récurrent : trop de protection pour certains produirait une forte segmentation du marché, d'où le chômage, les CDD, les jobs mal payés et la société divisée en deux classes. Que l'on flexibilise (ces choses là sont dites élégamment mais concrètement cela signifie : que l'on puisse licencier plus facilement et à moindre coût) et tout ira mieux. Pas d'autres solutions vous dis-je, la saignée. C'est le retour de l'idéologie Tina (There is no alternative) popularisée par Margareth Thatcher. On peut laisser tomber et choisir de fréquenter d'autres Tina, par exemple Tina Fey qui poussa l'humour jusqu'à jouer au cinéma le rôle de Sarah Palin.
Tina Fey - Vanity Fair
Puisque le sieur Basilien aime les rappels, autorisons nous celui-ci : la législation sur le licenciement en France date de 1973 et appartient donc aux trente glorieuses. A-t-on profité de la période pour élaborer des règles ultra-protectrices des salariés ? au contraire, avec un taux de chômage oscillant entre 3 et 4 %, on a considéré que le licenciement était un risque mineur. On a donc sanctionné l'absence de motif de licenciement par une indemnité égale à 6 mois de salaire : le préjudice ne pouvait être supérieur. Et il n'a jamais été question de réintégration, sauf dans les rares cas de nullité. La législation sur les licenciements économiques, plusieurs fois révisée dont la dernière en 2002, n'a pas modifié cet équilibre. Résultat : une entreprise peut licencier sans motif personnel ni économique dès lors qu'elle est prête à payer six mois de salaire. Voilà le prix du droit, à mettre en rapport avec la durée moyenne de chômage qui est de 13 mois. Ce qui conduit à 800 000 licenciements prononcés tous les ans, dont un quart donnent lieu à contentieux. Est-ce là une rigidité insupportable qui serait responsable tout à la fois du chômage et de la précarité. Avouons que l'on peine à le croire. Mais notre naturel nous invite à nous méfier de Tina, car l'on sait depuis Adam et Eve que l'on a toujours le choix, et à continuer à lui préférer Tina.
23:43 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : basilien, emploi, chômage, travail, tina, tina fey, droit, droit du travail, licenciement, ressources humaines
12/06/2012
Le provisoire ne dure pas
Au grand jeu de la Cour de cassation, chacun peut tenter sa chance, même sans garantie sur le résultat. Ayant sans doute en tête que les juges suprêmes n'apprécient guère les avenants au contrat de travail qui permettent, en augmentant provisoirement la durée du travail, de contourner les règles du travail à temps partiel, l'avocat a conseillé à son client de contester la validité d'un avenant au contrat organisant l'exercice provisoire d'une fonction complémentaire à son travail. En l'espèce il s'agissait d'effectuer les missions d'un salarié malade pendant le temps de la maladie, en sus de son propre travail. Un avenant a été conclu prévoyant une indemnisation supplémentaire du salarié pour la charge de travail et une fin de cette situation au retour du malade. Le salarié conteste cette possibilité de retour arrière : il a donné son accord au départ, il doit le donner également à la fin, sinon la situation doit perdurer. Erreur de jugement lui répond la Cour de cassation (Cass. soc., 31 mai 2012), l'avenant temporaire est parfaitement valable en matière de missions supplémentaires. Perdu.
Plutôt que d'envisager le gain potentiel, le salarié et son avocat auraient du penser à ces sculptures de sable dont la période va bientôt revenir. Elles durent au mieux un été puis se fondent dans la plage et ne laissent guère de trace. Car ce qui est conçu pour être provisoire ne saurait devenir permanent. La beauté du provisoire est aussi dans l'instant, qu'il est vain de vouloir prolonger. Pour l'avoir oublié, le salarié se retrouve n'avoir bâti avec son contentieux que des châteaux de sable.
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : droit, droit du travail, jurisprudence, sculpture, sable, plage, avenant, contrat, travail, ressources humaines
06/06/2012
Concurrence interne compétitive
Elle répond au doux acronyme de CIC. La concurrence interne compétitive est une de ces trouvailles manageriales construites sur des clichés promus au rang de concepts sociologiques voire philosophiques. Ceux qui sont à l'oeuvre ici sont assez simple: l'individu n'est motivé que par l'argent, la concurrence créé une émulation positive. Et c'est ainsi que certains dirigeants, expliquent à leur encadrement médusé, atterré, catastrophé, désespéré ou hilare selon la distance qu'ils arrivent à prendre, qu'au lieu d'organiser la coopération entre les salariés pour être efficace il faut au contraire les mettre en concurrence en interne, d'ailleurs la preuve cela se pratique dans certaines équipes de football (pendant ce temps, les rugbymen travaillent le collectif). En remontant un peu plus loin, ils auraient pu, mais cela aurait sans doute gâché la démonstration remonter à la concurrence fratricide de Caïn et Abel ou à Cronos, Saturne pour les latins, qui dévora ses enfants parce qu'une prédiction lui avait indiqué qu'un de ses fils lui ravirait le pouvoir. Mais peut être ces exemples de concurrence entre proches n'auraient-ils pas été les bienvenus dans la démonstration.
Goya - Saturne dévorant un de ses enfants
Le salarié pensait benoitement que la concurrence au sein d'un même groupe, cela n'existait pas. Ancien directeur d'un hypermarché Leclerc et tenu par une clause de non concurrence, il savait ne pas pouvoir prendre la direction d'une autre enseigne. Alors il se fit embaucher par un autre hypermarché Leclerc et somma son ancien employeur de lui verser la contrepartie de la clause de non-concurrence. Refus de ce dernier au motif que la clause n'était pas respecté et rendez-vous pour tout le monde devant le juge. Le salarié candide expliqua au tribunal qu'il ne saurait y avoir de concurrence au sein d'un même groupe. Le juge, qui connaît la Bible et la Mythologie, lui rétorqua que c'est souvent auprès de ses proches que l'on trouve ses principaux concurrents (Cass. soc., 16 mai 2012, n° 11-10.712). L'histoire ne dit pas si les hypermarchés s'en portent mieux.
23:06 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : copncurrence, contrat, clause, leclerc, saturne, compétitivité, ressources humaines, droit, travail
05/06/2012
Ne pas perdre le parcours en chemin
Les herbes sont hautes, le chemin mal tracé et peut être même improvisé au gré de la promenade. Mais il permet tout de même de rentrer chez soi. Les jeunes femmes qui bousculent blés et coquelicots reviennent de leur parcours dans les champs et prairies. Elles ont goûté le soleil d'été, et se désaltèrent déjà de la fraîche eau qui les attend. Car le plaisir n'est pas que dans l'instant, il est aussi dans l'attente de ce qui va se présenter lorsque l'imagination nous livre les premières saveurs des bonheurs à venir.
Renoir - Chemin dans les hautes herbes - 1875
Il serait bon que le Gouvernement et les partenaires sociaux, lors de la Conférence sociale qui se tiendra au mois de juillet et ensuite dans les travaux qui en résulteront, se souviennent que le parcours est constitué d'étapes et de temps différents et qu'aucune de ces étapes n'est capable, à elle seule, de rendre compte du chemin parcouru ni de celui qui demeure à découvrir. Et c'est pourquoi il sera important de ne pas aborder la formation professionnelle sous le seul angle de la formation des demandeurs d'emploi, sous la pression du taux de chômage qui ne cesse de croître, mais de l'envisager comme un moyen d'accompagnement des parcours professionnels et d'en profiter pour faire tomber les barrières statutaires qui s'opposent aux cheminements, notamment ceux qui se font à travers champs. La 7ème chronique des Carnets de campagne, rédigée avec Jean-Marie Luttringer, explique plus avant quelles barrières il s'agit de renverser pour offrir de nouvelles libertés.
23:47 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : conférence sociale, chômage, formation, emploi, campagne, parcours professionnel, renoir, peinture, travail
23/05/2012
Il n'y a pas de silence de la loi
Avec la décision inattendue, sauf peut être par ceux qui l'avaient demandé, du Conseil Constitutionnel d'abroger l'article du Code Pénal consacré au harcèlement sexuel, on a vu refleurir à foison les commentaires scandant qu'il y avait dorénavant un vide juridique, gouffre sans fond dans lequel seraient plongées les victimes de harcèlement. Répétons-le donc encore une fois : s'il y a une loi du silence, notamment en affaire de harcèlement, il n'y a jamais de silence de la loi. Autrement dit, toute situation ou tout comportement peut recevoir une qualification juridique. Si les vieillards chuchotent leur abject chantage à l'oreille de Suzanne dont ils convoitent le corps (puisqu'en ces matières mieux vaut éviter les périphrases et l'on suggèrera au législateur futur d'en terminer avec le terme "faveurs" s'il redéfinit le harcèlement) et s'ils assortissent leur parole d'une demande de silence à celle qu'ils veulent contraindre, constatons que la loi n'a jamais été silencieuse : elle a d'abord condamné Suzanne puis, une fois les faux témoignages d'adultère établis par l'intervention du prophète Daniel, reconnu son innocence. Mais jamais de vide il n'y eut et il n'y aura.
Artemisia Gentileschi - Suzanne et les vieillards
Notons tout d'abord que la décision du Conseil Constitutionnel ne concerne que le Code pénal et que les dispositions des articles L. 1153-1 et suivants du Code du travail demeurent applicables. Pas d'impact de fait pour les comportements au sein des entreprises privées. Par ailleurs, le droit pénal lui-même recèle d'autres qualifications à commencer par le harcèlement moral, dont les éléments seront parfois réunis, mais aussi l'aggression sexuelle ou la tentative, l'abus de faiblesse ou dans le secteur public l'abus de pouvoir. Bref, si le retrait du harcèlement sexuel du code pénal met en cause les actions intentées sur cette base, par contre il ne délivre pas, comme on a pu l'entendre ou le lire, un permis de harceler et ne créé pas un vide juridique comme le titrait hier encore Libération qui n'hésitait pas à reprendre à plusieurs reprises une formule manifestement destinée à marquer les esprits, au prix de l'approximation pour ne pas dire de l'erreur. La journaliste sera condamnée à se rendre avant le 14 juillet au Musée Maillol pour voir l'expositions Artemisia et réviser ainsi ses classiques.
12:37 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : harcèlement, harcèlement sexuel, artemisia, libération, libé, vide juridique, code pénal, travail
22/05/2012
Confluence
Elles ne proviennent pas des mêmes sources, mais sont nées dans les mêmes montagnes. Elles n'empruntent pas les mêmes cheminements, mais se retrouvent dans la vallée, lorsque les plissements du temps s'estompent et que la terre s'aplanit, elles bouillonnent chacune à leur manière, puis se mêlent indissolublement. Qui pourrait distinguer depuis les ponts de Toulouse les eaux qui viennent de la Garonne et celles qui viennent de l'Ariège ? Ce qui était distinct cesse de l'être. Sous le regard de Vieille-Toulouse, un peu au Sud de la ville, la confluence de la rivière et du fleuve offre une Garonne plus majestueuse. Car ainsi en va-t-il de notre manière d'appréhender la géographie : l'affluent perd son nom au profit du cours d'eau principal. En droit aussi, il est de principe que l'accessoire suit le principal. Ainsi semble disparaître ce qui s'absorbe en plus grand que lui, alors que disparaît surtout notre capacité à les distinguer.
Debbat-Ponsan - Allégorie de l'Ariège et de la Garonne
Le mouvement d'absorption de la politique de formation professionnelle par la politique de l'emploi a été amorcé en 1984 avec le tournant, déjà, de la rigueur. Après une structure interministérielle puis un Ministère à part entière de la formation professionnelle, était venu le temps de l'arrimage de la formation à l'emploi. Ce temps est toujours le notre comme le montre la 6ème livraison des Carnets de Campagne écrits pour l'AEF avec Jean-Marie Luttringer. Quant à savoir si ce rattachement traduit une disparition de l'accessoire dans le principal ou une fécondation de celui-ci par celui-là, la réponse devrait nous être rapidement apportée.
09:56 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gouvernement, formation, ministère, emploi, travail, garonne, ariège, toulouse
15/05/2012
Déraisonnable (2)
Décidément, le Crédit Agricole n'a guère de chance avec sa convention collective et les périodes d'essai. Trois ans après avoir été condamné pour une période d'essai excessive d'une durée d'un an (voir ici), la banque des champs subit une fois encore les foudres du juge qui, cette fois-ci, juge excessive une période d'essai de 6 mois. Il faut dire que l'emploi n'était pas le même, en l'occurence dans l'affaire il s'agissait d'une assistante commerciale. L'entreprise avait procédé à une première évaluation, peu satisfaisante, de la salariée après 3 mois. Mais avait décidé d'aller au bout de la période d'essai fixée à 6 mois en application de la convention collective. Louable mais injustifié pour le juge : la période d'essai ne peut servir qu'à apprécier les capacités du salarié et sa durée doit être totalement calibrée à cette exigence. Dès lors, six mois d'essai peuvent être considérés comme déraisonnables sur la base de l'emploi occupé.
Ange Leccia - La déraison du Louvre
L'occasion également pour le juge de rappeler une fois de plus qu'il n'est pas tenu par les termes d'une convention collective et que les partenaires sociaux peuvent, dans leur grande sagesse, manquer de vigilance. Pour la Cour de cassation, il paraît évident que fixer la durée de l'essai en fonction de la catégorie professionnelle n'a guère de sens : c'est la réalité de la situation qui compte et la difficulté de réaliser l'activité confiée.
On pourrait se dire que cette décision va inciter les employeurs à se séparer encore plus vite de leurs salariés, sans prendre le risque d'un contentieux a postériori, à moins qu'au contraire elle n'incite à ramener les périodes d'essai à ce qu'elles sont, à savoir une mise en situation de travail qui permet d'apprécier la compétence du salarié.Pour le reste, il faut raison garder.
01:30 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : période d'essai, droit du travail, travail, emploi, droit, ressources humaines
02/05/2012
Pause
Le joli mois de mai du printemps tardif, des drapeaux au soleil, de l'herbe fraîche, des pas ralentis. Repos actif disent les sportifs : pour régénérer corps et esprit, surtout ne pas s'arrêter mais changer de rythme. Modifier son rapport au temps en prenant le temps qui, merveille, ralentit lui aussi. Vous allez moins vite, le temps est plus long. Paradoxal ? tentez l'expérience.
Et dans ce temps étendu, si vos pas vous portent vers Degas et le nu, au Musée d'Orsay, lieu de tous les départs, ne résistez pas. Les toiles ici réunies ne le seront sans doute plus avant longtemps, raison de plus pour y passer un peu de temps. Une pause, avant un nouveau départ.
12:01 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : degas, temps, pause, mai, vacances, travail
26/04/2012
Un vrai travail
Lorsque les partenaires sociaux ont créé le contrat de professionnalisation en 2003, et non un énième contrat de formation, c'est bien pour signifier à toutes les parties concernées que la formation ne résultait pas exclusivement de l'action de formation suivie en dehors du poste de travail, mais également de l'exercice de ce travail. Venant après la VAE, la professionnalisation, qui vaut tant pour les contrats que pour les périodes, c'est la reconnaissance que le travail apporte, comme la formation, des compétences mais pas les mêmes et pas de la même manière. Un parcours de professionnalisation, ce n'est pas une formation où on apprend et un travail dans lequel on applique ce que l'on a appris en formation. C'est deux moyens différents d'acquérir des compétences distinctes qui concourrent ensemble à la professionnalisation. Dans une décision du 12 avril dernier, la Cour de cassation valide la prise d'acte de la rupture d'un contrat de professionnalisation par un salarié parce que l'entreprise ne lui a pas confié un travail lui permettant de se professionnaliser. Au regard de l'objet du contrat, pas un vrai travail donc.
La formule des juges est lapidaire : en ne donnant pas un travail au contenu suffisant, l'employeur n'a pas assuré l'obligation de formation qui lui incombe.
On souhaite que cette décision serve de point d'appui pour cesser de traiter le contrat de professionnalisation comme le seul support du suivi d'une formation. Combien d'OPCA aujourd'hui, puisque c'est désormais eux qui ont en charge de valider les contrats, vérifient le contenu de l'emploi occupé, exigent la fiche de poste et valident un parcours associant des compétences développées dans le travail et en formation ? le jour où tout les emplois seront qualifiants et apporteront des compétences, le jour où l'on cessera de bâtir des modèles d'activité sur la standardisation des comportements et au final sur la déqualification des salariés, ce jour-là on saura peut être ce qu'est le vrai travail. En nous en proposant une définition, les juges ont ouvert la voie.
00:26 Publié dans DROIT DE LA FORMATION, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : contrat de professionnalisation, travail, vrai travail, droit, formation, alternance, contrat
19/04/2012
Aprender trabajando
Il existe tout un courant d'éducateurs et d'enseignants qui voient dans le concept de compétences une énième manipulation pour assujettir les travailleurs aux exigences des entreprises. La compétence est ainsi accusée, dans le désordre, de faire intégrer les contraintes de l'organisation au salarié, de réduire la connaissance à du savoir-faire, de transformer le salarié en acteur mécanique de sa profession, de tayloriser les comportements, de tuer toute velléité de pensée critique ou encore, sans prétendre à l'exhaustivité, de constituer un obstacle permanent à la culture.
C'est oublier que la notion de compétence n'est pas née sous la plume de théoriciens du management cherchant la recette miracle de la motivation du salarié, mais des acteurs associatifs de l'insertion.
L'approche par les compétences a permis à des organismes travaillant avec des personnes en reprise d'activité ou ayant été éloignées très longtemps du marché du travail, d'utiliser des leviers pour leur reconstruction personnelle, leur confiance et leur professionnalisme. Face à des gens qui exprimaient ne savoir rien faire ou plus simplement ne rien savoir, il s'agissait par un passage en revue méthodique de leurs activités, d'identifier les compétences développées et de conduire ce travail d'explicitation comme un travail de conscientisation et de revalorisation personnelle. L'association Retravailler a été une des premières organisations à développer ces méthodes avec des femmes en situation de retour sur le marché du travail après avoir élevé leurs enfants. Le dessin ci-dessus illustre le travail conduit auprès d'enfants mexicains travaillant dans la rue pour redémarrer un travail éducatif.
Quant au reproche de réduire la connaissance au savoir-faire, il traduit un contresens. Ce n'est pas parce que la compétence s'exprime dans l'activité qu'elle ne mobilise ni culture, ni connaissance, ni réflexion critique, ni capacité de pensée autonome. C'est confondre la finalité de la compétence et la manière dont elle se construit et s'exprime. C'est traiter tout travail comme une aliénation alors que certains emplois seulement sont de cette nature.
La véritable question n'est pas celle de la compétence, ni de sa traduction opérationnelle, elle est plutôt dans le contenu du travail : plus celui-ci est mécanique, répétitif, dépourvu de toute variabilité et d'évolution, et moins il y aura compétence, mais également culture et connaissance. Par contre, si le travail, ou plus largement l'activité, se déploie sur un champ large, alors est offert un support pertinent pour développer ses compétences, c'est à dire son professionnalisme et soi. Si vous n'y croyez pas, demandez aux enfants mexicains.
22:29 Publié dans PEDAGOGIES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : compétence, éducation, formation, insertion, retravailler, travail, emploi, économie, ressources humaines
12/04/2012
Mars piraté !
Non, ne cherchez pas du côté de Jacques Chaminade futur colon de mars ni, pour les complotistes, du côté de la CIA qui aurait déjà soudoyé d'hypothétiques habitants de la planète rouge, non le Mars en question c'est le système qui gère les résultats des élections professionnelles depuis la loi du 20 août 2008. Le site ouvert par le Ministère du Travail pour centraliser l'ensemble des résultats des élections de délégués du personnel et de comités d'entreprise (c'est ici) a subi en début d'année une attaque informatique. Selon le Ministère, le pirate, non identifié, n'aurait fait que copier des procès-verbaux d'élections qui sont publics. Même si, vieux réflexe juridique, on présume la bonne foi, on ne peut s'empêcher de penser que réaliser un piratage informatique pour copier ce qui est accessible à tout un chacun, c'est moyennement crédible, à moins qu'il ne s'agisse d'une erreur de cible et qu'en s'attaquant à Mars le pirate inconnu ait cru s'en prendre à la NASA.
Mars
L'attaque informatique démontre tout simplement l'impatience de certaines organisations dont la survie dépend purement et simplement des résultats des élections. En effet, avant la fin de l'année seront publiés des arrêtés de reconnaissance fixant la liste des organisations syndicales représentatives dans les branches professionnelles et au niveau interprofessionnel. L'enjeu n'est pas mince qui, pour la première fois depuis deux siècles, reconnaîtra officiellement une différence entre les organisations syndicales, longtemps considérées comme se valant en tout. Terminée l'égalité de principe, chacun sera jugé à l'aune des suffrages qu'il a recueilli. Aucune organisation n'échappera à la perte de représentativité dans une ou plusieurs branches professionnelles. Quant au niveau interprofessionnel, seule la CFTC paraît véritablement menacée. A 6 mois de l'échéance, on comprend mieux la tentation du pirate d'approcher le rapport de forces, à moins qu'il n'ait tenté de modifier certains résultats ou, rien n'étant exclu, que l'objet de la manoeuvre ait été de démontrer la faiblesse du système pour mieux contester ensuite les résultats qu'il fournira. Réponse d'ici la fin de l'année. En attendant, on vous prie de considérer que MARS se porte très bien, merci.
00:07 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mars, élections, comité d'entreprise, délégués du personnel, travail, emploi, ressources humaines, droit
11/04/2012
Temps nouveaux
Parfois, question de moments ou de lieux, le temps n'est plus tout à fait le temps. La continuité linéaire et horlogère qui rythme notre vie a des hoquets. Le temps ne passe plus, ou plus de la même manière, ou alors il vous projette dans un temps que vous avez l'impression d'avoir toujours connu, un temps permanent qui n'est pas l'éternité mais beaucoup mieux que cela. Ou alors au contraire vous est offert un temps inconnu, dans lequel vous vous installez spontanément. Et que vous voudriez voire durer longtemps. Un temps du Sud. Un autre temps.
Ce temps qui n'appartient à rien de connu, il arrive aux magistrats aussi de le rencontrer. Dans une affaire jugée le 22 mars dernier, une salariée s'était vue proposer avant le début de son contrat de travail une formation de deux semaines lui permettant de se familiariser avec les méthodes de l'entreprise. Son contrat ayant été prématurément rompu, elle demanda la requalification de cette période de formation en période de salariat. Refus des juges, ce temps de formation ne s'est pas traduit par la production d'un temps travaillé pour l'employeur, il ne pouvait donc recevoir la qualification de temps de travail. Le seul fait d'être dans une formation payée par votre futur employeur ne fait pas de vous un salarié par anticipation.
Au-delà du cas d'espèce, cet arrêt est une contribution des juges à un processus qui semble s'accélérer : le découplement du temps de travail et du temps de formation et la création d'un temps de formation constituant une qualification à part entière et dont le régime serait distinct de celui du travail. Le chemin entamé avec le développement des multiples possibilités de se former en dehors du temps de travail s'ouvre donc à de nouveaux horizons, ceux des temps nouveaux.
00:25 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : formation, temps, photo, jurisprudence, droit, travail, éducation