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26/10/2012

Sécurité ?

Les négociations sur la sécurisation de l'emploi se déroulent difficilement. Lot de toute négociation véritable certes, car lorsque l'on se met d'accord sans délai, c'est que l'on ne négocie point mais que l'on constate une communauté de positions. Le point d'achoppement de la semaine est constitué par la réforme des licenciements économiques. Le texte patronal soumis aux organisations syndicales voudrait rendre plus facile la reconnaissance d'un motif économique, moins importantes les obligations de reclassement et moins susceptibles de recours les décisions de licenciement. Au nom de la flexibilité et de la sécurité juridique. Les organisations syndicales font remarquer que la seule sécurité traitée par le texte est celle de l'entreprise, et que la sécurisation de l'emploi n'est guère présente. On constate surtout que derrière les mêmes mots, s'abritent des intérêts et des intentions différentes.

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Ce qui surprend, c'est cette volonté des organisations patronales de vouloir à tout prix sécuriser les licenciements économiques. Il s'en pratique environ 260 000 chaque année, chiffre quasiment constant. Et seuls 2,5 % de ces licenciements donnent lieu à contentieux. Pourquoi ? parce que les sommes perçues par les salariés lors du départ, au moins dans les grandes entreprises, sont supérieures à ce que le juge accorderait en cas de contentieux. Il ne faut pas s'étonner que les conflits à l'occasion de PSE portent sur le montant des indemnités de départ. C'est moins de la résignation que du pragmatisme. En effet, si le licenciement n'est pas fondé en droit, le juge accordera au salarié 6 mois de salaires, voire un peu plus. Jamais la réintégration. Moyennant quoi, en gonflant un peu les indemnités, une entreprise tue l'intérêt à agir. D'où la faiblesse du contentieux. Du coup, c'est moins la sécurité juridique que visent les organisations patronales que la baisse du coût des licenciements. Il suffisait de le dire.

25/10/2012

Le fait du prince

C'est ce qu'invoquait la société Air France pour se séparer d'un salarié qui venait de se voir retirer son habilitation péfectorale de travailler en zone aéroportuaire. Le fait du prince, autrement dit la force majeure. Celle qui s'impose aux parties et conduit donc l'entreprise à licencier le salarié qui ne peut plus exercer l'emploi pour lequel il a été recruté. Mais voilà, les juges font du droit. Et la Cour d'appel, suivie en cela par la Cour de cassation, rappelle à l'entreprise que la force majeure est un évènement irrésistible, condition acquise ici puisqu'il est impossible de passer outre le défaut d'habilitation, extérieur aux parties, ce qui est le cas de la décision préfectorale, mais également imprévisible. Or, pour qui occupe un emploi soumis à habilitation, la perte de cette habilitation n'est pas imprévisible et peut faire partie des évènements qui affectent la vie du contrat. Pas de force majeure donc ici, le fait du prince n'était qu'un rêve, l'occasion de saluer Odilon Redon, véritable prince du rêve selon le titre de l'exposition qui lui fût consacrée l'an dernier au Grand Palais.

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Odilon Redon - Centaure

Dans son argumentaire, Air France faisait valoir que si elle avait l'obligation d'adapter les salariés à l'évolution de leur emploi, elle n'avait pas d'obligation de reclassement suite à la perte de l'habilitation. Mauvais raisonnement selon les juges. L'entreprise devait rechercher si elle ne pouvait pas permettre au salarié d'exercer ses fonctions, ou des fonctions comparables, en dehors des zones soumises à autorisation. Faute d'avoir procédé à une telle recheche, le licenciement se trouve injustifié. Nouvelle jurisprudence qui vise à favoriser la survie du contrat plutôt que sa rupture et impose à l'entreprise une obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat plutôt que de sauter un peu trop rapidement sur l'occasion.

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24/10/2012

A en pleurer

Il est parfois désespérant de se heurter à des murs, surtout lorsqu'ils sont bâtis d'incompréhension, de mauvaise volonté et cimentés par la position de pouvoir de ceux qui les érigent. Que l'on en juge : un salarié est licencié avec un droit à DIF portable de 1052 euros. Il intègre une autre entreprise qu'il quitte quelques mois plus tard avec 118 euros de DIF supplémentaires. Admis à l'assurance chômage, il demande à bénéficier de son DIF portable, cumulé, auprès de l'OPCA. Refus de celui-ci qui lui oppose que le DIF "n'est portable qu'une fois" puisque c'est l'OPCA de la dernière entreprise qui est compétent pour payer la somme. Le droit portable de 1052 euros est donc perdu. Appel de la DGEFP qui, apparemment, confirme cette position : le DIF n'est portable qu'une seule fois.

Et voilà comment ceux qui sont chargés de mettre en oeuvre la sécurisation des parcours des salariés prennent plaisir à inventer à coup d'interprétations hasardeuses et au minimum mal maîtrisées, des règles qui de ce fait ont l'effet exactement inverse à celui recherché.

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Picasso - La femme qui pleure - 1937

Si l'on voulait avoir un nouvel exemple de la mise en oeuvre de manière absurde de règles en perdant tout sens et toute finalité, on serait servi. Voilà donc qu'un salarié qui a acquis des droits pendant six ans, les perdrait parce qu'il a, dans son parcours, intégré un nouvel emploi. Que n'est-il resté au chômage pour profiter de son DIF portable ! ou pourquoi ne l'a-t-il pas utilisé chez ce nouvel employeur alors que c'était inutile !

D'autant que rien dans les textes n'impose une telle lecture. Au contraire, les partenaires sociaux s'étaient interrogés lors de la création de la portabilité, sur l'utilisation du DIF portable lors de parcours faits de périodes alternées d'emploi et de chômage. Ils en avaient conclu que le risque existait (ce qui justifie sans doute in fine la position de l'OPCA) qu'un bénéficiaire puisse utiliser deux fois le droit portable faute de traçabilité entre OPCA. Certains avaient même envisagé de créer une carte à puce pour tracer la portabilité. Et puis la raison l'emporta et l'on considéra que si quelques salariés bénéficiaient deux fois du même droit, c'était moindre mal par rapport au fait d'en priver plusieurs dizaines d'un droit acquis. Il faut croire que ce message n'a pas été intégré par tous. Au final,  voilà comment on fait supporter à l'individu, les insuffisances d'un système qui est censé être à son service.

Quant à une autre interprétation des règles de la portabilité, voir ci-dessous.

LA MISE EN ŒUVRE DE LA PORTABILITE DU DIF APRES LA FIN DU CONTRAT DE TRAVAIL.pdf

22/10/2012

Le retour des contre-lettres

Après les lettres festives, voici le retour annoncé de missives beaucoup moins ludiques. Il s'agit des contre-lettres, ces contrats occultes par lesquels on s'engage mutuellement sur une opération en général illégale à laquelle on donnera une apparence légale et autre que la véritable intention des parties. Un exemple :  il s'agira de se mettre d'accord sur une rupture amiable d'un contrat de travail, tout en lui donnant l'apparence d'un licenciement, assorti d'une transaction dans laquelle chacun recevra ce que la contre-lettre a prévu. Si ces pratiques n'avaient pas totalement disparu depuis la création de la rupture conventionnelle en 2008, leur nombre s'en était trouvé considérablement diminué. Il faut dire qu'il n'était plus besoin d'escroquerie, car c'est bien de cela qu'il s'agissait avec la contre-lettre qui visait à contourner le fisc et l'URSSAF, puisque les mêmes droits (indemnité exonérée et assurance chômage) étaient attachés à la rupture conventionnelle et au licenciement. Plus d'intérêt donc à passer par des pratiques illégales, on pouvait aller au but en terrain découvert.

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Gaston Chaissac - Lettre

Mais voila que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 se propose d'instaurer un forfait social (entendez une cotisation supplémentaire) d'un montant de 20 % sur les indemnités versées à l'occasion d'une rupture conventionnelle. Si cette ample ponction avait également porté sur les indemnités de licenciement, on aurait compris que l'on se trouvait face à une mesure destinée à la fois à freiner les ruptures de contrat et à combler le déficit des finances non pas de la belle-mère mais de l'Etat. Mais que non. Il ne s'agit que de taxer les ruptures conventionnelles que certains aimeraient bien interdire car dans leur représentation elle ne sert qu'aux employeurs qui abusent à volonté de la volonté des salariés. Suggérons à tous  ceux-la d'aller faire un tour sur le terrain social et de demander leur avis aux principaux concernés. Mais le fait est là : la rupture conventionnelle sera taxée mais pas le licenciement. De ce fait, nous verrons ressurgir les petits arrangements à l'amiable, les accords secrets, les comportements délinquants (appelons les choses par leur nom pénal, c'est toujours plaisant) et autres occulteries de grand chemin. Dans cette affaire, il y aura au moins une catégorie sociale qui trouvera son bonheur : les avocats qui n'étaient guère sollicités pour les ruptures conventionnelles dont la simplicité garantissait l'autonomie de chacun, vont retrouver de l'activité avec les contre-lettres, les procédures de licenciement et les transactions.Il leur sera aisé d'expliquer que le montant de leurs honoraires est moins élevé que le coût du forfait social. Quant aux autres, ils devront soit payer le prix de leur accord, soit revenir à l'illégalité. Et voila comment une fois de plus en voulant faire le bonheur des gens malgré eux, on en revient à leur compliquer la vie.

18/10/2012

Lettres festives

Les lettres dites "festives" sont des lettres qui diffusent une encre bleue lorsqu'elles sont ouvertes. La Poste a utilisé ce procédé pour démasquer une salariée qui ouvrait régulièrement des lettres transitant par un centre de tri. La Poste invoquait deux bonnes raisons d'utiliser ce subterfuge : d'une part elle ne pouvait tolérer une pratique qui constitue un délit pénal et d'autre part en tant que service public elle agissait pour protéger les intérêts des usagers et pas seulement les siens propres. Il n'empêche qu'elle ne s'est pas contenté de porter plainte ou de mettre fin aux agissements de la salariée, elle a procédé à son licenciement. Ce que la Cour d'appel de Chambéry avait validé. Pas la Cour de cassation qui persiste à refuser les techniques qui permettent de piéger un salarié, serait-ce avec les meilleurs arguments du monde. Le licenciement sera donc jugé sans cause réelle et sérieuse et la salariée indemnisée. Nouvelle illustration que droit et morale occupent deux champs distincts, sauf à considérer que la postière en désamour était en recherche de missives lascives.

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Mimi Parent

En s'obstinant à refuser à l'employeur de pouver la réalité par tout moyen, la Cour de cassation dresse une barrière protectrice du  salarié et considère que les droits de la défense sont supérieurs à ceux de la vérité. Une telle position peut susciter quelques incompréhensions : après tout les faits sont avérés et la faute établie. Pourtant il faut se féliciter de cette décision qui maintient fermement  la digue de la protection du salarié, y compris délinquant, contre des pratiques intrusives de l'employeur. Les moralistes se consoleront en constatant que privée de son emploi, la postière ne peut plus s'adonner au plaisir de la lecture à la dérobée.

Cour de cassation civile Chambre sociale 4 juillet 2012.pdf

17/10/2012

Ouvrir les portes du parcours

Sur l'excellent site de Bruno Callens consacré au DIF (voir ici), un internaute présente son parcours : salarié de 1985 à 2003 dans une même entreprise, puis deux ans de chômage consacrés à passer un CAP suite à quoi une activité d'artisan pendant 5 ans, puis un CDI dont il démissionne après 5 mois pour enchaîner un CDD de 6 mois, 4 mois d'intérim puis de nouveau 6 mois de CDD. Soit 17 ans d'activités dont deux années en formation dans le cadre de l'assurance-chômage. Et cette question : quels sont mes droits au DIF au terme de ce parcours. Et bien 0 avant 2004, 0 pendant la période de chômage, 0 pendant l'activité indépendante, 10 h portables pour les 6 mois de CDD, 0 pour les 4 mois d'intérim et 10 heures portables pour le dernier CDD. Soit 20 heures x 9,15 euros = 183 euros pour aller en formation.

Depuis le temps qu'il est question de sécurisation des parcours professionnels, l'exemple de ce parcours tellement typique durant lequel on enchaîne les statuts et les activités est édifiant : au final la personne qui a travaillé quasiment sans discontinuité est  exclue du droit à la formation. Preuve s'il en fallait, que nos systèmes sont avant tout conçus en référence à un modèle théorique de l'emploi permanent et qu'ils ne prennent guère en compte ce qui est pourtant la réalité quotidienne pour une grande partie de la population active, qui n'est sans doute pas celle qui a le moins besoin de formation. Mais les portes ouvertes pour certains se referment bien vite devant les autres.

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A lier les droits à l'ancienneté, on est encore dans le modèle des trente glorieuses de l'emploi de longue durée qui permet d'accumuler des droits à condition que rien ne bouge. Le meilleur moyen de priver de tout ceux qui sautent d'un emploi à l'autre pour parvenir à une continuité de revenu et témoignent au passage d'une capacité d'adaptation permanente. Mais ils seront pénalisés au niveau de la rémunération, de la protection sociale et de l'accès à la formation. Tant que l'on ne réfléchira pas en terme de droits liés à l'activité, quel que soit le statut, et garantis par des systèmes de mutualisation et que l'on continuera à cloisonner, segmenter et faire dépendre le statut social de la durée de l'emploi, on sacrifiera sciemment près d'un quart de la population active. Ce n'est pas la majorité objectera donc. C'est peut être exactement là que se situe le problème.

16/10/2012

Variabilité

Les étoiles variables, ce sont celles dont la luminosité n'est pas constante. Elles brillent avec plus d'éclat selon des intermittences moins prévisibles que la chute des feuilles à l'entrée de l'automne. Les étoiles variables sont des exceptions du ciel. Si l'on redescend sur Terre, on découvre que la variabilité est au coeur de débats récurrents. Et qu'à propos du coût du travail, il est fortement question de la variabilité de la masse salariale et donc de l'effectif. Le salarié  seule variable d'ajustement de la compétitivité ? c'est ce qu'affirme le MEDEF, qui propose pour relancer l'économie que l'on réduise le coût des charges sociales, que l'on allonge la durée des périodes d'essai, que l'on facilite le recours aux CDD et que l'on réduise les obligations des entreprises en matière de licenciement. Tout ceci faisant frein à l'emploi. Les arguments varient peu, ils étaient les mêmes dans les débats sur les 35 heures il y a 10 ans et les mêmes encore à la fin des années 70 pour lutter contre la crise qui s'installait.

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Eta Carinae - Etoile variable

Je me souviens de la mise en place des 35 heures : pour certaines entreprises, un véritable casse-tête car les coûts de main d'oeuvre représentaient la majorité de leurs coûts de production. Mais je me souviens aussi de ces entreprises où les coûts de main d'oeuvre représententaient 10 % des coûts de production, et la réduction du temps de travail 1% de ce coût. La tension n'était manifestement pas la même. Je me souviens aussi que si Pechiney a fermé des usines, ce n'était pas parce que les salariés coûtaient trop cher mais à cause du prix de l'aluminium sur le marché international. Faudra-t-il redécouvrir que le salarié n'est pas la seule composante des coûts de productions et que par conséquent coût de production n'est pas synonyme  de coût du travail contrairement à ce qu'indiquait ce matin Laurence Parisot ? faut-il rappeler que 80 % des embauches en 2011 ont été réalisées en CDD : que signifierait un assouplissement des règles ? que 100 % des embauches doivent être faites dans ce cadre ? faut-il rappeler qu'il y a eu 800 000 licenciements et 250 000 ruptures conventionnelles, soit plus d'un million de ruptures de CDI sur 18 millions de salariés. Faut-il en conclure qu'il est impossible de se séparer d'un salarié lorsque la conjoncture est difficile ? Enfin on rappellera que la loi a fixé à 8 mois la durée maximale des périodes d'essai pour les cadres et à 4 et 6 mois cette durée pour les non-cadres. Est-ce insuffisant pour apprécier la capacité de travail d'un salarié ? bref, ne peut-on constater que le salarié est déjà une variable d'ajustement et qu'il faudrait peut être profiter des scintillements alternatifs des étoiles pour porter de temps en temps ailleurs son regard lorsqu'il est question de coût du travail ?

15/10/2012

Vacance ?

Dans une de ces formules que les politiques adorent parce qu'ils pensent que ça fait malin, mais qui rappellent furieusement la réthorique de l'enseignement de bon aloi, Guillaume Peltier attirait cet été notre attention sur le fait qu'il n'y a pas loin du pouvoir en vacances à la vacance du pouvoir. La rentrée n'y a rien changé : le procès en immobilisme du pouvoir se poursuit, aggravé par le fait que cet immobilisme ne serait rompu que par de brusques réveils destinés à créer toujours plus de taxation. Pendant ce temps, les plans sociaux continuent, merci. Le piège du temps politique se referme sur l'exécutif. Car le temps politique, mais aussi le temps économique, sont des temps courts, et de plus en plus courts. Le temps social lui, est un temps long, et il n'y a guère de probabilité qu'il cesse de l'être.C'est ce décalage que nous vivons actuellement et qui laisse planer ce sentiment de vacance.

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Thomas Lévy-Lasne - Vacance

La Conférence sociale du mois de juillet a lancé un cycle de négociations qui devront être conclues avant la fin de l'année. Ensuite, s'enclenchera le processus législatif qui n'aboutira sans doute pas avant le printemps. Résultat, la future réforme annoncée du marché de l'emploi, de la flexi-sécurité, de la régulation de la précarité et des licenciements, ce n'est pas avant un an pour les premiers effets. Trop long ? le seul moyen d'aller plus vite aurait été que les partenaires sociaux ne négocient pas, que le Parlement intervienne sans délai et que la loi impose et contraigne. Le choix de faire vivre la démocratie sociale, de laisser aux interlocuteurs sociaux le temps de construire eux-mêmes des solutions est un pari risqué par le décalage qu'il crée avec l'urgence d'une situation sociale dégradée. Mais c'est le pari qu'une réforme n'est efficace que si les principaux acteurs sont parties prenantes à son élaboration. Et la conviction que la loi seule ne peut pas tout, comme il est constant que l'on ne change pas une société par décret. Reste donc dans l'attente à payer le prix politique de cette méthode d'action qui consiste, comme dirait l'autre, à laisser du temps au temps.

11/10/2012

Le monde à l'envers

Les pratiques d'évaluation mises en place par les entreprises n'ont pas toujours bonne presse chez les salariés et encore moins chez leurs représentants. Il n'est pas rare qu'une organisation syndicale appelle à ne pas participer activement aux entretiens annuels (ne pas s'exprimer, ne pas signer) voire carrément à les refuser. Il n'est pas non plus toujours bien vu que le manager demande régulièrement des comptes à ses équipes et suive de près leur activité : contrôle, flicage ou harcèlement sont rapidement dégainés. Plus largement, tout l'arsenal managerial déployé par l'entreprise souffre d'une suspicion de principe, d'une contestation des pratiques et au final d'un manque de crédibilité. Mais si l'on tourne son regard vers le juge et que l'on se demande comment il perçoit tout ceci, surprise : pour les tribunaux, l'évaluation et le fait d'être managé sont des droits du salarié. Le monde à l'envers.

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Georg Baselitz - The Gleaner - 1978

La Cour de cassation a souvent reproché à l'entreprise de n'avoir pas fait bénéficier le salarié d'un entretien annuel, ou de n'avoir pas tenu compte des propos du salarié ou de ses propres conclusions lors de cet entretien. Erigé en droit du salarié, l'entretien annuel devient dans les prétoires l'obligation pour l'entreprise d'avoir de la transparence sur l'appéciation qu'elle porte du travail du salarié, les attentes qu'elle manifeste à son endroit et la manière dont elle envisage l'avenir. Il en est de même pour toute activité manageriale : ne pas s'occuper d'un salarié et ne pas faire d'actes manageriaux  c'est ouvrir la porte de l'illicite placard dans lequel on voudrait faire entrer le salarié. Pour les juges, l'employeur ne peut renoncer à jouer son rôle d'employeur et le salarié peut revendiquer que cette fonction soit assumée. Le monde à l'envers c'est donc tout simplement pour le juge une remise à l'endroit.

09/10/2012

L'étau se resserre

Au mois de juin 2011, après un suspens tout relatif et une grande frayeur bien orchestrée, les DRH soufflaient à la lecture de la décision de la Cour de cassation validant le forfait jours. Nous annoncions pourtant déjà qu'il ne fallait peut être pas tant se réjouir du côté des services RH et qu'un train pouvait en cacher un autre  (voir ici). Ce train n'a pas manqué de passer et son souffle risque de décoiffer quelques habitudes. Honneur au Sud : la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a décidé le 23 mars 2012 qu'un chef de rayon de chez Décathlon, bombardé cadre et assujetti à un forfait jours, devait percevoir des heures supplémentaires car le forfait était nul. En effet, le chef de rayon était soumis à des horaires imposés et à des jours de présence le samedi et parfois le dimanche choisis par l'entreprise. Rien du cadre autonome donc. D'autre part, son salaire était fixé au tout premier niveau de rémunération des cadres. Rien qui soit en rapport avec les sujétions liées à sa fonction. Le forfait étant nul, le salarié aura droit à 11 h supplémentaires par semaine sur 2 ans, soit un total de plus de 16 000 euros. Et comme les corps de Martina Abramovic et son acolyte se resserrent sur le visiteur de musée qui doit choisir de passer ou pas, de frotter ou non et de faire face à l'homme ou à la femme, l'étau du juge se resserre sur les entreprises qui pensaient trouver dans le forfait un outil permettant d'habiller à bon compte des pratiques qui n'en relèvent manifestement pas, comme c'est le cas pour les chefs de rayon de la grande distribution.

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Marina Abramovic - Imponderabilia - 1977

Une deuxième couche vient d'être rajoutée par la Cour de cassation elle-même. Dans sa décision du 26 septembre dernier, elle annule le forfait jours d'un cadre qui consacrait un certain temps, et même un temps certain, à son activité professionnelle. La Cour de cassation rappelle que le forfait jours n'est ni un forfait jours et nuits, ni un forfait week-end, ni un forfait toute la journée. Et que l'accord collectif qui met en place le forfait jours doit prévoir des mesures de nature à faire respecter des temps de travail raisonnables. En l'espèce un entretien annuel et des rapports trimestriels de la hiérarchie sur la charge de travail, soit le minimum syndical qui n'existe pas dans toutes les entreprises, ne sont pas suffisants. Le forfait jours doit donc être annulé et des heures supplémentaires payées.

Lorsque l'étau commence à serrer à ce point, cela peut faire mal. Et nul doute que les juges ne s'arrêteront pas en si bon chemin. A tous ceux qui se félicitaient de la survie du forfait jours, il ne reste donc plus qu'à se mettre au travail pour en garantir la validité.

CA AIX 29 mars 2012.pdf

Cour Cass. 26 septembre 2012.pdf

08/10/2012

Les calculs de côté

Dès lors que l'on décide que des sommes qui sont versées à un salarié bénéficient d'une exonération sociale et/ou fiscale, on ouvre la porte à l'optimisation financière, sans garantie aucune pour la finalité poursuivie. Quatre exemples : l'intéressement était un outil de motivation qui devait permettre aux salariés de bénéficier d'une rémunération supplémentaire liée au résultat de leur travail. Il n'est le plus souvent qu'un outil de la politique de rémunération qui permet de distribuer un complément de revenu à moindre coût (d'où les formules d'intéressement où l'on gagne à tous les coups). Les heures supplémentaires devaient distribuer du pouvoir d'achat : leur défiscalisation a surtout conduit à recycler sous forme d'heures supplémentaires des éléments de salaire d'une autre nature. Amusant de constater que peu de temps auparavant, lorsque l'autorisation de l'inspecteur du travail était nécessaire pour dépasser le contingent, on faisait exactement le contraire, payant sous forme de primes diverses et variées ce qui était des heures supplémentaires. Résultat : on peut parier que l'exonération et maintenant sa suppression sont d'effet à peu près neutres sur l'emploi.

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Troisième exemple : les indemnités de rupture du contrat de travail (licenciement, rupture conventionnelle). Destinées initialement à compenser un préjudice, elles sont régulièrement utilisées pour défiscaliser les sommes versées à l'occasion du départ. Dernier exemple : les exonérations liées à un zonage (quartiers sensibles, zones rurales, etc.). Un dirigeant d'entreprise me faisait remarquer qu'il devait son résultat à un déménagement et à son installation dans la périmètre d'une zone à exonération, davantage qu'à son activité. Et il en concluait qu'avec les différents systèmes d'aide, son métier de chef d'entreprise s'en trouvait modifié. Il devait dorénavant composer avec les inévitables calculs de côté chers à Rimbaud. Le pire dans cette affaire est que ces calculs de côté amènent à construire des équilibres qui se trouvent inévitablement mis en péril lorsque l'on veut soudainement supprimer la niche artificiellement créé au départ mais qui ensuite se trouve largement habitée. Piège redoutable pour le créateur et pour l'utilisateur, qui laisse tout de même sceptique sur la pertinence de ce type d'outils en matière sociale. En ce lundi matin, on militerait bien pour la suppression totale des niches à calcul, ce que Rimbaud résumait ainsi :

Les calculs de côté, l'inévitable descente du ciel et la visite des souvenirs et la séance des rythmes, occupent la demeure, la tête et le monde de l'esprit.

03/10/2012

La séparation des amis

C'est bien connu, c'est lorsque tout va bien que l'on se sépare. Vous êtes heureux dans votre couple ? divorcez ! vous partagez une amitié d'enfance ? renoncez-y ! vous vous plaisez dans votre travail ? allez voir ailleurs ! Vous aurez la bénédiction des magistrats pour ce faire. Tout empêtrés qu'ils sont dans leur appréhension de la rupture conventionnelle, les juges de Cours d'Appel nous délivrent quasi-unanimement le message selon lequel toute situation de litige entre l'employeur et le salarié interdit de recourir à la rupture par accord mutuel. Vous n'en pouvez plus de votre travail ? ne négociez pas une rupture conventionnelle vous dit le juge, démissionnez. Votre manager vous harcèle ? ne proposez pas au DRH de mettre fin à cette situation par une rupture conventionnelle, elle serait nulle. Vous venez de recevoir deux avertissements et vous trouvez que c'est trop ? ne proposez pas une séparation amiable, la démission vous tend les bras. On se demande parfois à travers quel prisme les juges appréhendent les relations de travail si seuls les bons amis peuvent faire le choix de se séparer en bénéficiant des avantages de la rupture conventionnelle.

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Les bons amis

Dans une décision du 16 juin 2012, la Cour d'appel de Versailles a ainsi déclarée nulle une rupture conventionnelle intervenue après que le salarié ait reçu deux avertissements. La Cour d'appel de Reims (16 mai 2012) a estimé qu'un litige en cours devant les Prud'hommes interdisait de se mettre d'accord pour rompre le contrat de travail. Et ainsi de suite. Seule la Cour d'appel de Montpellier (16 novembre 2011) a posé en principe que le litige n'était pas un obstacle à la décision commune de séparation. Une fois de plus, la lumière vient du Sud.

Il n'en reste pas moins qu'il serait urgent que la Cour de cassation fixe une doctrine claire. Qu'elle considère comme nulle toute rupture intervenue dans un contexte de litige, et c'est la petite mort programmée de la rupture conventionnelle. Qu'elle n'en fasse pas un principe mais s'attache uniquement à vérifier la validité du consentement donné par le salarié et nous aurons fait un pas de plus vers la reconnaissance que le salarié n'est pas un incapable majeur.

28/09/2012

Droit d'expression (2)

Qui s'oppose à une réorganisation est aussitôt taxé d'être résistant au changement, accroché au passé, incapable d'évoluer ou de s'adapter. Ce discours bien connu voudrait faire croire que toute nouveauté est une bonne nouvelle et que le status quo n'est pas la préservation du bien mais le refus du meilleur. Il est pourtant des réorganisations qui sont des catastrophes, des évolutions qui sont des régressions et des nouveautés qui sentent davantage le moisi que le passé. C'est sans doute ce que pensait ce cadre de direction qui a diffusé un tract annonçant la constitution d'un syndicat et dans lequel il était écrit que « l’angoisse, le stress, la méfiance et les incertitudes des uns et des autres, et ce face aux rumeurs et autres restructurations tant sournoises qu’hasardeuses, nous ont conduits à la création d’un syndicat autonome d’entreprise ». C'en était trop pour son employeur qui le licencie pour manquement à l'obligation de loyauté, estimant que ces critiques émises par quelqu'un qui a participé à l'élaboration du projet ne pouvaient que viser à déstabiliser et décrédibiliser la direction. La Cour d'appel a validé le licenciement. Pas la Cour de cassation qui trouve là une nouvelle occasion de rappeler que tous les salariés, sans exclusive pour les cadres de direction, bénéficient d'un droit à l'expression.

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Dazibao en Chine avant leur interdiction en 1979

Les juges rappellent aux employeurs qui auraient tendance à penser que tout salarié a une obligation de confidentialité ou est soumis à un devoir de réserve, que le principe est inverse : tout salarié jouit d'un droit d'expression. Le principe est donc la liberté. Et la seule limite est de ne pas abuser de cette liberté. Pas d'insultes donc, ni de diffamation ou de dénigrement. En l'occurence, la Cour de cassation a estimé qu'il n'y avait rien de tout cela dans les termes utilisés. Ceux qui liront la décision, publiée ci-dessous, constateront que si "sournois" est une injure pour le juge toulousain (Cour d'appel de Toulouse), il n'en est rien pour le juge parisien (Cour de cassation). Je vous laisse le soin d'en tirer les conclusions.

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27/09/2012

Droit d'expression (1)

La méthode utilisée par la CPAM de Moselle pour traiter la question des risques psychosociaux, dans un contexte de fusion de caisses, de réorganisation, d'évolution des métiers et des comportements des assurés, n'est pas la plus fréquente. Des salariés volontaires ont été formés à la méthode d'identification des risques mise au point par l'ANACT et ce sont eux qui ont été interviewer leurs collègues, avant que les résultats de ce travail d'enquête ne soit traduit en plan d'action par des groupes de travail. Cette démarche participative est rare : le plus souvent, l'analyse des risques est un travail d'expert auxquels les salariés sont associés, ou pas, mais remettre ainsi le coeur du travail d'enquête dans les mains des salariés demeure peu usité. Sans doute en partie par crainte de perdre la maîtrise du processus, nouvelle vérification que le salarié est souvent managé à la manière dont Yves Montand transportait les flacons de nitroglycérine dans le Salaire de la Peur : en serrant les fesses pour qu'il ne se passe rien.

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Pour originale qu'elle soit, la méthode ne fait que redécouvrir ce que la loi Auroux du 4 août 1982, dont nous venons de fêter les 30 ans, avait souhaité promouvoir. Le droit d'expression directe et collective des salariés. Toujours présent dans le code du travail (articles L. 2281-1 et suivants), il l'est beaucoup moins dans les pratiques. Qui met en place des groupes de travail régulièrement dans l'année pour que les salariés puissent s'exprimer sur leurs conditions de travail ? qui organise des modalités spécifiques de ce droit pour que l'encadrement n'en soit pas privé ? qui se préoccupe de recueillir les avis et propositions des salariés sur les conditions et l'organisation du travail ? C'est pourtant une obligation depuis 30 ans. Nouvelle preuve que plutôt que de voter des textes nouveaux sur les risques psychosociaux, la pénibilité ou le harcèlement, si l'on appliquait les textes existant on arriverait sans doute à un meilleur résutat.

14/09/2012

Annoncer la couleur

Quelle idée de recruter les magistrats par concours ! du coup les filles réussissent mieux que les garçons, la magistrature se féminise et les décisions aussi. Il faut dire que Florence, Céline et Sandrine n'y ont pas été de main morte. En interdisant à la Caisse d'Epargne de Rhônes-Alpes Sud de continuer à pratiquer le système de gestion de la performance mis en place quelques années plus tôt, elles s'autorisent à passer les pratiques manageriales au crible de la protection de la santé des salariés. Certes, ce n'est pas la première fois qu'un juge considère que l'organisation du travail, par elle-même, peut être attentoire à la santé. La mise en examen de l'ex-PDG de France Télécom est là pour nous le rappeler. Mais ici, c'est la motivation retenue par les trois magistrates qui retient l'attention. Si le système mis en place est illicite c'est parce qu'il est bâti sur le principe que le seul objectif fixé aux salariés c'est de faire mieux que les autres, ce qui est particulièrement générateur de stress. Selon les juges, si l'entreprise met en place un système de gestion de la performance, cela signifie qu'elle doit fixer des objectifs, lesquels sont susceptibles d'être soumis à contrôle. En d'autres termes il faut annoncer la couleur. A ce sujet, si le Rouge et Noir sont les couleurs de Toulouse et de Chicago, il semblerait qu'elles soient également celle de Saint-Denis.

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La gestion de la performance à la Caisse d'Epargne est assurée par un système de Benchmark : les performances des agences et des salariés font l'objet d'une évaluation continue qui agrège les résultats et positionne chaque agence et chaque salarié en fonction de sa performance relative. Cette mise en concurrence interne permanente (proche de la fameuse concurrence interne compétitive, voir ici) est censée tirer les performances vers le haut. Elle traduit surtout le choix de privilégier la compétition sur la coopération pour améliorer le résultat. On ne s'en étonnera pas lorsque l'on constate que l'entreprise affirme dans ses conclusions qu'il n'y a pas de lien entre le système de benchmark et les risques psychosociaux "qui font partie du monde actuel du travail". Comme si ce monde actuel n'était pas un construit mais une donnée intangible. Et au passage, les magistrates n'oublient pas de tordre le cou aux accords sur les risques qui ne visent pas à prévenir les risques à la source, donc à les minorer, mais à les traiter lorsqu'ils surviennent par des numéros verts d'écoute, des reclassements ou mobilités ou encore des mesures qui renvoient le problème à des solutions exclusivement individuelles (formation, aménagement du poste de travail...). Or, le Code du travail est formel : les mesures préventives et collectives doivent primer sur les mesures curatives et individuelles. C'est ça le problème avec les filles qui lisent et qui travaillent : contrairement au Poker vous ne pouvez plus les bluffer et il faut annoncer la couleur.

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09/09/2012

Sous le volcan

Une mission me procure l’occasion de découvrir la Réunion que je ne connais pas. Je choisis d’anticiper un peu le déplacement pour aller marcher sur le volcan. Première surprise en arrivant, la mer est noire et grise dans la lumière du matin. Elle se colorera au fil de la journée mais cette première vision m’enchante. Car la couleur est la même que celle des coulées de lave dont l’apparition me saisit. Pas une coulée identique à une autre. De la matière venue du cœur de la terre et de la fusion qui prend des formes de hasard qui inscrivent le mouvement et le rythme de l’éruption dans des plissements, ondulations, failles, magmas et autres sculptures de la nature. Mieux que le test de Rorsach, mesdames et messieurs les recruteurs, présentez à vos candidats le magma originel et ses torsions méphistophéliques et vous verrez qu’il n’est guère possible de ne pas aller au fond de soi-même lorsque l’on est confronté à la matière qui surgit aujourd’hui comme elle a surgi il y a des millions d’années.

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Ici, c’est l’hiver. Le soleil a des rayons discrets, le vent  envoie les vagues affronter les côtes découpées.

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Et comme dans les Antilles, la religion a ses adaptations locales. Ici, la Vierge Parasol, qui apparaît entre lave et forêt, veille sur vous.

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Mais finalement la plus grande surprise c’est peut être qu’après 11 heures d’avion, avoir survolé l’Europe puis l’Afrique pour aller découvrir l’Océan Indien, tout le monde s’adresse à moi…en Français !

06/09/2012

My Generation

C'est parti ! après les contrats d'avenir qui ressemblent furieusement aux contrats du passé (désolé, pas résisté) sans toutefois arriver à innover comme le faisait le dispositif des nouvelles qualifications au début des années 80, voici les contrats de génération qui vont associer un jeune et un senior dans un bel élan paternaliste ou le papa senior sera tuteur du fiston junior pour lui mettre le pied à l'étrier et lui apprendre les bons vieux trucs des anciens. C'est pas touchant ça ? pour le coup, l'imagination a encore oublié de s'inviter au pouvoir et l'on nous ressert la transmission des compétences, comme l'horizon indépassable du senior. Ce faisant, on continue à reproduire le modèle de l'ancienneté des trente glorieuses comme si quelques révolutions culturelles et technologiques n'étaient pas passées par là. Avec le retour de la morale à l'école, antienne de nos gouvernements successifs, on a tout de même l'impression que le passé ne passe pas et qu'inventer des solutions nouvelles adaptées à un contexte qui évolue plus vite que les individus qui tentent d'y survivre est hors de portée de nos gouvernants successifs. Pas très excitant tout ça. Mais enfin, tout le monde à l'air content. Plus ou moins, mais content, du MEDEF à la CGT. Pour ma part, quitte à retourner dans le passé, au contrat de génération je préfère mille fois My Generation, c'est carrément plus Rock'n Roll et surtout c'est pas démodé.


05/09/2012

Responsable mais pas coupable

Rarement formule aura rencontré un tel écho et provoqué tant de débats. Le fameux "responsable mais pas coupable" de Georgina Dufoix a fait scandale en son temps. Il est pourtant rigoureusement juste en droit. La culpabilité s'exerce exclusivement au plan pénal, alors que la responsabilité, notion beaucoup plus large, peut concerner d'autres domaines du droit et notamment le droit civil.

C'est ce qu'a rappelé au printemps dernier la Cour de cassation en estimant que si une tentative de suicide d'un salarié sur son lieu de travail après un entretien avec le DRH et un Directeur technique peut être qualifiée d'accident du travail,elle ne saurait en elle-même et en l'absence de circonstances particulières imputables à l'entreprise, constituer une faute inexcusable de l'employeur et encore moins un délit pénal (Cass. soc., 31 mai 2012, n° 11-18.614).

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Soluto - Le regard coupable

Lorsqu'un accident du travail se produit, ou qu'une maladie professionnelle survient, l'entreprise est toujours responsable, mais rarement coupable. En effet, elle est responsable en tant qu'employeur de la couverture du risque accident du travail et maladie professionnelle. Cette responsabilité s'exerce dans le cadre de la sécurité sociale et comme pour toute assurance, plus le nombre de sinistres augmente, plus les cotisations seront élevées. Le deuxième niveau de responsabilité est celui de la faute inexcusable : l'employeur n'ayant pas rempli ses obligations de prévention, il est considéré comme responsable de l'accident. L'indemnisation du salarié s'en trouve améliorée soit sous forme de rente, si une incapacité subiste, soit sous forme de capital. Enfin, l'entreprise peut être coupable si l'action est menée au pénal, sachant que quasiment tous les manquements à la sécurité peuvent fonder une action justifiée pénalement. Les deux premiers risques sont exclusivement financiers. Le dernier associe la sanction pénale (prison, amende) à la sanction civile. Mais il est rarement mis en jeu, les salariés (et leurs assureurs) préférant souvent un procès civil dans lequel le régime de la preuve est libre, que le régime pénal qui est un procès accusatoire dans lequel la preuve doit être administrée par le demandeur. Et il est clairement plus simple d'obtenir l'engagement de la responsabilité de l'employeur plutôt que celui de  sa culpabilité. Car si l'entreprise est toujours responsable elle est très rarement coupable.

19/08/2012

Appropriation

Contrairement à l'idée reçue selon laquelle le travail serait une valeur, il sera ici soutenu que le travail n'est ni une valeur, ni un bien, ni un mal. Il sera également soutenu qu'il y a des sots métiers, des métiers aliénants et dépersonnalisant ; et qu'évidemment le travail peut être source de tous les plaisirs. A condition toutefois de se l'approprier et de le personnaliser. A chacun de trouver la bonne manière d'y parvenir.

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16/08/2012

Le bar est ouvert !

Il faut bien avouer que fixer la date de réouverture un 16 août laisse percer l'intention de reprise en douceur. Mais quelques vieux souvenirs sportifs me rappellent que c'est moins l'effort qui est difficile que les changements de rythmes brutaux. Et la journée du 15 août est sans aucun doute la plus lente de l'année parisienne, celle où les canards et les bateaux sur l'eau vont plus vite que les humains.

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Aussi, en cette journée de transition, est adopté le principe de ne pas revenir trop vite au commentaire de l'actualité. Il sera donc juste indiqué que la seule loi votée à l'unanimité dans le courant de l'été est celle portant sur la pénalisation du harcèlement sexuel. Loi demandée par les associations et les victimes et donc sans doute nécessaire. Toutefois, on peut se demander si la voie civile, à la fois plus rapide et plus simple, n'aurait pas été préférable et si ce n'est pas rendre un mauvais service aux plaignants que de s'engager dans une procédure accusatoire toujours périlleuse alors que le civil permet une administration plus simple de la preuve. Même si l'on oublie pas la dimension symbolique de la sanction pénale, il n'est pas certain qu'une société ait le bon réflexe en pénalisant systématiquement tous les comportements fautifs en oubliant les autres voies de réparation.

Et me voilà presque au rythme des canards et des bateaux.