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26/07/2010

Du temps réel

Au bord du Tage, l'ancienne usine ne produit plus d'électricité. Elle abrite un lieu d'expositions, celle consacrée à la fée électricité étant permanente. Elle s'accompagnait cet été d'une exposition consacrée au peuple (Povo, Povo) sur laquelle nous reviendrons très prochainement.

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Musée de l'électricité - Lisbonne
A l'intérieur, les machines sont huilées, graissées, patinées, prêtes à lancer leur grand cri d'acier, de feu, de vapeur, d'huile et de chair également car ces machines là  consomment aussi de la matière humaine. Elles viennent de Londres et témoignent de la révolution industrielle issue des machines à vapeur. Pour la première fois, la machine n'était pas un outil travaillant au rythme de l'homme et augmentant sa puissance mais au contraire une impératrice dictant son rythme à l'homme. De ce temps, le temps du travail n'a jamais plus été le même.
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Machine à vapeur Londonienne
Avant la Grande roue de la révolution russe, selon la formule de Cendrars, il y aura la grande roue des machines à vapeur. Toutes deux broieront le temps et les hommes en imposant des rythmes qui leurs sont propres et dans lesquels l'homme n'a plus tout à fait sa place. La science fiction défend l'idée que la vitesse finit par abolir le temps, les machines l'ont au contraire rendu plus présent à l'homme, l'y assujetissant comme le joug maintient la tête de l'animal inclinée vers le sol.
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Turbine - Musée de l'électricité - Lisbonne
Et la machine fit que le temps devint une abstraction. L'industrie se mit à raisonner en millièmes d'heures et des ingénieurs passent des heures devant leur écran, nouvelle version de la planche à dessin, pour gagner quelques un de ces millièmes. Que cela se traduise par la suppression au final de postes de travail est également devenu une abstraction. Et comme toujours lorsqu'une chose disparaît, on fait surgir le mot censé la remplacer. Est ainsi apparu, avec la folle vitesse de circulation de l'information, le concept de "temps réel". Il s'agit bien évidemment d'immédiateté et non de réalité, mais la notion de temps est devenu si abstraite, et si insupportablement abstraite, qu'il fallait la faire ressurgir. Allons y donc pour le temps réel. Mais si l'on veut redonner du sens à ce terme, que serait donc un temps réel ?
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Place du commerce - Lisbonne
Peut être celui où l'on prend le temps, sur une place, de guetter l'improbable qui ne manque pas de survenir sous la forme d'une jeune inconnue qui éprouve le temps en figeant quelques instants de grâce.
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Belle démonstration que le temps horizontal et le temps vertical n'ont ni la même épaisseur ni la même intensité. Mais qu'il est bon de goûter aux deux. Comme il est bon de se souvenir que l'information peut aussi circuler par le papier, que la lecture du journal le matin devrait être la prière quotidienne selon Hegel et que le poisson peut toujours attendre. Et tout à coup, le temps devient vraiment réel.
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07/04/2010

Modernité du Baroque

Six expositions consacrées à l'art baroque à Naples. Quel meilleur lieu pour présenter la chair incarnée, les débordements de la vie, le bouillonnement humain, la magnificence de la création et l'exubérance tragique de la condition humaine. On explique parfois le baroque comme une réaction aux formidables avancées des sciences et de la raison qui ont marquées le XVIIème siècle. Par le retour au réel, à l'homme de chair du Caravage, s'opère une réappropriation du monde.

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Le Caravage - La flagellation - 1607

Les concepteurs de l'exposition Barock qui se tient au Musée d'art contemporain Dona Régina, le MADRE (!), affirment cette même volonté de réancrage dans le réel. Devant la profusion de connaissances, d'informations et de rationalité, l'art contemporain peut constituer un retour au réel qui permet à l'individu de ne pas être dépossédé de lui-même. Parmi les artistes présentés, c'est sans doute Orlan qui illustre le mieux le projet. Ayant promu le corps oeuvre d'art dans une chirurgicale réappropriation, elle figure au moment de la Pâques et de la passion chrétienne, l'affirmation de l'existence personnelle inaliénable, sinon inaltérable.
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Orlan - Opération réussie - 1994

Et, mieux que Malraux, elle nous permet de comprendre pourquoi le XXIème siècle sera religieux, comme le baroque avait accompagné la Révolution Catholique.
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Orlan en Sainte Thérèse

La question du retour au réel s'impose également aux organisations. Est-ce par hasard si le suicide peut apparaître comme une réappropriation de soi dans une organisation à la froide rationalité déshumanisante ? Paraphrasons Rabelais pour affirmer que performance sans conscience n'est que ruine de l'âme, et des corps aussi. Plutôt la vie.
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30/03/2010

De l'individu dans son environnement

Le débat entre nature et culture n'est jamais clos, ni entre essentialisme et constructivisme, ni entre responsabilité individuelle et responsabilité collective, ou en d'autres termes, l'individu ou le système. La pensée, et les actes, classés politiquement à droite pointent plutôt l'individu seul responsable et tiennent l'environnement pour une excuse facile. La pensée, et les actes, classés politiquement à gauche mettent plus volontiers en avant un individu innocent dans une société coupable et s'interrogent sur la responsabilité individuelle au sein de déterminismes sociaux. Ces classiques débats ont été repris par les organisations syndicales et patronales sur le harcèlement et la violence au travail. Affaires d'individus ou de pratiques manageriales et de culture d'entreprise ? Quelques êtres pervers ou des organisations malsaines ? seule certitude : des salariés en souffrance un peu partout.

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Jean-Michel Basquiat

Le projet d'accord national interprofessionnel conclu le 26 mars 2010 sur ce thème laisse les deux options ouvertes et invite tout autant à prévenir, et sanctionner, les comportements individuels qu'à s'interroger sur les facteurs de risques liés à l'environnement y compris les modes de management. Complétant l'ANI du 2 juillet 2008 sur le stress au travail et l'ensemble des mesures relatives à la gestion de la santé des salariés, l'ANI du 26 mars 2010 officialise la nécessité de lutter contre la violence et le harcèlement au travail. Il faudra également que les partenaires sociaux, lassés de lutter contre, signent également des accords qui invitent à lutter pour : pour le bien être au travail par exemple ou mieux pour l'amélioration du confort au travail. Cela romprait un peu avec la vision doloriste du travail et militerait pour qu'il ne soit plus perçu comme une provocation d'associer, autant qu'il est possible, plaisir et travail.

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Le lapsus du jour de la responsable de projets :  "Il faut que j'en parle à mon écrispe...". Est-ce mon interlocutrice, son équipe ou les deux qui sont crispées ?

23/03/2010

Propositions inversées

En 1869 paraît à compte d'auteur un ouvrage qui va dynamiter, quelques années plus tard et après sa "redécouverte" par André Breton et Philippe Soupault, la littérature. L'ouvrage, composé de 6 chants (les chants, comme dans la Divine Comédie de Dante) s'intitule les Chants de Maldoror, il est signé du Comte de Lautréamont pseudonyme d'Isidore Ducasse. L'ouvrage est effrayant mais faut-il y voir seulement une blague potache à la Alfred Jarry, Maldoror n'étant qu'un avatar noir du Père Ubu ? peut-être s'il n'y avait "Poésies". Ce court ouvrage placé à la fin des Chants de Maldoror et qui semble en inverser toutes les valeurs. "Poésies" que Breton recopie à la bibliothèque nationale, après Rémy de Gourmont, et qui confère à l'ouvrage sa véritable portée. "Poésies" dont la lecture enchaînée à celle des Chants perturbera davantage le lecteur que la simple lecture des horreurs de Maldoror. Confronté à son inverse, le texte prend toute sa mesure.

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Jean Benoit - Le bouledogue de Maldoror

Cet exercice d'inversion, Jean-Paul Jacquier, l'excellent animateur du non moins recommandable site Les clés du social (http://www.clesdusocial.com/) s'y est livré à propos d'un rapport remis en février dernier au Premier Ministre à propos du Bien être au travail. Les rapporteurs, dont on notera qu'ils ont interrogé moultes dirigeants mais peu d'intéressés, formulent dix propositions. Concluant que s'il y avait lieu de proposer c'est que l'action faisait défaut, Jean-Paul Jacquier nous livre les dix propositions inversées, ce qui donne :
Les directions générales et leurs conseils d'administration ne s'impliquent pas dans les questions de santé au travail
Les managers de proximité ne prennent pas en compte la santé des salariés
Il n'existe pas dans les entreprises d'espaces de discussion
Les partenaires syndicaux ne sont pas impliqués dans la construction des conditions de santé au travail
La mesure des conditions de santé au travail n'est pas engagée
Les managers ne sont pas formés et préparés à la conduite d'équipes
Les collectifs de travail sont réduits à l'addition d'individus
Les projets de réorganisation n'intègrent pas l'impact humain
Les entreprises ne se préoccupent pas des impacts extérieurs de leur activité, notamment sur les fournisseurs
Les salariés en difficultés ne sont pas accompagnés mais laissés seuls face à leurs problèmes

Comme pour Maldoror, c'est la proposition inversée qui nous délivre la clé du message. Vous pouvez également lire le rapport ci-dessous.


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Jean Benoit et Mimi Parent  en 1948

Petit hommage à Jean Benoit, auteur du fameux bouledogue de Maldoror, dont l'oeil pétillant et l'esprit libre vivent toujours et menacent les infirmières de leur éternelle vigueur.

12/03/2010

Milieu du gué

Le milieu du gué est la position de tous les dangers. Les appuis sont mal assurés, le danger peut guetter issu de l'eau ou de chacune des rives, le milieu est sinon hostile du moins inhabituel et les repères manquent pour prendre des décisions qui se doivent pourtant d'être immédiates et n'admettent pas toujours de seconde chance. D'une manière plus générale, les positions médianes ne sont pas toujours les plus confortables ainsi vaut-il mieux n'utiliser qu'une chaise, plutôt que deux, pour s'asseoir. Une seule chose à faire donc lorsque l'on est au milieu du gué : traverser.

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Olivier Debré - Longue traversée gris bleu de Loire à la tache verte

La peinture d'Olivier Debré nous invite à la fluidité du voyage, à se laisser porter par le courant, à dériver autour des ilôts de verdure qui apparaissent ci et là. Le courant dans lequel on s'immerge ici nous est favorable et il ne tient qu'à nous d'en jouir à loisir. Douceur de Loire, force de l'abstraction, immensité du sentiment dans lequel on s'immerge avec volupté. Cette traversée là est bienheureuse et résoud toutes les crispations.
C'est d'une traversée de ce type dont aurait bien besoin le dispositif du Droit individuel à la formation, soumis pour l'instant à des tensions contradictoires qui le laissent au milieu du gué et dont on espère qu'il ne conduira pas à mener les salariés en bateau. Pour plus d'explications, ci-dessous un extrait d'un article réalisé avec Jean-marie Luttringer pour Droit Social qui paraîtra en Avril prochain et qui nous présente un DIF au milieu du gué.

 

27/01/2010

Psycho ou Socio

La photo pourrrait représenter deux amis qui goûtent au premier soleil du printemps et devisent de peu de mots, appréciant le temps, l'instant, les arbres, la beauté du moment et du lieu. Nous sommes à Rodez en 1946 et Antonin Artaud va quitter le lendemain l'hôpital psychiatrique dans lequel il a subi 58 séances d'électrochocs, qui ont tant secoué son corps qu'une séance lui brisa une vertèbre. Ces électrochocs lui ont été administrés par le Docteur Ferdières, assis à côté de lui, presque amical, un peu  triste peut être de la séparation.

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Le docteur Ferdières et Antonin Artaud - 1946 - Rodez

Le docteur Ferdières était-il un sadique, une brute, un pervers ? ou bien appliquait-il les thérapies de l'époque, celles que l'institution psychiatrique qualifiait de soin et non de violence ? la réponse à cette question trouve une actualité dans la négociation en cours sur le Harcèlement et la violence au travail. Les partenaires sociaux doivent transposer un accord cadre européen  sur ce sujet datant de  2006. La première version du projet d'accord fournie par les organisations patronales porte sur la prévention, les dispositifs d'alerte, les comportements individuels. Les organisations syndicales sont unanimes pour demander, comme la Cour de cassation l'a déjà reconnu, que l'on puisse mettre en cause non uniquement des personnes mais également l'organisation qui peut être violente. Deux approches des relations dans l'entreprise : l'approche sociologique qui part de l'organisation, l'approche psychologique qui part des individus. Qui est responsable, et rendons justice à Georgina Dufoix la responsabilité n'est pas la culpabilité, l'organisation ou l'individu ? ou bien l'interraction entre les deux ? pour répondre à cette question, mesdames et messieurs les négociateurs, une petite pensée pour Artaud.
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Patrick Santus - Artaud

 

 

 

04/01/2010

Rentrée des classes

Pas besoin d'avoir préservé la part d'enfant en soi pour, certains matins, être habité par un lancinant : "Je veux pas y aller".

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Jeunes catalans dubitatifs à l'idée de reprendre l'école

Il est certain qu'il est des activités plus amusantes que celles qui sont proposées les jours de reprise.
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La jeune génération au pouvoir

Mais il est vrai que les vacances fatiguent, surtout les musées, et que le travail permet de reprendre un rythme plus reposant.
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Museo Nacional d'Arte de Catalunya

Et puis il reste, paraît-il, un monde nouveau à construire. Alors, comme y invite Christophe Collomb : VAMOS !
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19/11/2009

Humeur au travail

Séance de travail avec des administrateurs d'OPCA. La réforme de la formation professionnelle percute de manière importante les organismes paritaires : prélèvement de 13 % de la part du nouveau fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, remise en cause de leur agrément, obligation de conclure une convention avec l'Etat sur leurs objectifs et moyens, quasi-obligation de financer des formations pour demandeurs d'emploi, nouvelles missions de GPEC en faveur des entreprises et salariés...c'est principalement pour eux que la réforme de la formation professionnelle constitue un profond changement. Chez les administrateurs, le sentiment fortement partagé de subir ce que l'Etat impose sans concertation. Première étape : briser la morosité pour retrouver une dynamique. Coup de main bienvenu d'un administrateur : "Le pessimisme est une humeur, l'optimisme c'est du travail".

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Miro - Encarnar la alegria - 1968

La formule est dérivée de celle d'Alain :"Le pessimisme est d'humeur, l'optimisme est de volonté". Mais je préfère la formule du travail, plus opérationnelle et sur laquelle on peut bâtir : construire une politique, identifier des moyens, poser les conditions de la négociation avec l'Etat, s'appuyer sur ce que l'on fait pour légitimer ce que l'on propose de faire, affirmer son autonomie, refuser la peur de l'autre mais le reconnaître pour ce qu'il est, consentir à évaluer sa propre action de manière professionnelle...bref, que du travail. La grisaille du matin à laissé place au soleil d'après-midi. Vite, au travail !

29/09/2009

Faire disparaître le travail

Le musée Ingres à Montauban présente jusqu'au 4 octobre 2009 "Ingres et les Modernes". Plus de 200 oeuvres sont réunies qui démontrent l'incroyable influence que Ingres a exercé sur les peintres de toutes époques et de tous styles et l'invraisemblable créativité qu'il a su propager à travers les siècles. Mais au milieu de tous ces génies de la peinture, Picasso, Masson, Matisse, Bacon, Chirico, Picabia et plus près de nous Orlan, Cindy Sherman, Ernest Pignon-Ernest ou encore Araki sans oublier le montalbanais Duchein, ce qui frappe au milieu de la profusion de peintures de tous genres ...ce sont encore les peintures d'Ingres. L'oedipe, le songe d'Ossian, Angélique, la Source...l'oeil revient sans cesse aux tableaux d'Ingres, s'en approche et les caresse comme y invite la douceur satinée de sa peinture et la beauté surgit de l'absence de touche, car Ingres peint sans touche, vous avez bien lu.

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Ingres - La source - 1856
Mais écoutons le :"La touche, si habile qu'elle soit, ne doit pas apparaître : sinon elle empêche l'illusion et immobilise le tout. Au lieu de l'objet représenté elle fait voir le procédé, au lieu de la pensée, elle dénonce la main". Si vous voulez que l'on voit son résultat, cachez le travail.
Cette leçon doit être présente à chacun de nos actes. Quelle que soit la complexité d'un problème, le temps passé à le résoudre, il s'agit de mettre à disposition de ceux qui auront à l'affronter  des solutions simples et efficaces. Le professionnalisme consiste avant tout à valoriser la finalité de l'action et non à agir pour se valoriser. A cette condition, nous serons comme Ingres véritablement, et non faussement, modernes.

08/07/2009

Un geste intelligent

Le sénateur Carle vient d'être nommé rapporteur du groupe de travail intercommissions du Sénat qui va examiner le projet de loi sur l'orientation et la formation professionnelle. Le sénateur Carle est un homme de bonne volonté. Il connait le domaine puisqu'il a présidé la commission sénatoriale qui a rendu l'an dernier un rapport sur la formation professionnelle continue. Il plaide pour  une réforme globale de la formation professionnelle, initiale et continue pour éviter d'avoir des dizaines de milliers de jeunes qui quittent le système éducatif sans qualification ou l'enseignement supérieur sans diplôme. Bravo. Le sénateur Carle souhaite rénover l'orientation professionnelle et revaloriser "l'intelligence du geste". Cette déclaration suscite immédiatement une envie : offrir au sénateur Carle ce tableau de Roland Penrose, pour la beauté du geste :

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Roland Penrose - Cri sur les toits - 1939

Ce tableau a été réalisé par Roland Penrose pour la Royal Academy. Cette institution avait refusé une de ses oeuvres, car elle contenait des mots inconvenants. Penrose proposa cette gestuelle de mains qui fut acceptée. A y regarder de plus près, les membres de la Royal Academy auraient découvert qu'en langage des signes les mains disent "Shit". C'est ce geste que l'on a effectivement envie d'offrir au sénateur Carle. Déjà Raffarin avait parlé de l'intelligence de la main. Aujourd'hui on nous ressert l'intelligence du geste. Ces expressions traduisent un double mépris, qui va à l'encontre de ce que leurs auteurs, à qui nous faisons crédit et c'est bien là qu'est le problème, souhaitent promouvoir. Parler de l'intelligence du geste c'est considérer qu'elle ne peut être située ailleurs et que les métiers dits "manuels" se résument à des habiletés dépourvues de réflexion. L'intelligent du geste n'est donc pas un intelligent de l'esprit. Mépris des individus. Et c'est également considérer que certains métiers ne sont que des techniques applicatives qui relèvent du seul savoir-faire expérientiel et habituel. Mépris des métiers. En réalité, répétons le, les métiers manuels n'existent pas, à l'exception de celui de l'auteur de ce blog qui risque la tendinite à s'acharner à taper sur son clavier de manière répétitive pour faire la peau à des inepties qui ont la vie dure et dont on continue à considérer que cela relève du bon sens alors que cela n'a tout simplement pas de sens.

22/06/2009

Légalité intelligente

Fête de la musique, même à Paris il y a des Bodegas et des bandas. Celle-ci met de l'ambiance dans le quartier Saint-Paul. Un instrument attire mon attention : sur le cuivre un sticker avec la mention "Légalité intelligente" ! Photo et réflexions : qu'est-ce qu'une légalité intelligente ? sans doute une légalité non envahissante, qui ne régit que le strictement nécessaire (et non qui prétend tout régler de nos vies), qui est synthétique et très travaillée (faire chaque loi comme si l'on rédigeait la déclaration des droits de l'homme pourrait être la consigne donnée au législateur), qui est élaborée à partir de cas qu'elle généralise car telle est sa fonction (et non une loi pour chaque cas) et qui n'est pas modifiée avant que d'être appliquée. Soit à peu près systématiquement l'inverse de ce que font nos législateurs depuis plusieurs décennies.

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Jean-Pierre Willems - Légalize intelligence

Mais après observation plus fine, déception. Le sticker sur le trombone disait "Legalize intelligence" et non "Légalité intelligente". La seconde appellation aurait été plus subsersive. Car à demander, même sur le mode humoristique, la légalisation de l'intelligence, on en demeure à demander encore à la loi de faire en nos lieux et place et on considère que la loi peut quelque chose pour l'intelligence. Non décidément, il était très bien ce slogan : "Légalité intelligente". Tous à vos banderoles !

30/05/2009

Un peu de lecture pour le week-end

Week-end de Pentecôte. Travail ou pas ? les jardins de Chaumont sont une belle destination. Fêter l'anniversaire d'un ami un beau prétexte, mais en faut-il, pour prolonger le week-end. Pour ceux qui passent par ce blog, un peu de lecture : une analyse du projet de loi sur la formation professionnelle publiée dans la Semaine Juridique Social.    SemaineJuridiqueSocial.pdf

On peut adopter la position de la Liseuse.

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Jean-Jacques Henner - La liseuse

Si la position n'est pas adaptée à la lecture d'une analyse juridique, alors ce texte de Parménide dont vous pouvez soit apprécier la poésie, soit  réfléchir à la profondeur, soit vous laisser aller à faire les deux. Bonne lecture et bon week-end.

« Les cavales qui m'emportent, m'ont entraîné  Aussi loin que mon cœur en formait le désir,  Quand, en me conduisant, elles m'ont dirigé  Sur la voie renommée de la Divinité, Qui, de par les cités, porte l'homme qui sait.  J'en ai suivi le cours; sur elles m'ont porté,  Attelés à mon char, les sagaces coursiers. Des jeunes filles nous indiquaient le chemin.  L'essieu brûlant des roues grinçait dans les moyeux, Jetant des cris de flûte. (Car, de chaque côté, Les deux cercles des roues rapidement tournaient), Cependant que déjà les filles du Soleil, Qui avaient délaissé les palais de la Nuit,  Couraient vers la lumière en me faisant cortège,  Écartant de la main les voiles qui masquaient  L'éclat de leur visage. Là se dresse la porte  Donnant sur les chemins de la Nuit et du Jour.  Un linteau et un seuil de pierre la limitent.
Quant à la porte même, élevée vers le ciel,  C'est une porte pleine, aux battants magnifiques,  Et Diké aux nombreux châtiments en détient  Les clefs, dans les deux sens contrôlant le passage Pour la séduire et la gagner, les jeunes filles  Usèrent à son endroit de caressants propos,  Afin d'habilement la persuader d'ôter,  Rien qu'un petit instant, le verrou de la porte. La porte bascula, ouvrant un large espace  Entre les deux battants, en faisant pivoter
Les gonds de bronze ciselé sur leurs paumelles  Retenus par des clous et d'épaisses chevilles.  C'est alors que, par là, tout droit, les jeunes filles Poussèrent à s'engouffrer le char et les cavales  Sur la route déjà tracée par des ornières.  La déesse avec bienveillance me reçut.  Elle prit ma main droite en sa main et me dit :
Jeune homme, toi qui viens ici, accompagné  De cochers immortels, portés par des cavales, Salut! Car ce n'est point une Moire ennemie,  Qui t'a poussé sur cette voie (hors des sentiers  Qu'on voit communément les hommes emprunter),  Mais Thémis et Diké. Apprends donc toutes choses,  Et aussi bien le cœur exempt de tremblement  Propre à la vérité bellement circulaire, Que les opinions des mortels, dans lesquelles  Il n'est rien qui soit vrai ni digne de crédit;  Mais cependant aussi j'aurai soin de t'apprendre  Comment il conviendrait que soient, quant à leur être,  En toute vraisemblance, lesdites opinions,  Qui toutes vont passant toujours. »

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Le Bernin - Daphnée et Apollon

13/05/2009

Vite et bien

L’artisan qui lira le titre de cette chronique pourra être choqué : vite et bien ne vont pas ensemble, le travailleur honnête associe depuis Lafontaine patience et longueur de temps. Le vite fait bien fait sent le petit malin qui bâcle, plus ou moins habilement, mais qui ne travaille pas vraiment. Le véritable labeur requiert du temps, dont la patine est la marque de la conscience et de la peine.

Et pourtant, Picasso, Masson, Pollock, Yves Klein, Matisse, Van Gogh,…

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Schroeder-Sonnenstern - La déesse de la hâte

Le rapport au travail est depuis l’origine du salariat un rapport au temps, et demeure fondamentalement un contrôle du temps. Combien d’entreprises ont conclu avec leur encadrement des conventions de forfaits en jours, censées reposer sur l’autonomie des salariés dans l’organisation de leur  temps de travail, sans rien changer à leurs pratiques manageriales de gestion des temps, des présences, et de mesure de l’investissement personnel par le temps passé. Le management par objectif n’est souvent qu’une cautère sur la jambe de bois du manager demeuré ancré dans le modèle industriel et taylorisé de la gestion des temps. Et l’on voit les comptes rendus d’activité, les fiches de temps, les outils de planification, etc. envahir l’espace, et le temps, des salariés. Ce paradoxe pourrait traduire l’impossibilité de dépasser l’oxymore du salarié subordonné et autonome. Il suffirait pourtant d’identifier les champs respectifs de la subordination et de l’autonomie. Le pouvoir de direction peut s'exercer sur la finalité et les moyens à utiliser (manières de faire) et laisser au salarié la liberté, et donc la responsabilité, de son temps. Tiens ? Liberté ? et si le véritable problème était dans l'insupportable que constitue la liberté d'autrui ? vite, des salariés libres et responsables.

Et pour finir, Malcolm de Chazal : "La pensée voyage à la vitesse du désir"

07/05/2009

Extension du stress

L’ANI sur le stress au travail signé le  8 juillet 2008 par les organisations patronales et syndicales vient d’être étendu. Il est donc applicable aux entreprises et aux salariés des secteurs de l’industrie, du commerce, des services, de la construction et de l’artisanat. Pour l’économie sociale, l’agriculture et les professions libérales, il faudra attendre des accords de branche.

L’accord retient une définition subjectivo-objective du stress : le stress est une perception par le salarié, élément subjectif, d'un décalage entre les contraintes de l'environnement et les ressources dont il dispose pour y faire face, éléments objectifs. Traiter le stress au travail impose donc de travailler sur l'adéquation entre les attentes de l'organisation vis-à-vis du salarié et les moyens mis à sa disposition pour l'exercice de ses missions. Autrement dit, le stress doit s'appréhender de la même manière que tout système de pilotage de la performance et plus globalement comme tout système de management.

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Séverine Romandie - Bleu Stress

Les entreprises auront une alternative pour traiter le stress : soit l'aborder de manière spécifique, soit l'inclure dans une politique plus générale de prévention des risques et de protection de la santé. Plaidons ici pour cette seconde approche qui garantit mieux des dérives contre l'approche excessivement psychologisante du stress, versus la souffrance au travail, pour laisser la question sur le terrain qui doit être le sien : quelles sont les exigences de l'organisation, quels sont les moyens qu'elle met à la disposition des salariés, quels sont les modes de régulation des fonctionnements, comment sont gérées les relations au travail, etc. Bref, il s'agit simplement de ne pas oublier que le stress dont il est question est le stress au travail. L'extension de l'ANI ne doit pas conduire à l'expansion sans limite du stress. Une inversion des valeurs pourrait d'ailleurs conduire à travailler sur les conditions d'amélioration du confort au travail et sur le développement du bien être plutôt que le traitement du mal être. Question purement sémantique ?  hum !

17/04/2009

BELLE JOURNEE !

Le mot résonne comme un écho, dans la rue, dans les bureaux, au café, au téléphone, en bas des mails : BON COURAGE ! le vendeur à la sauvette à qui j'achète les journaux le matin m'en gratifiait régulièrement. A force de s'entendre répondre : BELLE JOURNEE ! il s'y est mis également. Il me souhaite une bonne journée  mais ne peut parfois s'empêcher d'ajouter...et bon courage !

Drôle d'époque où vivre réclame du courage. Pas de la gaité, du bonheur, de l'envie ou du désir (essayez de souhaiter à vos voisins, à vos collègues : bon désir !). Retour à l'imaginaire argotique : on va au chagrin, comme le mineur.

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Jean-Pierre Willems - Le voyage en journée - 2009

La thématique de la souffrance au travail, si présente et si psychologisante dans son approche, les suicides sous pression, les licenciements et l'emploi jetable....ce bon courage sonne comme le glas de la valeur travail. L'invitation joyeuse des Fabulous Trobadors à ce que chacun invente son emploi et travaille dans la joie semble bien loin. Pour cette belle journée, les paroles des Fabuleux toulousains comme cadeau, essayez-les aussi en musique.

17/03/2009

Le champ du négociable

Avant de procéder à la recherche de reclassements possibles dans le cadre d'un licenciement économique, l'employeur demande aux salariés de répondre à un questionnaire listant leurs souhaits, notamment les zones géographiques vers lesquelles ils accepteraient une mobilité. Puis il fait des propositions en fonction des souhaits recueillis. Cette procédure, fréquente en pratique, n'est pas juridiquement correcte selon la Cour de cassation car non conforme aux dispositions du Code du travail qui imposent à l'employeur de rechercher tout reclassement possible dans les emplois de même catégorie voire de catégorie inférieure (C. trav., art. L. 1233-4). L'employeur ayant une obligation exhaustive il ne peut ni préjuger du choix des salariés ni réduire la portée de son obligation, serait-ce en accord avec le salarié. L'erreur ici fut de croire que le reclassement pouvait être effectué d'un commun accord alors qu'il s'agit d'une responsabilité exclusive de l'entreprise qu'elle ne peut partager avec le salarié. L'erreur porte donc sur le champ du négociable.

 

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Van Gogh - Champ de blé aux corbeaux - 1890

L'accord des parties ne peut pas tout : inutile de faire signer à un salarié un contrat par lequel il accepte d'être payé moins que la convention collective, de rembourser ses salaires en cas de faute ou de démission, de renoncer à une prime conventionnelle du fait de la situation économique de l'entreprise, d'aller en formation en dehors du temps de travail sans percevoir l'allocation formation, etc. Peu importe que l'accord du salarié soit réel, sincère voire même que le salarié soit demandeur. La première question à se poser pour la validité d'un accord est : l'objet même de l'accord est-il négociable ? à défaut, l'accord n'a pas de valeur, bien que signé par le salarié. Il constituera parfois du "droit psychologique", c'est-à-dire celui qui n'est pas sécurisé mais qui repose sur la méconnaissance du droit par l'une des parties, ou bien un accord légitime, reposant sur la confiance, mais non valide. La différence entre les deux est dans la confiance réciproque. Gageons toutefois que l'on peut conclure un accord basé sur la confiance et néanmoins juridiquement correct. Valide, confiant et légitime en somme.

09/03/2009

Inactif et suractif

Fred Deux a un jour, après avoir découvert la peinture et la litterature, disparu des statistiques de la population active. Electricien puis employé de libraire, il est devenu inactif rejoignant les 37 millions de personnes qui ne font pas partie de la population active, laquelle, composée des travailleurs salariés, des travailleurs non salariés et des demandeurs d'emploi, représente aujourd'hui 28 millions de personnes. Fred Deux a donc rejoint la majorité de ses concitoyens dans l'inactivité. A partir de ce jour, il n'a cessé.....d'être actif. Qui en douterait peut admirer ses oeuvres à la Halle Saint-Pierre à Paris et constater le travail, l'abnégation, l'effort mais aussi le courage nécessaire à la réalisation de ces immenses dessins qui ouvrent sur des mondes intérieurs infinis. Le repli sur soi, physiquement visible chez Fred Deux, est parfois une ouverture vers d'autres mondes.

 

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Fred Deux - Cible moi

Lors du débat sur les 35 heures, les opposants à la mesure ont fait valoir de manière récurrente que l'augmentation du temps de loisir ne pourrait que diminuer l'engagement du salarié pendant le temps travaillé. Cet argument s'appuie sur trois présupposés : le travail non économique est forcément du loisir, l'oisiveté comme on le sait est source de vices et le travail ne peut être que contraint (d'où le nécessaire contrôle physique des salariés et la faiblesse du télétravail en France). Avec le recul, toutes les études démontrent que la réduction du temps de travail a accru l'intensité du travail et généré des gains de productivité. Le désinvestissement n'est donc pas vérifié et les réticences de nombreuses directions des ressources humaines devant les demandes de travail à temps partiel ou de télétravail, souvent vécues comme des éloignements de l'entreprise, apparaissent bien difficile à justifier autrement que par le souci de perpétuer ce contrôle physique du travail directement issu du 19ème siècle. Peut être le fait que Fred Deux ait du s'éloigner du travail pour mieux travailler pourra-t-il donner à réfléchir au-delà des préjugés et statistiques.

25/11/2008

Plaisir au travail

Suicides au travail, mal-être, stress, souffrance…telle semble être l’actualité du travail. Au début du 21ème siècle, le travail-aliénation aurait donc pris le pas sur le travail libérateur et émancipateur. Ne doutons pas que le sinistre « Arbeit macht frei » des camps de concentration n’ait durablement rendue tabou l’idée de faire du travail une source de liberté ou de plaisir et non de contrainte ou de souffrance.

Dans l’entreprise elle-même le travail est peu souvent présenté de manière positive : renvoyé à des objectifs, à des processus, à des résultats, à des livrables, ….le travail n’est guère mis en valeur.

Prenons les entretiens d’évaluation : atteinte d’objectifs, projets de l’entreprise, projets du salarié (satané obligation de se projeter qui contribue à déposséder le salarié du présent) mesure de la compétence,… quantification et objectivation règnent en maîtresses sévères.

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Matisse - Le bonheur de vivre - 1905-1906

Quelle entreprise osera introduire le confort et le plaisir dans la discussion : confort au travail plutôt que sécurité au travail, confort dans les fonctions plutôt que capacité à maîtriser le poste, plaisirs à rechercher plutôt que projets à envisager, plaisir du résultat obtenu plutôt que sur-performance ou sous-performance, plaisir au travail plutôt qu’implication. Propos de doux rêveur ? c’est que l’époque doit s’y prêter !

19/11/2008

Le voile et le dévoilement

La Cour d’Appel de Douai vient d’annuler l’annulation du mariage pour cause de virginité dissimulée, remettant ainsi en  cause la décision du TGI de Lille qui a suscité tant de commentaires. Cette volte face  démontre que le juge n’est pas toujours très à l’aise avec la religion, et le juge du travail n’échappe pas à la règle. En la matière il est partagé entre deux principes : celui de permettre à chacun le libre respect de ses opinions et de veiller à ce que la religion ne soit pas source de discrimination et celui de considérer que la religion à l’inverse ne peut permettre au salarié de revendiquer des avantages particuliers ou de se soustraire à certaines obligations et surtout qu'elle n'a pas sa place sur le lieu de travail.

Sur cette voie étroite, il a par exemple été décidé récemment par un juge belge que : « La liberté de manifester sa religion n'est pas absolue ; des restrictions sont possibles lorsque les pratiques religieuses sont de nature à provoquer le désordre. L'usage interne à une société commerciale, interdisant au personnel en contact avec la clientèle le port de certaines tenues vestimentaires ne cadrant pas avec la neutralité et plus précisément le port du voile religieux, repose sur des considérations objectives propres à l'image de marque de l'entreprise commerciale. Un tel usage, qui s'applique à l'ensemble des travailleurs ou d'une catégorie de travailleurs, n'est pas discriminatoire. » (Cour du travail de Bruxelles - 15 janvier 2008).

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Gustave Moreau - Salomé et la danse des sept voiles

Les juges, en France, ont une position similaire. Le licenciement d’une salariée portant le voile a été jugé légitime lorsqu’elle est en contact avec la clientèle ou lorsqu’il s’agit d’un signe ostentatoire assimilé à du prosélytisme, interdit sur les lieux de travail. A l’inverser, le porte du voile ne pose pas de problème particulier pour une salariée qui fait du télémarketing ou lorsque le port du voile était déjà effectif et a pu être constaté lors du recrutement sans susciter de réaction particulière de la part de l’employeur.

Et pour ceux qui pensent que, comme Salomé, il serait préférable de toujours enlever le voile, rappelons cette décision qui a fait les délices de générations d’étudiants : le licenciement pour faute d’une salarié travaillant en chemiser transparent et sans soutien-gorge pour cause de perturbation de la bonne marche de l’entreprise. Fragile entreprise !

 

26/09/2008

La fin de la mise à la retraite

Le plan gouvernemental pour l'emploi des seniors a été intégré dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui sera adopté à l'automne. Dans ce projet figure la suppression totale de la possibilité pour une entreprise de mettre à la retraite un salarié à compter du 1er janvier 2010. Cette échéance est également celle de la fin de validité des accords dérogatoires qui permettent aujourd'hui de mettre un salarié à la retraite d'office entre 60 et 65 ans s'il réunit le nombre de trimestres suffisants pour bénéficier d'une retraite à taux plein. D'ici à peine plus d'un an, le départ à la retraite ne pourra donc plus s'effectuer qu'à l'initiative du salarié.

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Bernadette Leclercq - Mouche à la retraite

Cette mesure, a priori favorable pour le salarié qui choisira librement (ou économiquement) la date de sa retraite, pourrait de fait se révéler peu avantageuse : l'indemnité de mise à la retraite est souvent, dans les conventions collectives, plus importante que l'indemnité de départ à la retraite laquelle est moins bien traitée fiscalement et socialement. Par ailleurs, la nouvelle rupture conventionnelle perd toute exonération fiscale et sociale pour les salariés de plus de 60 ans et ne constituera pas une solution alternative. Ce qui permet de penser que les petits arrangements sous forme de licenciement fictif assorti d'une transaction ont encore de beaux jours devant eux.