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05/03/2014

Une circulaire peu inspirée

La loi de sécurisation de l'emploi était porteuse de multiples innovations, depuis la création du compte personnel de formation, jusqu'aux accords sur l'emploi ou la mobilité. Mais la mesure phare était sans conteste la mise en place de la Base de données unique, destinée à l'information des représentants du personnel : la nature des informations était revue dans une logique moins quantitative et plus qualitative, avec, pour la première fois depuis la création des comités d'entreprise en 1945, l'obligation pour l'employeur de donner une information prospective. Bref, la loi était plutôt inspirée. Le problème est que l'administration ne l'est guère. 

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Tanguy - L'inspiration 

Dans un projet (sic) de circulaire publié le 26 février, le Ministère du Travail nous livre deux recommandations qui mettent à mal les objectifs de la loi. La première consiste à préconiser aux entreprises de remplir la base de données avec les informations déjà existantes, notamment celles du bilan social, dont la majeure partie (notamment celle qui concerne la formation) est totalement obsolète et non pertinente. Que l'on en juge sur la partie formation : alors que la loi nouvelle demande à l'entreprise de définir le montant de son investissement formation, ce qui pourrait ouvrir un utile débat sur la définition de cet investissement, la circulaire préconise de reprendre les données du bilan social, moyennant quoi l'investissement sera exprimé par un % de la masse salariale consacré à la formation, pourcentage dans lequel sont inclus les salaires qui n'ont jamais constitué un investissement.  La deuxième recommandation est une mise en garde : la circulaire indique que tous les représentants du personnel qui ont accès à la base de données sont tenus à une stricte obligation de discrétion. Rappelons à l'administration que le propre d'un représentant du personnel est de représenter le personnel. Et que dans ce cadre là, il n'est jamais qu'un relais de l'information qu'il doit, c'est sa mission première pour exercer ses fonctions, répercuter auprès des salariés. Et que si les représentants du personnel sont soumis à une obligation de confidentialité pour les informations présentées comme confidentielles, il est hors de question de les empêcher de communiquer avec les salariés sur les informations reçues et les projets qu'elles sous-tendent, sauf à réduire le dialogue social à un échange entre personnes autorisées dont serait exclus les salariés. On peut difficilement avoir une approche plus institutionnelle et plus éloignée du fondement même du droit des salariés à la représentation. Une fois de plus donc, l'administration par une libre interprétation défait ce que la loi avait fait et pose les bases non pas de l'innovation et du développement d'un dialogue social qui ait du sens, mais de la perpétuation de tous les conservatismes. Comme on le sait, il est plus facile de changer les textes que les mentalités. 

Projet_de_circulaire_BDU-delais.pdf

30/10/2012

Vider les chaises

On en a désormais la certitude, c'est une entreprise d'éradication de certaines organisations syndicales qui est à l'oeuvre, et la Cour de cassation vient y prêter la main d'une curieuse manière. La loi du 20 août 2008 qui a profondément modifié les règles de représentativité des organisations syndicales, repose sur le principe que c'est lors des élections professionnelles que se mesure la représentativité, tant dans l'entreprise qu'au niveau des branches ou de l'interpofession. Les résultats globaux de représentativité sur ces deux derniers niveaux seront connus de manière officielle en 2013. Et au niveau de l'entreprise, les résultats de l'élection déterminent le poids de chaque organisations syndicale, rompant avec le principe d'égalité qui a prévalu pendant des décennies. Le législateur a également fait le choix de réserver aux organisations ayant deux élus au comité d'entreprise la possibilité d'y désigner un représentant syndical. La Cour de cassation, après le Conseil constitutionnel, vient de confirmer que cette règle ne portait pas atteinte au pluralisme syndical. C'est sur ce sujet que la Cour de cassation en rajoute une couche.

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Dans une décision du 24 Octobre 2012, les juges de la Cour suprême décident en effet qu'un accord ne peut prévoir qu'une organisation syndicale ayant moins de deux élus au CE conserve la possibilité d'y désigner un représentant. Selon les magistrats, la condition de disposer de deux élus est d'ordre public absolu. Rappelons que le rôle du représentant syndical est assez passif : il participe au CE sans voix délibérative. Mais il permet à son organisation d'être au courant des débats, ce qui est toujours utile lorsque ladite organisation n'a pas d'élus au CE, et ce qui est parfaitement inutile lorsqu'elle en a, deux a fortiori. La Cour de cassation a donc privilégié la solution qui ne sert à rien. Ou plutôt à une chose. A donner toujours plus de moyens aux organisations majoritaires et toujours moins aux autres. Cela s'appelle une volonté de vider les chaises et de réduire par tous les moyens le nombre d'organisations et le nombre d'élus. Le dialogue social s'en portera mieux paraît-il. On demande à voir.

Cass. Soc. 24 Octobre 2012.pdf

12/04/2012

Mars piraté !

Non, ne cherchez pas du côté de Jacques Chaminade futur colon de mars ni, pour les complotistes, du côté de la CIA qui aurait déjà soudoyé d'hypothétiques habitants de la planète rouge, non le Mars en question c'est le système qui gère les résultats des élections professionnelles depuis la loi du 20 août 2008. Le site ouvert par le Ministère du Travail pour centraliser l'ensemble des résultats des élections de délégués du personnel et de comités d'entreprise (c'est ici) a subi en début d'année une attaque informatique. Selon le Ministère, le pirate, non identifié, n'aurait fait que copier des procès-verbaux d'élections qui sont publics. Même si, vieux réflexe juridique, on présume la bonne foi, on ne peut s'empêcher de penser que réaliser un piratage informatique pour copier ce qui est accessible à tout un chacun, c'est moyennement crédible, à moins qu'il ne s'agisse d'une erreur de cible et qu'en s'attaquant à Mars le pirate inconnu ait cru s'en prendre à la NASA.

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Mars

L'attaque informatique démontre tout simplement l'impatience de certaines organisations dont la survie dépend purement et simplement des résultats des élections. En effet, avant la fin de l'année seront publiés des arrêtés de reconnaissance fixant la liste des organisations syndicales représentatives dans les branches professionnelles et au niveau interprofessionnel. L'enjeu n'est pas mince qui, pour la première fois depuis deux siècles, reconnaîtra officiellement une différence entre les organisations syndicales, longtemps considérées comme se valant en tout. Terminée l'égalité de principe, chacun sera jugé à l'aune des suffrages qu'il a recueilli. Aucune organisation n'échappera à la perte de représentativité dans une ou plusieurs branches professionnelles. Quant au niveau interprofessionnel, seule la CFTC paraît véritablement menacée. A 6 mois de l'échéance, on comprend mieux la tentation du pirate d'approcher le rapport de forces, à moins qu'il n'ait tenté de modifier certains résultats ou, rien n'étant exclu, que l'objet de la manoeuvre ait été de démontrer la faiblesse du système pour mieux contester ensuite les résultats qu'il fournira. Réponse d'ici la fin de l'année. En attendant, on vous prie de considérer que MARS se porte très bien, merci.

25/01/2012

Le sens des perles

On connait la peinture de Gabrielle d'Estrée et sa soeur, la duchesse de Villars, attribuée à l'Ecole de Fontainebleau. Le pincement, délicat, du sein serait la manière de désigner la favorite du roi Henri IV. Une autre peinture présentant les deux soeurs, moins connue, existe au Musée des Beaux-arts à Lyon. Ici, ce n'est pas la main, mais le collier de perles qui désigne la favorite. Les perles symbole de féminité (comme Vénus elles sont nées de l'écume), mais aussi de luxe...et de luxure. Ce qui n'épuise pas la signification de la perle, parfois utilisée dans la peinture comme symbole de l'innocence, un moyen détournée de révéler l'âge de la dame ou encore le nombre de ses amants. Dans la peinture, il est rare que les perles ne parlent pas.

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Il n'y a pas que dans la peinture que les perles sont présentes. Les textes de loi en recèlent quelques unes qui ne manquent pas de nous éclairer sur les intentions de leurs auteurs. Suite à diverses affaires de gestion contestée de comités d'entreprises (EDF, Air France, SNCF...), surgit l'inévitable proposition de loi pour garantir la transparence et prévenir toute malversation. Objectif louable mais l'on oubliera pas, et en matière juridique plus qu'ailleurs, que le diable adore se glisser dans les détails. On peut ainsi lire dans le projet que l'employeur arrête les comptes avec le secrétaire. Si tel était le cas, le comité d'entreprise changerait de nature. Il deviendrait cogéré par l'employeur et la délégation salariale qui porteraient chacun responsabilité des comptes. Or, le comité d'entreprise est une instance dont la gestion n'est pas paritaire. La qualité de Président ne renvoie pas à celle d'un Président de société ou d'association. Il s'agit essentiellement d'un Président de séance chargé d'organiser et d'animer les réunions qu'il convoque. Pour le reste, et de jurisprudence constante, l'employeur ne peut participer à la gestion du CE. Comment arrêter les comptes et engager sa responsabilité si l'on ne gère pas ? nouvelle illustration de lois hâtives, en réaction à l'actualité, non préparées ou pire très mal préparées et s'affranchissant de tout principe. Ou comment mettre à mal le droit en faisant du mauvais droit. Sur ce point, on est curieux de voir la portée que pourrait avoir l'article suivant, le dernier du projet : "Le comité d'entreprise exerce exclusivement les attributions qu'il tient de la loi". Compte tenu du large périmètre de compétences défini par la loi en matière économique et sociale ou de gestion des activités culturelles et sociales, cette volonté restrictive devrait être à peu près totalement dépourvue d'effet. Deux perles en sept articles, c'est un bon score.

14/09/2011

Quand le juge fait la leçon

....le Parlement ferait bien d'en tirer profit. Le TGI d'Orléans vient de faire preuve de pédagogie en jugeant que l'article L. 2324-2 du Code du travail était contraire à la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH). De quoi s'agit-il ? L'article en question, issu de la loi du 20 août 2008, prévoit qu'une organisation syndicale ne peut désigner de représentants syndicaux au comité d'entreprise, dans les entreprises de plus de 300 salariés, que si cette organisation y compte au moins deux élus. Lors du vote de la loi, cet article paraissait absurde : la capacité de désigner des représentants syndicaux au comité d'entreprise appartenait jusque-là à toute organisation syndicale, pourquoi la limiter à celles qui ont des élus, et qui disposent déjà à ce titre de toute l'information du comité, alors qu'un syndicat peut désormais être représentatif (avec 10 % des voix aux élections) sans avoir d'élu au comité ? les parlementaires ont fait valoir qu'il s'agissait de légitimer la présence des représentants syndicaux en limitant la possibilité de désignation en fonction de la représentativité. Les juges de province, contrairement à la Cour de cassation, ne se sont pas laissés abuser par le raisonnement : ils connaissent la musique et administrent une leçon au législateur dont l'objectif était manifestement uniquement de diminuer le nombre de représentants du personnel.

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Matisse - La leçon de piano

La leçon est en trois temps. En premier lieu, il est rappelé que la CEDSH garantit l'égalité de traitement des organisations syndicales. En second lieu, le législateur est placé devant ses contradictions : si la finalité est de conforter la représentativité, toutes les organisations représentatives, et pas seulement celles qui ont deux élus, doivent pouvoir désigner un représentant syndical. Troisièmement, compte tenu du rôle du représentant syndical, qui participe au CE pour que son organisation soit informée et avec uniquement voix consultative, il est logique que tout syndicat représentatif puisse désigner un représentant, y compris et même surtout, s'il n'a pas d'élu. Exit donc l'article L. 2324-2 qui constitue une discrimination syndicale, l'inégalité de traitement des organisations n'étant pas justifiée.

Et voici le législateur renvoyé à ses incohérences. On souhaite que la Cour d'Appel et la Cour de cassation, si elles sont saisies, apprécient la finesse du raisonnement du juge des bords de Loire et confortent sa position o combien justifiée et légitime. Envoyez la musique !

 TGI Orleans.pdf

18/05/2011

Et soudain, l'avalanche

Le délégué syndical a manifestement bien fait son travail. Les courriers sont tous arrivés le même jour. Une soixantaine. Adressés à la direction de l'entreprise qui compte quelques centaines de salariés. Une belle proportion. La rédaction des lettres est appliquée, le style est formel mais correct, il est dupliqué à l'identique dans les soixante missives. Seule change la formation demandée. Les soixante salariés qui demandent en même temps à bénéficier du DIF ont fait l'effort de choisir chacun une formation différente. Stupeur du DRH qui n'avait rien vu venir. Que faire face à une telle avalanche ?

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Turner - Avalanche dans les Grisons

Pas de panique. Rien ne presse. Tout d'abord convoquer un comité d'entreprise ou inscrire la question à son ordre du jour. Indiquer que l'entreprise avait jusqu'à présent comme politique de gérer les demandes au fil de l'eau, n'ayant quasiment pas de demandes. Devant l'afflux massif, et pour endiguer l'avalanche, l'entreprise ne peut plus apporter uniquement des réponses individuelles au cas par cas mais doit élaborer une politique. D'où la réunion du comité d'entreprise auquel cette politique est présentée. Ce qui permettra ensuite de répondre aux salariés, selon les choix de formation qu'ils ont proposé, qu'ils entrent ou non dans la politique de l'entreprise. Rien de bien méchant donc. Mais cela le serait encore moins si au lieu d'attendre que la pression ne vienne d'en bas, les entreprises se posaient la question de savoir à quoi peut servir la formation dans l'entreprise et pourquoi il faudrait privilégier le DIF comme modalité de formation. Pour ceux qui souhaitent avoir quelques idées, au cas où, vous pouvez consulter le document joint. Car plutôt que d'attendre l'ensevelissement on peut prendre l'initiative de choisir le bon chemin, celui qui met à l'abri des avalanches.

Pourquoi développer le DIF dans les politiques de formation.pdf

29/03/2011

Calendrier toulousain

Vite et bien = deux fois bien. Mais dans le Sud, on aime souvent prendre son temps et tous les arguments sont bons pour avoir des calendriers longs. La décision aurait-elle été la même au nord de la Loire ? la Cour de cassation nous le dira peut être si les recours nous mènent jusque-là. Mais nul doute que les représentants des employeurs n'encourageront pas Carrefour à faire appel, de crainte qu'une jurisprudence ne s'établisse en ce domaine. Mais de quoi s'agit-il donc ? d'une décision du TGI de Toulouse qui estime que lorsqu'un licenciement collectif est de nature à impacter la santé des salariés, il doit être soumis au CHSCT avant toute consultation du comité d'entreprise. Sacrés juges toulousains.

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Raymond Moretti - Toulousains

A vrai dire, cela devait finir par arriver. Depuis quelques années, la jurisprudence ne cesse, en s'appuyant sur une définition extensive de la santé au travail, d'étendre le champ d'intervention du CHSCT. Entretiens annuels, systèmes de rémunération, programmes de gestion de la performance...la liste est longue des sujets qui doivent être soumis au CHSCT préalablement au CE. En jugeant pour la première fois que le CHSCT devait être consulté en amont du CE s'il est établi qu'un plan de cessation d'activité a un impact sur la santé des salariés, difficile d'ailleurs qu'il n'y en ait pas, le juge fournit en tous cas aux représentants du personnel une magnifique perche pour rallonger les calendriers. Car voici l'employeur tenu de rajouter à la double consultation du CE sur le projet et sur ses conséquences sociales, une troisième consultation, préalable d'ailleurs aux deux premières, sur l'impact que le projet peut avoir sur la santé des salariés, ainsi que sur les mesures que l'entreprise compte prendre pour minorer cet effet. Pour les salariés toujours quelques semaines ou mois de gagnés. Pour l'entreprise, du temps perdu. A chacun son calendrier, et pour tous celui du juge.

 TGI ToulouseCHSCT-LicenciementEconomique.pdf

14/12/2010

De l'inconvénient d'avoir plusieurs chambres

Eric Rohmer avait choisi de compléter le titre de l'un de ses films, "Les nuits de la pleine lune", par un très moral proverbe champenois : "Qui a deux femmes perd son âme, qui a deux maisons perd la raison". Est-ce le fait d'avoir plusieurs chambres qui a fait perdre à la Cour de cassation le fil du raisonnement ? on peut le craindre en prenant connaissance d'une décision rendue le 9 décembre dernier. La deuxième chambre civile condamne un représentant du personnel a rembourser à la sécurité sociale les indemnités journalières perçues pendant un arrêt maladie. Motif ? le salarié a continué à exercer son mandat, certes en dehors de ses heures obligatoires de présence à domicile, mais la Cour a jugé que les heures de délégation, assimilées à du temps de travail effectif, constituaient une activité non autorisée et donc incompatible avec l'arrêt maladie. Surprise lorsque l'on sait que la Cour de cassation, mais la chambre sociale, a toujours jugé que la suspension du contrat, y compris la maladie, ne suspend pas le mandat. Et que la Cour de cassation toujours, mais la chambre criminelle, a déjà condamné pour délit d'entrave un employeur qui n'a pas convoqué un membre du comité d'entreprise à une réunion au motif qu'il était en arrêt maladie. Voici donc des chambres qui ne communiquent guère, ou plutôt qui ne se sentent pas liées par ce qu'il se passe dans la chambre d'à côté. Les juges ont trop de savoir vivre.

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Dorothea Tanning - La chambre d'amis

Plus exactement, chacun enfermé dans sa chambre juge à l'aune de son périmètre et se soucie peu de cohérence. A moins que le défaut de cohérence ne résulte plus naturellement de deux droits différents : le droit de la sécurité sociale et le droit du travail. En réalité, ce n'est pas la première fois qu'un tel conflit survient à propos de représentants du personnel qui exercent leur mandat pendant un arrêt maladie : le contentieux de droit du travail est favorable au salarié, pas celui de la sécurité sociale. Reprenons calmement :

1) L'arrêt maladie ne signifie pas que le salarié soit grabataire et doive s'abstenir de toute activité. Cela signifie simplement que l'état de santé est incompatible avec le travail, pas nécessairement avec tout travail. Une jambe cassée m'interdit de conduire un véhicule, pas de rédiger une chronique de droit du travail (je vais bien, merci, c'est un exemple).

2) Le mandat n'est pas lié au travail effectif. Il peut s'exercer pendant des temps de congés (congés payés, congé parental, etc.).

3) La question est plutôt celle du cumul d'indemnisation : peut-on cumuler des heures de délégation avec des indemnités journalières ? c'est ceci que censure la chambre civile et uniquement. Il ne faut donc pas conclure de la décision que les représentants du personnel ne peuvent exercer leur mandat pendant un arrêt maladie.

Que faire en pratique ? deux possibilités : ne pas rémunérer les heures de délégation au prétexte qu'elles ne peuvent être du temps de travail effectif étant incompatible avec l'arrêt maladie. Et le salarié conservera ses IJ. Le problème survient en cas d'accident du travail : c'était d'ailleurs le cas en l'espèce et la sécurité sociale refusa l'accident du travail. Deuxième solution : faire autoriser l'activité liée au mandat par le médecin traitant. Cela semble être la bonne solution. Dans une affaire jugé le 28 avril dernier, la chambre civile a rejeté le pourvoi (pour des raisons de forme certes) d'une caisse primaire contre la décision d'une Cour d'appel qui avait validé le fait qu'un salarié, à la fois musicien et enseignant, soit en arrêt de travail du fait d'une tendinite pour son activité de musicien mais poursuive ses activités d'enseignement dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique.

Et nous voilà donc conduits par le jeu cumulé des chambres, à demander aux médecins le droit de poursuivre, ou pas, l'exercice d'un mandat de représentation du personnel. Et que pense-t-on de cette solution dans les chambres ?

15/10/2010

Quand la CGC voit double

Le Conseil Constitutionnel a tranché le 7 octobre dernier : les dispositions du Code du travail adoptées spécialement pour la CGC ne sont pas inconstitutionnelles. De quoi s'agit-il ? depuis la loi du 20 août 2008, les organisations syndicales ne sont représentatives dans l'entreprise que si elles obtiennent au moins 10 % des suffrages exprimés lors du premier tour des élections du comité d'entreprise. Cette réforme, qui a pour objectif de légitimer les syndicats par le vote et d'assurer ainsi leur capacité à conclure des accords engageant les salariés, a été contestée par les syndicats "minoritaires" qui voient leur représentativité menacée. Normalement, les 10 % s'apprécient au niveau de l'entreprise. Sauf pour la CGC, d'où le recours, qui du fait de sa nature catégorielle, voit sa représentativité appréciée uniquement dans le ou les collèges (deuxième et/ou troisième) dans lesquels elle peut présenter des candidats. Dérogation inacceptable pour FO qui est à l'origine du recours. Pour le Conseil constitutionnel, la disposition ne fait pas problème et ne créé pas une inégalité car elle concerne un syndicat catégoriel et ne mesure une représentativité qui ne vaut que pour les salariés appartenant aux collèges concernés. Cette précision n'exclut toutefois pas que le calcul de représentativité pour la CGC soit double.

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B.M.C - Taureau mort et son double

En effet, la CGC peut demander un calcul de représentativité uniquement dans le collège cadre ou bien dans le collège cadre et le collège techniciens agents de maîtrise, qui sont les collèges dans lesquels elle peut statutairement présenter des candidats. Dans ce cas, si elle atteint 10 % elle est représentative mais uniquement pour les salariés appartenant à ce ou ces collèges. Elle ne peut donc pas conclure d'accord couvrant tous les salariés de l'entreprise. Par contre, si elle obtient, serait-ce à partir des résultats dans un seul collège, plus de 10 % au niveau de l'entreprise, malgré son caractère catégoriel elle peut prétendre représenter l'ensemble des salariés puisque la loi ne fixe aucun minima par collège dans ce cas. Avantage du syndicat catégoriel qui peut jouer soit uniquement sur sa catégorie, soit au niveau de toute l'entreprise si son poids catégoriel est suffisant. Seule restriction : la CGC ne peut présenter de candidats dans le premier collège sans perdre cet avantage de la double représentativité. En effet, si elle présente des candidats dans tous les collèges, elle n'est plus par définition une organisation catégorielle.

Et voilà comment une organisation à qui certains promettaient disparition avec la réforme de 2008 se trouve au contraire dans une situation plus confortable que d'autres organisations, notamment celle qui lui contestait ce droit à une double représentativité. Dans l'arène de la représentativité, tous les taureaux ne sont donc pas égaux. Reste à souhaiter de belles corridas !

14/09/2010

Le mythe du sciapode

Le sciapode est un être mythologique grec qui possède une jambe unique dotée d'un pied géant. Ces attributs lui permettent de poursuivre les animaux à la course, le sciapode est donc très rapide, mais également de s'abriter du soleil, le sciapode appréciant la méditation paisible. Preuve que vitesse et lenteur peuvent cohabiter harmonieusement.

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Le sciapode porte donc témoignage que l'on peut marcher sur un seul pied sans pour autant manquer de dynamisme. Ainsi en va-t-il del a gestion paritaire de la formation professionnelle qui, depuis 40 ans, s'est construite quasi-exclusivement à l'extérieur de l'entreprise soit dans la négociation de branche, soit dans les OPCA. A contrario, la gestion paritaire interne n'a guère évolué pendant la même période, le dialogue social sur la formation demeurant enserré dans une consultation souvent formelle du comité d'entreprise.

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Sciapode et autres monstres - 1544

Mais pourquoi faudrait-il rajouter une jambe au sciapode ? en faire un homme serait aussi tuer le mythe. La réponse dans la chronique réalisée pour l'AEF avec Jean-Marie Luttringer afin d'ouvrir un peu plus grand le champ du dialogue social sur la formation dans l'entreprise.

CE et FORMATION ou le MYTHE du SCIAPODE.pdf

Et pour ceux qui aiment le sciapode, le dernier vivant à ma connaissance : http://lepoignardsubtil.hautetfort.com/

10/06/2010

Bon appétit !

La restauration est une affaire sérieuse, il s'agit ici de table et non de tableaux, qui n'admet pas l'approximation. La Cour de cassation a eu l'occasion de le rappeler dans une décision du 30 mars 2010 à propos d'un conflit opposant un comité d'entreprise à un employeur. L'affaire était la suivante : l'employeur gérait le restaurant d'entreprise depuis plusieurs années. Il lance un nouvel appel d'offres et sélectionne un prestataire qui lui fait réaliser une économie sur le coût des repas. Le comité d'entreprise, qui jouit d'un monopole de gestion des activités culturelles et sociales dont fait partie le restaurant d'entreprise, réclame à l'entreprise la différence, soit l'économie réalisée, estimant que l'employeur ne peut baisser sa contribution au financement des activités culturelles et sociales. La Cour d'appel déboute le comité au motif que seules les activités dont le comité assure la gestion sont concernées. La Cour de cassation infirme cette analyse : le montant des dépenses réalisées au titre des activités culturelles et sociales comprend les activités gérées par le comité d'entreprise plus celles gérées par l'employeur. Si l'employeur baisse sa participation, le comité a le droit de récupérer la différence. Festin donc pour les élus !

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Jan Van Biljvert - Le Festin des Dieux - 1630

Les articles du Code du travail ont beau avoir été réécrits en 2008, ils datent sur le fond de 1945. Ils sont toutefois souvent peu ou mal appliqués. Le principe, rappelé par la Cour de cassation est pourtant simple : l'entreprise doit consacrer au financement des activités culturelles et sociales une somme qui ne peut varier à la baisse que si la masse salariale elle-même baisse. Ce principe concerne aussi bien les sommes versées au comité d'entreprise pour les activités qu'il gère directement que celles gérées par l'employeur dont ce dernier doit rendre compte au comité pour qu'il puisse exercer son contrôle budgétaire. Un comité d'entreprise est donc légitime à demander à l'employeur le coût de la restauration et à veiller à ce que les dépenses soient maintenues, à défaut à percevoir la différence entre les dépenses de l'année et le montant le plus élevé des trois années précédentes. Le comité d'entreprise peut également, s'il le souhaite, demander à l'entreprise de lui verser l'intégralité des fonds consacrés à la restauration et lancer les appels d'offres lui-même...ou mettre en place des tickets-restaurants. Dans tous les cas : "Bon appétit !".

16/09/2008

Surveillance sous contrôle

Alors que le fichier Edvige de surveillance et de contrôle des citoyens fait débat, l'actualité nous rappelle que la question de la surveillance ne s'arrête pas aux frontières de l'entreprise. Le groupe allemand Lidl vient d'être condamné, en Allemagne, à verser près d'un million et demi d'euros à ses salariés pour les avoirs espionnés, donc surveillé à leur insu, enregistrant leurs conversations ainsi que faits et gestes. L'objectif de l'entreprise, qui a reconnu les faits, était la lutte contre le vol et les fraudes. Que faire pour les entreprises confrontées à une telle situation ? rappelons que la loi française reconnaît comme légitime le fait que l'employeur contrôle l'activité des salariés du fait de son pouvoir de direction. Toutefois, toute mise en oeuvre de moyens ou de techniques de contrôle doit faire l'objet d'une information et consultation préalable du comité d'entreprise (C. trav., art. L. 2323-32). A défaut, il conviendra d'informer les délégués du personnel ou les salariés eux-mêmes.

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Source : Surveillance camera players

Ce principe a été réaffirmé par la Cour de cassation dans une décision du 10 avril 2008. Une entreprise avait consulté le comité d'entreprise sur la mise en place d'un outil de pilotage commercial, puis sur l'entrée en vigueur d'un système de rémunération variable. Le comité d'entreprise, s'apercevant par la suite que l'outil servait également à l'évaluation des salariés, a demandé à ce que l'utilisation du système soit suspendue jusqu'à ce qu'il soit consulté sur l'utilisation de l'outil aux fins de contrôle de l'activité des salariés. A bon droit estiment les juges, la consultation du comité ayant pour objet de vérifier la pertinence et la proportionnalité entre les moyens utilisés et les objectifs recherchés (Cass. soc., 10 avril 2008, n° 06-45-741). La portée de cette décision peut s'appliquer à tout système de contrôle dans l'entreprise : contrôle du temps, contrôle qualité, contrôle de satisfaction client, contrôle des process, etc. Dès lors que les systèmes de contrôle d'activité peuvent servir à prendre des décisions individuelles (évaluation, formation, rémunération, etc.) concernant les salariés, le contrôle du comité d'entreprise s'impose. Une surveillance sous contrôle en quelque sorte.

16/07/2008

Quand l'employeur voit double

La Cour de cassation a rendu le 24 Juin 2008 un arrêt qui peut être de nature à renforcer considérablement le contrôle syndical sur les processus de prise de décision de l'entreprise : selon les hauts magistrats un syndicat est habilité à agir en justice pour demander au juge des référés qu'il condamne un chef d'entreprise à réunir, informer et consulter un comité d'entreprise (Cass. soc., 24 juin 2008).
 
Par cette décision est posé le principe que si le comité d'entreprise est bien évidemment susceptible d'agir en justice pour protéger ses droits, cette prérogative appartient également aux organisations syndicales indépendamment de toute action du comité. L'employeur peut donc voir un double risque dans l'absence de consultation régulière du comité d'entreprise.
 
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Double vision - Campagne contre l'alcool au volant
 
En application de l'article L. 2132-3 du Code du travail, les syndicats peuvent en effet exercer devant toutes les juridictions les droits réservés à la partie civile concernant le faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collective de la profession. Il faut en conclure que les attributions du comité d'entreprise relèvent de l'intérêt collectif de la profession. Ce principe a permis, en l'espèce, à un syndicat d'EDF d'imposer à l'entreprise de suspendre une opération de regroupement de sociétés de maintenance pour n'aboutir qu'à une société sous-traitante, tant que le comité d'entreprise et le CHSCT n'ont pas été consultés.
 
Double possibilité d'action et double regard sur les risques donc pour l'entreprise qui ne peut garantir sa tranquillité par une négociation avec le seul comité d'entreprise sans craindre qu'une organisation syndicale, en désaccord avec le comité, n'oblige à sa consultation et dans l'attente aboutisse au gel des décisions engagées. 
 

27/03/2008

Consultation du CE sur la formation avant le 30 septembre

L'accord du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail prévoit dans son article 7 qu'afin de renforcer la cohérence entre les éléments d'anticipation mis en lumière dans le cadre de la GPEC et la mise en oeuvre du plan de formation de l'entreprise, les deux réunions de consultation du comité d'entreprise sur l'exécution du plan de formation de l'année précédente et sur le projet de plan de l'année à venir doivent respectivement intervenir avant le 1er octobre et le 31 décembre de l'année en cours.

Un projet de décret élaboré par le Gouvernement fixe en conséquence au 30 septembre, et plus au 15 novembre, la date de première consultation du comité d'entreprise. Les documents d'information doivent être envoyés trois semaines auparavant. Cette consultation portera donc sur le bilan de l'année 2007 complet et de l'année 2008 (premier semestre) ainsi que sur les orientations de la politique de formation de l'entreprise, dont la politique de DIF. La seconde consultation avant le 31 décembre 2008 portera sur les projets pour l'année 2009.

Deux rappels complémentaires :

- l'obligation de consulter n'est pas une obligation de faire. L'entreprise peut annoncer une politique à parfaire ou un plan de formation à compléter en cours d'année dès lors qu'il n'est pas entièrement établi en fin d'année. Rien n'impose donc à l'entreprise d'avoir bouclé un plan de formation avant la fin de l'année ; 

- l'entreprise n'est pas quitte avec les deux consultations qui constituent des obligations minimales. Toute décision de portée collective prise en cours d'année dans le domaine de la formation professionnelle suppose une consultation préalable du comité d'entreprise au titre de ses compétences générales (C. trav., art. L. 432-1). Ainsi une évolution du plan de formation en cours d'année impose une consultation supplémentaire du comité d'entreprise.