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08/01/2013

Le gardien et le tireur de penalty

Lorsque je travaille avec des responsables ressources humaines et qu'ils me parlent des représentants du personnel, je n'échappe pas toujours à la remarque : "De toute façon, ils peuvent tout faire, prendre leurs heures de délégation quant ils veulent, poser toutes les questions, faire durer les réunions, demander des expertises, refuser de voter un avis de comité d'entreprise, et on ne peut rien faire". Et lorsque je travaille avec des représentants du personnel, je n'échappe quasiment jamais à la remarque : " On peut se démener dans tous les sens, utiliser tous les moyens à notre disposition, dans toutes les instances, lorsque l'entreprise a pris une décision, de toute façon elle la mettra en oeuvre et on ne peut rien faire". Bien évidemment, les deux ont raison.

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Ramon Masats - Madrid - 1957

Et je ne peux m'empêcher de penser au moment du tir de penalty : pour le gardien, le tireur est tout près, il est énorme, lui est tout petit et la cage des buts est immense. Pour le tireur, il est très loin, le gardien est immense et la cage des buts minuscule.

Si les RH et les représentants du personnel ont également raison c'est parce que notre législation en matière de droit collectif du travail  s'est construite sur un principe auquel il n'est quasiment jamais dérogé et que l'on peut exprimer ainsi : les représentants du personnel auront d'autant plus de moyens d'actions qu'ils sont dénués de toute capacité d'intervention sur les décisions de l'employeur. C'est pour la même raison, préserver le pouvoir de l'employeur directement issu du droit de propriété et donc conçu comme un droit patrimonial inaliénable, que le droit du travail ne connaît quasiment pas l'avis conforme du comité d'entreprise nécessaire à la mise en oeuvre de décisions de l'employeur. Un tel principe a toujours été refusé à la fois par certains syndicats pour qui ce serait de la cogestion et par les employeurs pour lesquels ce serait une quasi-expropriation (ne plus être maître chez soi). Pourtant, la codécision est un principe largement en vigueur en Allemagne, mais c'est curieux, ce n'est jamais ce principe là que l'on songe à importer lorsque l'on se compare à nos voisins. Et c'est pourquoi le gardien et le tireur continuent à partager l'angoisse du tir du penalty.

01/01/2013

2013 en dansant

Pour passer en 2013, le Théâtre Royal de Madrid a invité Mark Morris et sa compagnie, et la musique de Mozart. 

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Dans la musique et la chorégraphie, tout ce que l'on se souhaite pour 2013 : virevolte, humour, technique, liberté, joie, plaisir, envie d'être ensemble, beauté et au final l'émotion de voir tout ceci rassemblé avec une grande simplicité. 

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Le premier tableau est celui des filles, le second celui des garçons. C'est, de loin, le second qui est le plus bouleversant. Les hommes dansent en souriant, pleins de grâce, de force, de douceur, de puissance, de délicatesse, de rouerie et de subtilité. Le dernier tableau, qui associe les deux groupes, poursuit le charme qui restera longtemps présent.

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Pour Mozart, le plus nécessaire et le plus difficile en musique c'est le tempo. Souhaitons nous de trouver et de garder le bon tempo en 2013. BONNE ANNEE A TOUTES ET A TOUS.

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31/12/2012

Avant de partir

Dernier jour de l'année. Comme en musique, une pause. Celle qui permet aux notes d'avant, et d'après, de s'assembler. Si en peinture une couleur n'est-elle même qu'en fonction des couleurs qui l'entourent, en musique les notes sonnent au sein des espaces de silence dans lesquels elles s'insèrent. Temps de pause donc, la tête sourit au corps qui goûte au repos des muscles et prend plaisir au relâchement. Retour de la pleine conscience, signe que bientôt, il faudra partir.

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Tu es plus belle que le ciel et la mer


Quand tu aimes il faut partir
Quitte ta femme quitte ton enfant
Quitte ton ami quitte ton amie
Quitte ton amante quitte ton amant
Quand tu aimes il faut partir

Le monde est plein de nègres et de négresses
Des femmes des hommes des hommes des femmes
Regarde les beaux magasins
Ce fiacre cet homme cette femme ce fiacre
Et toutes les belles marchandises

II y a l’air il y a le vent
Les montagnes l’eau le ciel la terre
Les enfants les animaux
Les plantes et le charbon de terre

Apprends à vendre à acheter à revendre
Donne prends donne prends

Quand tu aimes il faut savoir
Chanter courir manger boire
Siffler
Et apprendre à travailler

Quand tu aimes il faut partir
Ne larmoie pas en souriant
Ne te niche pas entre deux seins
Respire marche pars va-t’en

Je prends mon bain et je regarde
Je vois la bouche que je connais
La main la jambe l’œil
Je prends mon bain et je regarde

Le monde entier est toujours là
La vie pleine de choses surprenantes
Je sors de la pharmacie
Je descends juste de la bascule
Je pèse mes 80 kilos
Je t’aime

Blaise Cendrars, Feuilles de route, 1924

27/12/2012

Luz !

Lorsque la France connaissait un boom économique (mais si, souvenez vous la fin des années 2000 ou plus récemment la baisse continue du chômage avant la crise financière, puis de la dette, puis économique, puis des trois à la fois), on disait que la natalité allait bien parce que les français avaient le moral et croyaient en l'avenir. Et puis les difficultés venant, et la natalité ne fléchissant pas, on nous expliqua qu'il s'agissait en période de crise d'un repli sur le privé et sur la famille. Ah bon. En Espagne, lorsque les villes éclataient des lumières de fêtes, on disait que c'était le miracle espagnol, sorte de prolongement naturel de la movida.

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Et puis, comme souvent dans le Sud ou l'excès est une seconde nature, la crise frappa plus qu'ailleurs. Mais les lumières persistent. Alors certains avancent que c'est pour oublier les difficultés, s'étourdir de lumière et faire, pendant quelques jours, comme si rien n'avait changé. On peut dire ça, où autre chose. Il est facile d'avoir des explications sur tout, sauf que pour la natalité et les lumières, et quelques autres choses, il vaudrait mieux reconnaître que l'on en sait rien, et se réjouir du spectacle. Lumières !

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17/07/2012

Le temps d'avant

C'était le temps d'avant. D'avant que l'homo economicus ne réduise l'humain à l'état d'agent économique. D'avant que les commerces soient ouverts tous les jours de l'année, comme vient de le décider la communauté de Madrid. Avant que l'horizon de l'individu ne soit borné par les centres commerciaux et les galeries marchandes. Dans le temps d'avant, la liberté de l'esprit passait par celle du corps et supposait que l'on ait le temps de s'abandonner.

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Dans le temps d'avant, les parents accompagnaient les enfants lors de dimanche après-midi proustiens où le temps passait plus lentement qu'à tout autre moment. Et dans cet intervalle, il suffisait de regarder pour voir et sentir la grâce.

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Et dans ce temps mêlé d'ennui et de plaisirs, pouvaient s'épanouir les premières expériences qui constituent profondément les êtres. Il faut prendre le temps pour être là lorsqu'une petite fille dévoile le dessous de ses jupes.

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Ce temps d'avant, c'était les dimanches où les parents de la petite fille ne faisaient pas commerce et ceux du petit garçon ne couraient pas les boutiques. Ils avaient mieux à faire : regarder la vie se déployer devant eux. Ils ne comprenaient même pas ce qu'est un agent économique. C'est vous dire si c'était vraiment le temps d'avant.