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01/07/2013

Gaston délinquant !

Tout était réuni pour que la Cour de cassation rende une décision banale : un salarié utilisait une partie de son temps de travail et le matériel de l'entreprise pour effectuer des travaux  qui lui étaient rémunérés par ailleurs. Le cas n'est pas rare de l'utilisation du matériel, et du temps, pour faire autre chose que son travail. Que cela soit sanctionnable, c'est évident. Qu'il s'agisse d'une infraction pénale, en l'occurence d'un abus de confiance, cela l'était moins. C'est pourtant ce qui a été jugé le 19 juin dernier par la chambre criminelle de la Cour de cassation.

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Ce qui n'est pas banal, c'est qu'au lieu de s'en tenir à l'affaire, les juges emploient  à dessein une formulation générale destinée à la publication : l'utilisation par le salarié de son temps de travail à d'autres fins que celles pour lesquelles il est rémunéré constitue un abus de confiance. Devient ainsi pénalement sanctionnable non seulement le travail pour autrui, mais également l'absence de travail. Tous les Gaston Lagaffe qui s'assoupissent au bureau constituent donc une bande inorganisée de délinquants coupables d'abus de confiance. Pour ne rien dire des frénétiques de la discussion extra-professionnelle, des contemplateurs maladifs, des fumeurs à répétition, des accros de la machine à café, des pianoteurs de smartphones ou des navigateurs de l'internet.  Que tout ceci puisse relever d'une responsabilité contractuelle, bien sûr, de là à pénaliser à tout va...m'enfin !

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Flagrant délit d'abus de confiance

C. Cass Chambre criminelle 19 juin 2013 - Abus de confiance.pdf

27/03/2013

Arroseur arrosé

Licencié pour faute grave, pour cause de harcèlement de ses collaborateurs, un manager conteste son licenciement au motif qu'il était lui-même harcelé. La Cour de cassation reconnaît le double harcèlement et en tire une double conclusion : le licenciement du harceleur est justifié, les faits de harcèlement des collaborateurs étant établis, mais étant lui même harcelé il ne peut être considéré comme ayant commis une faute grave. Il bénéficiera donc d'une indemnité de licenciement et de préavis. Si le salarié se trouve protégé par la faute initiale de l'employeur, il n'en est pas moins mouillé par son comportement, ce qui arrive lorsque la vague est plus haute que la protection.

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Cette version moderne de la première comédie cinématographique, le film l'arroseur arrosé de Louis Lumière, est malheureusement moins comique. Mais elle nous livre deux enseignements. La première est que l'entreprise qui envisage de reprocher une faute à un salarié doit toujours balayer devant sa porte et se demander si elle-même est au dessus de tout soupçon. La seconde est qu'un salarié, même subordonné, demeure responsable de ses actes, surtout lorsqu'ils constituent des délits, le harcèlement faisant l'objet de sanctions pénales.  Les juges évitent ainsi de justifier le harcèlement en cascade tout en démontrant qu'il n'est pas impossible d'être à la fois coupable et victime.

Cour_de_cassation Chambre_sociale 29_janvier_2013.pdf

18/10/2012

Lettres festives

Les lettres dites "festives" sont des lettres qui diffusent une encre bleue lorsqu'elles sont ouvertes. La Poste a utilisé ce procédé pour démasquer une salariée qui ouvrait régulièrement des lettres transitant par un centre de tri. La Poste invoquait deux bonnes raisons d'utiliser ce subterfuge : d'une part elle ne pouvait tolérer une pratique qui constitue un délit pénal et d'autre part en tant que service public elle agissait pour protéger les intérêts des usagers et pas seulement les siens propres. Il n'empêche qu'elle ne s'est pas contenté de porter plainte ou de mettre fin aux agissements de la salariée, elle a procédé à son licenciement. Ce que la Cour d'appel de Chambéry avait validé. Pas la Cour de cassation qui persiste à refuser les techniques qui permettent de piéger un salarié, serait-ce avec les meilleurs arguments du monde. Le licenciement sera donc jugé sans cause réelle et sérieuse et la salariée indemnisée. Nouvelle illustration que droit et morale occupent deux champs distincts, sauf à considérer que la postière en désamour était en recherche de missives lascives.

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Mimi Parent

En s'obstinant à refuser à l'employeur de pouver la réalité par tout moyen, la Cour de cassation dresse une barrière protectrice du  salarié et considère que les droits de la défense sont supérieurs à ceux de la vérité. Une telle position peut susciter quelques incompréhensions : après tout les faits sont avérés et la faute établie. Pourtant il faut se féliciter de cette décision qui maintient fermement  la digue de la protection du salarié, y compris délinquant, contre des pratiques intrusives de l'employeur. Les moralistes se consoleront en constatant que privée de son emploi, la postière ne peut plus s'adonner au plaisir de la lecture à la dérobée.

Cour de cassation civile Chambre sociale 4 juillet 2012.pdf