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04/03/2014

Lignes frontières

Tout changement de système soulève des questions conjoncturelles liées à la transition et à la bascule d'un dispositif vers un autre. Sans qu'il soit toujours possible de garantir une fluidité entre l'avant et l'après et sans pouvoir éviter de générer des effets de perte ou d'aubaine selon les cas. Il en ira sans doute de même pour la transition du DIF vers le Compte personnel de formation dont les conditions varieront fortement suivant la situation des personnes au cours de l'année 2014. La loi prévoit en effet que les heures de DIF  acquises au 31 décembre 2014 seront utilisables dans le cadre du CPF. Ce qui élimine de ce transfert deux catégories de salariés : ceux qui ont changé d'entreprise au cours de l'année 2014 et ont perdu leur crédit antérieur, le DIF n'étant pas transférable, et ceux qui ont perdu leur emploi avant le 31 décembre, puisqu'ils perdent le compteur DIF transformé en budget de portabilité. 

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Par contre, celui qui change d'entreprise ou perd son emploi au début de l'année 2015 aura pu faire constater son crédit DIF au 31 décembre et en conservera le bénéfice. La situation sera d'autant plus différente du salarié sorti de l'entreprise avant le 31 décembre qu'à compter du 1er janvier 2015, le DIF disparaissant la portabilité du DIF fait de même et les droits ouverts à un crédit potentiel financé par l'OPCA disparaissent également. Sauf à continuer à faire vivre pendant quelques temps, un droit qui n'existe plus. Peut être le décret à venir sur les modalités d'utilisation du crédit DIF dans le cadre du CPF pourrait-il prévoir que pour les salariés bénéficiaires d'une portabilité constatée au 31 décembre, le budget disponible est reconverti en heures de CPF. La complexité générée par une telle mesure serait moindre que l'inéquité générée par l'application stricte des règles actuelles. 

26/02/2014

Un nouveau pari

- Holmes ! Holmes ! cette fois-ci c'est fait ! la commission mixte a statué, la loi va être votée, il faut rentrer et commenter sans attendre...

- Watson, mon ami, je vous remercie pour la délicatesse dont vous témoignez à mon endroit en faisant mine de ne pas constater que le soleil voilé du volcan a totalement empourpré mon visage, généré de petites et ridicules poches d'eaux sous mes yeux et m'a virtuellement transformé en chinois écarlate et boursouflé...

- Puisque vous en parlez, Holmes, je vous avoue à ma grande honte et confusion que je me suis égaré à penser que les leçons que vous m'aviez donné ces jours derniers vous étaient rendues et même, pardonnez-moi, qu'elles n'étaient pas imméritées...

- Holmes, la sincérité est le gage de l'amitié, et vous êtes mon ami...

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Japon

- Merci Holmes, mais si nous ne rentrons pas avant que vous retrouviez de plus ordinaires couleurs, au moins pouvons nous commenter...vous pourriez dire en quelques mots ce que vous pensez de loi nouvelle maintenant que son contenu est fixé...

- Bien, je cède Watson. Vous connaissez mon goût pour la liberté, et conséquemment pour la responsabilité. Mesurée à ces deux critères, nous avons plutôt une bonne loi : moins de contrainte bureaucratique pour l'entreprise et plus de responsabilité d'employeur, plus de liberté pour le salarié avec le CPF et moins de contraintes dans le choix des formations, plus de possibilités de régulation pour les branches et un champ plus ouvert à la négociation...une seule véritable réserve, la même logique n'a pas été retenue pour les prestations de formation et les organismes qui les assurent...au final, à cette réserve près, un pari sur l'intelligence plutôt que sur la contrainte...

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La Réunion

- Mais Holmes, vous aviez dit la même chose il y a dix ans à propos du DIF : un pari sur l'intelligence et il semble bien qu'il ait été perdu...

- La loi nouvelle n'en est que plus méritoire...il aurait été facile de céder à la tentation de la contrainte, de l'obligation, de la prescription...s'adresser de nouveau à la faculté de dialogue, de négociation et à la responsabilité de chacun en ouvrant de nouveaux espaces de liberté, c'est plutôt une bonne surprise...

- Vous êtes bien positif Holmes...et toujours aussi rouge...

- Vous voyez bien qu'il est trop tôt pour rentrer...allons plutôt goûter au Ti punch qui nous attend...

21/02/2014

On va enfin savoir

....encore quelques semaines, ou petits mois, de patience, et nous saurons. Enfin. Nous saurons ce qu'est une formation de qualité dès que sera publié le décret qui doit nous révéler, après tant de vaines recherches, le grand secret. Gai, gai, réjouissons nous. Ou pas. Car il n'est pas impossible, et l'on pourrait même dire sans excès de pessimisme qu'il est probable, que les critères qui nous seront proposés seront de piètre qualité, notamment si l'on se fie au fait que toutes les tentatives, nombreuses, pour faire évoluer la définition de l'action de formation se sont heurtées à des murs d'incompréhension plus infranchissables que la mer rouge. Et il est à craindre que sous couvert de qualité on ne soit guère capable de produire autre chose qu'une bureaucratique normalisation. 

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C'est un vieux fantasme de tous les contrôleurs, centralisateurs, normalisateurs et autres rabougris de l'imagination que de penser qu'ils pourront réguler d'en haut, par décret (mais après consultation de toutes les parties, cela va de soi...), la qualité de la formation. Pourtant, le marché de la formation est un marché de professionnels. Les entreprises, les OPCA, POLE EMPLOI, les conseils régionaux...autant d'acheteurs de formation dont c'est le métier. Et l'achat de formation par les particuliers représente péniblement 6 % du marché, avec un droit protecteur spécifique, ce qui est normal. Faut-il donc qu'ils soient maladroits, incompétents, étourdis, hébétés, drogués ou endormis ces acheteurs professionnels pour acheter n'importe quoi. Mais grâce aux sénateurs qui, hélas, ne se sont pas endormis et ont poursuivi leurs travaux tardivement, ils sauront enfin ce qu'est la qualité et pourront cocher satisfaits les cases de la conformité pour acheter en toute tranquillité. Allez, tous en route vers l'innovation garantie par décret !

13/02/2014

C'est du propre !

Achim d'Arnim a été le premier à formuler la question de manière aussi directe : "Ce que nous créons, est-ce à nous ?".  La question se pose aussi bien à propos des conditions de production de l'oeuvre, toute oeuvre est en partie le produit de l'environnement dans lequel elle a été conçue, que de sa vie postérieure, ainsi tout lecteur réécrit à travers le prisme de sa singularité le livre qu'il lit. Et si l'auteur peut toujours dire où se trouvaient ses motivations conscientes, que sait-il de son inconscient, des imprégnations qui l'habitent et finalement du ressort de chacun de ses actes. Que savait Giorgione de La Tempête, qui demeure une des peintures les plus énigmatiques qui soit et qui peut servir de support à mille interprétations ?

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Giorgione - La Tempête - 1507

Après chaque texte important, cela ne manque pas : les interprétations se multiplient et tout le monde tire à hue et à dia pour trouver justification à sa propre lecture. S'agissant de la réforme de la formation professionnelle, qui n'échappe pas à la course au déchiffrage, il importe de rappeler quelques évidences qui ne paraissent pas l'être pour tout le monde : 

- le texte de l'ANI du 14 décembre ne constituera jamais une norme juridique applicable, tant il est vrai qu'il n'a pas vocation à être étendu et que techniquement il ne pourrait d'ailleurs l'être au regard des importantes différences qu'il comporte avec la loi qui va être adoptée ;

- le fait d'avoir participé, de près ou de loin, à la négociation n'est donc aucunement la garantie que l'on est particulièrement bien placé pour interpréter la loi à venir. Au contraire, cela suppose de s'affranchir du cadre des négociations pour avoir un regard sur un texte différent ;

- quelle que soit les intentions du législateur au moment où il élabore la norme légale, ces intentions sont supposées trouver traduction dans les formulations retenues. L'esprit du texte se déduit donc de sa lettre et non de ses conditions de production. Et si ce qui est écrit devait signifier autre chose que ce que l'on peut en déduire, c'est qu'il fallait l'écrire autrement ;

- et au final, comme toujours, seul le juge est compétent pour nous dire où se trouve la vérité juridique, dans l'hypothèse pas toujours vérifiée où il y aurait contentieux. Rappelons nous par exemple, que les partenaires sociaux pensaient créer une coresponsabilité entre l'employeur et le salarié en matière d'employabilité lorsqu'ils ont créé le DIF, et que le juge n'a jamais voulu suivre un tel raisonnement, considérant que la nature même du contrat de travail s'y opposait. 

Même s'il est parfois difficile pour les partenaires sociaux ou le législateur de l'admettre, dès que les textes qu'ils produisent sont conclus, ils cessent de leur appartenir au profit de tous ceux qui doivent en faire usage. Tel est le propre du droit. 

11/02/2014

Un petit détail

Le diable s'y niche, c'est bien connu. Mais les détails sont souvent fascinants. Par ce qu'ils cachent et qu'il faut aller chercher, par ce qu'ils révèlent sans vraiment le montrer. Le tableau que vous voyez est un détail. Quelques centimètres carrés d'une toile qui fait plusieurs mètres de surface. Un tableau dans le tableau, une explosion dans la composition, un condensé d'énergie libre dans une peinture maîtrisée. La toile est à Nice, dans le musée Chagall, et dans les détails, Chagall est un merveilleux poète de l'abstraction. 

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Il est un alinéa dans le projet de loi sur la formation professionnelle qui n'attire que peu l'attention. Niché dans un texte qui ne manque pas de nouveautés, il pourrait passer inaperçu, comme un simple amendement rédactionnel. La modification de l'article L. 6231-8 paraît mineure : elle supprime pourtant toute référence à la formation hors-temps de travail et impose aux employeurs de prendre des engagements de reconnaissance des efforts du salarié (mais on ne sait plus lesquels puisqu'il peut s'agir d'une formation pendant le temps de travail) et des compétences acquises par un accès prioritaire aux fonctions correspondantes, lorsque le salarié suit une formation de développement des compétences. Ces formations sont celles qui apportent aux salariés des compétences non utilisables dans le cadre de leur fonctions. Il s'agit donc d'un développement de la qualification personnelle et non contractuelle. Dans le cadre du plan de formation, cela correspond aux formations de catégorie 2. Si dorénavant, à partir du mois prochain en fait dès que la loi est applicable, il faut prendre des engagements particuliers pour tout ce qui ne concerne pas l'emploi occupé, on ne connaît pas meilleur frein au développement de l'employabilité. Ce qui s'appelle se tirer une balle dans le pied. 

31/01/2014

Un cadeau empoisonné ?

Pour trouver un compromis entre les organisations syndicales qui souhaitaient une contribution de 1 % pour la formation et les organisations patronales qui militaient pour s'en tenir à 0,8 %, fut imaginé le principe d'une contribution de 0,2 % au titre du Compte Personnel de Formation dont les entreprises pourraient s'exonérer en cas de conclusion d'un accord prévoyant un financement direct pour un montant équivalent de formations relevant du CPF. Nombre de commentateurs ont estimé que c'était un cadeau fait aux grandes entreprises qui allaient s'empresser de s'exonérer de cette obligation et réduire ainsi le montant de leur contribution. Il pourrait bien s'avérer que cette possibilité ait des allures de cadeau empoisonné pour ces entreprises. 

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En premier lieu, négocier qu'au moins 0,2 % sera consacré au CPF, cela risque d'être bien souvent l'engagement de faire davantage, puisque 0,2 % est la base minimale de négociation : quel intérêt pour les salariés alors que le financement par l'OPCA n'est pas plafonné et pourrait permettre, si les salariés sont demandeurs, de bénéficier de financements plus importants. Car l'entreprise qui s'exonèrera de cotiser ne pourra par là même plus prétendre à la mutualisation. Ensuite, il faut tenir compte du fait que le CPF comprend des droits opposables à l'employeur, hors temps de travail (toutes les formations éligibles) et sur le temps de travail (le socle de connaissances et compétences). Soit le risque pour l'employeur de gérer directement l'organisation de formations sans intérêt pour lui, plutôt que de voir l'OPCA s'en occuper. Enfin, opter pour la déductibilité directe c'est réintroduire pour ces sommes l'imputabilité, la déclaration fiscale et le contrôle de l'administration que la réforme supprime. Et comme la loi ne reconnaît pas à l'entreprise qui signe un tel accord le pouvoir de fixer elle-même les priorités du CPF, qui demeureront fixées à l'extérieur de l'entreprise, on ne voit guère de configuration qui permette de garantir que, du point de vue de l'entreprise, une telle négociation soit judicieuse. Vraiment tout du cadeau empoisonné. 

29/01/2014

C'est plutôt bien parti

Depuis mercredi matin, la Commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale examine le projet de loi relatif à la formation. Et les modifications apportées au texte lors de la première journée de travail laissent penser que le Compte Personnel de Formation ne sera pas, mais vraiment pas, une resucée plus ou moins relookée du DIF. Deux nouveautés en témoignent. En premier lieu le rapporteur a souhaité placer en tête des priorités du CPF le socle de connaissances et de compétences en précisant qu'il comportait bien tous les éléments définis par les partenaires sociaux : maîtrise des outils informatiques et bureautiques, maîtrise des savoirs de base et des langues étrangères, capacité à travailler collectivement et capacité à apprendre. Rappelons que lorsque le CPF est utilisé par le salarié pour le socle de compétences, il est effectué de droit pendant le temps de travail. L'option retenue est donc une ouverture large des formations accessibles dans ce cadre. 

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Le départ pour Loudun - Francis Moreeuw - 1987

La deuxième bonne nouvelle pour le CPF est que si les fonds collectés par les OPCA ne sont pas utilisés pour ce dispositif, ils ne pourront pas être réutilisés sur d'autres (le plan ou la professionnalisation) mais devront être versés au FPSPP. La stratégie de fermeture des priorités pour ne pas faire fonctionner le CPF et réaffecter les ressources ailleurs est ainsi mise en échec. Par contre, son ouverture, à confirmer pour les certifications personnelles qui devront être largement définies, permettra une articulation avec les plans de formation dans le cadre d'une codécision avec le salarié. Au final, on parviendra peut être à atteindre les objectifs du DIF avec un dispositif de nature différente, si toutefois l'esprit de la Commission passe le cap des séances de l'Assemblée, mais apparemment on peut faire confiance au rapporteur. 

21/01/2014

Parcours nomade

Dans le document envoyé aux partenaires sociaux en Juillet 2013 pour leur demander de négocier sur la réforme de la formation professionnelle, Michel Sapin demandait à ce que soit revue la définition de la formation professionnelle pour mieux prendre en compte la formation informelle. L'ANI a traduit cette demande en prévoyant qu'une formation associait des objectifs, une ingénierie pédagogique et une évaluation des résultats. La novation résidait dans la disparition du programme, corset rigide qui impose un parcours commun et préétabli, au profit de la possibilité pour chacun d'avoir un parcours dont les contenus sont aussi variés que les besoins individuels pour parvenir à un objectif commun. Une invitation aux parcours nomades donc. 

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Mais fi de tout ceci dans l'avant projet de loi : non seulement la définition actuelle de la formation n'est pas réformée, mais elle est complétée par des dispositions relatives à la formation à distance, censées en faciliter l'organisation, mais qui alourdissent les mentions qui doivent figurer dans le programme de la formation, point cardinal de la définition de l'action. Manifestement, les rédacteurs ont oublié qu'ils travaillent au sein du Ministère du Travail, et non de l'Education nationale, et que le programme n'a guère de sens pour définir une action de formation professionnelle continue qui s'adresse à des adultes qui ont tous des compétences et des situations de travail différentes, et qui peuvent donc tous passer par des chemins différents pour parvenir à un même objectif, si l'on veut bien considérer que la formation ne s'arrête pas aux frontières de la petite classe, mais que l'acquisition de compétences débute même quand on en sort. Souhaitons que sur ce point, et quelques autres, le débat parlementaire n'entérine pas des conceptions figées de ce qu'est la formation et fasse preuve si possible d'audace et à tout le moins d'esprit d'ouverture, ce qui serait bien le moins pour une loi portant sur la formation. 

15/01/2014

Audition (le CPF 3)

Dans la grande fabrique des lois que constitue l'Assemblée nationale, être accueilli par le rapporteur de la loi formation qui vous dit en souriant : "Ici nous ne faisons pas du droit, nous faisons la loi", donne le ton. Et il a raison, faire du droit c'est faire de la technique, faire la loi c'est utiliser la technique pour mettre en oeuvre des ambitions. Audition donc sur le texte à venir et confirmation que son contenu devrait assez nettement évoluer entre le projet initial et le texte qui sortira fin février de l'Assemblée. Retenons ici, un seul point, celui de la mise en oeuvre du CPF. Pour constater qu'une fois encore on a du mal à échapper à la défiance a priori. Lorsque je plaidai pour un CPF largement ouvert, notamment sur toutes les certifications personnelles, même lorsqu'elles correspondent à une formation obligatoire pour l'employeur, vint inévitablement la remarque : "Mais est-ce qu'on ne risque pas un détournement du CPF si les entreprises l'utilisent dans le cadre du plan de formation ? ".

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Audition - Takashi Miike

Et revoilà l'erreur magistrale commise sur le DIF qui reparaît. En négociant à tour de bras que les formations d'adaptation ne devaient pas entrer dans le DIF, les organisations syndicales l'ont condamné à se marginaliser, au grand profit des entreprises qui se sont dépêchées d'acter que le DIF ne pourrait se faire que sur du transverse, avant d'expliquer aux salariés que cela ne relevait donc pas de l'intérêt de l'entreprise. Il est évident que pour qu'un dispositif fonctionne quantitativement, il faut qu'il corresponde à un intérêt commun. Or, qui peut nier que toutes les certifications personnelles (permis, habilitations, certifications règlementaires, etc.) qui constituent des conditions pour exercer une activité sont de formidables outils d'employabilité. Et au final, si le permis poids lourds d'un chauffeur et les formations obligatoires qui vont avec ont été cofinancées par le plan et le CPF, qui a gagné en liberté ? l'entreprise ou le salarié ? répondre à la question c'est donner, il me semble, le véritable enjeu sur le champ des formations accessibles en CPF. Nous verrons fin février si être auditionné c'est être entendu.

14/01/2014

Les listes entrent en lice (le CPF 2)

Pour ceux qui n'auraient pas compris que le Compte personnel de formation n'a qu'un lointain rapport avec le DIF, le projet de loi sur la formation est particulièrement éclairant. Alors qu'en matière de DIF chaque entreprise était libre de définir sa politique de formation et de décider dans quels domaines le DIF pouvait s'exercer, pour le CPF les formations accessibles seront fixées à l'extérieur de l'entreprise et devront remplir une double condition : d'une part aboutir à un titre RNCP, un Certificat de qualification professionnelle, une certification figurant sur l'inventaire supplémentaire aux titres établi par la CNCP (inexistant à ce jour), entrer dans les formations relatives au socle de compétences (à définir par décret) ou faire partie des formations qualifiantes régionales, et d'autre part figurer sur une liste établie nationalement par le CPNEFP (comité paritaire national de l'emploi et de la formation professionnelle) ou par une CPNE ou par un CPREFP (le même au niveau régional). Bref, point de CPF hors des listes. Moi je n'y peux rien, les listes ça m'évoque irrémédiablement la complainte du progrès.


Alors de deux choses l'une. Soit le malthusianisme l'emporte (ou la crainte d'une explosion des demandes) et l'on fait des listes resserrées, fermées, limitatives, pleines de restrictions pour des tas de bonnes raisons qui se transformeront inévitablement en mauvaises : ne pas livrer le CPF au marché, ne pas accroître la pression financière sur le système, ne pas encourager les pratiques de consommation pure de formation,...bref tout ce qui revêtira les oripeaux de la bonne conscience pour en fait tuer le dispositif dans l'oeuf, ou bien on fait confiance, on ouvre largement, on permet le choix, on encourage l'initiative, on est volontariste, et on se dit qu'il sera toujours temps de resserrer les priorités ultérieurement si le succès est au rendez-vous. Pour ce qui me concerne, à la complainte du progrès (ceux qui voudraient bien mais qui ne peuvent point) j'ai toujours tendance à préférer la liberté, c'est à dire la responsabilité.

12/01/2014

Faire simple, c'est compliqué (le CPF 1)

Picasso, Matisse, Cézanne, les danseurs aussi, et les musiciens et d'autres sans doute, dont les écrivains à qui l'on conseille toujours de reprendre leur page et de dire la même chose en supprimant tous les mots inutiles, tous n'ont eu de cesse que de déstructurer, déconstruire, faire éclater les représentations habituelles pour aller vers l'épure, l'essentiel, le sujet même, ramené à quelques traits, quels mots ou quelques notes. Le Graal, c'est d'aller au plus simple pour dire l'indicible. En matière juridique il n'en est pas autrement, et tout l'art consiste à synthétiser, en quelques règles générales, tout le flot de l'inépuisable diversité de la réalité que l'on se propose de régir. Dans le projet de loi sur la formation, tout lecteur aura constaté que l'art fait défaut, et particulièrement en ce qui concerne les modalités d'acquisition du compte personnel de formation.

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Femme nue couchée, la dormeuse - Picasso - 1932

Concentrons nous sur deux dispositions. La première sur les acquisitions : 20 heures pendant 6 ans puis 10 heures pendant trois ans. Soit neuf années à des taux différents, ce qui ouvre bien inutilement des tas de questions pratiques : 2015 est-elle la première année pour tout le monde ? faut-il partir de l'entrée sur le marché du travail ? comment compter les années de retrait de l'activité ? et les années de travail non salarié entre des années de travail salarié ? et une année complète de chômage vient-elle amputer les neufs ans ? autant de casse-têtes pour le gestionnaire du CPF alors qu'il aurait été plus simple de s'en tenir à 20 h par an plafonnées, et mieux encore, le compte étant personnel et non lié au statut selon la loi, à considérer que tout actif acquérait 20 heures quelle que soit sa situation, jusqu'à atteindre le plafond.

Et en passant, notons que si la loi se fait désormais fort de reprendre les ANI, elle devrait quand même prendre en compte le fait que lorsque la négociation se conclue par une séance de 26 heures, la qualité rédactionnelle ne peut être au rendez-vous et qu'il est sans doute préférable de transposer l'esprit plutôt que la lettre.

La deuxième disposition concerne la précision légale que les congés de maternité, paternité, adoption, parental ou de soutien familial sont pris en compte pour le CPF. Les non juristes, ou les juristes peu rigoureux, en concluront que tous les congés cités ne sont pas pris en compte dans le calcul. Et ils auront tort car le principe est que le CPF est alimenté à hauteur de 20h par année de travail à temps complet, ce qui exige la prise en compte de tous les congés assimilés au travail et créé une incertitude, compte tenu de la formule, sur les absences non assimilées à du temps de travail effectif. Moyennant quoi, on reproduit pour le CPF une des difficultés déjà identifiée pour le DIF. Là encore, établir le droit en fonction de la personne, et non du temps de travail, était logique, cohérent et simple. Mais apparemment, faire simple c'est vraiment compliqué.

09/01/2014

Une histoire de calendrier

Dans le projet de loi sur la formation professionnelle, trois dispositions sont expressément renvoyées à l'année 2015 pour leur application : la création du compte personnel de formation, les nouveaux collecteurs de taxe d'apprentissage et le financement du paritarisme. Pour toutes les autres dispositions, il n'y a pas de calendrier différé, ce qui conduit à leur application immédiate. Si le texte restait en l'état, les nouveaux taux de contribution des entreprises au financement de la formation professionnelle seraient applicables dès 2014 (collecte 2015). On voit le grand bazar qui en résulterait, notamment pour les OPCA, et les entreprises par ricochet, qui appellent des cotisations en cours d'année et non uniquement à l'issue de l'exercice clos.

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Tiepolo - La vérité dévoilée par le temps

Sans doute le projet sera-t-il modifié et une année d'adaptation laissée à tout le monde. Oui mais alors il faudra trouver des ressources pour financer le compte personnel de formation, que les salariés pourront potentiellement utiliser dès le 1er janvier 2015 avec leur solde d'heures de DIF. Rien d'irrémédiable puisque les OPCA pourraient alors faire des appels prévisionnels (ce qui aura le paradoxe d'accélérer les prélèvements que l'on veut alléger) et qu'au besoin le FPSPP peut jouer son rôle de banquier du secteur en garantissant les premiers financements, d'autant que tout le monde table sur une montée en charge très progressive du CPF. Comme on le voit, un peu de prudence s'impose car il y a de fortes chances qu'entre le projet mis en  circulation le 6 janvier dernier et le texte qui sortira de l'Assemblée en principe le 28 février prochain, il pourrait bien y avoir quelques surprises.

08/01/2014

Un entretien à tiroirs

Débutons le passage en revue du projet de loi sur la formation professionnelle par le nouvel Entretien Professionnel. Une lecture rapide pourrait persuader certains qu'on ne fait que reprendre de l'ancien et que l'on créé une nouvelle obligation procédurale qui imposera aux entreprises de rajouter trois cases à leurs supports d'entretiens annuels et que tout cela sera un peu formel et vite bâclé. Ceux-là pourraient bien avoir un réveil brutal, car il n'existe qu'un lointain rapport entre l'entretien professionnel version 2003/2004 et celui qui nous est proposé aujourd'hui. Mais pour s'en rendre compte, il faut en ouvrir tous les tiroirs.

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Femme tiroirs - Igor Morski

En premier lieu, l'objectif de l'entretien (qui est obligatoire pour toutes les entreprises quels que soit leur taille et leur secteur d'activité) est de passer en revue les perspectives d'évolution professionnelle, notamment en terme de qualification et d'emploi, ce qui en fait clairement un entretien RH et non un entretien managerial. L'ANI exclue d'ailleurs que cet entretien soit confondu avec l'entretien d'appréciation ou entretien annuel. Premier problème : comment réaliser quantitativement ces entretiens avec la ligne RH ?

En second lieu, tous les six ans l'entreprise doit à l'occasion de l'entretien vérifier que le salarié a :

- suivi au moins une action de formation ;

- bénéficié d'une progression, salariale ou professionnelle ;

- acquis des éléments de certification, par la formation ou la VAE.

Il est prévu que si deux sur trois de ces critères ne sont pas remplis, les entreprises de 50 salariés et plus devront abonder le compte personnel de formation de 100 heures avec le financement associé. Ce qui impose, compte tenu du faible nombre de salariés qui obtiennent des diplômes, un droit à la formation tous les six ans et un droit à l'évolution salariale (qui ne saurait être la seule augmentation des minimas conventionnels ou du SMIC) pour tous. Avec une sanction à la clé. Et si pour les petites entreprises la sanction n'est pas définie par la loi, nul doute que le juge ne pourra qu'attribuer des dommages et intérêts à tout salarié qui n'aurait pas bénéficié des entretiens et suivi des formations et bénéficié d'une évolution salariale. 

Et l'on peut faire confiance au juge pour trouver dans ces nouvelles dispositions, un point d'appui pour ouvrir encore de nouveaux tiroirs.

Ceux qui se sont empressés de constater que l'ANI ne changeait rien fondamentalement en matière de formation, feraient peut être bien de remettre l'ouvrage sur le métier et de travailler les textes plutôt que d'exposer leurs préjugés.

 

06/01/2014

Changement de lumière ou de décor ?

Tous les blasés, les cyniques, les "à qui on ne la fait pas", aiment bien rappeler que plus ça change moins ça change, que la révolution c'est étymologiquement le retour à la case départ, que la réforme ce n'est jamais que de nouveaux mots pour dire de vieilles choses, bref, embourbés nous sommes, embourbés nous resterons.

Il est vrai qu'avec les 69 pages du projet de loi sur la formation professionnelle, l'emploi et la démocratie sociale, et les innombrables renvois à d'innombrables décrets, on se dit que décidément l'art de légiférer se perd, comme depuis à peu près deux siècles. Qui se plonge sans prévenir dans le texte, risque clairement de ne pas y voir jaillir la lumière.

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Alors nous allons tenter de mettre sur ce texte un peu de jour et d'aller voir de plus près ce qu'il recèle. Les sujets ne manquent pas : nouvel entretien individuel, nouvelles contributions financières, nouveau compte personnel de formation et fin du DIF, conseil en évolution professionnelle, service public régional de la formation, disparition de l'imputabilité et de la déclaration fiscale pour les entreprises, obligations de négociation et de consultation renforcées, engagements plus nombreux vis-à-vis des salariés qui se forment mais aussi de ceux que l'on ne forme pas, fin du financement des organisations patronales et syndicales par les OPCA, création d'un financement transparent et obligation de rendre des comptes, mode de calcul de la représentativité patronale qui échappe à l'élection, ...vraiment les sujets ne manquent pas qui nous promettent des jours nouveaux sinon meilleurs.

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Alors, la même chose sous un emballage différent ? le jour et la nuit ? comme à chaque jour suffit sa peine, à partir de demain sur ce blog, chaque jour un commentaire d'une des thématiques de la loi. Pour tenter d'y voir plus clair et de savoir si c'est juste une variation de la lumière ou si le décor a vraiment changé.

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22/12/2013

Incertitudes

Ce n'est pas encore de l'inquiétude, mais cela s'en rapproche. Pas de la crainte véritablement, mais cela pourrait bien le devenir. Les première réactions des professionnels de la formation à la présentation de l'ANI, toute la semaine dernière, se situent entre perplexité, stupéfaction, incompréhension, interrogations et malgré tout quelques peurs qui traduisent la perception des bouleversements potentiels. Les questions les plus fréquentes sont budgétaires : comment défendre le budget formation sans le support de l'obligation ? comment résister à la tentation du DAF ou du contrôleur de gestion de répercuter la baisse de l'obligation ? comment négocier un budget en hausse quand les obligations baissent ? et s'il n'y a plus d'imputabilité, comment protéger le champ d'activité qu'est la formation de toutes les actions périphériques ? et quel impact sur mon périmètre, ma fonction, mes missions, mon rôle ?

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De Chirico - L'incertitude du poète - 1913

Force est de reconnaître qu'ils furent peu nombreux ceux qui, spontanément, ont exprimé leur satisfaction de voir disparaître les contraintes fiscales et administratives ou les question à n'en plus finir sur ce qui est formation ou ne l'est pas, ceux qui se sont réjouis de la possibilité d'élargir leur champ d'action, félicités de voir la formation positionnée sur de vrais enjeux ou qui ont vu dans la réforme l'opportunité de faire grandir leur fonction. Pour l'instant, l'incertitude domine et elle est le plus court chemin vers l'inquiétude. Mise en sommeil pendant la trêve festive de fin d'année, elle pourrait bien ressurgir rapidement en début d'année.

19/12/2013

Pas en avant, grand bond ou pas perdus ?

C'est ce que l'on appelle ne pas faire l'unanimité. Aux critiques de la CGPME qui ne signera pas l'ANI du 14 décembre 2013, s'ajoutent les réserves de fédérations patronales (plus ou moins prononcées) soit sur le contenu du texte soit sur son efficience, ainsi qu'un débat à la CGT pour savoir si l'on signera ou non. A l'évidence, l'affaire n'est pas pliée et une belle bagarre se prépare à l'Assemblée et sans doute également ensuite lors de l'élaboration des textes d'application et surtout lors de la mise en oeuvre. Pas les meilleures conditions pour engager une évolution aussi forte. Ce n'est donc pas demain que nous saurons si le texte signé traduit véritablement un grand bond en avant.

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En l'occurrence, grand bond il pourrait y avoir si l'on allait au bout de la défiscalisation (qui n'est pas l'absence de mutualisation), si le pari du transfert d'obligations fiscales vers des obligations sociales est tenu (le précédent pari sur le DIF a été perdu), et si l'on parvient à gommer les insuffisances, rapidités ou incohérences du texte. Soit, il faut le répéter, le constat que le plus dur est vraiment devant nous comme l'explique la chronique réalisée pour l'AEF.

AEF ANI 14 Décembre 2013.pdf

17/12/2013

Big-bang ?

Comme disent les agences de promotion immobilière, c'est un accord en voie de futur achèvement qui a été finalisé le 14 décembre dernier. Le déroulement de la négociation ne plaidait pas pour un texte de grande qualité sur la forme : du surplace pendant quasiment trois mois pour un sprint final de deux jours n'est pas la meilleure manière de travailler techniquement. Pour autant, le texte a potentiellement une dimension révolutionnaire, au sens littéral de modification fondamentale des principes structurant un système. Car c'est la première fois en 40 ans que l'on fait le pari que c'est par les obligations sociales, et non fiscales, que l'on dynamisera la formation. Reste deux conditions pour que cette promesse de révolution aboutisse à un véritable big-bang.

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La première tient aux futurs signataires de l'accord. Le précédent pari, celui d'une négociation sur la formation dans toutes les entreprises avec le DIF, a été perdu notamment faute d'implication des signataires dans la mise en oeuvre du dispositif. La base sommée de se débrouiller seule n'en a rien fait. Gare à ne pas reproduire le même schéma.

La seconde tient au contenu de la loi à venir. Si l'Etat tire toutes les conséquences de la défiscalisation de la formation, au profit d'une obligation de contribution sociale versée aux OPCA et pouvant être assortie de régimes conventionnels ou optionnels, alors on pourra parler de révolution. Mais il faudra pour cela sortir de l'approche fiscale, pour ne pas dire fiscaliste, de la formation, supprimer l'imputabilité qui n'a plus d'intérêt, la déclaration fiscale, la bureaucratisation de la formation et laisser la responsabilité sociale s'exercer pleinement, au besoin en l'accompagnant. De ce point de vue, la partie du projet de loi consacré au contrôle de la formation qui étend à des contrats de droit privé des sanctions administratives de taxation du chiffre d'affaires laisse très sceptique quant à la capacité du Ministère du travail à véritablement changer de paradigme.

C'est donc à la manière dont ceux qui se sont réjouis de la conclusion de la négociation mouilleront la chemise que l'on pourra juger s'il s'agit d'une véritable révolution ou pas. Le plus dur reste à venir.

10/12/2013

Face au miroir

Au point où se trouve la négociation interprofessionnelle sur la formation, qu'il y ait au final un accord ou pas n'a plus guère d'importance. Car il ne pourrait s'agir que d'un accord a minima, de bric et de broc, sans véritable dynamique. Alors après tout, mieux vaudrait qu'il n'y en ait pas. A ceux d'ailleurs qui craignent cette issue et se rassurent en disant que jamais une négociation sur la formation n'a échoué, commençons par raconter ceci : la veille de la faillite de Lehman Brothers, discussion téléphonique entre des banquiers américains et français. Les américains expriment leur crainte de la banqueroute qui leur paraît inévitable. Réponse d'un français : "Mais c'est impossible, la banque existe depuis un siècle et demi !". Il n'avait certainement pas du jouer, petit, avec des dinosaures ni des indiens. Et continuons en rappelant que ce n'est pas la signature d'un accord qui fait le succès d'une négociation, mais son contenu. Et quel que soit le contenu de l'accord s'il y en avait un, il est douteux qu'il soit satisfaisant.

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Foujita - Femme au miroir - 1922

C'est donc vers un échec que l'on se dirige, avec ou sans accord. Et comme toujours, les commentaires hâtifs vont fuser : incapacité du système à se réformer, corporatismes et conservatismes bloquant une nécessaire refonte, système incompréhensible et incapable d'évoluer, etc. Et comme toujours, ce seront ceux qui commenceront par nous expliquer qu'ils ne comprennent rien au système qui seront les plus virulents. Alors faisons simple : tout consultant sait que lorsqu'il se plante sur le diagnostic, la probabilité de construire une réponse efficiente est la même que celle de regarder jusqu'au bout un film de Lelouch : pas impossible, mais très difficile quand même. Lorsque la formation a fait l'objet de la réforme de 2003-2004, elle s'inscrivait, 2 ans après la mise en place de la VAE, dans une logique  d'accompagnement du développement des compétences. Résultat : un bon accord et une bonne loi. En 2009, les partenaires sociaux ont négocié sous pression et à partir d'un diagnostic exclusivement négatif : résultat un accord de faible portée et une mauvaise loi. Et on est reparti en 2012 sur les mêmes bases : rapports, articles, reportages en tous genres pour expliquer combien le système fonctionne mal. Personne pour pointer ce qui fonctionne bien et mérité d'être conforté et pourrait constituer le fondement d'une dynamique nouvelle. Et le pire, c'est que les contempteurs du système verront dans le résultat de la négociation la confirmation de leurs critiques. Alors que le seul reproche véritable que l'on peut faire aux partenaires sociaux, c'est  de n'avoir su ou pu produire eux-même un véritable diagnostic sur le système qu'ils gèrent, se contraignant ainsi à travailler à partir des piètres diagnostics qui sont venus occuper un espace qui n'aurait pas du leur être concédé. A ne pas savoir affronter son image dans le miroir, on se trouve toujours dépendant du regard d'autrui. Souhaitons que le prix à payer ne s'avère pas trop lourd.

29/11/2013

On n'a pas d'idées, mais on a des projets !

Le Ministère du Travail vient de faire paraître ses projets de réforme du contrôle de la formation professionnelle, dans le cadre du projet de loi à venir sur la formation et la démocratie sociale. A la lecture, on hésite entre la colère et la déprime. Le seul souci du Ministère en matière de politique de formation : la lutte contre "les sectes et le charlatanisme". Alors que la Miviludes peine à trouver les quelques exemples qui justifieraient la suspicion générale qu'elle projette sur le secteur de la formation (sur son site, elle pointe comme manifestation du risque sectaire le fait que 20 % des formations seraient de nature comportementales : il va falloir instruire les gentils membres de la Mission sur la notion de compétence qui leur est manifestement étrangère, à tout point de vue), voilà le Ministère qui a comme horizon politique la foireuse émission Cash investigation !

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Steve Lambert - Out of ideas

Mais voici le pire : alors que personne en France ne s'accorde sur la définition exacte de la formation professionnelle et que les frontières des actions de formation sont définies par le Ministère lui-même de manière approximative, il est prévu d'autoriser les contrôleurs à prononcer le redressement de la totalité du chiffre d'affaires concernant les actions litigieuses. Comme s'il n'y avait rien de mieux à faire, sur le champ de la formation professionnelle, que de créer de l'insécurité juridique et financière au motif qu'il faut traquer les charlatans. Mais il est vrai que pour faire véritablement quelque chose, encore faudrait-il avoir des idées.

21/11/2013

Et 1 et 2 et 3....projets d'ANI

Après le texte initial du MEDEF sur lequel les discussions n'ont pas véritablement débuté, après le texte se voulant de synthèse élaboré par FO, est mis en discussion un troisième projet d'ANI élaboré par la CGPME. Du coup, la séance prévue ce jour est annulée.  Jamais une négociation interprofessionnelle sur la formation n'avait connu une telle situation, preuve que la méthode de la Conférence sociale et ses préparatoires, le cadrage de la négociation par la saisine du Ministère et la définition d'un calendrier ne constitue pas une garantie de bon achèvement du processus de négociation. Quelles que soient les causes de cette situation, il devient difficile pour les négociateurs de trouver dans le laps de temps restant, une  réelle convergence. 

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Jackson Pollock - Convergence

Pourtant, si un accord n'était pas trouvé, ou à tout le moins une position commune, sur le modèle de la réforme de la représentativité syndicale, cela enverrait le message à l'Etat et aux Régions que les partenaires sociaux sont dans l'incapacité de faire évoluer le système qu'ils pilotent depuis 40 ans, ce qui ouvrirait un boulevard à une régulation publique dont rien ne garantit qu'elle puisse être autre chose qu'une gestion administrée de la formation. Il est en effet un peu inquiétant d'entendre des représentants des régions affirmer que l'avenir du dispositif est dans l'articulation des quatre services publics : de la formation initiale, de la formation continue, de l'emploi et de l'orientation professionnelle, soit une formation coupée de l'entreprise, des salariés et de leurs représentants. Souhaitons que l'on en arrive pas là et que l'on puisse retrouver, comme dans les toiles de Pollock, le fil de la convergence.