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11/06/2015

Acteurs...de cinéma ?

Le système de formation professionnelle français a fonctionné pendant 40 ans en s'appuyant sur la fiscalité et la gestion paritaire des moyens d'accès à la formation. La loi du 5 mars 2014 a rompu avec ces choix pour, dans la logique de l'ANI du 14 décembre 2013, parier sur la responsabilité des bénéficiaires : aux entreprises d'assumer leur rôle d'employeur et aux salariés d'être acteurs. En droit, la responsabilité suppose capacité et liberté. Capacité d'agir cela veut dire disposer des éléments nécessaires à la prise de décision. Liberté cela suppose que les choix ne soient pas effectués par des tiers, la seule liberté consistant à dire oui ou non. 

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Un exemple parmi d'autres : une salariée souhaite se professionnaliser. Elle identifie les activités qu'elle souhaiterait intégrer à ses pratiques. Elle trouve un prestataire de formation qui dispose d'une offre correspondant à son projet, le contacte et dispose d'un devis, d'un calendrier. Elle prend contact avec l'OPCA financeur qui lui répond (en mai) que pour ce qui la concerne, il y a un catalogue annuel qui est élaboré et qu'il faut choisir à l'intérieur. Après vérification son projet n'y figure pas. On l'invite à reprendre contact...lors de la parution du prochain catalogue en fin d'année. 

Depuis 2004, on trouve systématiquement dans les ANI la volonté de promouvoir le salarié "acteur". Depuis 2013, on y associe l'entreprise "responsable". Si l'on veut que ces mots aient une quelconque réalité, alors il faut cesser de déposséder les bénéficiaires de leur capacité de choix et avoir l'humilité de mettre en place des systèmes qui ne décident pas pour autrui mais leur permettent d'exercer leur libre choix en allant au-delà du simpliste "Qui paie commande" qui ne peut être que contreproductif tant l'implication du bénéficiaire est la condition même de l'efficacité de la formation. En d'autres termes, il faut que le réalisateur accepte de ne faire que tourner et laisse les acteurs jouer. 

24/02/2015

L'ombre d'un doute

Les auteurs de la réforme de la formation professionnelle avaient-ils conscience, en orientant l'intégralité des dispositifs légaux vers la certification, de toutes les conséquences qui en résultaient ? on peut en douter tant le raisonnement en terme de "formation" demeure présent dans les esprits alors que le système a déjà basculé vers la certification. On peut en juger au désarroi parfois affiché par des partenaires sociaux lorsqu'ils constatent que, sur le CPF par exemple, toute formation à laquelle est associée une des certifications éligibles doit être financée sans que l'OPCA n'ait à se prononcer sur le parcours. Il faut pourtant louer cette liberté des parcours et lutter contre leur normalisation qui consisterait à réintroduire des durées, des contenus, des programmes standardisés. Osons le dire, il est temps de faire confiance à l'offre et aux personnes et de ne pas  asphyxier le système en le bridant par volonté de vouloir totalement le maîtriser. Mais sur ce point, j'ai comme l'ombre d'un doute. 

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L'exemple du socle de compétences n'est pas pour rassurer : nous avions un référentiel, avec lequel il était possible de travailler, voilà que l'on nous annonce des formations types, des organismes labellisés, une certification. Et au passage quelques mois de plus avant d'entrer dans l'opérationnel. Tout encadrer, tout normaliser, tout prévoir, tout organiser, tout contrôler. tout décider, on ne peut pas dire que l'on soit sur le modèle de la confiance. Ni même sur le modèle pédagogique annoncé : celui de permettre aux acteurs de se saisir pleinement de ce qui est mis à leur disposition pour en faire le meilleur usage possible. Car réduire le champ de décision d'autrui n'a jamais été la meilleure manière de le responsabiliser. 

14/01/2014

Les listes entrent en lice (le CPF 2)

Pour ceux qui n'auraient pas compris que le Compte personnel de formation n'a qu'un lointain rapport avec le DIF, le projet de loi sur la formation est particulièrement éclairant. Alors qu'en matière de DIF chaque entreprise était libre de définir sa politique de formation et de décider dans quels domaines le DIF pouvait s'exercer, pour le CPF les formations accessibles seront fixées à l'extérieur de l'entreprise et devront remplir une double condition : d'une part aboutir à un titre RNCP, un Certificat de qualification professionnelle, une certification figurant sur l'inventaire supplémentaire aux titres établi par la CNCP (inexistant à ce jour), entrer dans les formations relatives au socle de compétences (à définir par décret) ou faire partie des formations qualifiantes régionales, et d'autre part figurer sur une liste établie nationalement par le CPNEFP (comité paritaire national de l'emploi et de la formation professionnelle) ou par une CPNE ou par un CPREFP (le même au niveau régional). Bref, point de CPF hors des listes. Moi je n'y peux rien, les listes ça m'évoque irrémédiablement la complainte du progrès.


Alors de deux choses l'une. Soit le malthusianisme l'emporte (ou la crainte d'une explosion des demandes) et l'on fait des listes resserrées, fermées, limitatives, pleines de restrictions pour des tas de bonnes raisons qui se transformeront inévitablement en mauvaises : ne pas livrer le CPF au marché, ne pas accroître la pression financière sur le système, ne pas encourager les pratiques de consommation pure de formation,...bref tout ce qui revêtira les oripeaux de la bonne conscience pour en fait tuer le dispositif dans l'oeuf, ou bien on fait confiance, on ouvre largement, on permet le choix, on encourage l'initiative, on est volontariste, et on se dit qu'il sera toujours temps de resserrer les priorités ultérieurement si le succès est au rendez-vous. Pour ce qui me concerne, à la complainte du progrès (ceux qui voudraient bien mais qui ne peuvent point) j'ai toujours tendance à préférer la liberté, c'est à dire la responsabilité.

28/04/2013

Vite et bien

La route vous tend les bras, les nuages vous accompagnent, vous glissez dans l'air, l'asphalte est un guide bienveillant, vous vivez un instant de paix, vous vous dîtes que si tout était à refaire, vous referiez tout, votre vie ressemble à ce long sillon noir qui s'éclaire comme votre visage. Et soudain comme le flash qui vous rappelle que d'aucuns se préoccupent de conscieusement ruiner tout espace poétique. Dans le monde qui vous a rattrapé, c'est un excès de vitesse,  dans celui dans lequel vous étiez, c'était une pause délicate. Ces gens là ne savent pas vivre.

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Et comme lorsque l'on ne sait pas vivre on met un prix sur toute chose, il va falloir payer ce moment de poésie sous la forme d'une amende. Sauf......sauf si vous êtes salarié et que le moment de grâce a surgi au cours d'un trajet entre deux clients dans un véhicule appartenant à votre entreprise. Car alors, impossible pour l'employeur de demander au salarié le remboursement de l'amende. C'est ce que vient de rappeler, le 17 avril dernier, la Cour de cassation, en application du principe selon lequel un salarié n'engage jamais sa responsabilité vis-à-vis de l'employeur, sauf faute lourde. Et rêver en ligne droite, n'est pas une faute lourde, nous n'en sommes pas encore là.

Mais que l'impunité ne vous conduise pas à prendre trop de vitesse, il y a tant à voir sur les bords des routes.

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Cour de cassation 17 avril 2013.pdf

16/01/2011

Voilà ce que l'on pouvait dire

La formule est rituelle : « Voilà ce que l’on pouvait dire ce soir sur le sujet… ». Essayez de regarder un journal télévisé (n’en abusez pas) et d'échapper à la rituelle phrase de clôture. Impossible. Manière pour le journaliste de fermer la porte ou de remettre le couvercle puisque tout a été dit. N'essayez pas de réfléchir, de penser ou de rajouter quoi que ce soit, on vous dit que tout ce qu'il y avait à dire a été dit. Bonne nuit les petits.

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Et pourtant, il aurait été possible de dire au moins les choses autrement, voire de n’en rien dire. Car le premier choix est celui des sujets, le second choix est celui de l’angle de traitement et le troisième choix est dans le commentaire. C'est-à-dire le travail du journaliste. Faut-il qu’il soit mal à l’aise avec lui-même, sa légitimité, son professionnalisme pour sempiternellement s’excuser de n’avoir fait autrement et prévenir toute opposition : j’ai dit ce qu’il était possible de dire, j’ai fait mon métier. En l’occurrence son métier serait de faire  exactement l’inverse.

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Ce qu'il est possible de dire du Red Rose

 Ce désengagement journalistique, cette grande couverture ou grand parapluie brandi à tout bout de champ ressemble furieusement à une recherche de l’irresponsabilité. Si le droit nous apprend que l'on peut être reconnu irresponsable, il nous apprend également que l’on est libre à hauteur de ce que l’on est responsable. Considérer que l’on ne pouvait faire autrement que ce que l’on a fait, c’est refuser d’engager sa responsabilité professionnelle et au final nier son professionnalisme qui consiste au contraire à justifier ses choix.

Voilà ce que l’on pouvait  dire ce soir sur cette étrange manie des journalistes.

14/05/2008

Ne pas former tue

 La protection de la santé des salariés fait l'objet d'une sévérité accrue de la part des tribunaux, notamment depuis 2002 et la réforme de la législation relative à la santé au travail. 

La responsabilité de l'entreprise  peut être engagée, en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle,  soit au plan civil soit au plan pénal notamment lorsque l'accident est grave a fortiori lorsqu'il est mortel.

 

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 La cour de cassation, dans un arrêt en date du 15 janvier 2008 rappelle la responsabilité de l'employeur en ces termes : 

"La cour d'appel qui relève notamment, au titre des manquements à l'origine de l'accident, que la notice d'utilisation que la prévenue reconnaissait avoir eu en sa possession soulignait la nécessité impérieuse, pour le conducteur de la nacelle, d'une formation à la sécurité spécifique à ce type de matériel, et que la victime de l'accident n'avait pas bénéficié de la formation qui lui aurait permis de se rendre compte du péril qu'il y avait à déplacer la nacelle en tournant le dos au sens de marche de l'engin, comme elle l'avait fait, et à remplacer « au pied levé », avec l'autorisation de son employeur, le salarié devant lui apporter, aide et assistance par un parent, intérimaire électricien, dont le concours avait été inadapté, a justifié sa décision (condamnation pour homicide involontaire)." (Cass. crim., 15 janvier 2008, n° 07-80.500).

Si la formation n'est pas le seul moyen de prévention des risques, elle en constitue un des moyens privilégiés. Rappelons qu'une partie des activités de formation de l'entreprise doit constituer une réponse au diagnostic en matière de santé qu'est le document unique d'évaluation des risques professionnels. A défaut, la responsabilité de l'entreprise en cas d'accident sera quasi-systématiquement retenue.