Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

13/02/2014

C'est du propre !

Achim d'Arnim a été le premier à formuler la question de manière aussi directe : "Ce que nous créons, est-ce à nous ?".  La question se pose aussi bien à propos des conditions de production de l'oeuvre, toute oeuvre est en partie le produit de l'environnement dans lequel elle a été conçue, que de sa vie postérieure, ainsi tout lecteur réécrit à travers le prisme de sa singularité le livre qu'il lit. Et si l'auteur peut toujours dire où se trouvaient ses motivations conscientes, que sait-il de son inconscient, des imprégnations qui l'habitent et finalement du ressort de chacun de ses actes. Que savait Giorgione de La Tempête, qui demeure une des peintures les plus énigmatiques qui soit et qui peut servir de support à mille interprétations ?

3896578368.jpg

Giorgione - La Tempête - 1507

Après chaque texte important, cela ne manque pas : les interprétations se multiplient et tout le monde tire à hue et à dia pour trouver justification à sa propre lecture. S'agissant de la réforme de la formation professionnelle, qui n'échappe pas à la course au déchiffrage, il importe de rappeler quelques évidences qui ne paraissent pas l'être pour tout le monde : 

- le texte de l'ANI du 14 décembre ne constituera jamais une norme juridique applicable, tant il est vrai qu'il n'a pas vocation à être étendu et que techniquement il ne pourrait d'ailleurs l'être au regard des importantes différences qu'il comporte avec la loi qui va être adoptée ;

- le fait d'avoir participé, de près ou de loin, à la négociation n'est donc aucunement la garantie que l'on est particulièrement bien placé pour interpréter la loi à venir. Au contraire, cela suppose de s'affranchir du cadre des négociations pour avoir un regard sur un texte différent ;

- quelle que soit les intentions du législateur au moment où il élabore la norme légale, ces intentions sont supposées trouver traduction dans les formulations retenues. L'esprit du texte se déduit donc de sa lettre et non de ses conditions de production. Et si ce qui est écrit devait signifier autre chose que ce que l'on peut en déduire, c'est qu'il fallait l'écrire autrement ;

- et au final, comme toujours, seul le juge est compétent pour nous dire où se trouve la vérité juridique, dans l'hypothèse pas toujours vérifiée où il y aurait contentieux. Rappelons nous par exemple, que les partenaires sociaux pensaient créer une coresponsabilité entre l'employeur et le salarié en matière d'employabilité lorsqu'ils ont créé le DIF, et que le juge n'a jamais voulu suivre un tel raisonnement, considérant que la nature même du contrat de travail s'y opposait. 

Même s'il est parfois difficile pour les partenaires sociaux ou le législateur de l'admettre, dès que les textes qu'ils produisent sont conclus, ils cessent de leur appartenir au profit de tous ceux qui doivent en faire usage. Tel est le propre du droit. 

Les commentaires sont fermés.