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18/11/2012

Un texte en forme de vol de bicyclette

En 1986, Yvon Gattaz, Président du CNPF, réclamait la suppression de l'autorisation administrative de licenciement. Cette seule mesure, en facilitant le licenciement, encouragerait l'emploi au point qu'il pourrait en résulter la création de 300 à 400 000 emplois. On vota la suppression de l'autorisation, mais à défaut de pouvoir voter les embauches, elles restèrent au rang des promesses qui n'engagent que ceux qui y croient.

Plus de 25 ans plus tard, les positions des organisations d'employeurs n'ont guère évolué, comme le montre le texte remis aux syndicats lors de la négociation sur la sécurisation de l'emploi. Les principales mesures du texte ? faciliter les licenciements, limiter leur coût, réduire les possibilités de recours judiciaire pour les salariés et, surprise, réintroduire l'homologation des plans sociaux par l'administration, dont on s'aperçoit après coup que cette mesure sécurisait peut être davantage l'entreprise que les salariés en empêchant la saisine du juge judiciaire. Certes, la négociation n'est pas achevée, mais trouver un accord équilibré paraît aujourd'hui aussi improbable que l'équilibre de cette bicyclette, photographiée par Manuel Alvarez Bravo dont on peut voir les poétiques et émouvantes photographies au Jeu de Paume.

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Alors que la négociation sur la sécurisation de l'emploi se voulait audacieuse, novatrice et débouchant sur des mesures historiques, situation économique et sociale oblige, force est de constater que les vieilles recettes sont toujours à l'oeuvre et qu'il est très difficile de dépasser les formules magiques qui sonnent comme des slogans : facilitons le licenciement, on encouragera l'embauche. Que jamais la réalité de cette affirmation n'ait été démontrée importe peu, elle n'est manifestement pas discutable. Et il importe encore moins de constater que plus de 800 000 licenciements sont réalisés tous les ans, dont les 3/4 ne donnent pas lieu à contentieux, et de continuer d'affirmer que licencier en France est très difficile pour ne pas dire impossible.

A partir de là, personne ne devrait s'étonner de voir une bicyclette se promener le long des fils électriques.

Proposition patronale Securation de l'emploi.pdf

16/11/2012

Franchir le seuil

Les obligations sociales des entreprises sont assujetties à des effets de seuil. L'employeur de moins de 10 salariés n'a pas les mêmes obligations que celui qui en compte plus de 50 ou plus de 300 ou plus de 1000 pour ne retenir que les principaux seuils sociaux. Dans le cadre de la négociation sur la sécurisation de l'emploi, les organisations patronales souhaitent réduire les effets liés aux seuils. Elles proposent pour cela de différer l'application des obligations nouvelles et de réduire ces obligations en dessous de certains seuils. C'est reproduire en pire ce que l'on souhaite éviter, car si les obligations sont réduites, elles inciteront d'autant moins à franchir le seuil, serait-ce avec un effet différé.

Il est pourtant vrai que les seuils ont de quoi faire peur, notamment celui de 50 salariés qui est, de loin, celui qui est le plus coûteux pour l’entreprise, dans des proportions qui peuvent s’avérer exorbitantes. Ainsi, le passage à plus de 50 salariés entraîne la mise en place d’un Comité d’entreprise (0,2 % masse salariale pour le fonctionnement, plus temps de réunion, plus temps de délégation, plus le financement des activités sociales…), mais également de la participation obligatoire, soit  le reversement d’une partie du résultat aux salariés, la possibilité d’avoir jusqu’à 5 organisations syndicales, la mise en place d’un CHSCT, le recours à un PSE en cas de licenciement économique, etc.  A dissuader effectivement le mieux disposé des chefs d’entreprise, et ce qui aboutit à une surreprésentation des entreprises de moins de 50 salariés et au final à priver les salariés de certains droits. Au final, personne n'est véritablement gagnant.

Le seuil du jardin.jpg


Mais voyons les choses autrement. Plutôt que de remonter les seuils ou différencier encore plus les obligations, ne serait-il pas possible de les lisser en instaurant soit des règles communes à toutes les entreprises (par exemple la participation dès le premier salarié), des instances de représentation simplifiées pour toutes les entreprises et des  moyens proportionnels à la taille (par exemple des crédits d’heures augmentant proportionnellement au nombre de salariés plutôt que fixes à partir de seuils…). S'il est effectivement urgent de mettre en chantier la question des seuils sociaux, il est peut être encore plus important de faire simple et intelligent, c’est une tentation à laquelle ni les négociateurs ni le législateur ne devraient normalement résister, même si on constate qu'ils persistent souvent à faire l'inverse.

Et pour tous ceux qui trouveraient ces histoires de seuil un peu arides, vous pouvez avec le week-end qui s'annonce franchir le seuil du jardin avec André Hardellet, la réalité prendra tout de suite une autre dimension.

26/10/2012

Sécurité ?

Les négociations sur la sécurisation de l'emploi se déroulent difficilement. Lot de toute négociation véritable certes, car lorsque l'on se met d'accord sans délai, c'est que l'on ne négocie point mais que l'on constate une communauté de positions. Le point d'achoppement de la semaine est constitué par la réforme des licenciements économiques. Le texte patronal soumis aux organisations syndicales voudrait rendre plus facile la reconnaissance d'un motif économique, moins importantes les obligations de reclassement et moins susceptibles de recours les décisions de licenciement. Au nom de la flexibilité et de la sécurité juridique. Les organisations syndicales font remarquer que la seule sécurité traitée par le texte est celle de l'entreprise, et que la sécurisation de l'emploi n'est guère présente. On constate surtout que derrière les mêmes mots, s'abritent des intérêts et des intentions différentes.

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Ce qui surprend, c'est cette volonté des organisations patronales de vouloir à tout prix sécuriser les licenciements économiques. Il s'en pratique environ 260 000 chaque année, chiffre quasiment constant. Et seuls 2,5 % de ces licenciements donnent lieu à contentieux. Pourquoi ? parce que les sommes perçues par les salariés lors du départ, au moins dans les grandes entreprises, sont supérieures à ce que le juge accorderait en cas de contentieux. Il ne faut pas s'étonner que les conflits à l'occasion de PSE portent sur le montant des indemnités de départ. C'est moins de la résignation que du pragmatisme. En effet, si le licenciement n'est pas fondé en droit, le juge accordera au salarié 6 mois de salaires, voire un peu plus. Jamais la réintégration. Moyennant quoi, en gonflant un peu les indemnités, une entreprise tue l'intérêt à agir. D'où la faiblesse du contentieux. Du coup, c'est moins la sécurité juridique que visent les organisations patronales que la baisse du coût des licenciements. Il suffisait de le dire.

15/10/2012

Vacance ?

Dans une de ces formules que les politiques adorent parce qu'ils pensent que ça fait malin, mais qui rappellent furieusement la réthorique de l'enseignement de bon aloi, Guillaume Peltier attirait cet été notre attention sur le fait qu'il n'y a pas loin du pouvoir en vacances à la vacance du pouvoir. La rentrée n'y a rien changé : le procès en immobilisme du pouvoir se poursuit, aggravé par le fait que cet immobilisme ne serait rompu que par de brusques réveils destinés à créer toujours plus de taxation. Pendant ce temps, les plans sociaux continuent, merci. Le piège du temps politique se referme sur l'exécutif. Car le temps politique, mais aussi le temps économique, sont des temps courts, et de plus en plus courts. Le temps social lui, est un temps long, et il n'y a guère de probabilité qu'il cesse de l'être.C'est ce décalage que nous vivons actuellement et qui laisse planer ce sentiment de vacance.

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Thomas Lévy-Lasne - Vacance

La Conférence sociale du mois de juillet a lancé un cycle de négociations qui devront être conclues avant la fin de l'année. Ensuite, s'enclenchera le processus législatif qui n'aboutira sans doute pas avant le printemps. Résultat, la future réforme annoncée du marché de l'emploi, de la flexi-sécurité, de la régulation de la précarité et des licenciements, ce n'est pas avant un an pour les premiers effets. Trop long ? le seul moyen d'aller plus vite aurait été que les partenaires sociaux ne négocient pas, que le Parlement intervienne sans délai et que la loi impose et contraigne. Le choix de faire vivre la démocratie sociale, de laisser aux interlocuteurs sociaux le temps de construire eux-mêmes des solutions est un pari risqué par le décalage qu'il crée avec l'urgence d'une situation sociale dégradée. Mais c'est le pari qu'une réforme n'est efficace que si les principaux acteurs sont parties prenantes à son élaboration. Et la conviction que la loi seule ne peut pas tout, comme il est constant que l'on ne change pas une société par décret. Reste donc dans l'attente à payer le prix politique de cette méthode d'action qui consiste, comme dirait l'autre, à laisser du temps au temps.

10/10/2012

Le juge Hercule

On doit au philosophe américain Ronald Dworkin la métaphore du juge Hercule. Selon Dworkin, pour bien juger, le juge devrait parfaitement connaître le droit positif, mais également sa sociologie et la manière dont il s'insère dans une culture, il devrait en dégager la philosophie et les principes et faire preuve d'imagination  créatrice en interprétant les lois au regard de cet ensemble pour donner de la cohérence aux solutions pratiques qu'il adopte. Travail véritablement Herculéen il faut bien en convenir, et pas seulement par son volume, mais également par la diversité des compétences qu'il sollicite, tant il est vrai qu'Hercule savait à la fois se comporter en héros, en guerrier, en intellectuel avisé et même en esclave d'Omphale, chacune de ces postures n'étant que l'adaptation des mêmes valeurs et principes aux circonstances.

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François Boucher - Hercule et Omphale - 1730

On serait bien tenté de considérer que le travail accompli par les juges en matière de droit de la formation depuis plus de 30 ans est digne d'Hercule. Car c'est en s'appuyant sur un petit nombre de principes, qu'il a su faire vivre en des circonstances disparates au moyen d'une imagination créatrice, que le juge a faconné de la fin des années 80 à aujourd'hui un droit de l'employabilité du salarié d'une grande cohérence et d'une extrême puissance tant sont solides les principes qui le fondent.

La chronique rédigée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF présente une synthèse de ce travail herculéen et explique pourquoi les partenaires sociaux, dans les négociations qu'ils ont ouvertes sur la sécurisation des parcours professionnels, feraient bien de s'inspirer de ce travail d'Hercule et s'attacher à construire un droit de principes plutôt que de persister à accumuler du droit de procédure.

CONTRIBUTION_DES_JUGES_A_LA_SECURISATION_DES_PARCOURS_PRO...

12/03/2012

Réveil

Après deux ans de négociation, des assoupissements, un peu de léthargie et quelques autres chats à fouetter également, les partenaires sociaux ont conclu le 17 février dernier un accord sur la modernisation du paritarisme et son fonctionnement. Il n'était que temps. Après plusieurs décennies de paritarisme, les partenaires sociaux actent enfin des principes de gouvernance destinés à garantir la transparence de la gestion, son efficience et ses résultats. Certes l'effort vient tard, il est timide puisque limité aux organismes nationaux interprofessionnels,  mais il a un goût de printemps pour la démocratie sociale qui en a bien besoin.

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Johann Heinrich Fussli - Le réveil de Titania - 1781

Avec ce texte, nous aurons des administrateurs qui cumuleront moins de mandat, qui seront en activité ou auront moins de 70 ans, qui seront formés, qui rendront compte, qui adopteront des règles de fonctionnement transparentes, qui mettront en place des audits internes et externes, qui s'attacheront à la qualité des services rendus aux bénficiaires et qui se doteront de capacités d'évaluer l'impact des actions conduites.

On peut se demander pourquoi tout ceci, qui semble tomber sous le sens, a demandé deux ans de négociation et n'a pas été fait depuis longtemps. Mais après tout, ce n'est plus la question du jour. Apprécions l'hirondelle et laissons lui annoncer le printemps.

Projet ANI Paritarisme.pdf

15/02/2012

En route vers le silence

Si l’on souhaite que plus personne n’entende rien, il y a deux méthodes : le silence et le vacarme. Mais si l’on se dote d’un indicateur quantitatif, avec le vacarme il est possible de considérer que beaucoup de choses, énormément de choses, se sont dites.

Le dialogue social obligé est un vacarme. Après les accords seniors et avant les accords pénibilités, les accords égalités professionnelles occupent DRH et syndicalistes. Tous les bilans en témoignent : négociation formelle, créativité atone, portée réduite, habillage de pratiques existantes, l’impact de la négociation est faible. Mais quantitativement, on peut brandir des chiffres : les centaines d’accords conclus, les milliers d’entreprises couvertes, les millions de salariés concernés. Loin d’être revigoré par cette déferlante conventionnelle, le dialogue social en sortira affaibli : beaucoup de vacarme, peu d’effets.

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Nonne au collier de silence

Quand on est fatigué du vacarme, il reste le silence. Tel risque d’être l’avenir du dialogue social lorsque, fatigués de négocier des accords vides de contenu et sans portée, habitués à se voir pendant des heures sans résultat, les partenaires en viendront à préférer le silence. Ils pourront alors se dire qu'il y a deux manières de tuer le dialogue social : l'empêcher ou faire semblant de l'encourager.

05/07/2011

Le DIF à la forge

La branche de la Métallurgie vient de renégocier son accord relatif à la formation professionnelle. Mis à la signature le 1er juillet 2011, ce texte devrait recueillir l'aval des organisations syndicales. Il annule et remplace tous les accords précédents sur le même sujet, rendant beaucoup plus lisible le dispositif de formation de la métallurgie. Petit zoom dans le cadre de cette chronique sur le DIF repassé à la forge pour une mise au goût du jour.

Tout d'abord, l'accord de branche ne s'applique qu'à défaut d’accord d’entreprise : priorité à la négociation de proximité. Leçon de l'expérience car le DIF est mis en oeuvre de manière très différente selon les entreprises.

Ensuite une approximation : l'accord prévoit que tout titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée bénéficie chaque année de 20 heures de DIF. Il liste ensuite les cas de suspension du contrat de travail qui ouvrent droit au DIF. Ces dispositions sont incohérentes. Pour qu'elles aient du sens il aurait fallu que le DIF soit lié au travail effectif. Etant lié à l'existence du contrat, il en résulte mécaniquement que seules les absences qui n'ouvrent pas droit à l'ancienneté (interruption du contrat et non suspension) ne sont pas prises en compte. Seule exception légale : le congé parental à temps plein.

 L'accord du 1er juillet prévoit également que toutes les formations entrant à la fois dans le champ de la FPC, de la politique de formation de l'entreprise et dans les orientations de la branche relèvent du DIF. Exit l'interdiction de faire du DIF sur les actions d'adaptation au poste de travail. L'accord en revient finalement à l'approche légale qui ne fait aucun lien entre les catégories de formation et le DIF. Voilà un bon coup de soufflet sur le champ du DIF dans les forges de Vulcain.

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Velazquez - Les forges de Vulcain - 1630

Dans la série des coups de limes salutaires, les négociateurs ont également prévu que le DIF pouvait être convenu lors de l'entretien professionnel ou sur demande du salarié. C'est l'accord qui est mis en avant et non l'initiative.

Dans la même veine, il est prévu qu'un accord bilatéral, employeur-salarié, peut librement déterminer si le DIF s'effectue pendant ou en dehors du temps de travail.

Par contre, l'accord ne règle pas, de manière fâcheuse, l'approximation légale qui veut que si seule la faute lourde prive du DIF, ce dernier en cas de licenciement doit être demandé pendant le préavis. Reprendre ce régime légal bancal ne permet pas d'offrir une solution certaine aux entreprises et aux salariés en cas de faute grave. Une prise de position plus courageuse aurait été bienvenue.

Enfin, on notera que l'accord lève l'ambigüité de l'accord précédent sur le DIF en cas de démission. L'accord métallurgie est un des rares accords à prévoir qu'en cas de démission le DIF est de droit. Il est dorénavant précisé que l'engagement de l'entreprise est plafonné comme en matière de licenciement. Cette précision, qui ne figurait pas dans la précédent accord, permet de porter les droits du démissionnaire à hauteur de ceux du salarié licencié, sans aller au-delà.

Au final, plutôt de la belle ouvrage, même si manifestement il est encore possible de peaufiner l'usinage.

AccordUIMM1erJuillet2011.pdf

15/06/2011

Allô, l'Etat ? ici la démocratie sociale

Suite du feuilleton des OPCA et plus largement de la négocation sur la formation professionnelle. Dans une interview donnée à l'AEF, Jacques Barthélémy revient sur la possibilité pour un accord collectif de prévoir des contributions conventionnelles en matière de formation professionnelle. S'appuyant tant sur le droit constitutionnellement garanti de la négociation, les principes du droit conventionnel et les principes du droit de la formation, Jacques Barthélémy confirme, pour ceux qui en douteraient encore, que la position de la DGEFP excluant toute création de financement en dehors des règles fiscales ne repose sur aucun fondement.

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LONDRES

Rappelons que la DGEFP estime que la création d'une obligation conventionnelle ayant pour objet le financement de dispositifs de formation professionnelle non prévus par le code du travail « ne peut être envisagée, aucune disposition législative n'autorisant expressément la création d'une ou de plusieurs contributions conventionnelles permettant de remplir l'obligation fixée à l'article L.6331-1 en sus des articles créant l'obligation légale. ».

Jacques Barthélémy rappelle qu'il ne s'agit pas de remplir l'obligation légale de financement, mais de dégager des moyens conventionnels, supplémentaires aux financements fiscaux et n'ayant pas la même nature, dans le cadre de la capacité générale des partenaires sociaux à créer des garanties collectives pour les salariés.

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PARIS

Une certaine culture française voudrait qu'en l'absence de texte spécial, l'interdiction prévale. Comme s'il fallait faire fi des principes et que l'opérationnel n'existait que dans la prescription. On voit comme cela finit : attendre que l'on vous indique où vous pouvez vous coucher. Dans cette affaire, on aimerait, au nom de la démocratie sociale qui en a bien besoin, que les partenaires sociaux refusent de se plier à l'injonction et que, d'une manière plus générale, ils ne se couchent pas.

Place du champ conventionnel en formation-J.Barthelemy.pdf

12/05/2011

Le temps du bâton

En cette période anniversaire du 10 mai 1981, on peut se souvenir de : "Il faut laisser du temps au temps". Sauf que le temps politique a ses échéances, qui ne sont pas celles du temps social. Le politique a besoin de résultats, il les a promis. Et s'ils ne viennent pas, il faut les faire venir. Mais comment ? lorsque l'on est pressé, on a pas non plus le temps de réfléchir et l'on en revient aux recettes supposées simples : carotte ou bâton. Plus de carottes à distribuer ? alors ce sera le bâton. Vous ne négociez pas sur l'emploi des seniors ? le bâton de la pénalité ! Vous ne négociez pas sur l'emploi des handicapés ? le bâton ! Vous ne négociez pas sur la pénibilité ? le bâton ! et non plus sur l'égalité professionnelle ? le bâton, le bâton, le bâton vous dis-je, que Molière mettait dans les mains des sots.

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Cherchez l'âne

Car il savait bien, Molière, que le bâton ne règle rien, bien au contraire. Que peut faire un collégien à qui je demande, sous peine de bâton, de résoudre une intégrale de polytechnique ? accepter le bâton et nourrir un sentiment d'injustice ou tricher. C'est ce que nous dit, à mots peu voilés, le Ministère du travail qui dresse le bilan des accords seniors : majoritairement des accords de neutralisation sans portée pratique. De la forme donc, pour éviter le bâton. Mais trouver d'autres leviers de motivations supposerait de laisser du temps au temps. Et ce temps là est révolu.

02/03/2011

Une Fée pour le dialogue social

S’il y en a qui ne chôment pas, en cette période difficile pour l’emploi, ce sont les partenaires sociaux. Pas moins de 7 négociations interprofessionnelles sont en cours ou seront lancées lors de ce premier semestre, et pas sur des thèmes faciles, que l’on en juge :  l’emploi  des jeunes, l’assurance chômage, les retraites complémentaires, la gouvernance des organismes paritaires et le financement du paritarisme, le dialogue social et les IRP, le bilan d’étape professionnel et le financement de la protection sociale. Si le programme est vague, heu...pardon vaste (sacré Martine !), il faut bien reconnaître qu'après deux mois, les résultats sont maigres puisque le seul accord véritablement en vue porte sur la convention d’assurance chômage, reconduite quasiment en l’état. Et  sont annoncées pour le second semestre des négociations sur  l’emploi et la sécurisation des parcours professionnels, la qualité de vie au travail et l’emploi des seniors. Diable !

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Raoul Dufy - La Fée Electricité - 1937

Pourtant, cela patine au point que Gérard Larcher, fort de son statut de Président du Sénat ce qui est autrement plus stable que la fonction de Ministre, parle de « dialogue social adolescent ». Et ajoute  que le mode même de travail, sous forme de réunion au siège du MEDEF et d’amendement par les syndicats d’un projet de texte  patronal, démontre l’immaturité du système (pour Gérard Larcher, on sent bien que la qualité d’adolescent est surtout marque de faiblesses).

Reste à trouver une méthode de travail différente, puisque même la loi n’est plus faite sur la base d'un texte du Gouvernement mais de celui d’une commission. Alors à quand les commissions d’élaboration de textes en amont des phases de négociation ? lorsque cette question sera résolue, une dernière demeurera : où se réunir pour négocier puisqu’il n’est pas symboliquement pertinent de se rendre systématiquement au siège d’une des organisations professionnelles. Le concours est ouvert pour déterminer ce qui pourrait être le lieu de la négociation collective. Pour ma part, je vote pour la hall du musée d’art moderne dans lequel est installée la Fée électricité. Réalisée par Raoul Dufy à la demande d’EDF pour montrer, notamment, le rôle social joué par la lumière électrique, peut être cette fée penchée sur les négociateurs serait-elle propice à susciter  l’étincelle de créativité qui fait les bons accords.

24/02/2011

Les branches de l'intérieur

Question d'un enfant au sculpteur qui achève de modeler un cheval dans ce qui fut un bloc de pierre : "Comment tu savais qu'il y avait un cheval caché dedans ?". Giuseppe Penone connaît les arbres, et il sait qu'il y a des branches à l'intérieur. Alors il ouvre l'arbre, il découpe, il avance, il ponce, son corps à corps avec l'arbre le fait devenir branche lui-même. C'est à cet instant qu'il les fait surgir. Et vous les propose enfin dévoilées.

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Giuseppe Penone - Tronc creux


A l'intérieur des OPCA, il y a des branches. Il n'est pas anormal que des tensions surgissent entre les deux. Les tensions c'est de la vie et c'est aussi ce qui fait tenir. A condition toutefois que ces tensions s'exercent avec la force requise et qu'elles ne mettent pas en péril l'équilibre de l'ensemble. Dans les négociations sur la mise en place des nouveaux OPCA, il sera nécessaire de définir des modes de régulation des tensions si l'on veut que l'oeuvre réalisée soit pérenne. La troisième chronique de la Fabrique des OPCA, réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF, fait le point sur les relations entre les branches et l'OPCA. Les négociateurs ne pourront pas dire qu'ils ne savaient pas qu'il y avait des branches cachées dedans.

La fabrique des OPCA - Accord de branche et OPCA.pdf

16/02/2011

De la représentativité

Taraboukine  écrit à propos de Malevitch et du Suprématisme : "Et chaque fois que le peintre a voulu se débarrasser réellement de la représentativité, il ne l’a pu qu’au prix de la destruction de la peinture et de son propre suicide en tant que peintre." En voilà un que le carré blanc sur fond blanc avait un peu agacé.

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Malevitch - Carré blanc sur fond blanc - 1918

La question de la représentation est indissociable de celle de l'art, mais à Taraboukine on pourra préférer Olivier Debré : "La peinture dite abstraite est la recherche de l’image vraie. La peinture dite figurative est l’image de l’apparence."

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Olivier Debré - Daitoku-ji Temple

La représentativité est de la même manière récurrente, une question posée aux organisations patronales et syndicales. Si la loi du 20 août 2008 a réglé la question de la représentatitivité syndicale en nous en fournissant les critères, notamment à travers la mesure d'audience, nul ne s'est penché à ce jour sur les critères de la représentativité patronale. Cette question ne pourra être continuellement différée. Il serait logique qu'elle soit réglée avant 2013, date à laquelle sera établie la représentativité des organisations syndicales au niveau des branches et interprofessionnel. La seconde chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer dans le cadre de la Fabrique des OPCA, aborde la question de la représentativité des partenaires sociaux et de son impact sur les négociations en cours dans le cadre de la réforme des OPCA. Et l'on s'aperçoit qu'en matière de représentativité, il y en a qui sont plus égaux que les autres.

Représentativité et OPCA.pdf

08/02/2011

Etranges machines

Les OPCA sont d'étranges organismes. Paritaires, créés par accord, soumis au contrôle de l'Etat, gérant plus de 6 milliards d'euros, ils demeurent méconnus mais alimentent moultes suspicions : pratiques opaques, conflits d'intérêts, gestion dispendieuse, productivité hasardeuse...les travaux préparatoires de la loi du 24 novembre 2009 n'ont pas épargné les OPCA, ni leurs gestionnaires. Sans nécessairement que les rapports de l'IGAS, de la Cour des comptes, de la commission Ferracci ou Parlementaire ne nous éclairent davantage sur les pratiques de ces drôles de machine (sauf peut être le rapport de l'IGAS, de loin le meilleur de tous ceux cités).

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Jean Tinguley - Grosse Meta Maxi-Maxi Utopia  - 1987

Pour mieux comprendre les OPCA, Jean-Marie Luttringer et moi-même produirons 12 chroniques au rythme d'une par semaine sous le titre générique "La Fabrique des OPCA". Ces chroniques seront publiées par l'AEF et seront mises en ligne sur ce blog. Elles porteront sur les thèmes suivants :

I. Les OPCA et la négociation collective

1. Création d'un Opca et liberté de choix de l'entreprise ;
2. Représentativité patronale et syndicale et administration de l'OPCA ;
3. Opposabilité des clauses d'un accord formation au conseil d'administration d'un Opca ;
4. Les pouvoirs de la CPNE et ses relations avec l'Opca ;
5. Les procédures d'extension et d'agrément et leurs effets juridiques.

II. Fonctionnement, financement et gestion des Opca

6. La gouvernance paritaire : assemblée générale, conseil d'administration, section paritaire professionnelle (SPP) ;
7. Délégation de gestion et subdélégation ;
8. Ressources fiscales, ressources conventionnelles ;
9. Prestations de services à l'entreprise aux salariés aux demandeurs d'emploi ;
10. Les relations entre l'Opca et le FPSPP ;
11. Le plan comptable ;
12. Les conventions d'objectifs et de moyens.

Peut être cette vision rapprochée permettra-t-elle de mieux saisir les logiques et modes de fonctionnement de la bête.

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Voici donc la première des douze chroniques de la Fabrique des OPCA. Elle porte sur la mise en place d'un OPCA et la liberté de choix de l'entreprise. Pourquoi les OPCA ne sont-ils que partiellement concurrents entre eux et quelles sont les libertés d'une entreprise vis-à-vis d'un OPCA, telles sont les questions traitées dans cette première chronique.

La fabrique des Opca-1-CréationOPCAetLibertéchoixentreprise.pdf

10/12/2010

Une belle oeuvre, inachevée

Picasso dut répondre à la question d'Henri-Georges Clouzot qui tournait en 1955 "Le mystère Picasso" : "Quand une oeuvre est-elle terminée ?". La réponse n'est pas dans les mots. Elle est sur la toile, elle est dans la perception évidente, soudaine, que tout se tient, que tout est en place et que c'est terminé. L'histoire de la peinture est riche de repentirs traqués par les rayons X de la modernité. Les toiles sous les toiles fascinent pour comprendre la construction du tableau. Elles ne nous apprennent pourtant rien sur l'instant de la fin du tableau. La question n'est pas ce qu'a fait le peintre avant, mais pourquoi il s'est arrêté à ce moment là, à cet endroit là. Henri-Georges Clouzot ne savait pas, en 1955, que quelques années plus tard il laisserait une oeuvre inachevée qui deviendrait une légende. Les 185 bobines jamais montées de l'Enfer sont un des mythes du cinéma, moins sulfureux par le titre que par la belle Romy.

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Les partenaires sociaux n'ont pas tourné 185 bobines de film, mais ils ont signé plus d'une dizaine d'accords nationaux interprofessionnels de référence dans le domaine de la formation professionnelle. A l'occasion du 40ème anniversaire du premier d'entre eux, conclu en 1970, une chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF fait le point sur les apports de la négociation collective à l'évolution et la transformation de la formation professionnelle. La matière formation passée au moule de la négociation par les artistes paritaires donne une oeuvre inachevée mais qui conserve pouvoir de séduction et promesses d'avenir. Seront-elles tenues ? la parole reste aux artistes.

A propos du 40e anniversaire de l'ANI de 70.pdf

 

Et pour ceux qui seraient plus sensibles aux charmes de Romy Schneider qu'à ceux du droit de la négociation collective appliquée à la formation, ce que nous ne saurions blamer, voici quelques extraits choisis des 185 bobines pour réchauffer un week-end d'automne aux couleurs hivernales.



 

06/12/2010

Du rythme !

Au début du XXème siècle, Blaise Cendrars donnait du rythme à la poésie : en lui faisant prendre le transsibérien et en créant, avec la complicité de Sonia Delaunay, le premier livre simultané, autrement dit le premier livre artistique par sa typographie et son iconographie. Et ce n'est pas tout : relié d'un seul tenant, le livre se déplie et se déploie, se mettant lui-même en mouvement. La prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France rompt avec la poésie romantique et classique des décennies précédentes. Elle propulse dans la modernité, à coup de chevaux vapeurs et de sifflets de locomotives, une manière nouvelle de faire de la poésie. En rythme.

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Blaise Cendrars - Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France

Livre simultané illustré par Sonia Delaunay

Les acteurs sociaux feraient bien, au choix, de lire Blaise Cendrars ou de prendre le transsibérien pour retrouver du rythme. Que l'on en juge :

- La préparation opérationnelle à l'emploi (POE) est une des grandes innovations de la loi du 24 novembre 2009. Elle prévoit une utilisation massive des ressources du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) pour les formations de demandeurs d'emploi liées à des embauches. Le texte n'appelle aucun décret d'application. Juste une convention entre le FPSPP et Pole Emploi pour une mise en oeuvre opérationnelle. Plus d'un an après l'entrée en vigueur de la loi, la convention n'est toujours pas conclue et la POE ne fonctionne pas. Pas grave, les chômeurs ne râlent pas.

- La même loi prévoyait, conformément à l'ANI du 7 janvier 2009, qu'une négociation fixerait les conditions de mise en oeuvre du bilan d'étape professionnelle. Près de deux ans après la signature de l'ANI, aucun calendrier n'est fixé pour négocier la mise en oeuvre du bilan d'étape professionnel. Pas grave, personne n'a compris à quoi il servait entre l'entretien professionnel et le bilan de compétences.

- Les partenaires sociaux ont ouvert plusieurs chantiers dont deux qui portent sur leurs relations mêmes : le financement du paritarisme et la réforme des institutions représentatives du personnel. Ces deux thèmes n'apparaissent pas, à ce jour, dans les sujets qui pourraient être inscrits à l'agenda social 2011. Pas grave, l'Etat trouvera là un argument supplémentaire pour reprendre la main sur les terrains désertés par les partenaires sociaux qui protesteront, mais un peu tard.

Tout se passe comme si d'urgence il n'y avait point, comme si le rythme était celui de la vie des petites boutiques et des petites affaires. Le rythme de ceux qui décident n'est décidément pas celui de ceux qui auraient besoin qu'ils agissent vite et bien, c'est à dire deux fois bien.

01/12/2010

Des dialogues vertueux

Ecrire c'est d'abord lire, peindre c'est d'abord regarder. Comme les écrivains empruntent à ceux qu'ils ont aimé lire, les peintres dialoguent dans leur peinture avec leurs prédécesseurs. Et, précision que je sens nécessaire bien qu'elle ne devrait pas l'être, il n'y a strictement aucune antinomie entre ces emprunts et la réalisation d'une oeuvre toute personnelle. Car l'oeuvre va dire la manière de voir, de traduire et de comprendre, au sens le plus global. En ce sens, tout dialogue est singulier.

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Martial Raysse           -               J.D.A Ingres

 

On peut considérer que le dialogue social est vertueux et que la confrontation est un aiguillon de la créativité, même si chacun ne se situe pas sur le même terrain, comme le peintre et le photographe.

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Tom Hunter        -          Vermeer

La négociation d'entreprise sur la formation professionnelle s'est peu développée depuis 40 ans. Les causes en sont multiples : faiblesse globale de la négociation collective dans les entreprises françaises (moins de 20 % des entreprises de plus de dix salariés signent un accord collectif chaque année), défiance des négociateurs de branche,  compétence des négociateurs d'entreprise, intérêt pour le sujet, etc. La chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF explore les conditions d'une relance de la négociation d'entreprise sur la formation professionnelle. Elle expose notamment le parallèle entre le DIF, moyen négocié d'accès à la formation, et la négociation collective et la place qu'occupe la formation dans les négociations obligatoires. Et pourquoi l'on peut espérer un dialogue un peu plus fourni et fructueux dans les années à venir.

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19/11/2010

S'ils le veulent bien

C'est un des articles les plus fameux du Code civil, vieux de plus de deux siècles. Il s'agit de l'article 1134 qui affirme solennellement que "Les conventions légalements formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites". Autrement dit, les conventions qui respectent la loi méritent d'être élevées à la dignité de la loi. Sans oublier jamais qui les a faites reines. Cette conception du contrat, individuel ou collectif, n'a guère évolué depuis 1804. La loi toute puissante concède au conventionnel d'occuper le terrain que l'on accepte de lui céder, moyennant la redevance permanente de la déférence. Et gare à qui voudrait s'affranchir des limites du champ dans lequel il convient de brouter avec bonne humeur : la loi veille et elle ne plaisante guère.

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La déférence est souvent présente chez les négociateurs d'accords collectifs de travail soit par recherche du confort de l'abri légal, soit par crainte de la transgression, soit par tactique pour négocier a minima, soit par conception hiérarchique des rapports entre la loi et l'accord. Bref, les bonnes, et surtout les mauvaises, raisons ne manquent pas laisser à la négociation une place seconde. En cette période où vont s'ouvrir des négociations sur la formation professionnelle au niveau des branches, il serait souhaitable que les partenaires sociaux affirment cette autonomie et, pour paraphraser Reine Malouin, qu'ils la prennent et n'attendent pas qu'on la leur donne. La chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF indique comment la négociation de branche pourrait être un espace d'autonomie et d'innovation, si les négociateurs le veulent bien.

La négociation de branche sur la formation professionnelle.pdf

11/11/2010

Armistice ?

Assuré d'être confirmé dans sa fonction de Premier Ministre, François Fillon a eu le souci de montrer qu'il pouvait parfaitement incarner lui-même le "virage social", dont on ne sait très bien d'ailleurs en quoi il pourrait consister. Il s'est ainsi prononcé pour une meilleure articulation entre la démocratie politique et la démocratie sociale. Louable intention, même si les vieux réflexes ne seront pas perdus en un jour. Après avoir garanti que les partenaires sociaux auraient un rôle plus important à jouer à l'avenir, l'ex et futur Premier Ministre a rappelé qu'en tout état de cause, il revenait au politique d'avoir le dernier mot. Il ne s'agit après tout que d'une perpétuation de la phrase d'André Laignel qui avait fait scandale en 1981 : "Vous avez politiquement tort car vous êtes juridiquement minoritaire" (s'adressant à l'opposition à l'Assemblée). Il a toujours été difficile pour tous les gouvernants de considérer que leur légitimité n'était pas nécessairement universelle et qu'avoir gagné un vote ne garantissait pas d'avoir politiquement raison sur tous les sujets. Mais en ce jour d'armistice souhaitons que le dialogue entre les représentants politiques et les partenaires sociaux s'oriente vers l'apaisement pour le profit de tous.

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Elisabeth-Louise VIGEE-LE BRUN - La paix ramenant l'abondance - 1780

Nous pourrons rapidement vérifier, dans le domaine de la formation professionnelle, si l'armistice est durable. Tous les OPCA perdent leur agrément à la fin de l'année 2011 et des négociations doivent s'engager, certaines ayant déjà abouti, pour recomposer le paysage des OPCA. Pour guider cette négociation, l'Etat a fixé des règles précises dans la loi du 24 novembre 2009 et le décret du 22 septembre 2010. Toutefois, des espaces de négociation demeurent et doivent permettre à la créativité des partenaires sociaux de s'exprimer, tout en s'appropriant la redéfinition des missions et des modalités de fonctionnement des OPCA. Ce n'est guère par l'autorité, voire  l'autoritarisme que l'on produit de l'implication, mais au contraire en responsabilisant. Dans un premier temps, la balle est dans le camp des partenaires sociaux. A eux de prendre l'initiative de négocier en utilisant tous les espaces disponibles. Ensuite nous jugerons sur pièce de la position de l'Etat. Dans l'attente, voici la chronique rédigée pour l'AEF avec Jean-Marie Luttringer qui fait le point sur les limites et marges de manoeuvre pour les négociations sur les OPCA.

Limites et autonomie contractuelle de la négociation OPCA.pdf

21/10/2010

Rupture conventionnelle, pas de bluff !

La rupture conventionnelle du contrat de travail connaît un succès croissant depuis sa création en juin 2008. Nous serions désormais sur une base de 150 000 ruptures conventionnelles par an. Contrairement aux affirmations, pas toujours désintéressées, de certains avocats, la rupture conventionnelle constitue bien la modalité de rupture du contrat de travail qui offre la plus grande sécurité juridique c'est-à-dire qui prête le moins le flanc à la contestation. C'est donc elle qu'il faut privilégier si l'on préfère un bon accord à un mauvais procès. Encore faut-il réunir deux conditions pour la sécuriser : traiter l'intégralité des droits du salarié et l'informer complètement sur sa situation post-rupture.

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MarieJnn - Rupture

Pour les droits du salarié, on prendra soin de passer en revue tous les droits en cours ou à venir et de déterminer leur mode de règlement : salaires dus, jours de RTT, jours de congés payés, utilisation ou non du DIF avant la rupture, commissions à venir, primes venant à échéance après la rupture (proratisation ou non), versements ultérieurs le cas échéant de l'intéressement et de la participation, clause de non concurrence, dispense ou pas de travail avant la fin du contrat, etc. Pour ce faire, il sera nécessaire d'établir un contrat listant tout ces points et de ne pas se contenter du formulaire de l'administration qui sert à l'enregistrement mais pas à fixer toutes les conditions de la rupture.

Pour l'information complète du salarié, il est nécessaire de l'informer sur ses droits dans le cadre de la rupture : traitement fiscal et social des sommes versées à l'occasion de la rupture, délai de carence pour l'assurance-chômage, montant des indemnités d'assurance-chômage, impact de la rupture sur d'autres droits du salarié (notamment en matière d'assurance sur les crédits immobiliers : selon que le contrat vise une indemnisation par l'assurance chômage ou une perte d 'emploi due à un licenciement, la garantie pourra jouer ou non).

Dès lors que toutes ces conditions sont respectées, et que l'on conduit donc une négociation globale et loyale, la rupture conventionnelle constituera bien le mode de rupture du contrat de travail le plus sécurisé...quant à la rupture. Car rien n'exclut qu'un salarié saisisse les prud'hommes pour demander le paiement d'heures supplémentaires ou la réparation d'un préjudice moral du fait d'un harcèlement. Mais un contrat qui interdirait au salarié tout recours concernant l'exécution et la rupture du contrat de travail, cela n'existe pas, et lorsque cela existe, c'est du bluff.