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02/06/2013

Liberté mais aussi égalité et fraternité ?

Le Gouvernement annonce son intention de réformer le régime des auto-entrepreneurs, et aussitôt, la machine médiatique s'emballe. La droite, c'est le jeu, hurle au découragement total de toute initiative d'entreprendre. Les auto-entrepreneurs auto-proclamés "poussins" s'égosillent devant leur liberté entamée et leur statut dégradé. Et la Ministre benjamine et tarn et garonnaise, Sylvia Pinel, se voit obligée de reprendre le Premier Ministre lui-même. Il faudrait tout de même rappeler, dans cette affaire, que les premiers demandeurs d'une réforme du statut d'auto-entrepreneur ce sont...les entrepreneurs. Dès la création du statut, les artisans se sont élevés contre cette possibilité de les concurrencer déloyalement, du fait d'un taux de charge forfaitaire avantageux par rapport au droit commun et d'un non assujettissement aux mêmes obligations règlementaires.

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Gil - www.gilblog.org

J'ai salué, sur ce blog, la liberté d'activité que représente le statut d'auto-entrepreneur. Il serait désolant de réduire à peau de chagrin cette liberté. Mais pour autant, cela ne doit pas éluder la question de l'égalité (pourquoi des statuts différents pour exercer une même activité) ni celle de la fraternité (pourquoi des contributions différentes aux régimes sociaux). Le mieux à faire, en ce domaine, est peut être de se demander de quel droit commun nous avons besoin pour l'exercice d'activités indépendantes principales et pour les activités indépendantes accessoires et d'arrêter de créer des statuts dérogatoires qui apportent moins de réponses immédiates qu'ils ne créent de problèmes à venir.

24/08/2011

Réalités économiques

L'argument est tellement récurrent que n'importe qui pourrait écrire les discours des premiers ministres qui annoncent un plan de rigueur. L'important tient en une phrase : "Il y a des réalités économiques". En réalité, tous les économistes sérieux savent que l'axiome est faux. Il y a une représentation économique des choses serait plus juste. Par exemple, il suffit de changer les normes comptables et vous modifiez la réalité économique. Jean-Marie Messier le savait bien qui a imposé l'EBITDA comme réalité aux analystes avant que ces derniers n'imposent une autre réalité. Mais celui qui connaît le mieux la réalité,  c'est le Yucca.

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Ola Pehrson - Yucca Invest Trading Plant

En 1999, l'artiste suédois Ola Pehrson a connecté un Yucca sur un logiciel de gestion des ordres de bourse. Les mouvements vitaux du Yucca produisent des impulsions électriques qui génèrent des ordres d'achat et de vente sur les marchés internationaux. Après six mois de fonctionnement, le Yucca qui n'a pourtant fait ni Harvard, ni Yale, ni HEC, avait gagné de l'argent. Voilà la réalité économique : un Yucca bien arrosé (il recevait lumière et eau lorsque son compte était positif et demeurait au sec et dans le noir lorsqu'il perdait de l'argent) est plus rentable que nombre d'humains, quand bien même ne ménageraient-ils pas leur peine.

Et on la traite comment cette réalité économique là monsieur le premier ministre ?

11/11/2010

Armistice ?

Assuré d'être confirmé dans sa fonction de Premier Ministre, François Fillon a eu le souci de montrer qu'il pouvait parfaitement incarner lui-même le "virage social", dont on ne sait très bien d'ailleurs en quoi il pourrait consister. Il s'est ainsi prononcé pour une meilleure articulation entre la démocratie politique et la démocratie sociale. Louable intention, même si les vieux réflexes ne seront pas perdus en un jour. Après avoir garanti que les partenaires sociaux auraient un rôle plus important à jouer à l'avenir, l'ex et futur Premier Ministre a rappelé qu'en tout état de cause, il revenait au politique d'avoir le dernier mot. Il ne s'agit après tout que d'une perpétuation de la phrase d'André Laignel qui avait fait scandale en 1981 : "Vous avez politiquement tort car vous êtes juridiquement minoritaire" (s'adressant à l'opposition à l'Assemblée). Il a toujours été difficile pour tous les gouvernants de considérer que leur légitimité n'était pas nécessairement universelle et qu'avoir gagné un vote ne garantissait pas d'avoir politiquement raison sur tous les sujets. Mais en ce jour d'armistice souhaitons que le dialogue entre les représentants politiques et les partenaires sociaux s'oriente vers l'apaisement pour le profit de tous.

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Elisabeth-Louise VIGEE-LE BRUN - La paix ramenant l'abondance - 1780

Nous pourrons rapidement vérifier, dans le domaine de la formation professionnelle, si l'armistice est durable. Tous les OPCA perdent leur agrément à la fin de l'année 2011 et des négociations doivent s'engager, certaines ayant déjà abouti, pour recomposer le paysage des OPCA. Pour guider cette négociation, l'Etat a fixé des règles précises dans la loi du 24 novembre 2009 et le décret du 22 septembre 2010. Toutefois, des espaces de négociation demeurent et doivent permettre à la créativité des partenaires sociaux de s'exprimer, tout en s'appropriant la redéfinition des missions et des modalités de fonctionnement des OPCA. Ce n'est guère par l'autorité, voire  l'autoritarisme que l'on produit de l'implication, mais au contraire en responsabilisant. Dans un premier temps, la balle est dans le camp des partenaires sociaux. A eux de prendre l'initiative de négocier en utilisant tous les espaces disponibles. Ensuite nous jugerons sur pièce de la position de l'Etat. Dans l'attente, voici la chronique rédigée pour l'AEF avec Jean-Marie Luttringer qui fait le point sur les limites et marges de manoeuvre pour les négociations sur les OPCA.

Limites et autonomie contractuelle de la négociation OPCA.pdf

03/11/2010

Grenelle ou Talleyrand ?

Comme le frigidaire, l'appellation "Grenelle" est  passée dans le langage commun. Faut-il pour autant en faire un usage immodéré ?  après le Grenelle de l'environnement, le Grenelle de la mer, certains ont appelé à un Grenelle de la sécurité urbaine et voici le futur auto désigné premier Ministre qui réclame un Grenelle de la fiscalité. Personne n'a encore proposé un Grenelle des banlieues (il fut en 2007 question d'un Plan Marschall mais l'aide américaine tarde manifestement à venir), le Grenelle des retraites n'a pas eu lieu et les partenaires sociaux peinent à enclencher le Grenelle du dialogue social. Comme dirait De Gaulle, sauter comme un cabri en criant Grenelle, Grenelle, cela ne fait guère avancer les choses. Et peut être faut-il se souvenir de ce que furent les accords de Grenelle : une augmentation du SMIG (ancêtre du SMIC) de 30 %, une hausse des salaires moyens de 10 %, la reconnaissance des syndicats dans l'entreprise, la réduction de la durée du travail, l'assouplissement des conditions d'accès à la retraite, une grande négociation sur l'emploi, l'engagement d'une négociation sur la formation professionnelle qui donnera l'accord de juillet 1970 puis la loi de juillet 1971...Bref, à peu près exactement l'inverse des tendances actuelles, ce qui confirme que plus on utilise le mot et moins on voit la chose.

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Si l'appellation de Grenelle est restée, c'est parce que le Ministère du Travail, lieu des négociations, a son entrée au 127 de la rue de Grenelle. Mais le bâtiment fait l'angle avec la rue Talleyrand. Vous vous souvenez ?  l'ancien  évêque qui nationalisa les biens du clergé. L'Eglise cria à l'apostat. Et pourtant ! en prévoyant que les biens appartenaient à l'Etat, ils furent ensuite transférés aux communes en grande partie,  Talleyrand, certes avec l'aide du Concordat, inventa un nouveau mode locatif dont l'Eglise tire toujours profit : le curé est le seul, ou quasiment, à pouvoir user du lieu, mais la charge de l'entretien revient à la collectivité publique. Voici un nouveau mode d'accord : celui qui conduit à faire exactement le contraire de ce que l'on annonce. Mais vous voyez l'effet si un dirigeant se mettait à réclamer un Talleyrand des retraites ou de la fiscalité !

Pour mémoire, les accords de Grenelle : Accord_de_Grenelle.pdf