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08/11/2010

Le collectif, c'est moi

Le droit du travail peine souvent à appréhender le collectif. Bien sur la loi reconnaît les droits collectifs. Mais leur support est souvent le sujet individuel : ainsi le droit à la négociation collective est un droit individuel exercé collectivement. Pourquoi cette personnalisation du droit ? En grande partie parce que le sujet de droit est l'individu, le support du droit le contrat de travail et que le collectif n'atteint jamais ce niveau d'incarnation. La collectivité de travail est protéiforme, mouvante et jamais stabilisée. Comme l'on ne se baigne jamais dans le même fleuve, on n'est jamais, ou très rarement, face au même collectif, alors que l'individu est un sujet stable de droit.

Cette consécration juridique du sujet s'accorde à l'évolution historique des sociétés occidentales. Le XXème siècle a vu l'individu s'extraire du collectif, s'affirmer, s'autonomiser et demander reconnaissance pour lui-même et non pour son groupe d'appartenance. Il en est résulté une personnalisation plus forte des relations et une mise sous tension corrélative plus importante des individus. Peu de domaines ont échappé à ce mouvement, ainsi que nous le confirme Gérard Larcher.

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L'affiche est placardée sous les arcades de la rue de Vaugirard, face à l'entrée du Palais du Luxembourg. Double stupéfaction en la découvrant. Tout d'abord l'expression "coeur de métier" empruntée au langage managerial paraît bien peu appropriée pour le Sénat qui n'est ni une entreprise, ni une organisation composée de professionnels. La fonction élective n'est pas un contrat de travail et le Sénat n'est pas un site de production de ces choses curieuses que l'on appelle les lois. Le mandat sénatorial devrait plutôt être un métier de coeur qu'un coeur de métier, et l'on s'inquiète de cette inversion des valeurs. La deuxième surprise est que si l'on a pas le nez collé sur l'affiche, seuls sont lisibles les mots "Le coeur de métier du Sénat c'est : Gérard Larcher". La photo est d'ailleurs là pour nous le rappeler. Surprise car on pensait l'homme plus humble et plus soucieux de la nature de sa fonction. Et l'on se dit que si même lui en vient à s'auto-promouvoir dans la plus pure langue de bois manageriale, c'est qu'en matière de recul du collectif, on a sans doute pas encore tout vu.

 

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