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05/07/2011

Le DIF à la forge

La branche de la Métallurgie vient de renégocier son accord relatif à la formation professionnelle. Mis à la signature le 1er juillet 2011, ce texte devrait recueillir l'aval des organisations syndicales. Il annule et remplace tous les accords précédents sur le même sujet, rendant beaucoup plus lisible le dispositif de formation de la métallurgie. Petit zoom dans le cadre de cette chronique sur le DIF repassé à la forge pour une mise au goût du jour.

Tout d'abord, l'accord de branche ne s'applique qu'à défaut d’accord d’entreprise : priorité à la négociation de proximité. Leçon de l'expérience car le DIF est mis en oeuvre de manière très différente selon les entreprises.

Ensuite une approximation : l'accord prévoit que tout titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée bénéficie chaque année de 20 heures de DIF. Il liste ensuite les cas de suspension du contrat de travail qui ouvrent droit au DIF. Ces dispositions sont incohérentes. Pour qu'elles aient du sens il aurait fallu que le DIF soit lié au travail effectif. Etant lié à l'existence du contrat, il en résulte mécaniquement que seules les absences qui n'ouvrent pas droit à l'ancienneté (interruption du contrat et non suspension) ne sont pas prises en compte. Seule exception légale : le congé parental à temps plein.

 L'accord du 1er juillet prévoit également que toutes les formations entrant à la fois dans le champ de la FPC, de la politique de formation de l'entreprise et dans les orientations de la branche relèvent du DIF. Exit l'interdiction de faire du DIF sur les actions d'adaptation au poste de travail. L'accord en revient finalement à l'approche légale qui ne fait aucun lien entre les catégories de formation et le DIF. Voilà un bon coup de soufflet sur le champ du DIF dans les forges de Vulcain.

LesForgesdeVulcain-Velazquez-1630.jpg

Velazquez - Les forges de Vulcain - 1630

Dans la série des coups de limes salutaires, les négociateurs ont également prévu que le DIF pouvait être convenu lors de l'entretien professionnel ou sur demande du salarié. C'est l'accord qui est mis en avant et non l'initiative.

Dans la même veine, il est prévu qu'un accord bilatéral, employeur-salarié, peut librement déterminer si le DIF s'effectue pendant ou en dehors du temps de travail.

Par contre, l'accord ne règle pas, de manière fâcheuse, l'approximation légale qui veut que si seule la faute lourde prive du DIF, ce dernier en cas de licenciement doit être demandé pendant le préavis. Reprendre ce régime légal bancal ne permet pas d'offrir une solution certaine aux entreprises et aux salariés en cas de faute grave. Une prise de position plus courageuse aurait été bienvenue.

Enfin, on notera que l'accord lève l'ambigüité de l'accord précédent sur le DIF en cas de démission. L'accord métallurgie est un des rares accords à prévoir qu'en cas de démission le DIF est de droit. Il est dorénavant précisé que l'engagement de l'entreprise est plafonné comme en matière de licenciement. Cette précision, qui ne figurait pas dans la précédent accord, permet de porter les droits du démissionnaire à hauteur de ceux du salarié licencié, sans aller au-delà.

Au final, plutôt de la belle ouvrage, même si manifestement il est encore possible de peaufiner l'usinage.

AccordUIMM1erJuillet2011.pdf

29/01/2010

Le syndrome de l'ingénieur

Le modèle français est celui de la rationalité triomphante. Le modèle de l'ingénieur qui construit les avions les plus performants (le Rafale, le 680, le Concorde), les trains les plus rapides (TGV), les centrales nucléaires les plus productives, etc. Que ces brillantes créations de la rationalité technologique ne soient pas que des réussites commerciales voire ne séduisent guère les destinataires potentiels n'est pas un motif suffisant pour remettre en cause le modèle. Preuve en est, à un autre niveau certes, le projet d'accord proposé par l'UIMM sur la GPEC dans le secteur de la métallurgie. La GPEC y est définie comme la prévision des besoins futurs de l'économie (pas des organisations ou des personnes les besoins, de l'économie on l'aura noté) et la mise en adéquation des compétences actuelles des salariés. Le modèle est persistant : on prévoit l'avenir puis on s'y adapte. L'ingénieur est donc à la fois un génie technologique et un prophète, autrement dit un Dieu tout puissant qui maîtrise les lois de la nature.

Rafal Olbinski.jpg
Rafal Olbinski - Le prophète
Démiurge certes, mais rationnel. Cette conception binaire et mécaniste de la GPEC, dans laquelle les individus sont des sommes de compétences techniques constituant un stock qu'il importe de maintenir à jour et adapté à la prévision future, ne fonctionne pourtant pas. Ni en terme de mobilisation des personnes, on le comprend aisément puisque l'individu n'est renvoyé qu'à ce qui lui manque pour l'avenir, ce qui permet au passage de ne pas valoriser l'existant, ni en terme de prévision tout simplement comme l'actualité s'acharne à nous le démontrer. Et c'est ainsi que la GPEC est l'art de stocker le passé en s'acharnant à tracer les compétences des individus et à travailler sur un avenir qui, comme la ligne d'horizon, demeure un mirage inatteignable. A croire que le syndrome de l'ingénieur est d'oublier qu'il existe un présent, un ici et maintenant à célébrer quotidiennement, tel un anniversaire. Mais tout ceci est-il bien rationnel et raisonnable ?