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09/02/2015

Simple, non ?

Apparemment pas tant que ça, ou alors je m'y prends comme un manche pour expliquer la manip. Mais, ayant un faible pour les lézards mexicains, je ne lâche pas l'affaire et profite du lundi matin et de la vitamine D d'un week-end ensoleillé pour remettre l'ouvrage sur le métier. En route donc ! le 28 février prochain, les entreprises solderont leurs contributions au financement de la formation professionnelle pour l'année 2014. Le message qui leur est délivré est souvent que pour cette collecte, rien ne change et que les nouvelles règles ne s'appliqueront qu'au 28 février 2016 sur la collecte au titre de l'année 2015. Ce qui est, bien évidemment faux. Les nouvelles règles sont entrées en vigueur le 1er janvier 2015 et deux mois après on ne peut pas faire comme si elles n'existaient pas. Et si elles n'impactaient pas le versement qu'une entreprise peut faire  à son OPCA au titre du plan de formation. 

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Car effectivement, sur les contributions obligatoires (CIF, Professionnalisation, éventuellement versement obligatoires conventionnels sur le plan) rien ne change. Par contre, pour les entreprises qui avaient l'habitude de verser, de manière volontaire, tout ou partie de leur plan de formation (dans le cadre du 0,9 %) la question se pose de savoir si ce versement doit encore être effectué, et si oui au titre de quelle année. Car entre le 1er janvier et le 28 février 2015, les dépenses peuvent être effectuées au titre de 2014 ou de 2015. Or, si un versement plan est effectué au titre de 2014, il est mutualisé puis remis à disposition dans les conditions fixées par le Conseil d'administration de l'OPCA. Alors que si le versement volontaire est effectué au titre de 2015 (dès lors que l'entreprise n'en a pas besoin pour justifier de l'atteinte de son 1,6 %), il s'agit d'une somme non mutualisée qui est portée au crédit de l'entreprise et lui reste acquise. Une bonne occasion pour se rapprocher de son OPCA et voir sur quelles bases peut s'établir une relation nouvelle dans un environnement juridique nouveau. 

22/12/2014

Préserver les acquis

En ce jour anniversaire, il est temps de se souvenir qu'on a toute la vie pour préserver les acquis de l'enfance et tenter de rester fidèle à ce que nous portons de plus libre en nous. Ce qui n'exclut pas, surtout pas, des acquis nouveaux, parmi lesquels ceux du CPF, alléluia !

A partir de quand acquiert-on des heures au titre du compte personnel de formation (CPF) ?

A partir du 1er janvier 2015, toute personne qui est salariée dans le secteur privé acquiert des heures au titre du CPF.

Combien d’heures sont acquises chaque année ?

L’acquisition est de 24 heures par an sur la base d’un travail à temps plein. En cas d’activité à temps partiel, l’acquisition est proratisée (soit 12 heures de CPF pour un mi-temps).

Tous les salariés sont-ils concernés ?

Oui, quelle que soit la nature du contrat de travail.

Les alternants (apprentis et contrats de professionnalisation) n’avaient pas droit au DIF, acquièrent-ils des heures de CPF ?

Oui, comme tout salarié. Ne sont exclus que les stagiaires.

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Comment est calculé le nombre d’heures acquis par un salarié en CDD ?

Comme pour les autres salariés : au prorata de son temps de travail. Un CDD de trois mois à temps plein donnera droit à 6 heures de CPF et un CDD de trois mois à mi-temps permettra d’acquérir 3 heures de CPF.

Lorsque la durée conventionnelle de travail est inférieure à 35 heures, l’acquisition est-elle proratisée ?

Si le temps plein dans l’entreprise est inférieur à 35 heures  hebdomadaire ou 1607 heures par semaine, les salariés ont droit à l’intégralité des 24 heures. Dans ce cas, l’entreprise doit informer l’OPCA et lui fournir la liste nominative des salariés concernés afin qu’il la transmette à la Caisse des dépôts pour la rectification des droits des salariés.

Les heures supplémentaires permettent-elles d’acquérir des droits supplémentaires ?

Non. Si les heures complémentaires sont prises en compte pour les salariés à temps partiel (le droit est calculé sur le temps de travail réel), les heures effectuées au-delà de 35 heures ne sont pas prises en compte pour les salariés à temps plein du fait du plafonnement à 24 heures par an.

Combien d’heures acquièrent les salariés en forfait en jours ?

24 heures quelle que soit le volume du forfait. Cette solution se déduit du fait que le temps partiel n’existe pas pour les forfaits en jours.

Est-il possible d’acquérir 24 heures chaque année ?

Oui si les heures sont utilisées régulièrement. A défaut, dès que le compteur de CPF atteint 120 heures, les droits acquis sont plafonnés à 12 heures par an et si le compteur arrive à 150 heures il n’y a plus d’acquisition. En tant que droit rechargeable, le CPF est donc une incitation à l'utilisation fréquente et non à l'épargne qui est pénalisante. 

 Un accord de branche ou d’entreprise peut-il prévoir une acquisition supérieure à celle résultant du temps de travail ?

Oui, mais l’accord doit alors obligatoirement prévoir une cotisation complémentaire qui ne peut être inférieure à 13 euros par heure supplémentaire acquise par le salarié. Par exemple, si un accord prévoit qu’un salarié à mi-temps acquiert 24 heures et non 12, l’entreprise devra verser une contribution minimale de 12 x 13 euros = 156 euros à l’OPCA. Dans ce cas, l’entreprise doit informer l’OPCA des salariés concernés afin que la Caisse des dépôts puisse prendre en compte les heures acquises en supplément. 

16/12/2014

Arbitraire et fait du prince

On pourra me rétorquer que lorsque l'on vient du Sud, on est pas toujours au garde à vous devant les règles (d'une manière générale d'ailleurs, on est pas très porté sur le garde à vous...). On pourra me dire que dans ces chroniques même, l'orthodoxie n'est pas toujours au rendez-vous. Oui, on pourra toujours le dire. Mais en même temps, on peut également trouver que les positions que l'administration vient de prendre dans sa deuxième version du Question/Réponse consacré aux OPCA, c'est un peu fort de café. Et que, comme en des temps plus impériaux mais non moins impérieux, force reste à l'Etat mais pas forcément à l'Etat de droit. Entre l'empire et la world company, le doigt divin tient lieu de parole sacrée.

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De quoi s'agit-il ? de trois questions qui n'étaient pas tranchées dans le premier Questions/Réponses et qui le sont dans le second avec le plus parfait arbitraire :

- En premier lieu s'agissant de la possibilité pour une entreprise de faire un versement volontaire à un OPCA. Toute la loi du 5 mars 2014 et les décrets vont dans le sens de l'OPCA unique (pour les arguments détaillés, voir l'article sur les OPCA publié dans Droit Social de Décembre 2014 et sur ce blog). La DGEFP devait produire un argumentaire sur ce point, elle se contente d'une affirmation : le versement peut être fait à l'OPCA de branche ou à un OPCA interprofessionnel. Pourquoi ce privilège sauf considération politique ? nous n'en saurons rien ;

- Ensuite sur la possibilité pour un OPCA de financer les frais de déplacement des administrateurs, prévue par la loi. Tout d'abord la DGEFP annonce que seuls sont visés les membres des Conseils d'administration. Puis elle indique aujourd'hui que les conseils d'administration régionaux, à qui elle dénie par ailleurs toute capacité de décision, sont également concernés alors que les sections paritaires professionnelles, qui figurent elles dans la loi et sont donc des instances paritaires "légales" de l'OPCA n'y ouvriront pas droit. Pourquoi une telle distinction ? sur quelle base juridique ? mystère, mais ainsi le veut-on et ainsi en sera-t-il ;

- Enfin sur la possibilité pour les OPCA de financer la rémunération des salariés dans les entreprises de moins de 10 salariés. La loi ne le prévoit pas, un projet de décret l'envisageait mais le décret final ne l'a pas repris et voilà que l'on nous annonce que puisque c'était prévu dans l'ANI du 14 décembre 2013 (texte non étendu, qui ne le sera jamais et qui n'a aucune valeur normative et surtout pas celle d'imposer une solution que la loi écarte) et bien il suffit qu'un accord ou le conseil d'administration de l'OPCA le prévoit et ce sera possible. 

Au final, trois positions dont on pourrait dire courtoisement qu'elles ont une base juridique fragile, et de manière plus directe qu'elles font litière des règles au profit d'une position politico-administrative. Le problème n'est même pas sur les solutions retenues : la loi aurait pu le prévoir. Le problème est que justement elle ne l'a pas prévu et que l'on nous administre une nouvelle fois la preuve qu'il vaut mieux être influent que respecter les règles pour préserver ses intérêts. Pas forcément le meilleur message à transmettre dans une société qui cherche des repères. Mais quand arbitraire et fait du prince sont dans un bateau et comptent bien y rester, ce sont ceux qui s'en tiennent à la règle qui tombent à l'eau. 

QR DGEFP OPCA v2.pdf

28/11/2014

Ne pas voir, ne pas dire, ne pas entendre

Au Japon, la signification des singes de la sagesse, dans le culte Koshin, est la suivante : "ne pas vouloir voir ce qui pourrait poser problème, ne rien vouloir dire de ce qu’on sait pour ne pas prendre de risque et ne pas vouloir entendre pour pouvoir faire « comme si on ne savait pas.". Cette maxime pourrait servir d'exergue à la réunion tenue hier par la DGEFP à l'attention des OPCA. Et elle se trouve d'autant plus justifiée, si l'on se réfère au Questions/Réponses diffusé à cette occasion : si les articles du code du travail sont rappelées à longueur de pages, aucune réponse écrite n'est apportée aux questions posées depuis plusieurs mois et qui sont bien plus problématiques que celles abordées dans le document. 

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Ainsi : 

- Pas de précisions sur le champ du développement de la formation professionnelle continue, ouvert au financements conventionnels et volontaires, alors que les négociations de branche sont en cours et que la DGEFP donnera son avis sur les demandes d'extension d'accord ;

- Pas d'indication écrite sur la possibilité ou non pour une entreprise d'avoir le choix de l'OPCA auquel elle effectue un versement volontaire et sur l'existence ou non d'un champ de concurrence entre les OPCA. Seulement l'indication orale d'une non exclusivité qui va à rebours de nombreux arguments de texte et qui n'est pas étayée ;

- Aucune allusion à la portabilité du DIF, qui pourrait devenir monnaie de singe au 1er janvier mais pour laquelle on continue à faire comme s'il n'y avait pas de problème ;

- Et sur un des rares points sur lesquels il est pris position, l'impossibilité pour un accord de branche d'interdire à une entreprise de gérer elle-même le 0,2 % du CPF et de privilégier la mutualisation, une argumentation bien courte qui ne démontre en rien pourquoi le choix du collectif heurterait un principe d'ordre public en considérant que la mutualisation est plus avantageuse que la gestion individuelle. 

Et puisque l'on reproche le peu d'engagement du document, la moindre des choses est de s'engager soi-même. Vous trouverez donc un peu de lecture avec l'article à paraître la semaine prochaine dans Droit Social du mois de décembre consacré, justement, au nouveau droit applicable aux OPCA. Bonne lecture. 

question_reponses_DGEFP.pdf

DS12-2014-Willems-pc.pdf

13/10/2014

L'étau financier

Il y a les spécialistes du refroidissement qui viennent systématiquement gâcher l'enthousiasme. Ceux qui guettent la nouveauté comme on attend l'hiver : en maugréant et en tremblant, frigorifiés avant même que les frimas ne les saisissent. Tous les oiseaux de mauvaise augure, bien mal nommés car tout tient du plomb en eux et bien peu de l'aérien. Et bien il y a des chances pour que tous ceux-là se rengorgent de nouveau à propos du Compte Personnel de Formation puisque chaque annonce de difficultés éventuelles est accueillie le sourire aux lèvres sur l'air du : "Je vous l'avais bien dit". Sur ce blog, la tendance est plutôt de se lancer à l'aventure le coeur léger et l'appétit ouvert, sans se soucier au moment de prendre l'élan de savoir ce que sera la chute. 

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Prenons toutefois le risque de nourrir les sceptiques de goût et de profession en revenant sur le compte personnel de formation. Au vu des travaux conduits dans les branches qui ont oeuvré sur la question, et des choix déjà effectués par le COPANEF en la matière, on sait que les premières listes devraient être plutôt larges. Mais on constate également que, saisissant la possibilité qui leur est offerte de fixer des plafonds de financement, certains OPCA s'orientent vers le plafonnement très bas des formations n'entrant pas dans les priorités de la branche,  les formations qui y trouvent place bénéficiant de financements plus élevés. Ce faisant, le droit du salarié sera donc très différent selon son secteur d'activité et la mobilité interbranches ne s'en trouvera pas renforcée. Or, on sait que la mobilité professionnelle est bien plus importante que la mobilité géographique et qu'en matière d'employabilité, c'est la première qu'il faut soutenir. Ce phénomène n'ira qu'en s'accentuant lorsque les demandes de CPF s'avèreront plus importantes que les financements et que la régulation financière assurera le pilotage du dispositif. On s'apercevra alors que tout le fastidieux travail sur les listes ne sert pas à grand chose si au final les OPCA décident que les formations de leurs branches seront financées au coût réel, tandis que les autres auront un plafond à moins de 10 euros, ce qui de fait cessera d'être un plafond pour devenir un barème. Et l'on découvrira après coup, la belle surprise, que la régulation financière sera le véritable outil de pilotage du dispositif et que les listes de formation éligibles auront bien moins orienté que les taux financiers. Faut-il vraiment s'en étonner ? 

02/09/2014

La fin du fromage

Les périodes de professionnalisation ont été créées par les partenaires sociaux en 2003. Elles reposent sur deux principes essentiels :

- l'alternance est la meilleure modalité pédagogique pour professionnaliser ;

- on acquiert des compétences en exerçant des activités et en formation, mais pas les mêmes et pas de la même manière. 

Au total, un parcours en alternance associant des activités et de la formation formelle devait contribuer à professionnaliser les salariés en CDI. Une instrumentation de ce dispositif et une gestion très institutionnelle qui n'a pas su rompre avec les schémas traditionnels (selon lesquels au travail on travaille et en formation on se forme) a contribué à détourner les périodes de professionnalisation de leur finalité pour en faire un dispositif financier aux allures de gros fromage pour les  entreprises. 

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La loi du 5 mars 2014 a mis un coup d'arrêt à ces pratiques en réformant les périodes de professionnalisation,  les ultimes précisions venant d'être apportées par décret. Dorénavant, les périodes de professionnalisation seront qualifiantes ou certifiantes, elles dureront au minimum 70 heures et elles devront mettre en place une véritable alternance avec un tuteur. Aux OPCA maintenant de sortir d'une logique purement financière pour mener la bataille du développement des compétences en situation de travail avec un accompagnement formation, ce qui suppose de s'intéresser à l'ensemble du parcours et pas seulement à la formation. Pas si simple la sortie du fromage. 

REGIME DES PERIODES DE PROFESSIONNALISATION.pdf

13/02/2013

Cause toujours !

Nous avons la chance, en France, de disposer de hauts dirigeants, de hauts fonctionnaires, de grandes écoles qui les ont formés et au total d'élites remarquables agissant au sein d'institutions prestigieuses. La Cour des comptes en fait partie, qui n'accueille que la crème des énarques. Et la Cour des comptes s'est mis en tête, à la fois bien pleine et bien faite, cela va de soi, de s'intéresser à la formation professionnelle. En 2008, elle commit un premier rapport qui pointait l'ensemble des dysfonctionnements du système de formation, sans mettre en valeur les succès car les magistrats de la Cour ont appris et retenu que ce qui va bien ne présente aucun intérêt, comme dirait un médecin, contrairement à ce qui va mal qui doit retenir toute notre attention. Ainsi focalisée sur le bancal, la Cour avait préconisé de réduire le nombre d'OPCA car cela réduirait ainsi les coûts de fonctionnement du système. Ce qui fût fait par l'administration, d'une manière qui effraie aujourd'hui les magistrats : pure logique comptable, objectif unique de réduire les frais, invraisembable batterie de 153 indicateurs pour apprécier l'activité d'un OPCA,...la Cour constate aujourd'hui les désastres de ce qu'elle a préconisé et s'en émeut. Pour autant, elle préconise...de réduire encore le nombre d'OPCA et leurs frais de gestion.

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Martial Raysse - Cause toujours !

Le fait que les frais de gestion aient augmenté avec la réforme et la réduction du nombre d'OPCA n'a ni perturbé la Cour ni suscité la moindre remise en question de son mécanique a priori selon lequel plus une organisation grandit plus elle fait des économies d'échelles. Et les magistrats ont oublié de relever qu'ils comparent des chiffres qui ne se rapportent pas à la même réalité puisque les missions des OPCA se sont considérablement élargies.

Pourtant, en matière de frais de gestion, le Conseil d'Etat, autre instance remarquable qui ne recrute également que la crème de l'ENA, avait posé un juste diagnostic : une partie seulement des frais se rattachent au fonctionnement proprement dit, la plus grande part des coûts exposés par un OPCA constitue des services en nature qui sont rendus aux entreprises et salariés. Additionner du fonctionnement et du service est un profond non-sens. Ce que l'on a déjà à maintes reprises soulevé ici. Mais comme la Cour des Comptes n'écoute déjà pas le Conseil d'Etat la probabilité qu'elle entende ce que j'écris est à peu près la même que celle de voir la belle indifférente tourner la tête vers le gnome hystérique qui n'en peut mais. Comme dirait l'autre, cause toujours !

Rapport Cour des Comptes - Les suites.pdf

24/10/2012

A en pleurer

Il est parfois désespérant de se heurter à des murs, surtout lorsqu'ils sont bâtis d'incompréhension, de mauvaise volonté et cimentés par la position de pouvoir de ceux qui les érigent. Que l'on en juge : un salarié est licencié avec un droit à DIF portable de 1052 euros. Il intègre une autre entreprise qu'il quitte quelques mois plus tard avec 118 euros de DIF supplémentaires. Admis à l'assurance chômage, il demande à bénéficier de son DIF portable, cumulé, auprès de l'OPCA. Refus de celui-ci qui lui oppose que le DIF "n'est portable qu'une fois" puisque c'est l'OPCA de la dernière entreprise qui est compétent pour payer la somme. Le droit portable de 1052 euros est donc perdu. Appel de la DGEFP qui, apparemment, confirme cette position : le DIF n'est portable qu'une seule fois.

Et voilà comment ceux qui sont chargés de mettre en oeuvre la sécurisation des parcours des salariés prennent plaisir à inventer à coup d'interprétations hasardeuses et au minimum mal maîtrisées, des règles qui de ce fait ont l'effet exactement inverse à celui recherché.

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Picasso - La femme qui pleure - 1937

Si l'on voulait avoir un nouvel exemple de la mise en oeuvre de manière absurde de règles en perdant tout sens et toute finalité, on serait servi. Voilà donc qu'un salarié qui a acquis des droits pendant six ans, les perdrait parce qu'il a, dans son parcours, intégré un nouvel emploi. Que n'est-il resté au chômage pour profiter de son DIF portable ! ou pourquoi ne l'a-t-il pas utilisé chez ce nouvel employeur alors que c'était inutile !

D'autant que rien dans les textes n'impose une telle lecture. Au contraire, les partenaires sociaux s'étaient interrogés lors de la création de la portabilité, sur l'utilisation du DIF portable lors de parcours faits de périodes alternées d'emploi et de chômage. Ils en avaient conclu que le risque existait (ce qui justifie sans doute in fine la position de l'OPCA) qu'un bénéficiaire puisse utiliser deux fois le droit portable faute de traçabilité entre OPCA. Certains avaient même envisagé de créer une carte à puce pour tracer la portabilité. Et puis la raison l'emporta et l'on considéra que si quelques salariés bénéficiaient deux fois du même droit, c'était moindre mal par rapport au fait d'en priver plusieurs dizaines d'un droit acquis. Il faut croire que ce message n'a pas été intégré par tous. Au final,  voilà comment on fait supporter à l'individu, les insuffisances d'un système qui est censé être à son service.

Quant à une autre interprétation des règles de la portabilité, voir ci-dessous.

LA MISE EN ŒUVRE DE LA PORTABILITE DU DIF APRES LA FIN DU CONTRAT DE TRAVAIL.pdf

19/04/2012

Lâchez nous les moyens !

Après les OPCA, c'est au tour des FONGECIF de passer sous la toise de l'administration ou plutôt, comme le dit un président de FONGECIF, "au confessionnal". Car il y a du pénitent chez tous ceux qui se rendent à la DGEFP pour signer la convention d'objectifs et de moyens (COM) avec l'Etat. Comment comptez vous réduire vos taux diaboliques ? Envisagez vous de cesser vos honteuses pratiques qui consistent à inventer des prestations que le code du travail n'a pas prévues ? allez vous enfin cesser d'encourager l'assistanat en accueillant toute personne qui souhaite être accompagnée dans ses projets ? pour avoir beaucoup dépensé par le passé vous réduirez vos dépenses en rémission de votre laxisme. Et vous veillerez à ce que les salariés non prioritaires cessent de pousser les portes du FONGECIF et d'avoir des projets personnels car seuls ceux qui entrent dans les critères que nous avons fixés pour vous seront admis au royaume du financement du CIF. Repentez vous et allez économiser ! sans oublier de préserver le secret de la confession en vertu duquel sur la COM vous ne communiquerez !

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Clovis Trouille - Le confessionnal - 1959

L'administration aura réussi à faire des COM, normalement outil de contractualisation sur les objectifs (d'abord) et les moyens (ensuite), une procédure unilatérale, et non négociée,  qui se concentre sur les moyens et n'aborde les objectifs qu'après avoir malthusiennement réduit les possibilités de les atteindre.

On rappelera simplement à la DGEFP que l'innovation en matière sociale a rarement été le fruit de l'imagination législative et qu'elle a encore plus rarement été portée par une tutelle administrative tatillone. C'est en dehors de toute règlementation que s'est développé l'intérim avant que la loi ne le reconnaisse, de même pour les groupements d'employeurs ou plus récemment pour le portage salarial. Que des FONGECIF inventent des prestations d'accompagnement à la création d'entreprise, de pré-VAE comme des OPCA ont inventé des DIF orientation devrait être salué comme des capacités d'innovation et de créativité qui légitiment la capacité d'action paritaire et non comme des dérives extra-légales justifiant trois pater et quatre ave. Faut-il rappeler également que les CIF intégralement réalisés en dehors du temps de travail ont été mis en place à titre expérimental par des FONGECIF bien avant que la loi de 2009 ne vienne les reconnaître. L'incapacité de l'administration à échapper à la culture du contrôle de la conformité et de l'unilatéral au profit d'une véritable culture de la négociation et de l'innovation reproduit effectivement la logique du confessionnal, celle qui veut qu'il n'est pas possible qu'un pêcheur n'ait pas pêché. Souhaitons aux FONGECIF d'oublier le confiteor et la maxima culpa et de continuer à braconner (voir ici) pour le plus grand plaisir de tous.

10/04/2012

Une bonne surprise !

Pour le lecteur intéressé par le sujet, le rapport Larcher constituera une bonne surprise. Certes, il y a matière à dire sur les 26 propositions qui sont formulées en synthèse, mais chacune d'entre elles a le mérite de partir de l'existant pour tenter de l'améliorer et ne cède ni à la facilité, ni à la démagogie. Du coup, cette bonne surprise s'en avère être une mauvaise pour le commanditaire, dont l'enthousiasme transparaît dans l'accueil fait au rapport (ici) comme nous l'annoncions vendredi dernier.

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Henri Rousseau - Mauvaise surprise

Dans le détail des propositions, relevons tout de même en premier commentaire une incohérence. Le rapport n'instruit pas, comme il le lui était demandé, le procès des corps intermédiaires et au contraire plaide pour un renforcement du rôle des OPCA à qui il est suggéré de confier la collecte de la taxe d'apprentissage. De même, est proposée une négociation du plan de formation à partir de 250 salariés. Mais ces propositions qui, avec d'autres, visent à conforter le dialogue social, s'accompagnent d'une première proposition qui ne va guère dans ce sens. Le rapport Larcher propose de supprimer l'obligation légale de financement du plan de formation pour les entreprises de 10 salariés et plus, ce qui serait une bonne chose. Mais la même proposition vise également à interdire toute obligation conventionnelle qui pourrait s'y substituer. Une telle interdiction n'aurait guère de sens et reviendrait à dénier à une branche professionnelle de pouvoir mutualiser des fonds si elle estime que le secteur en a besoin. Par ailleurs, cela déséquilibrerait considérablement les OPCA que l'on veut par ailleurs conforter et cela réduirait les moyens nécessaires pour la formation, particulièrement dans les PME avec le risque que la formation dans bien des entreprises se limite aux formations obligatoires. Enfin, cela mettrait à bas des années de politiques mutualisées dans des secteurs particulièrement dynamiques sur le champ de la formation. Si l'on compare cette mesure à la tonalité générale du rapport, on peine à trouver sa cohérence. Peut être une petite poussée libérale pour que la mauvaise surprise ne le soit pas trop ? ou une conviction personnelle mal étayée ? quoi qu'il en soit, et malgré l'intérêt qu'il peu présenter, on sait déjà que la probabilité que ce rapport serve de base à une réforme est faible : si le Président est reconduit, ce n'est pas sur ces bases qu'il réformera, et s'il ne l'est pas, ce n'est certainement pas sur la base de rapports commandés par lui que la réforme se fera. Alors un coup pour rien ? c'est peut être là que se niche en réalité la bonne surprise.

Rapport Larcher.pdf

15/12/2011

OPCA chauve-souris

Voyez mes ailes, dit la chauve-souris, je suis oiseau. Voyez mes poils, répond la chauve-souris, je suis souris. La dualité permet toutes les duplicités. La DGEFP n'a pas manqué de saisir l'occasion à propos des OPCA. Voyez vos ressources, issues de l'impôt, elles sont publiques et justifient un contrôle chaque jour plus étroit. Vous serez bientôt une agence de notation de ce que l'on vous dit pour veiller à vous y conformer. Mais voyez votre statut privé : je peux passer contrat avec vous et vous imposer une clause de confidentialité. Nous sommes dans le domaine privé des relations contractuelles. Public, privé, ordre, contre-ordre, contrat, la chauve-souris elle même a la tête qui tourne.

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Penot - La femme chauve-souris

Peut être que si nos gouvernants faisaient un léger effort de cohérence, leur action serait à la fois plus crédible et plus efficace. La loi du 24 novembre 2009 prévoit que l'Etat passe avec les OPCA une convention d'objectifs et de moyens. Ce type de convention existe dans de nombreux domaines. Après tout, rien de plus normal que la gestion de fonds ayant une nature fiscale fasse l'objet d'une contractualisation entre l'Etat et le gestionnaire. Mais pourquoi diable imposer une clause de confidentialité qui vient prendre à rebours le principe de transparence dans la gestion des OPCA, l'égalité de traitement, l'exigence démocratique de savoir quelles missions sont assignées à ceux qui gèrent des contributions fiscales, et qui au final est peu réaliste : comment la feuille de route de l'OPCA ne pourrait-elle pas être publique ? comment évaluer une action guidée par le confidentiel ? comment garantir le respect par la structure même d'objectifs qui doivent demeurer inconnus ? l'absurdité le dispute à la confusion. En réalité le roi, plus que la chauve-souris, est nu : le masque des principes successifs et contradictoires dissimule mal le visage de l'arbitraire et de l'autoritarisme. Le mot de la fin à Fred Vargas : "...il était possible qu’il finisse isolé comme une chauve-souris sans radar ne comprenant plus rien au monde."

02/12/2011

Surprises dans le jardin

Les jardins à la française ne sont pas faits pour surprendre. Tout au contraire, le plan leur tient lieu d'essence et la prévisibilité de bréviaire. L'ennui est leur seconde nature, qui s'accorde bien à la rassurante rationnalité qui a présidé à leur création, dont la motivation ultime est sans doute de guérir le paysagiste et le jardinier de leurs obsessions.

Mais tout jardin vaut un détour pour qui est persuadé que la disponibilité à la surprise est la condition de sa survenance. Ce qui se vérifie assez facilement et permet, par exemple, de voir surgir une forme hélicoïdale qui enrichit le jardin de ses formes.

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Il peut toujours y avoir des surprises dans les jardins. Y compris dans les jardins d'agréments, et même lorsque ces agréments sont distribués aux OPCA par le Ministère du travail. Les surprises résultent, pour l'essentiel, de l'irruption du droit du travail, et plus précisément du droit de la négociation collective, dans la mise en oeuvre des accords créant ou désignant les OPCA. La chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF fait la liste des surprises auxquelles pourraient être confrontés les OPCA mais aussi les entreprises.

La Fabrique des OPCA - Jardin d'agréments (2).pdf

23/11/2011

Jardin d'agréments

Le jardin d'Epicure était lieu de plaisir et de raison car en ce temps là il ne venait à personne l'idée d'opposer l'un et l'autre. Le jardin est un lieu de curiosités. Fourmillant de vies multiples, il varie selon le temps et au gré du temps. On peut s'y établir dans un immobilisme tout empreint de mouvements perpétuels. Et si l'on s'y assoupit, le réveil s'agrémente du plaisir de la re-découverte.

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Festival des jardins de Chaumont 2011

Le jardin est le reflet de celui qui le cultive, et tous n'ont pas le charme de ces champignons magiques. Ce jardin ci-dessous, qui rassemble les noms des plantes disparues et des lieux de leur disparition est un cimetière austère dont l'homme est responsable.

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Festival des jardins de Chaumont 2011

La politique suivie par le Ministère du travail pour délivrer l'agrément aux nouveaux OPCA qui officieront à compter de 2012, ne s'est guère inspirée des champignons magiques, tournesols joyeux et violettes vibrionnantes. Les OPCA ont été méthodiquement passés au défoliant fiscal qui leur a fait perdre quelques uns de leurs atours sociaux, considérés comme des herbes folles qu'il convenait d'éradiquer.

La chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF montre comment une logique fiscale restrictive a systématiquement été préférée à une logique sociale porteuse de dynamiques de négociation. A chacun ses jardins.

Les OPCA passés au défoliant fiscal - La Fabrique des OPCA.pdf

08/10/2011

La chasse aux papillons

A compter du 1er janvier 2012, tous les OPCA perdent leur agrément et seuls ceux qui ont bénéficié d'une décision d'agrément de la part de l'Etat en cette fin d'année 2011 pourront continuer à exercer. Le premier arrêté d'agrément  vient d'être publié. D'autres suivront. A la lecture, on constate que l'arrêté définit précisément le champ couvert par les OPCA, en listant les conventions collectives nationales (CCN) qui entrent dans son champ de compétence, ce qui n'était pas le cas jusqu'alors. Il en résulte deux conséquences. En premier lieu, cette exigence nouvelle de la DGEFP devrait mettre fin au braconnage, c'est à dire aux pratiques des OPCA qui acceptaient les adhésions d'entreprises ne relevant pas de leur champ  conventionnel. Ces entreprises relèvent aujourd'hui obligatoirement de l'interprofession, c'est à dire soit de l'AGEFOS-PME, soit d'OPCALIA lorsque cet organisme sera agréé. En deuxième lieu, l'arrêté précise bien que l'OPCA n'est compétent que pour les entreprises qui "relèvent" des CCN visées et non qui "appliquent" ces CCN. Il est donc nécessaire que les entreprises soient incluses dans le champ d'application de la CCN pour relever de l'OPCA. Fini donc également la possibilité pour les OPCA de branche de cotiser auprès d'eux-même, lorsqu'ils appliquent une des CCN de leurs adhérents par usage. Ils doivent légalement choisir entre AGEFOS-PME et OPCALIA.

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Berthe Morisot - La chasse aux papillons

Reste tout de même un espace d'incertitude sur lequel l'administration ne s'est pas prononcé : les champs conventionnels définis par les conventions collectives ne sont pas toujours très précis, et il existe parfois des zones de recouvrement entre deux CCN. Ces zones frontières un peu floues entre certaines conventions collectives, permettra toujours d'avoir un peu de souplesse dans la détermination du champ de compétence de l'OPCA. Mais au final, le braconnage est terminé en ce qui concerne le gros gibier et les arbitrages entre les zones frontières qui subsistent relèvent davantage de la chasse aux papillons.

13/07/2011

Une preuve par l'exemple

Dans le débat relatif à la réforme des OPCA, une pièce pourrait être ajoutée au dossier : celle de la négociation qui vient de s'achever à propos des Missions de l'Agence pour l'Emploi des Cadres (APEC). L'APEC est financée par des cotisations obligatoires des entreprises et des salariés mais vend également des prestations. Cette activité marchande pose la question du respect du droit de la concurrence et aurait pu conduire à scinder l'activité de l'APEC en deux : d'une part les prestations financées par le régime de contributions obligatoires, d'autre part les prestations vendues. Les partenaires sociaux sont parvenus à éviter cet éclatement en distinguant trois prestations différentes :

- les prestations d'intérêt général rendues dans le cadre des cotisations obligatoires. Elles relèvent d'une mission de service public (service économique d'intérêt général selon la terminologie européenne) ;

- les prestations non marchandes : elles ne sont pas vendues mais financées par les contributions dans le cadre d'un mandat de service public et au prix du marché ;

- les prestations vendues : elles ne peuvent recevoir aucun financement par les cotisations et doivent intégralement se financer aux conditions du marché.

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Francis Bacon - Triptyque - 1976

Le peintre qui réalise un triptyque peint trois tableaux. Pour autant, chacun de ces tableaux ne trouve du sens que dans la cohérence de l'ensemble. C'est à ce résultat que sont parvenus les partenaires sociaux dans la négociation sur l'APEC. Voilà un bel exemple à suivre pour la négociation sur les missions des OPCA qui pourraient être organisées de la manière suivante :

- les missions d'intérêt général rendues à toutes les entreprises dans les mêmes conditions et financées par les frais de gestion et de mission ;

- les missions non marchandes, financées par les frais de mission et dont le contenu serait négocié dans le cadre de la COM ou bien financées par des contributions conventionnelles supplémentaires ;

- les prestations complémentaires vendues au prix du marché et gérées de manière autonome des autres prestations.

Ce schéma simple est de nature à garantir à la fois la qualité des services et leur niveau par la multiplicité des sources de financement. Il satisfait à la fois à la législation française et au droit européen. Il s'appuie sur un exemple existant. Il pourrait donc être facilement décliné pour les OPCA. A moins qu'il ne se trouve quelqu'un pour expliquer que ce n'est pas possible. Il faudra alors dire si c'est pour des raisons juridiques ou politiques, car par les temps qui courent le droit a souvent bon dos.

ANI APEC.pdf

30/06/2011

Fin de partie

La pièce est à épisode et celui qui se clôt n'est pas le dernier. La réforme de la formation professionnelle, qui en réalité est surtout une réforme des OPCA, débutée en juillet 2008 va connaître son premier épilogue dans les prochains jours. Les dernières négociations sont en cours pour finaliser la recomposition des OPCA et définir leurs nouvelles modalités de fonctionnement. Le processus a été long, initié par la lettre de Christine Lagarde aux partenaires sociaux en juillet 2008, le nombre d'intervenants dans le débat a été pléthorique (Rapports du Sénat, de l'IGAS, de la Cour des comptes, du groupe quadripartite présidé par Pierre Ferracci...), les partenaires sociaux ont conclu un ANI le 7 janvier 2009, le législateur a voté la loi du 24 novembre 2009.

Restait la mise en oeuvre pour terminer la première partie, la mise en ordre de marche, avant de pouvoir juger de l'efficacité du nouveau système. Et c'est peu de dire que cette fin de partie tourne au fiasco.

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Dorothéa Tanning - Endgame - 1944

Chargée de piloter le dossier, la DGEFP a commis deux erreurs majeures. La première sur le fond : considérer que dans un système qui associe de multiples acteurs, qui repose depuis l'origine sur l'articulation entre le législateur et la négociation collective, il était possible de faire prévaloir une vision autoritaire, monolithique, administrative et unilatérale des textes adoptés, parfois même sans en respecter ni la lettre ni l'esprit. La deuxième erreur est de méthode : en faisant paraître en toute fin du processus de négociation, des positions qui prennent à rebours l'histoire et le droit, la DGEFP soit méconnait la dynamique de la négociation collective, soit se donne pour objet de mettre à mal, ou plus exactement sous tutelle, la gestion paritaire.

Les partenaires sociaux ont décidé de ne pas s'en laisser compter, et pour la plupart de maintenir leur position dans les accords qui seront conclus. Conclusion : soit la DGEFP fait évoluer sa manière de considérer les OPCA et la négociation collective, prenant notamment la mesure de la loi Larcher, soit il reviendra au juge de jouer les arbitres.

La 12ème chronique consacrée à la Fabrique des OPCA, écrite avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF, revient sur ce fiasco et identifie les questions qui pourraient faire l'objet de contentieux, ainsi que celles qui demeurent pendantes faute d'avoir eu la volonté de les traiter par le dialogue.

La Fabrique des OPCA 12.pdf

 

24/06/2011

Faire face

Comme le torero se présente face au taureau, le danseur de flamenco ouvre sa poitrine comme un défi à tous les dangers. Pour les deux, il s'agit moins de ne pas avoir peur que de décider d'aller au-delà de cette peur.

Nous avions exprimé, avec Jean-Marie Luttringer, le souhait que les partenaires sociaux n'aient pas peur de prendre des positions qui n'étaient pas celles de l'administration, notamment telles qu'exprimées dans le "Questions/Réponses" relatif à la réforme des OPCA. Il fallut dépasser le temps de la stupeur pour que vienne celui de la réaction. Par un communiqué daté du 17  juin, le CPNFP conteste les positions prises par la DGEFP et réaffirme l'existence d'un champ de négociation autonome sur la formation. Jeudi 23 juin, les partenaires sociaux envisagent de saisir le Conseil d'Etat sur la légalité de textes qui n'ont pas été présentés au Conseil National de la Formation Professionnelle Tout au Long de la Vie (CNFPTLV). Dans les négociations en cours, des dispositions relatives à Conseils d'administration territoriaux ou sectoriels paritaires, à des ressources purement conventionnelles, à des sections professionnelles ayant autorité (sous le contrôle du Conseil d'administration, bien évidemment) sur les politiques de branche, sont maintenues contre l'avis de l'administration. Un petit air de flamenco sonne aux oreilles.

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Cristina Hoyos et Antonio Gades

Ne pas avoir peur de l'épreuve de force, être capable de faire une entrée en mêlée musclée si cela s'avère nécessaire, est le meilleur moyen de ne pas perdre le match avant de l'avoir joué, surtout lorsque l'adversaire joue également le rôle d'arbitre. Car là est bien le problème de fond. Lorsque l'arbitraire et l'autoritarisme tiennent lieu de méthode de Gouvernement, tout va bien lorsque tout le monde se couche et se soumet. Mais il suffit que quelqu'uns se relèvent et l'on voit alors rapidement combien le Roi est nu. Encore faut-il avoir la volonté de faire face. On ne peut que se féliciter que les partenaires sociaux l'aient eu.

Délibération CPNFP du 17 juin 2011.pdf

20/06/2011

Un peu d'histoire

Il faut éclairer l'histoire par les lois et les lois par l'histoire. Ainsi s'exprimait Montesquieu. Le juriste toulousain Hauriou estimait, pour sa part, que si un peu de sociologie éloigne du droit, beaucoup de sociologie y ramène. Bref, si l'on perd de vue les conditions de production de la règle, il y a de fortes chances que l'on en perde le sens. C'est ce qui arrive à la DGEFP, dont les positions deviennent ubuesques, lorsqu'elle explique à des OPCA qu'ils ne peuvent déléguer à des structures paritaires territoriales ou sectorielles, en s'appuyant sur un texte dont l'histoire démontre qu'il signifie exactement le contraire de que l'on voudrait lui faire dire. Mais qui veut tuer son chien...

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Félix Labisse - Lucrezia - 1972 - Série "Les faiseuses d'histoire"

Le droit c'est de la technique, dans l'art de le manier, et de la politique, dans l'usage que l'on en fait. En prétendant que toute délégation de gestion doit être faite à un organisme patronal, la DGEFP commet une double erreur. La première est technique, les OPCA sont des organismes paritaires et le principe de paritarisme, légal, prévaut sur une exception fixée par décret. La seconde est politique. En utilisant, avec au choix incompétence ou mauvaise foi, un argument aussi faible pour remettre en cause le paritarisme, l'administration tente de faire prévaloir une vision autoritaire des relations sociales que l'on croyait dépassée au moins depuis l'adoption en 2004 du nouvel article premier du Code du travail. Et sur ce plan également, une approche historique du paritarisme et des dynamiques de la négociation collective aurait du conduire sur d'autres voies. En ces périodes de baccalauréat, il en est qui ont sérieusement besoin de réviser.

UN OPCA PEUT-IL AVOIR DES DELEGATIONS PARITAIRES.pdf

15/06/2011

Allô, l'Etat ? ici la démocratie sociale

Suite du feuilleton des OPCA et plus largement de la négocation sur la formation professionnelle. Dans une interview donnée à l'AEF, Jacques Barthélémy revient sur la possibilité pour un accord collectif de prévoir des contributions conventionnelles en matière de formation professionnelle. S'appuyant tant sur le droit constitutionnellement garanti de la négociation, les principes du droit conventionnel et les principes du droit de la formation, Jacques Barthélémy confirme, pour ceux qui en douteraient encore, que la position de la DGEFP excluant toute création de financement en dehors des règles fiscales ne repose sur aucun fondement.

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LONDRES

Rappelons que la DGEFP estime que la création d'une obligation conventionnelle ayant pour objet le financement de dispositifs de formation professionnelle non prévus par le code du travail « ne peut être envisagée, aucune disposition législative n'autorisant expressément la création d'une ou de plusieurs contributions conventionnelles permettant de remplir l'obligation fixée à l'article L.6331-1 en sus des articles créant l'obligation légale. ».

Jacques Barthélémy rappelle qu'il ne s'agit pas de remplir l'obligation légale de financement, mais de dégager des moyens conventionnels, supplémentaires aux financements fiscaux et n'ayant pas la même nature, dans le cadre de la capacité générale des partenaires sociaux à créer des garanties collectives pour les salariés.

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PARIS

Une certaine culture française voudrait qu'en l'absence de texte spécial, l'interdiction prévale. Comme s'il fallait faire fi des principes et que l'opérationnel n'existait que dans la prescription. On voit comme cela finit : attendre que l'on vous indique où vous pouvez vous coucher. Dans cette affaire, on aimerait, au nom de la démocratie sociale qui en a bien besoin, que les partenaires sociaux refusent de se plier à l'injonction et que, d'une manière plus générale, ils ne se couchent pas.

Place du champ conventionnel en formation-J.Barthelemy.pdf

08/06/2011

Le DIF ? une Chance !

Dans une décision du 18 mai dernier, la Cour de cassation juge que "le salarié, dont la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est justifiée et qui n'est pas tenu d’exécuter un préavis, a droit à être indemnisé de la perte de chance d'utiliser les droits qu'il a acquis au titre du droit individuel à la formation".

Pour ceux qui défendent l'idée que le DIF est un droit dont le salarié aurait seul l'usage, un capital individuel en quelque sorte, voici un sujet de préoccupation : le DIF est une chance ! autrement dit, une possibilité. La Cour de cassation ne sanctionne pas l'impossibilité d'utiliser un droit, du fait de la rupture, mais la perte de la possibilité, donc de l'éventualité, de son utilisation. Résumons : le DIF c'est 4 droits. Le droit à un crédit, le droit à l'information, le droit à la négociation de l'utilisation du crédit (droit d'initiative et droit d'avoir une réponse) et le droit à portabilité. Ce n'est ni un droit de consommation, ni un droit de créance.

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Giovanni de Lutero - La Fortune : La Chance

Chacun des droits est sanctionnable  : le défaut de gestion du crédit, le défaut d'information, le défaut de réponse ou le défaut de mise en oeuvre de la portabilité. Sans doute l'employeur pourrait-il également être condamné pour ne pas avoir conduit une négociation loyale sur le DIF ou pour avoir opposé des refus illicites (budget insuffisant, non prise en charge par l'OPCA, etc.). Mais il est peu probable que l'impossibilité de se mettre d'accord après une négociation loyale trouve un jour une sanction juridique.

En réalité, qui veut favoriser le développement du DIF doit porter son regard non sur le moyen (le DIF lui même) mais sur la finalité. Lorsque le DIF est demandé par le salarié pour renforcer sa compétence, pour travailler dans un meilleur confort et une meilleur sécurité ou pour anticiper sur des évolutions d'emploi connues, voire sur une situation personnelle (inaptitude par exemple) : son refus par l'entreprise constitue un manquement à ses obligations de gestion des compétences dans le domaine de la performance du salarié, de sa santé ou de ses obligations de veille à l'évolution de l'emploi. Et c'est à ce titre que le refus de DIF sera sanctionnable. Par contre, si le salarié s'obstine à passer par la voie du DIF pour des projets personnels, peu de chance, donc de possibilité, qu'il reçoive l'aide du juge. Comme disent les Québécois, si tel était le cas, le salarié serait bien chanceux !