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26/02/2015

Pour les OPCA aussi, l'ennemi c'est la finance...

On connaît la formule : "Mon ennemi, il n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti...c'est le monde de la finance". Et bien il se pourrait que pour les OPCA, l'ennemi ce soit la finance. Car pour un organisme paritaire, avoir comme stratégie de développement, projet ou horizon indépassable, le seul niveau de sa collecte, c'est non seulement un peu court, mais surtout cela ne peut que mal se terminer. Lorsque les logiques commerciales auront pris le dessus sur les logiques sociales qui seules justifient l'existence des OPCA alors il suffira de demander à Bercy de remettre de l'ordre dans les dérives du paritarisme de gestion et cela en sera terminé des fonds paritaires de la formation. L'URSSAF et la Caisse des dépôts d'un côté, le marché de l'externalisation de l'autre, en terme de services les entreprises y retrouveront leurs petits. 

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C'est pourquoi la démarche de 12 OPCA interpellant l'administration pour contester sa position, politique, de permettre aux OPCA interprofessionnels de collecter tous azimuts des contributions volontaires d'entreprises, ne doit pas être vue comme une simple défense de pré carré ou logique protectionniste. Il s'agit d'affirmer la nature d'un OPCA et d'en tirer les conséquences en termes de missions, de capacités d'intervention, de mode de financement des services, de qualité des services rendus, etc. plutôt que de considérer, ici comme ailleurs, que la concurrence doit s'appliquer à tout et à tous. Et la DGEFP devrait se demander, à l'heure où elle négocie les COM, si elle souhaite vraiment que les frais de fonctionnement des OPCA servent à financer des messages publicitaires pour doper la collecte. Il vaudrait mieux d'ailleurs, cesser de raisonner à partir des OPCA et se poser la question de leur champ d'intervention et de leurs compétences en partant des entreprises et des salariés : quelles logiques de regroupement des branches au sein des OPCA ? comment prendre en compte les groupes d'entreprises multibranches ? quelle articulation entre branches et territoires ? quelle place pour les logiques métiers ? comment intégrer la professionnalisation des fonctions supports dans les branches ? si l'on partait de là, on éviterait bien des combats dans lesquels personne n'a rien à gagner. 

Courrier 12 OPCA.pdf

18/12/2013

Action collective

Il n'y a pas que la formation professionnelle qui connaisse son big-bang. La prévoyance est également en train de connaître le sien avec la décision du Conseil Constitutionnel en date du 13 juin dernier, qui interdit les clauses de désignation dans les accords collectifs. Par clause de désignation, on entend possibilité pour une convention collective de rendre obligatoire l'adhésion et la cotisation de toutes les entreprises d'un même secteur à un organisme de régime complémentaire de santé. Pour le Conseil Constitutionnel, la possibilité de choix et la possibilité de concurrence doivent prévaloir sur l'obligation. C'est oublier un peu vite qu'il est des secteurs ou l'action n'est efficace que lorsqu'elle est collective.

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Dans une remarquable tribune publiée par l'AEF, Jacques Barthélémy explicite pourquoi sous couvert de libre concurrence, on fait prévaloir les intérêts particuliers, dont on sait que la somme n'a jamais constitué l'intérêt général, sur les intérêts bien compris des entreprises et des salariés. L'exemple donné du secteur de la boulangerie est parfaitement éclairant. Et le parallèle avec la formation pourrait être frappant : moins de mécanisme collectifs et plus de renvoi vers le libre choix de chacun, il n'est pas certain au final que ces "chacun"ne soient pas perdants.

Tribune_J_Barthelemy.pdf

13/07/2011

Une preuve par l'exemple

Dans le débat relatif à la réforme des OPCA, une pièce pourrait être ajoutée au dossier : celle de la négociation qui vient de s'achever à propos des Missions de l'Agence pour l'Emploi des Cadres (APEC). L'APEC est financée par des cotisations obligatoires des entreprises et des salariés mais vend également des prestations. Cette activité marchande pose la question du respect du droit de la concurrence et aurait pu conduire à scinder l'activité de l'APEC en deux : d'une part les prestations financées par le régime de contributions obligatoires, d'autre part les prestations vendues. Les partenaires sociaux sont parvenus à éviter cet éclatement en distinguant trois prestations différentes :

- les prestations d'intérêt général rendues dans le cadre des cotisations obligatoires. Elles relèvent d'une mission de service public (service économique d'intérêt général selon la terminologie européenne) ;

- les prestations non marchandes : elles ne sont pas vendues mais financées par les contributions dans le cadre d'un mandat de service public et au prix du marché ;

- les prestations vendues : elles ne peuvent recevoir aucun financement par les cotisations et doivent intégralement se financer aux conditions du marché.

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Francis Bacon - Triptyque - 1976

Le peintre qui réalise un triptyque peint trois tableaux. Pour autant, chacun de ces tableaux ne trouve du sens que dans la cohérence de l'ensemble. C'est à ce résultat que sont parvenus les partenaires sociaux dans la négociation sur l'APEC. Voilà un bel exemple à suivre pour la négociation sur les missions des OPCA qui pourraient être organisées de la manière suivante :

- les missions d'intérêt général rendues à toutes les entreprises dans les mêmes conditions et financées par les frais de gestion et de mission ;

- les missions non marchandes, financées par les frais de mission et dont le contenu serait négocié dans le cadre de la COM ou bien financées par des contributions conventionnelles supplémentaires ;

- les prestations complémentaires vendues au prix du marché et gérées de manière autonome des autres prestations.

Ce schéma simple est de nature à garantir à la fois la qualité des services et leur niveau par la multiplicité des sources de financement. Il satisfait à la fois à la législation française et au droit européen. Il s'appuie sur un exemple existant. Il pourrait donc être facilement décliné pour les OPCA. A moins qu'il ne se trouve quelqu'un pour expliquer que ce n'est pas possible. Il faudra alors dire si c'est pour des raisons juridiques ou politiques, car par les temps qui courent le droit a souvent bon dos.

ANI APEC.pdf

16/09/2010

Coopération

Le mur d'André Breton a été préservé lors de la vente, et donc de la dispersion, de sa collection. Il peut être visité à Beaubourg, derrière une vitre qui interdit de s'approcher des objets exposés mais qui permet ainsi de les saisir dans leur globalité. Etonnante vision de ces peintures, sculptures, objets usuels ou rituels, coifffes, masques, poupées, objets de culte, de chamanes, oeuvres artisanales ou oeuvres artistiques. Chaque pièce est singulière et possède sa richesse propre. Et pourtant leur assemblage produit une oeuvre collective, dans laquelle aucune pièce ne se fond, au contraire même l'oeuvre collective permet à chacune des oeuvres de produire sa lumière propre.

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Ce jeudi 16 septembre est le jour d'ouverture du Master de Responsable Formation organisé par DEMOS et l'Université d'Evry. Jour de découverte des participants, au-delà de leur rencontre lors des épreuves d'admission, mais surtout jour de découverte du groupe. Le plaisir de découvrir des individus est un des moteurs les plus puissants pour un formateur. Mais dans un cursus de longue durée, s'y ajoute l'excitation de l'aventure collective, inscrite dans la durée, la sensation que le temps passé ensemble influencera la vie de chacun, la conviction que nous sommes à l'orée de belles découvertes. La condition de tout ceci est inscrite dans le mur de Breton : ici, aucune oeuvre ne concurrence l'autre et la beauté de chacune renvoie son éclat sur les autres, prises individuellement et collectivement. Car il est un moteur plus puissant que celui de la concurrence, c'est celui de la coopération.

04/05/2009

Emulation

Au Palais des lumières d'Evian sont exposées 250 œuvres produites par des artistes ayant été hébergés à la Ruche, lieu mythique de Montparnasse créé par Alfred Boucher, peintre et sculpteur, en 1912. La Ruche n’est pas une école au sens de mouvement, il n’y a pas un style caractéristique de la Ruche et chaque artiste a pu suivre son chemin personnel. Toutefois, la collaboration, l’amitié, la fréquentation, mais aussi l’inimitié, la confrontation voire l’affrontement ont leur part dans les productions individuelles, puisque rares furent les productions collectives. Modigliani, Léger, Soutine, Archipenko...sont passés par la Ruche dans laquelle Ernest Pignon-Ernest a un atelier.

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Ossip Zadkine - Un couple

 Dans cet univers de vie et de travail, les influences réciproques ne sont jamais automatiques ou hasardeuses, elles ne sont pas certaines mais elles existent. Dans quelle mesure l'oeuvre d'autrui a-t-elle influencé mon travail ? quelle est la part d'Ingres dans Picasso ? la part de David ou Raphael dans Ingres ? la réponse est impossible, comme il est peu probable de déterminer la part exacte des lectures d'un écrivain dans la production de ses livres.

L'expérience de la Ruche, comme celle des mouvements artistiques du XXème siècle, nous montre que la compétition, et a fortiori la concurrence qui n 'en est qu'une modalité fruste, n'est qu'une des formes possibles de l'émulation. Alors que des entreprises développent le concept de "concurrence interne compétitive", il pourrait être judicieux de réfléchir aux autres manières possibles de susciter de l'émulation et de la coopération. Pour ceux qui verraient en ce souhait une douce utopie, dont par ailleurs nous manquons cruellement, cette phrase de Modigliani figurant au regard des tableaux exposés à Evian : "Ton devoir réel est de sauver ton rêve".

07/07/2008

S'accrocher aux branches ?

Le projet de loi sur la démocratie sociale et le temps de travail  sur lequel le Parlement essaie de travailler ces jours-ci (essaie seulement car le temps lui est compté), est porteur d'un bouleversement considérable de notre droit du travail. Les dispositions relatives au temps de travail prévoient en effet que les accords d'entreprise sur le temps de travail s'appliqueront de manière prioritaire et que les conventions et accords de branche ne pourront plus être invoqués que par défaut.

Il s'agit d'une considérable mutation de notre ordre juridique : la hiérarchie des normes s'en trouve bouleversée. Quel est donc le tort des branches pour être aussi vite écartées ?

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Van Gogh - Branches d'amandier fleuries
 
Si le droit du travail s'est construit autour de conventions collectives de branche c'est pour deux raisons : d'une part placer toutes les entreprises dans la même situation en matière d'obligations sociales au regard de la concurrence  et de manière complémentaire, mais décisive pour les organisations syndicales, ne pas faire du statut des salariés un élément de concurrence en le renvoyant au niveau national et non à celui de l'entreprise. En d'autres termes, en imposant les mêmes obligations sociales à toutes les entreprises du secteur, on garantit la concurrence et on évite les dérives de la négociation "compétitive".
 
La loi sur la démocratie sociale fait exactement le choix inverse à celui qui a prévalu depuis l'origine du droit du travail au milieu du 19ème siècle : dorénavant, le social fera partie du champ des éléments concurrentiels et les entreprises d'un même secteur d'activité pourront relever de règles différentes. Bonne nouvelle pour le DRH, on ne pourra lui dire qu'il ne fait pas vraiment partie du business : par la négociation il détient une grande partie du cadre concurrentiel. Moins bonne nouvelle, le social fait désormais partie du négociable et le DRH sera désormais sommé de trouver des marges de manoeuvre budgétaires en négociant des règles sociales inférieures, au moins sur le temps de travail,  à celles existant au niveau de la branche. Pour le DRH, la commande risque par conséquent d'être, si l'on ose dire, de se décrocher de la branche.