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23/02/2016

P comme....PROFESSIONNALISATION

Défie toi du bœuf par devant, de la mule par derrière

et du moine de tous côtés (Miguel de Cervantes)

 Le cuisinier Ting dépeçait un beuf pour le prince Wen-houei.

On entendait des « houa » quand il empoignait de la main l’animal, qu’il retenait sa masse de l’épaule et que, la jambe arqueboutée, du genou l’immobilisait un instant.

On entendait des « houo » quand son couteau frappait en cadence, comme s’il eût exécuté l’antique danse du Bosquet ou le vieux rythme de la Tête de lynx.

-C’est admirable ! s’exclama le prince, je n’aurais jamais imaginé pareille technique !Le cuisinier posa son couteau et répondit :

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Beauté du geste (Catherine Huppey) 

Ce qui intéresse votre serviteur, c’est le fonctionnement des choses, non la simple technique. Quand j’ai commencé à pratiquer mon métier, je voyais tout le boeuf devant moi. Trois ans plus tard, je n’en voyais plus que des parties. Aujourd’hui, je le trouve par l’esprit sans plus le voir de mes yeux. Mes sens n’interviennent plus, mon esprit agit comme il l’entend et suit de lui-même les linéaments du boeuf. Lorsque ma lame tranche et disjoint, elle suit les failles et les fentes qui s’offrent à elle. Elle ne touche ni aux veines, ni aux tendons, ni à l’enveloppe des os, ni bien sûr à l’os même. (…)Quand je rencontre une articulation, je repère le point difficile, je le fixe du regard et, agissant avec une prudence extrême, lentement je découpe. Sous l’action délicate de la lame, les parties se séparent avec un « houo » léger comme celui d’un peu de terre que l’on pose sur le sol. Mon couteau à la main, je me redresse, je regarde autour de moi, amusé et satisfait, et après avoir nettoyé la lame, je le remets dans le fourreau. (…)

Tchouang Tseu (Traduction : Jean-François Billeter)

18/01/2015

Y a pas que la formation

Le Compte personnel de formation pourrait bien occulter l'un des objectifs de la réforme de la formation, et non des moindres. Annoncé dans le courrier que Sapin avait envoyé aux partenaires sociaux, il consiste à profiter de la défiscalisation pour ouvrir le champ des moyens  du développement des compétences et ne pas s'en tenir à la formation comme horizon ultime de la professionnalisation. Si le CPF renforce la notion de besoin de formation, la défiscalisation du plan lui substitue le concept de besoin de compétences ou de professionnalisme. Alors que pendant 40 ans la règlementation fiscale a porté à bout de bras les budgets de formation, plans de formation, besoins de formation et services formation, soit une logique d'action centrée sur le produit, la réforme met l'accent sur le besoin de compétences et la diversité des moyens de professionnalisation.


Encore faut-il vaincre la force de l'habitude. Très peu de négociations ont, à ce jour, saisi cet espace ouvert sur la diversité des moyens de développement des compétences. Aussi faut-il saluer le projet d'accord, en cours de négociation, dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif, dans lequel les partenaires sociaux listent différents moyens de professionnalisation qui pourront désormais être financés par l'OPCA : l'analyse de pratiques, la supervision, les rencontres professionnelles, les actions intégrées au travail, les actions de développement professionnel, les formations internes, etc. En soulignant qu'il n'y a pas que la formation, un tel accord invite à ne pas focaliser excessivement sur le moyen pour s'intéresser surtout au résultat. La question n'est évidemment pas de savoir si le volume de formation augmente ou non, mais plutôt si chacun a la possibilité, quels que soient les moyens utilisés, de se développer professionnellement. 

15/09/2014

Une illusion d'Etat de droit

On sait depuis le 5 mars 2014 que la durée des périodes de professionnalisation va être allongée pour éviter que le dispositif ne soit détourné vers le simple financement du plan de formation. On sait depuis le mois de juin que la durée minimale sera fixée à 70 heures et que le décret paraîtra à la fin de l'été. Il est paru le 22 août. Et là, panique à bord dans les OPCA : quid des demandes en cours, des dossiers à venir, des engagements, des financements. Le Conseil d'administration ne peut-il décider de reporter l'entrée en vigueur de la mesure (un conseil d'administration d'organisme paritaire qui vote pour savoir si la loi doit être respectée ou non cela s'est déjà vu), ne peut-on considérer que la règle ne vaut pas, bref que fait-on ? 

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Comme souvent en France, on appelle l'Etat à la rescousse. Et la DGEFP devrait nous dire prochainement que les dispositions du décret du 22 août, juridiquement valides depuis le 23, ne s'appliqueront en fait, à titre dérogatoire, qu'à compter du 1er janvier. Si tel était le cas, et au-delà du cas des périodes de professionnalisation, ce serait une fois de plus reconnaître que la règle ne vaut pas plus qu'un courrier de l'administration, qu'il suffit d'un bon lobbying pour remettre en cause ce qui est voté et que si nous sommes censés être égaux devant la loi, certains le sont plus que d'autres. Bref, nous aurons encore l'exemple d'un Parlement qui fait trop de lois et d'une administration qui encourage à ne pas les respecter. Belle pédagogie pour l'Etat de droit qui dans ces conditions tend à devenir une illusion. 

02/09/2014

La fin du fromage

Les périodes de professionnalisation ont été créées par les partenaires sociaux en 2003. Elles reposent sur deux principes essentiels :

- l'alternance est la meilleure modalité pédagogique pour professionnaliser ;

- on acquiert des compétences en exerçant des activités et en formation, mais pas les mêmes et pas de la même manière. 

Au total, un parcours en alternance associant des activités et de la formation formelle devait contribuer à professionnaliser les salariés en CDI. Une instrumentation de ce dispositif et une gestion très institutionnelle qui n'a pas su rompre avec les schémas traditionnels (selon lesquels au travail on travaille et en formation on se forme) a contribué à détourner les périodes de professionnalisation de leur finalité pour en faire un dispositif financier aux allures de gros fromage pour les  entreprises. 

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La loi du 5 mars 2014 a mis un coup d'arrêt à ces pratiques en réformant les périodes de professionnalisation,  les ultimes précisions venant d'être apportées par décret. Dorénavant, les périodes de professionnalisation seront qualifiantes ou certifiantes, elles dureront au minimum 70 heures et elles devront mettre en place une véritable alternance avec un tuteur. Aux OPCA maintenant de sortir d'une logique purement financière pour mener la bataille du développement des compétences en situation de travail avec un accompagnement formation, ce qui suppose de s'intéresser à l'ensemble du parcours et pas seulement à la formation. Pas si simple la sortie du fromage. 

REGIME DES PERIODES DE PROFESSIONNALISATION.pdf

04/06/2013

Vision globale

Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) lance un travail d'analyse des pratiques de formation dans les TPE, en liaison avec le Conseil national d'évaluation de la formation professionnelle. Les pratiques de formation de 40 TPE représentatives seront examinées. L'objectif est d'établir une typologie des pratiques et des modalités de formation. C'est très bien, mais avec un petit risque toutefois, celui de manquer de vision globale en mettant la focale uniquement sur l'usage de la formation sans s'interroger sur les processus de professionnalisation.

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Dans une TPE, en effet, la formation ne joue que de manière marginale un rôle dans la professionnalisation des salariés. C'est essentiellement par l'activité, souvent polyvalente, souvent obligée d'être créative, souvent faite d'expérimentation plus que de process, que se construisent à titre principal les compétences des salariés. Plutôt que de chercher à développer l'accès à la formation dans les TPE, ce qui peut rester un objectif louable, il serait tout de même plus intéressant d'identifier comment les processus de professionnalisation opèrent sans recourir à la formation. Et de cesser de considérer que les TPE ne forment pas, en reconnaissant au contraire qu'elles professionnalisent. Autorisons nous cet amicale recommandation au FPSPP : qu'il n'oublie pas qu'il est le Fonds de sécurisation des parcours professionnel et non le Fonds de sécurisation des parcours de formation.

19/04/2013

Former, c'est pas permis

Tout part, comme souvent, d'une louable intention : améliorer la qualité de  l'alternance, dans le secteur de l'hôtellerie-restauration et notamment réduire le taux de rupture anticipée des contrats. Pour ce faire, les partenaires sociaux décident de rendre obligatoire pour tous les maîtres d'apprentissage et tuteurs de jeunes en contrat de professionnalisation une formation de deux jours destinée à garantir la qualité de l'accueil, de l'accompagnement et de la formation. Jusque-là, tout va bien. Mais on ne sait ce qui a poussé les signataires à retenir comme appellation du dispositif "Le permis de former". Peut-être la volonté d'insister sur le caractère obligatoire de la formation ou de valoriser le suivi de la formation par la délivrance d'un permis. Le choix n'en est pas moins malheureux.

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Malheureux parce que s'il y a permis de former c'est qu'il n'est pas possible de former sans être allé soi-même en formation. L'accord ne vise pourtant que les nouveaux maitres d'apprentissage ou tuteurs, pas ceux qui l'ont déjà été, qui n'ont pas été formés et qui s'en trouvent dispensés par leur expérience. Mais si l'expérience suffit, pourquoi créer une formation obligatoire ?

Malheureux également parce qu'un permis atteste de compétences, de capacités. Or, le permis de former est délivré sur la base du suivi d'une formation et non pas après vérification de la capacité à former. Comme si l'on vous donnait le permis de conduire après 20 leçons sans s'assurer que vous maîtrisez le véhicule.

Pour avoir choisi un si mauvais intitulé, et avoir sacrifié le sens des mots à la beauté de la formule, les responsables seront condamnés à revoir le film consacré à Michel Clouscard, ce qui leur rappelera que lorsque tout est permis, rien n'est possible.

Accord HCR Permis de former.pdf

08/05/2009

Bouc émissaire

Le rapport relatif à l’accès au contrat de professionnalisation pour les publics éloignés de l’emploi, remis jeudi 7 mai par Jean-François Pillard au Secrétaire d’Etat à l’emploi Laurent Wauquiez et à Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et Haut commissaire à la jeunesse, fait le constat d’un contrat principalement centré sur les jeunes diplômés et non sur les adultes ou les non diplômés. Parmi les causes avancées, le fait que les organismes de formation seraient maîtres de la prescription et qu’il y aurait une rigidité de l’offre. Une fois de plus, l’organisme de formation fait figure d’accusé et subit l’éternel procès en sorcellerie.

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Goya - Le sabbat des sorcières

Réfléchissons pourtant un peu : si l’offre de formation ne trouvait pas son public, existerait-elle toujours ? en d’autres termes, qui veut le plus du diplôme : le jeune ou l’organisme de formation ? et pourquoi le jeune veut-il un diplôme sinon parce que c’est la meilleure garantie pour l’accès à l’emploi et le sésame indispensable dans bien des politiques de recrutement. Si rigidité il y a, c’est peut être bien dans les pratiques de recrutement et de gestion des ressources humaines et non dans l’offre de formation qui n’est qu’une conséquence et non une cause. Réunissez des jeunes et des familles pour leur demander où va leur choix entre une formation diplômante et une formation qualifiante.

Les contrats de professionnalisation mettent en cause quatre acteurs : l’acheteur (l’entreprise), le consommateur (le jeune), le payeur (l’OPCA) et le prestataire (l’organisme de formation). Faire croire que le vendeur mène le jeu alors que les décisions principales relèvent de l’acheteur, du consommateur et du payeur est peut être un défaut d’analyse. On aimerait qu’il ne s’agisse pas d’une escroquerie intellectuelle.

14/01/2009

Un pas de plus

L'ANI du 7 janvier 2009 n'a pas suscité, c'est le moins que l'on puisse dire, d'enthousiasme. Ni parmi les négociateurs qui ont souvent expliqué qu'ils avaient posé l'acte II de la réforme, ni parmi les autres acteurs de la formation professionnelle (Etat, Régions, entreprises, ...). La technicité de son contenu y est sans doute pour beaucoup, qui ne se laisse pas appréhender facilement malgré les efforts de  pédagogie dans la rédaction et le propos liminaire. Quoi de plus normal : si l'ANI du 5 décembre 2003 était créateur de droits pour les salariés (DIF, entretien professionnel, passeport formation, contrat de professionnalisation, périodes de professionnalisation...), l'ANI du 7 janvier 2009 s'intéresse moins à ces droits, qu'il aménage et complète à la marge, qu'à la gouvernance du système de gestion paritaire et à l'orientation des financements. Rien de spectaculaire donc pour celui qui est extérieur au dispositif. Et pourtant il s'agit d'un pas de plus, capital, sur le chemin de l'autonomie des partenaires sociaux.

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Renoir - Chemin montant dans les hautes herbes

Toutes les bases sont posées pour que le système de gestion de la formation professionnelle devienne un régime à la régulation essentiellement conventionnelle, la loi ne faisant que généraliser les règles adoptées par la voie de la négociation collective. S'il subsiste une frustration après la signature de l'accord c'est sans doute qu'un seul pas ait été fait, alors que le chemin est encore long. Mais nous ne sommes qu'en janvier, et c'est au printemps qu'apparaissent les beaux et fragiles coquelicots. A suivre donc.

Ci-dessous, l'analyse de l'ANI du 7 janvier 2009 réalisée avec Jean-Marie Luttringer et publiée par l'AEF.

 

08/12/2008

PREMIER PROJET

Un premier projet de texte daté du 5 décembre 2008 a été diffusé en vue de constituer le socle d'un ANI sur la professionnalisation tout au long de la vie et la sécurisation des parcours professionnels. L'intitulé marque une première rupture : il ne s'agit plus de formation mais de professionnalisation et de gestion des parcours. Le contenu est également porteur de nouveautés : implication plus forte des partenaires sociaux dans la certification, intervention des OPCA vers les demandeurs d'emploi, rapprochement entre les FONGECIF et France Emploi (structure se substituant le 1er janvier à l'ANPE et l'ASSEDIC), orientation des financements vers les salariés les moins qualifiés, élargissement du champ de compétences des OPCA, ...

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Plein de perspective, avenir radieux

Le projet doit être complété sur deux points : les dispositions relatives au DIF et au CIF ainsi que les obligations financières des entreprises. Ces deux points constituent des points durs de la négociation. De leur résolution dépend en grande partie le fait que ce premier projet puisse être pleinement porteur de perspectives et annoncer un avenir radieux.