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10/12/2013

Face au miroir

Au point où se trouve la négociation interprofessionnelle sur la formation, qu'il y ait au final un accord ou pas n'a plus guère d'importance. Car il ne pourrait s'agir que d'un accord a minima, de bric et de broc, sans véritable dynamique. Alors après tout, mieux vaudrait qu'il n'y en ait pas. A ceux d'ailleurs qui craignent cette issue et se rassurent en disant que jamais une négociation sur la formation n'a échoué, commençons par raconter ceci : la veille de la faillite de Lehman Brothers, discussion téléphonique entre des banquiers américains et français. Les américains expriment leur crainte de la banqueroute qui leur paraît inévitable. Réponse d'un français : "Mais c'est impossible, la banque existe depuis un siècle et demi !". Il n'avait certainement pas du jouer, petit, avec des dinosaures ni des indiens. Et continuons en rappelant que ce n'est pas la signature d'un accord qui fait le succès d'une négociation, mais son contenu. Et quel que soit le contenu de l'accord s'il y en avait un, il est douteux qu'il soit satisfaisant.

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Foujita - Femme au miroir - 1922

C'est donc vers un échec que l'on se dirige, avec ou sans accord. Et comme toujours, les commentaires hâtifs vont fuser : incapacité du système à se réformer, corporatismes et conservatismes bloquant une nécessaire refonte, système incompréhensible et incapable d'évoluer, etc. Et comme toujours, ce seront ceux qui commenceront par nous expliquer qu'ils ne comprennent rien au système qui seront les plus virulents. Alors faisons simple : tout consultant sait que lorsqu'il se plante sur le diagnostic, la probabilité de construire une réponse efficiente est la même que celle de regarder jusqu'au bout un film de Lelouch : pas impossible, mais très difficile quand même. Lorsque la formation a fait l'objet de la réforme de 2003-2004, elle s'inscrivait, 2 ans après la mise en place de la VAE, dans une logique  d'accompagnement du développement des compétences. Résultat : un bon accord et une bonne loi. En 2009, les partenaires sociaux ont négocié sous pression et à partir d'un diagnostic exclusivement négatif : résultat un accord de faible portée et une mauvaise loi. Et on est reparti en 2012 sur les mêmes bases : rapports, articles, reportages en tous genres pour expliquer combien le système fonctionne mal. Personne pour pointer ce qui fonctionne bien et mérité d'être conforté et pourrait constituer le fondement d'une dynamique nouvelle. Et le pire, c'est que les contempteurs du système verront dans le résultat de la négociation la confirmation de leurs critiques. Alors que le seul reproche véritable que l'on peut faire aux partenaires sociaux, c'est  de n'avoir su ou pu produire eux-même un véritable diagnostic sur le système qu'ils gèrent, se contraignant ainsi à travailler à partir des piètres diagnostics qui sont venus occuper un espace qui n'aurait pas du leur être concédé. A ne pas savoir affronter son image dans le miroir, on se trouve toujours dépendant du regard d'autrui. Souhaitons que le prix à payer ne s'avère pas trop lourd.

29/10/2013

Le retour du pilote d'avion

Le 20 avril 1988, la Cour de cassation a pour la première fois estimé qu'un employeur devait adapter les salariés à l'évolution de leur emploi. Il s'agissait d'un pilote d'avion. La compagnie qui l'employait, ayant changé ses avions, l'avait licencié pour recruter un pilote qualifié sur les nouveaux avions. Licenciement injustifié selon les juges : l'employeur a l'obligation de faire acquérir la nouvelle qualification au pilote en place et ne peut le licencier que s'il échoue.

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Le 23 Octobre dernier, la Cour de cassation jugeait à nouveau l'affaire d'un pilote. Formé cette fois-ci par son employeur, il avait signé une clause de dédit prévoyant le remboursement des frais de formation en cas de démission. Ayant quitté volontairement l'entreprise, il s'était vu assigné, et condamné en appel, à payer la clause de dédit-formation. Erreur selon la Cour de cassation. La clause prévoyait le remboursement des salaires et charges pendant la formation, ce qui est légalement impossible puisque le versement du salaire est la conséquence du fait que l'adaptation au poste se déroule pendant le temps de travail. Des cours d'appel avaient déjà soulevé cet argument, mais c'est la première fois qu'il est utilisé par la Cour de cassation et posé en principe.

Reste à apprécier la portée exacte de la décision : elle n'exclut le dédit-formation que sur les salaires, pas sur les coûts pédagogiques et ne pose pas en principe que toute action d'adaptation constituant une obligation de l'employeur elle ne peut faire l'objet d'un dédit. En cela, elle s'écarte de la comptabilisation fiscale des coûts de formation et se rapproche davantage d'une appréciation de l'investissement social de l'entreprise, soit exactement le sens que la négociation est en train de donner à la formation. Toujours en avance, les juges.

COUR DE CASSATION - 23 Octobre 2013 - Dedit Formation.pdf

06/10/2013

Mobile

Lors d'une manifestation publique, la semaine dernière, un des intervenants en tribune soupira que les choses iraient tout de même mieux, en France, si les salariés étaient mobiles, comme dans les autres pays d'Europe. Un murmure d'approbation sembla parcourir la salle. A moins que ce ne fut de la réprobation, car il s'agit évidemment d'une énorme sottise. Si l'on s'en tient aux chiffres de l'INSEE, la France est un des pays d'Europe où la mobilité est la plus forte. Chaque année, 2 % des salariés changent de région pour raisons professionnelles. C'est peu direz-vous. Oui mais en Allemagne c'est 1,3 % et en Espagne 0,8 %. La faible mobilité est donc loin d'être l'apanage des Français. 

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Mobile - Immobile

A l'heure où il est question de former davantage les demandeurs d'emploi, il ne faudrait pas perdre de vue cette réalité : si plus de 20 % des salariés changent d'entreprise chaque année, seuls 2 % donc changent de région. Ce qui signifie que la mobilité s'exerce très principalement dans un même périmètre géographique. Au moment de définir des priorités de formation, il sera peut être bon de se rappeler que l'on change plus facilement de secteur professionnel que de bassin d'emploi et que c'est évidemment d'autant plus vrai que le niveau de revenu est peu élevé. Ce qui laisse à penser que, la formation étant un moyen, c'est moins l'amélioration du fonctionnement du système qui doit être le premier objectif, que la prise en compte des bons paramètres pour les questions que la formation est censée résoudre.

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22/07/2013

Exclusion-Inclusion

Je pense avoir découvert l'inclusion avec les porte-clés et leurs publicités insérées au coeur de ronds, carrés, coeurs, ovales de plastique transparents.

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On m'a ensuite offert une boîte de jeu dénommée PLASTIC 2000 qui permettait de réaliser soi-même ses inclusions. Je ne pense pas en avoir réalisé une seule, mais la boîte me fascinait. Pourtant, inclure c'était enfermer, emprisonner, immobiliser, et je préférais de loin l'exclusion, mère de toute les libertés. Je retrouvai bien plus tard cette opposition dans les inclusions de Damien Hirst.

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Damien Hirst - Saint-Sébastien - 2007

Entre temps, j'avais constaté dans un autre domaine, que l'on utilisait l'exclusion lorsque l'on se proposait d'inclure. Ainsi, tous les contrats de travail dont l'objectif est l'inclusion de jeunes  (apprentissage, professionnalisation) ou de personnes en difficulté (contrat initiative-emploi, contrat d'accès à l'emploi, contrat unique d'insertion) commencent par exclure leurs bénéficiaires du droit commun pour mieux les inclure. Curieuse logique que celle qui consiste à tenter de ramener vers le droit commun en commençant par y déroger. Technique des petits pas me dit-on. Contradiction fondamentale est ma réponse. Apparemment, l'avocat général près la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) partage mon avis. Il vient de considérer que la loi française qui exclut du calcul des effectifs de l'entreprise les salariés en contrat d'insertion était contraire à la directive européenne  qui garantit le droit à la représentation des salariés. En effet, lorsque l'employeur a une activité qui le conduit à recourir massivement aux contrats en insertion, il peut ne pas avoir à mettre en place de représentation du personnel. Les salariés de l'association marseillaise à l'origine de l'affaire sont plus de 120 et pour autant n'ont pas de comité d'entreprise. Si la CJUE suit les conclusions de son avocat général, il va falloir sérieusement recompter...et inclure.

21/07/2013

Pourquoi travaillez-vous ?

L'été a pris ses aises, il s'est engouffré dans nos désirs de chaleurs si longtemps contenus, il a envahi nos corps et nos cerveaux. Après une telle attente, impossible de résister, nous le laissons faire. La preuve : pas de jurisprudence aujourd'hui, de texte alambiqué ou d'essai de pédagogie du droit, un simple test d'été, sur le mode des magazines de plage, que vous pourrez donc faire l'économie d'acheter. Si vous voulez savoir pourquoi vous travaillez, ou plus exactement pour quoi vous travaillez, pensez au travail que vous souhaiteriez faire et choisissez parmi les cartes ci-dessous celle qui l'illustre le mieux.

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Vous avez choisi la dame de pique ? votre travail est un moyen qui vous permet d'accéder à une identité professionnelle et sociale, à des avantages matériels liés à vos conditions de travail, à un statut. Bref, vos principales motivations pour le travail sont extérieures au travail lui-même.

Vous avez choisi la dame de coeur ? vous privilégiez le sens du travail à ses conditions ou à la rétribution que vous en tirez. La nature de l'activité exercée est votre principale source de satisfaction et vous attachez de l'importance à être un bon professionnel, investi dans son travail.

Vous avez choisi la dame de trèfle ? le travail n'a de sens pour vous qu'en tant qu'il permet d'accéder à une rétribution. La rémunération guide vos pas et prend le pas sur toute autre motivation. La reconnaissance passe par l'argent et les possibilités qu'il vous offre.

Vous ne vous reconnaissez pas dans votre choix ? rassurez-vous, ce n'est qu'un test de l'été, d'autant plus dépourvu de valeur qu'il vous assigne une case alors que vos motivations sont multiples, articulées entre elles et fluctuantes dans le temps. C'est pourtant avec un schéma de ce type qu'un éminent professeur d'Université a longtemps couru les conférences pour parler de la motivation par la rémunération, sur le ton de la révélation. Souhaitons lui à lui aussi un bel été.

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10/07/2013

Un nouveau garde-barrière

Depuis le 1er juillet dernier, une entreprise ne peut plus mettre en oeuvre un PSE (plan de sauvegarde de l'emploi : mesures destinées à limiter le nombre de licenciements ou favoriser la reprise d'emploi pour les salariés licenciés) sans conclure un accord majoritaire avec les organisations syndicales, ou obtenir l'accord du Directeur régional du travail. Ce n'est pas le retour de l'autorisation administrative de licenciement (créée par Chirac en 1976 et supprimée...par Chirac en 1986 dans un de ces saltos arrières dont il avait le secret), mais cela y ressemble quand même un petit peu. Le piquant de l'affaire, c'est que ce sont les organisations patronales qui ont souhaité confier ce rôle de garde barrière au Directeur du Travail quoi doit donc décider si le train des licenciements peu passer ou non.

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Garde-barrière qui à défaut de train tente de faire passer les phares

Apparemment, les employeurs préfèrent la négociation avec les syndicats ou l'administration que le recours à cet imprévisible juge qui bloqua, par le passé, quelques PSE. L'avenir nous dira si ce pari s'est avéré fructueux ou non, et pour qui. Pour l'heure, constatons qu'en pleine période de crise, le nombre de licenciements économiques stagne autour de 250 000 par an (contre le double de licenciements personnels) et que plus de la moitié sont prononcés en dehors de tout PSE. Ce qui ne fait guère que 100 000 salariés concernés par le nouveau dispositif, sur 800 000 licenciements. Pas tout à fait une goutte d'eau, certes, mais pas non plus de quoi considérer que le garde-barrière ait dorénavant les clés de l'emploi. Comme les phares, il risque plutôt de voir passer au loin les bateaux.

09/07/2013

Chamboule tout ?

Cette fois-ci, c'est parti. La feuille de route envoyée par le Ministre du Travail, Michel Sapin, aux partenaires sociaux en les invitant à négocier constitue le véritable point de départ de la nouvelle réforme de la formation professionnelle. Les demandes ne sont pas mineures : revisiter la définition de l'action de formation, mettre en place les modalités de fonctionnement du compte personnel de formation, supprimer le DIF, réviser les périodes de professionnalisation, mutualiser davantage les fonds dus par les entreprises dans le cadre du 1,6 %, orienter les ressources vers les salariés les plus fragiles et vers les demandeurs d'emploi, revoir le financement du plan de formation et ses modalités d'élaboration...tout est en place pour le jeu du chambouletout.

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Mais dans le chambouletout, les boîtes reprennent toujours leur place à la fin...jusqu'à la prochaine fois. Alors un nouveau coup pour (presque) rien ou une vraie évolution de notre système de formation avec une évolution significative de l'obligation fiscale qui n'en finit plus de structurer les pratiques de formation ? Peut-être que cette fois-ci sera la bonne ! alors souhaitons une réforme excitante et en route !

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Détail de la feuille de route ministérielle :

Feuille de route ministérielle - 8 juillet 2013.pdf

05/07/2013

A votre écoute

Il n'est pas besoin d'être fan de Mickey pour savoir que les Etats-Unis ont de grandes oreilles. Il n'est pas non plus besoin d'être fan d'Astérix pour savoir que la France aussi. Vous savez désormais, après les révélations du Monde et pour autant que vous en doutiez, que vos mails, vos sms, vos conversations téléphoniques et les coordonnées de vos correspondants sont aspirés par la grande machine à tout surveiller et mis à la disposition de différents services du renseignement. Pour les salariés, ce n'est pas un scoop. Ils savaient déjà, en habitants avisés du monde du travail à l'ère numérique, que leur employeur peut à tout moment accéder à leurs fichiers, mails ou sms dès lors qu'ils transitent par des outils professionnels. Oui mais dans ce cas là, direz-vous, c'est licite. Effectivement. Mais licite ne signifie pas moral, éthique ou pertinent. En réalité, ce contrôle généralisé relève tout à la fois de la volonté de puissance et du voyeurisme.

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Clovis Trouille - La voyeuse

Il n’y a parfois rien de plus vulgaire que l’alibi d’être dans son bon droit  pour justifier des comportements qui ne  sont guère justifiables. Certes, le droit reconnaît à l’employeur le droit de fouiller dans les poubelles numériques de ses salariés, mais que penser d’une relation de travail établie sur de telles bases ? j’ai le droit de vous surveiller, donc je ne me pose pas la question de savoir s’il est bon de le faire. Comment mieux dire que l’on souhaite placer la relation sous le signe de la défiance ? si les chartes informatiques d’entreprise regorgent de recommandations sur la manière dont les salariés doivent utiliser l’outil informatique, on attend la charte dans laquelle l’employeur s’engage à ne pas abuser de son droit de contrôle. Dans l’attente, on reste à votre écoute.

04/07/2013

Des réalités

Serge Dassault, chasseur émérite que les juges ont en ligne de mire, est à l'origine de l'introduction dans le code du travail des actions de formation relatives à l'économie de l'entreprise qui "ont pour objet la compréhension par les salariés du fonctionnement et des enjeux de l'entreprise" (C trav., art. L. 6313-9). Si les députés, toujours soucieux de l'éducation des masses, ont voté le texte, ils ont toutefois refusé, comme le leur demandait l'industriel et patron de presse, de rendre ces formations obligatoires. Autant dire que le texte n'a strictement aucun effet cette catégorie n'ayant aucune utilité autre que proclamatoire. Il souligne tout de même un état d'esprit, celui qui consiste à penser que si les salariés comprenaient mieux les lois et réalités économiques, ils seraient plus en accord avec leurs dirigeants. Face à une telle affirmation, fêtons tout à la fois la réalité, et même l'hyperréalité, et l'arrivée de l'été avec Hilo Chen et ses peintures estivales.

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Hilo Chen - Beach - 2004

Puisque réforme de la formation il doit y avoir, suggérons aux députés, par seul souci de réciprocité, d'introduire dans le code du travail un article relatif aux réalités sociales qui ont pour objet "la compréhension par les dirigeants des réalités sociales vécues par les salariés et des enjeux liés à leurs conditions réelles d'exercice de leurs activités professionnelles". Je dis ça mais je n'ai pas l'influence de Serge Dassault et peut être que c'est l'hypperréalité d'Hilo Chen qui m'est montée à la tête. En même temps, le soleil, on avait perdu l'habitude.

03/07/2013

Dédoublement

La loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin généralise, pour les entreprises de plus de 5000 salariés, l'élection de représentants des salariés au sein du Conseil d'Administration, ou de surveillance. Il y en aura 1 si le conseil compte moins de 12 membres, 2 s'il y en a plus de 12. Même minoritaires, ces administrateurs nouveaux auront le droit de vote. Ils participeront à tous les conseils, auront accès aux informations et contribueront aux débats. Jouer ce rôle sera tout sauf évident. Pas facile en effet de concilier les relations interpersonnelles, qui peuvent devenir cordiales, la fonction de représentation des salariés et le rôle d'administrateur. Le risque de schizophrénie est bien réel.

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Je me souviens d'un secrétaire de CE et de CCE, délégué syndical central, représentant au conseil d'administration et divers autres mandats au nom d'un syndicat qui était le syndicat unique, avec une forte tradition d'opposition, au sein d'un groupe industriel. Les patrons de l'entreprise étaient des américains. Ils emmenèrent le syndicaliste au siège aux Etats-Unis, à Saint-Louis, passèrent beaucoup de temps avec lui, l'associant à tout, lui montrant tout. Le syndrôme du journaliste "embedded" et l'inverse de la confrontation frontale, dans laquelle il aurait été plus à l'aise. Un monde nouveau, des logiques qui ont leur cohérence et au final un positionnement personnel de plus en plus difficile à construire. Pour sortir du dilemne, le syndicaliste trouva comme solution de renoncer à ses mandats permanents, et de consacrer au moins une journée par semaine à son activité : remplir des sacs, les charger dans les camions, faire fonctionner les machines, assurer le nettoyage et la maintenance. En équipe au milieu des autres salariés. Pour prévenir le risque de dédoublement, rien de mieux que de se donner comme objectif de faire des liens entre les mondes.

27/06/2013

On vous l'avait bien dit...

...qu'il était inutile d'essayer de faire jouer à la rupture conventionnelle le rôle d'une transaction en insérant dans l'accord une clause par laquelle le salarié s'interdit tout recours ultérieur à propos de la rupture de son contrat de travail mais aussi, tant qu'on y est, pour tout autre motif. La Cour de cassation vient de juger qu'une telle clause est dépourvue d'effet mais que pour autant elle ne remet pas en cause la rupture conventionnelle. Encore raté pour ceux qui croient toujours que l'on peut se protéger d'un contentieux par une petite phrase en bas du contrat. 

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On peut donc toujours conclure une rupture conventionnelle et assigner ensuite son employeur soit pour contester la validité de l'accord donné (ce qui reste très difficile à établir), soit pour formuler des demandes distinctes de la question de la rupture. En fait, il n'y a qu'un évènement qui protège véritablement de tout contentieux à venir : c'est le contentieux. Le principe d'unicité d'instance interdit en effet de s'y reprendre à deux fois en matière prud'homale. Le meilleur moyen de transiger, de manière définitive, est donc de le faire devant le juge. Mais cela n'empêchera pas certains avocats de continuer à conseiller de faire du droit psychologique, celui qui marche tant que l'autre y croit. En quelque sorte, l'inverse du pari sur l'intelligence. Du coup, quand c'est raté, on va pas pleurer.

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04/06/2013

Vision globale

Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) lance un travail d'analyse des pratiques de formation dans les TPE, en liaison avec le Conseil national d'évaluation de la formation professionnelle. Les pratiques de formation de 40 TPE représentatives seront examinées. L'objectif est d'établir une typologie des pratiques et des modalités de formation. C'est très bien, mais avec un petit risque toutefois, celui de manquer de vision globale en mettant la focale uniquement sur l'usage de la formation sans s'interroger sur les processus de professionnalisation.

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Dans une TPE, en effet, la formation ne joue que de manière marginale un rôle dans la professionnalisation des salariés. C'est essentiellement par l'activité, souvent polyvalente, souvent obligée d'être créative, souvent faite d'expérimentation plus que de process, que se construisent à titre principal les compétences des salariés. Plutôt que de chercher à développer l'accès à la formation dans les TPE, ce qui peut rester un objectif louable, il serait tout de même plus intéressant d'identifier comment les processus de professionnalisation opèrent sans recourir à la formation. Et de cesser de considérer que les TPE ne forment pas, en reconnaissant au contraire qu'elles professionnalisent. Autorisons nous cet amicale recommandation au FPSPP : qu'il n'oublie pas qu'il est le Fonds de sécurisation des parcours professionnel et non le Fonds de sécurisation des parcours de formation.

02/06/2013

Liberté mais aussi égalité et fraternité ?

Le Gouvernement annonce son intention de réformer le régime des auto-entrepreneurs, et aussitôt, la machine médiatique s'emballe. La droite, c'est le jeu, hurle au découragement total de toute initiative d'entreprendre. Les auto-entrepreneurs auto-proclamés "poussins" s'égosillent devant leur liberté entamée et leur statut dégradé. Et la Ministre benjamine et tarn et garonnaise, Sylvia Pinel, se voit obligée de reprendre le Premier Ministre lui-même. Il faudrait tout de même rappeler, dans cette affaire, que les premiers demandeurs d'une réforme du statut d'auto-entrepreneur ce sont...les entrepreneurs. Dès la création du statut, les artisans se sont élevés contre cette possibilité de les concurrencer déloyalement, du fait d'un taux de charge forfaitaire avantageux par rapport au droit commun et d'un non assujettissement aux mêmes obligations règlementaires.

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Gil - www.gilblog.org

J'ai salué, sur ce blog, la liberté d'activité que représente le statut d'auto-entrepreneur. Il serait désolant de réduire à peau de chagrin cette liberté. Mais pour autant, cela ne doit pas éluder la question de l'égalité (pourquoi des statuts différents pour exercer une même activité) ni celle de la fraternité (pourquoi des contributions différentes aux régimes sociaux). Le mieux à faire, en ce domaine, est peut être de se demander de quel droit commun nous avons besoin pour l'exercice d'activités indépendantes principales et pour les activités indépendantes accessoires et d'arrêter de créer des statuts dérogatoires qui apportent moins de réponses immédiates qu'ils ne créent de problèmes à venir.

31/05/2013

Vive l'inertie !

Il ne fait pas bon être bon élève dans le champ social. Et on ne compte plus les enthousiastes de la première heure qui doivent affronter les sarcasmes et sourires goguenards des désabusés professionnels qui, n'ayant jamais été nulle part, sont revenus de tout. Cela avait commencé avec les 35 heures. Ceux qui s'étaient inscrits dans la loi de 1998, avaient réduit le temps de travail et maintenu les salaires, cherchaient encore comment regagner les surcoûts de 11,4 % générés par leur décision, quant la deuxième loi votée en 2000 leur fit comprendre qu'en ne faisant rien, et en restant à 39 heures, le surcoût était de 2,5 % de salaire et pouvait se rattraper en un an, deux maximum. Et l'on nous refait le coup avec le DIF. Ceux qui ont été proactifs et ont développé des politiques innovantes vont devoir soit replier les gaules, soit trouver les ressources en interne lorsque l'on obligera les OPCA à réorienter leurs financements vers les demandeurs d'emploi et le compte personnel de formation.

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Tout se passe comme si le législateur prenait un malin plaisir à décourager les initiatives, à favoriser l'inertie et finalement à donner raison à tous les pisse-froids qui ont toujours d'excellentes raisons de manquer d'imagination. Peut être que le jour où l'on se préoccupera de faire des textes pour accompagner les proactifs, pour encourager l'innovation, pour récompenser la créativité et non pour contraindre, imposer, sanctionner les récalcitrants et finalement tomber dans un jeu de dupe où chacun tient la barbichette de l'autre (je t'impose mais pas trop, je fais ce que tu m'imposes mais en faisant semblant), peut être alors que cela ira un peu mieux. On ira toujours plus vite en essayant d'accélérer le mouvement qu'en tentant de faire bouger l'inertie.

30/05/2013

Innovation classique

Ingres est répertorié parmi les peintres classiques : excellente maîtrise du dessin, application minutieuse dans la préparation des fonds, positionnement précis des détails, disparition de toute trace de la brosse après qu'elle soit passée sur la toile, le digne héritier de son maître David. Oui mais voilà, sous ce classicisme d'apparence apparaît l'innattendue et incongrue innovation : les corps s'allongent, les os s'assouplissent, les positions défient les lois physiques, les représentations débordent leurs personnages. Picasso ne s'y était pas trompé qui construisit un dialogue avec Ingres à travers le temps.

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Ingres - La source

Si l'on peut innover dans le classicisme, il arrive également que l'on fasse l'inverse. Lors de sa visite à l'usine Bosch de Rodez, François Hollande a salué un accord entre la direction et les syndicats qu'il a qualifié de "bel exemple" du dialogue social et qu'il a placé dans la ligne des objectifs poursuivis par le contrat de génération. Sans doute sa lecture de l'accord, ou du résumé que lui en ont fourni ses conseillers, a-t-elle été rapide. L'accord de compétitivité est surtout marqué par 116 départs en préretraite, soit l'inverse du maintien dans l'emploi des seniors voulu par le contrat de génération, qui sera de ce fait classé au rang des mesures qui persistent à vouloir le bonheur d'autrui malgré lui, et l'exacte politique de ressources humaines conduite depuis plus de 40 ans : maintenir la situation de ceux qui restent en diminuant  les coûts par des mesures d'âge. Pour le coup, très classique mais bien peu innovant.

28/05/2013

Auberge allemande

Je ne sais pas si Jean-Emmanuel Ray a été voir l'auberge espagnole, le film de Cédric Kaplish. Mais je sais qu'il interdit aux étudiants du Master en Développement RH, à la Sorbonne, de faire leur voyage d'étude annuel au Sud de la Loire. Il faut quand même rester sérieux : un voyage de travail cela s'organise en Suède, en Autriche, aux Pays-Bas, au Danemark, même pas en Grande-Bretagne (les pubs !) et surtout pas en Italie, en Espagne, en Grève -pardon en Grèce- ou au Portugal, il y a suffisamment d'acquis sociaux (congés payés, RTT) pour aller faire un tour dans ces pays là. Et les statistiques lui donnent raison : l'Allemagne a accueilli en 2012 un million d'immigrés alors que l'Espagne et les autres perdent leur jeunesse. Car là se trouve le phénomène nouveau. Si les immigrants des pays d'Europe centrale demeurent majoritaires, les espagnols, les italiens, les grecs ont rejoint l'Allemagne par dizaines de milliers. Attention le Nord, le Sud arrive !

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Jeune européen se préparant à entrer dans une bodega

Je ne sais pas si le fait de priver les pays du Sud d'une main d'oeuvre qualifiée pour l'utiliser à produire des biens de consommation qui seront revendus à ces mêmes pays au risque d'aggraver leur déficit constitue un cercle économique vertueux. Par contre, cet appel d'air allemand, qui  devrait  s'amplifier ces prochaines années pour des raisons démographiques, aura au moins le mérite de contribuer à développer les bodegas en terres anglo-saxonne, ce qui changera un peu de la fête de la bière (mais non c'est pas pareil). Du coup, on peut continuer à apprendre l'espagnol, on pourra bientôt s'en servir en Allemagne. Olé !

22/05/2013

Ali Gattaz et les 40 milliards

J'en suis resté baba. Doublement baba d'ailleurs. D'abord parce que voir Pierre Gattaz, le candidat donné favori à la présidence du MEDEF, prendre la plume pour signer une tribune dans Le Monde consacrée à la formation professionnelle, c'était rien moins qu'évident. La seconde en lisant la dite tribune. Car, comme d'autres, j'ai du me pincer, relire et rerelire pour être bien sur de n'avoir pas rêvé. Après les fantaisistes 30 milliards de la formation que Sarkozy voulait récupérer, voici que le peut être futur patron des patrons explose toutes les limites en invitant les partenaires sociaux à mieux utiliser les 40 milliards d'euros gérés paritairement. Rappelons que les OPCA en gèrent 6 fois moins (6,5 milliards) et que même en grattant quelques millions dans les dépenses de l'UNEDIC, on reste loin du compte. Décidément, le trésor imaginaire caché dans la grotte secrète n'en fini pas d'alimenter tous les fantasmes. Donnons vite le sésame à chacun pour qu'il puisse aller vérifier qu'en fait de trésor, il faudra repasser.

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Ali Baba au théâtre de la Criée à Marseille

Toutefois, le contenu de la tribune  conduit à absoudre cette approximation. Pour une fois, ne nous est pas servi le couplet sur l'Education nationale qui est incapable de former les bons professionnels dont les entreprises ont besoin. Au contraire, ce discours est dénoncé comme à la fois naïf et irréaliste. Que l'Education nationale donne les fondamentaux et la curiosité de tout (ah, la curiosité de tout, mais comment la faire entrer dans les programmes se demande l'inspecteur général perplexe...) et les entreprises s'occuperont des professionnels. Certes cela ressemble à un Yalta où la coopération est peu présente, mais c'est certainement mille fois mieux qu'une fausse coopération basée sur la méfiance, voire la défiance, réciproque. Et puis concentrée sur les fondamentaux, l'Ecole pourra ainsi garantir que chacun saura lire, écire et compter....au moins jusqu'à 40.

Réformer la formation professionnelle.pdf

21/05/2013

Sortir des statuts

Lors de sa visite aux autoproclamés pigeons, François Hollande a annoncé son souhait de voir se développer un enseignement à l'entrepreunariat dès le collège, moyennant quoi il eût presque droit à une standing ovation. Voici donc l'école sommée de préparer les élèves à devenir des chefs d'entreprise. Encore un effort et Raymond Barre et son fameux : "Les chômeurs n'ont qu'a créer leur entreprise" redeviendra d'actualité. Mais surtout, voilà le type d'annonce qui repose sur deux supercheries. La première est qu'il faudrait un enseignement particulier pour devenir chef d'entreprise : que l'on sache la mission première de l'éducation est de participer à ce que chacun soit autonome, libre et responsable. Cela doit coller avec la fonction de dirigeant sans qu'il soit besoin d'en rajouter. La seconde supercherie est, qu'encore une fois, on ne raisonne qu'en terme de statut.

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Alfred Pellan - Collage - 1939

Car qu'est-ce qu'un entrepreneur ? si certains dirigeants d'entreprise sont des entrepreneurs, tel n'est pas le cas de tous (les héritiers, les rentiers, les investisseurs, les gestionnaires, etc.). Et considérer que seuls les entrepreneurs entreprennent, c'est oublier un peu vite que des millions de salariés entreprennent tous les jours dans le cadre de leur activité et qu'un nombre aussi important de bénévoles entreprennent dans le cadre d'activités associatives et/ou militantes. Bref, si l'on veut préparer nos chères têtes blondes à être créatives, imaginatives, autonomes, entreprenantes, responsables et pleines d'initiatives, il vaudrait mieux ne pas s'en tenir à leur bourrer le crâne d'économie et de gestion. Mais plutôt leur suggérer  qu'il  faut toujours aller voir derrière les statuts.

19/05/2013

Prendre langues

Le débat suscité par l'introduction de cours en anglais à l'Université est consternant. Consternant de constater que les défenseurs de cours en anglais y voient principalement l'intérêt d'attirer des étudiants étrangers et de mieux préparer les étudiants français au monde des affaires. Consternant de voir que les opposants considèrent que c'est en refusant toute autre langue que le français qu'on le défend le mieux. En ce dimanche pluvieux, il faut beaucoup de sérénité pour résister à l'envie de les noyer tous. Mais il y a peut être mieux à faire : leur rappeler que se tiendra à Toulouse le 26 mai prochain, comme tous les ans depuis 1992, le Forom des langues à l'occasion duquel tous les métèques sont invités à se retrouver place du Capitole.

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Les promoteurs de l'anglais à l'Université pourraient y découvrir que la langue ne se réduit pas à sa dimension communicationnelle et que toute langue est une anthropologie car c'est par le langage que l'homme se construit, se pense et créé. Les défenseurs du français conçu comme seule langue d'enseignement pourraient y découvrir que l'on transmettra davantage de valeurs en enseignant plusieurs langues dès le primaire qu'en réintroduisant, comme si c'était le problème, des cours de morale au collège. Mais pour cela il faudrait que les uns et les autres admettent le postulat du forom des langues : toutes les langues doivent être placées sur un pied d'égalité et dès lors leur apprentissage simultané ne s'en trouve que facilité. Pour apprendre la langue, il vaut mieux prendre langues.

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05/05/2013

Allez les petits !

Le Ministère de l'Education nationale vient de faire paraître les résultats des Universités en matière d'accès à la licence des étudiants engagés dans un premier cycle. Et surprise, en tout cas pour certains, ce sont les petites universités de province (Chambéry, Angers, Clermont, Pau, Orléans, LA Rochelle...), dont plusieurs étaient récemment menacées de fermeture faute de crédits suffisants, qui obtiennent les meilleurs résultats. Et d'une manière générale, les universités qui comptent moins de 20 000 étudiants sont plus performantes que les mastodontes des grandes agglomérations. On souhaite que les acharnés du regroupement, de la concentration, de la massification, les rois de l'économie d'échelle et des gains de productivité, les thuriféraires de la rationnalisation, se penchent sur ces résultats et s'autorisent à remettre leurs dogmes en question.

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Ils s'apercevront ainsi que lorsque l'on est plus petit, on est plus léger, plus souple, plus réactif, plus créatif (puisque moins puissant a priori) et que l'on consacre au final beaucoup moins de temps à l'organisation que dans les grandes unités qui perdent leur temps à essayer de fonctionner. Voilà qui devrait, ou aurait du, faire réfléchir ceux qui pensent que l'on gagnera en productivité en fusionnant les services extérieurs de l'Etat, les Chambres de Commerce, les OPCA, les Universités et toutes les structures publiques ou para-publiques. Sur le papier, ces champions de l'efficacité considèrent que cela réduira le nombre de postes consacrés à l'administration du dispositif. Sur le terrain, cela a pour conséquence d'obliger ceux qui devraient faire autre chose à administrer les monstres ainsi créés à coup de reporting, de réunions de coordination, de process censés remplacer l'intelligence et qui ne font que favoriser le désinvestissement. Bref, pour retrouver l'agilité, la créativité, l'efficacité et le sourire, car tout cela va ensemble, rendez nous les petits !

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