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12/11/2012

Une tarte bien crémeuse

Stanley Kubrick n'a finalement pas intégré à son film Dr Folamour, la gigantesque bataille de tartes à la crème entre les russes et les américains comme scène finale. Il a préféré substituer au comique des images de véritables essais nucléaires, comme pour rappeler qu'il ne venait pas simplement de tourner le dernier film burlesque depuis Buster Keaton.

Peut être aurait-il fallu, à l'inverse, quelques dernières pages burlesques au rapport Gallois pour finir de persuader le lecteur que tout ceci n'est pas très sérieux. On se contentera de reprendre ici les propositions qui touchent à la formation professionnelle.

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La première propose de rapprocher le système éducatif et l'entreprise en faisant entrer des chefs d'entreprises dans les établissements car, nous dit le rapport, l'offre de l'Education Nationale n'est pas adaptée aux souhaits des entreprises qui ne trouvent pas le personnel dont elles ont besoin. Cette première tarte à la crème nous présente l'Education nationale exclusivement comme un fournisseur de main d'oeuvre clé en main à l'économie. Rappelons que la mission de l'Education nationale, comme son nom l'indique, est de former des citoyens avant de former des agents productifs ou des consommateurs, et qu'ensuite il appartient peut être aux entreprises de former elles mêmes à leurs métiers et de veiller à la qualification de la main d'oeuvre. Et puis si l'on veut rapprocher l'école et l'entreprise, il ne faut pas uniquement mettre des chefs d'entreprises dans les établissements, il faut aussi mettre des enseignants dans les conseils d'administration.

La deuxième proposition consiste à doubler le nombre d'alternants en cinq ans (soit passer de 400 000 apprentis et 100 000 jeunes en contrat de professionnalisation à 1 million au total). Parfait, l'alternance est une excellente filière. Mais qui paie la différence ? on augmente la taxe d'apprentissage ? la taxe formation continue ? les impôts locaux pour que les régions puissent financer les CFA ? on chercherait en vain un début de solution opérationnelle dans le rapport qui par ailleurs s'élève contre les taux de charges.

La troisième proposition vise à la mise en place d'un compte individuel de formation, sujet d'actualité. La seule proposition concrète pour aller en ce sens est de fusionner le DIF (crédit d'heures bénéficiant à 17 millions de salariés) et le CIF (disponibilités financières bénéficiant à 40 000 salariés). Nul doute que si l'on affectait les 800 millions d'euros du CIF à 17 millions de salariés, chacun en aurait pour son argent avec 47 euros en poche pour se former.

Trois propositions tartes à la crème version Dr Folamour, sur la formation, j'espère que pour les autres propositions, sur lesquelles je décline toute compétence, Gallois lui l'était, compétent.

Rapport-Gallois-PACTE-POUR-LA-COMPETITIVITE-DE-L’INDUSTRI...

21/09/2012

Du bon usage du droit

Le CEDEFOP vient de publier une étude sur les clauses de dédit formation dans les 27 pays de l'Union Européenne, les 3 candidats à l'adhésion (Turquie, Croatie, Macédoine) et les 3 pays de l'AELE (Islande, Liechtenstein, Norvège). Premier constat, les clauses de dédit formation existent dans 27 des 33 pays, avec des régulations légales ou conventionnelles, preuve que la question de la charge finale de l'investissement formation a été posée quasiment partout. Deuxième constat, l'auteur du rapport adopte comme présupposé non discutable, en tout cas très peu discuté, que les clauses de dédit formation c'est bon pour tout le monde. Pour l'entreprise qui sécurise son investissement et pour le salarié qui se trouve ainsi responsabilisé et prend conscience de l'effort de l'entreprise. Après la CNIL, voici donc de nouveau un expert qui suppute l'absence de conscience du salarié, cet irresponsable qu'il convient de discipliner un peu en le menaçant d'avoir à payer lui-même sa formation pour qu'il prenne enfin en considération l'effort que fait l'entreprise. Mais surtout, le rapport répète ad nauseam que la contrainte juridique résultant de la clause de dédit formation, que l'auteur encourage à appliquer pour toutes les formations y compris de courte durée, est une excellente manière de développer la formation professionnelle et d'impliquer plus fortement le salarié. Voici donc le droit dans sa version punitive promu outil pertinent de management. Ajoutée à une clause d'exclusivité, de mobilité, de confidentialité, de non-concurrence et de rémunération largement variable, la clause de dédit-formation achèvera de corseter le salarié qui dès lors n'aura plus qu'à filer droit. Pas de doute qu'ainsi entravé, sa motivation s'en trouvera renforcée.

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Nobuyoshi Araki -  2012

Il n'est pas exclu que le droit puisse être un outil de management pertinent. Encore faudrait-il l'utiliser dans sa version positive : donner des repères clairs pour l'action, fixer des cadres, identifier les marges de manoeuvre  de chacun, donner de la légitimité à ses pratiques, s'ouvrir des espaces de liberté, identifier des solutions possibles. Mais force est de constater que c'est quasi-exlusivement pour sa capacité à sanctionner que l'on recours au droit, transformant les juristes en gestionnaires de risques et non en producteurs de valeur ajoutée. Nos gouvernants ne sont d'ailleurs pas en reste qui ont multiplié les obligations de négocier sous peine de sanctions : seniors, égalité professionnelle, pénibilité et bientôt contrats de génération, ce qui témoigne d'une certaine continuité culturelle en dépit des alternances politiques. Pour les mesures qui récompensent les comportements vertueux, on est prié d'attendre encore un peu. On terminera sur un paradoxe à propos de la clause de dédit formation : la formation est censée apporter de l'autonomie au salarié, donc de la liberté et de la responsabilité. N'est-il pas contradictoire de vouloir ficeler ceux que l'on tente de rendre plus autonomes ?

Clauses de dédit formation - CEDEFOP.pdf

A l'attention toute particulière de l'expert du CEDEFOP, une deuxième photographie d'Araki pour lui permettre de méditer sur le rapport que l'entrave peut entretenir avec le plaisir.

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21/08/2012

Mais où est le mélangeur ?

Cette année, les Rencontres photographiques d'Arles invitent...les étudiants, ou anciens étudiants de l'Ecole Nationale Supérieure de Photographie (ENSP), installée à Arles. Pour fêter les 30 ans de sa création, l'Ecole a pris quelques nouvelles des 640 étudiants qu'elle a diplômé. Et présente les travaux de quelques uns d'entre eux. Les commentaires accompagnant les photos sont assortis d'une petite fiche biographique. L'occasion de jeter un coup d'oeil sur les parcours des diplômés de l'ENSP. Majoritairement des jeunes gens qui ont fait des études artistiques (Beaux-Arts, sociologie de l'art, sciences de l'art, écoles de cinéma, d'arts plastiques, etc.) ou des sciences humaines (histoire, socio, lettres, philo,...) et il faut chercher longtemps pour trouver une ingénieure et un infirmier. Dorothée Smith, pour sa part, a fait des études de philosophie à la Sorbonne avant d'intégrer l'ENSP.

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Dorothée Smith

Je pense justement aux étudiants du Master Développement des Ressources Humaines de la Sorbonne, dont les CV sont posés sur mon bureau. Je regarde également leur parcours : droit, gestion, gestion, droit. Et Ressources Humaines au final. Pas un juriste à l'ENSP, pas un historien, philologue ou sociologue de l'art en Ressources Humaines. Pas de doute, les cloisons sont bien montées et ceux qui ont fait le boulot ont en plus planqué le mélangeur. Il serait pourtant urgent de le retrouver et que ceux qui sont chargés de recruter tous ces jeunes gens osent s'en servir.

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28/07/2012

Vous êtes formidables !

Non il ne s'agit pas de remettre au goût du jour l'émission de Pierre Bellemarre créée il y a plus de 50 ans, mais d'un simple constat : la rue, c'est le cinéma gratuit. Il suffit de prendre le temps de regarder. Et hop, cela surgit, comme ce batteur très concentré sur son affaire.

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Mais il y aussi ces cyclistes qui se préparent pour The underwear Mass, une bike ride en sous-vêtements pour affirmer l'égalité de droits en montrant la différence assumée de chacun.

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La loi à Chicago interdit en effet aux femmes de paraître seins nus en public, mais pas aux hommes. C'est, notamment, pour contester cette illégalité de droits que les manifestants se dénudent en riant et sans que cela ne provoque d'émoi particulier chez les spectateurs.

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Détour par  l'intérieur un court instant pour surprendre deux pasteurs en admiration devant un tableau de Monet. Le jardin de la maison familiale leur rappelle le temps des culottes courtes, plus courtes que leur soutane qui s'obstine à nier un corps qui quelquefois se rebelle.

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Retour à la rue pour apercevoir, tout droit sorti des jardins de l'enfance, un ours qui semble attendre sagement le passage au feu vert pour prendre la fuite.

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Les gens sont vraiment étonnants. Jusqu'à s'émerveiller de voir surgir Chilly Willy (Frisquet en français), le petit pingouin frigorifié qui apparaissait toujours après les dessins animés de Woody Woodpecker. Pas la peine de chercher plus loin pourquoi formateur c'est un beau métier.

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03/07/2012

Du bon usage de l'examen

En cette période de baccalauréat, un conseil tardif aux impétrants, qui n'en ont que faire et qui ont bien raison. La première épreuve du baccalauréat est celle du français qui, par l'ingénieuse idée d'un gestionnaire de l'éducation de nos enfants, se passe en fin de première ce qui est le plus certain moyen de désintéresser totalement les élèves de la matière pour l'année de terminale. Mais là n'est pas le propos. A cette première épreuve donc, je me présentai fort d'honnêtes résultats obtenus en cours d'année ce qui pouvait contribuer à calmer un peu mon inquiétude. Celle-ci disparut totalement lorsque l'examinatrice, qui constituait un étonnant cumul d'absences - de beauté, d'entrain, de jeunesse, d'amabilité, de présence- tira au sort le sujet qui me revenait : un commentaire du passage du Rouge et le noir dans lequel Julien Sorel fait feu, dans l'Eglise au moment de l'office, sur Mme de Rénal. Joie, bonheur et félicité ! Mon texte préféré et tant de choses à dire. La préparation fut enthousiaste et l'oral quasiment une déclamation ; tout y passa : la passion qui broie ce qu'elle vénère, le destin implacable des êtres qui n'échappent jamais à leur condition, la volonté inconsciente que ce qui paraît être folie advienne, l'amour qui vient bouleverser les calculs les plus rationnels et les plans les plus solidement établis, bref je m'enflammai.

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Mark Rothko - Noir, Rouge sur Noir sur Rouge - 1964

C'est peu de dire que mon excitation trouva peu d'écho. L'absence d'intérêt pour mon propos et l'absence de patience à mon endroit vinrent s'ajouter à toutes les autres. Le plus improbable survint lorsque l'examinatrice me demanda de compter les adverbes du texte et de lui indiquer les figures de style figurant dans le passage. L'hébétude et la stupidité s'installèrent définitivement sur mon visage. Elle me congédia en soupirant et dans un effort ultime marmonna : "Comme vous avez un bon dossier je vous mets 10/20".

De ce premier oral du baccalauréat je tirai la conclusion définitive qu'un examen est totalement dépourvu d'enjeu autre que le fait de l'obtenir. Foin de convictions, de fierté personnelle, de goût ou de reconnaissance d'un travail (et ne parlons pas d'une pensée personnelle). La capacité à reproduire très exactement l'attendu est l'horizon indépassable de ce genre d'épreuves. Je décidai donc, face à un tel néant intellectuel et moral et par esprit de réciprocité, d'une part de tricher autant que faire se peut (et cela se pût) et d'autre part de m'en tenir strictement à ce qui était demandé. Rien n'indique à ce jour que ces deux résolutions aient perdu de leur pertinence.

Note : Une pensée pour Sylvia Kristel plongée dans le coma, qui demeure comme un écho de l'Atlantide. Voir ici.

21/06/2012

En route pour la Conférence

Farid al-Din Attar est un poète perse du XIIème siècle dont l'oeuvre la plus connue est la Conférence des oiseaux. Réunis à l'instigation de La Huppe, trente oiseaux se mettent en quête de leur Roi. Le voyage sera initiatique comme il se doit et lorsqu'ils rencontreront leur souverain, ils l'entendront dire : "Le soleil de ma majesté est un miroir. Celui qui se voit dans ce miroir y voit son âme et son corps.". Autrement dit, on ne voyage jamais que vers soi-même. Novalis, dans les Disciples à Saïs, nous délivre le même message : celui qui parvient à soulever le voile de la princesse Isis ne voit que son propre visage.

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Farid al-Din Attar - La Conférence des oiseaux

La Conférence Sociale programmée les 9 et 10 juillet prochains est le second grand rendez-vous du quinquennat qui débute après le Conseil Européen de la fin juin. Elle permettra à l'Etat, ainsi qu'aux Régions dans le domaine de la formation professionnelle, de définir avec les partenaires sociaux les domaines qui relèvent de la loi et de la négociation, de définir les périmètres d'autonomie de chacun et les terrains de collaboration. Dans ce rendez-vous avec l'ensemble des partenaires, chacun a rendez-vous avec lui-même pour savoir quelle part d'autonomie il est prêt à revendiquer ou à accepter. Autonomie cela signifie liberté d'agir et donc responsabilité. Si les partenaires sociaux souhaitent véritablement que fonctionne la démocratie sociale, les voici donc à l'heure de prendre toutes leurs responsabilités. La 8ème et dernière chronique du Cycle des Carnets de campagne, écrite avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF, identifie les contours de ce que pourrait être l'autonomie des partenaires sociaux en matière de formation professionnelle et les thèmes qui pourraient être inclus dans le calendrier de travail qui sera élaboré au cours de cette Conférence.

CARNETS DE CAMPAGNE 8.pdf

31/05/2012

Le temps des enfants

Tous les enfants, ou presque, s'ennuient en classe. Mais cet ennui n'est guère pris en compte lorsqu'il s'agit de s'attaquer aux fameux rythmes scolaires. En reposant, dès sa nomination, la question de la semaine de 5 jours, Vincent Peillon a réouvert un débat récurrent. En ce domaine, une exigence devrait primer : adopter la solution la plus adaptée sur le plan pédagogique. Or, comme le rappelle Antoine Prost, la capacité d'apprentissage des enfants sur une journée est de 5 heures. Le temps utile maximal est donc de 25 heures par semaine, soit 5 x 5 heures. Mais dans le débat sur la semaine de 4 ou 5 jours, il est surtout question du temps...des parents. Temps de week-end, temps de congés, horaires de  travail, temps de garde, entre autres, sont passés au crible. Et l'on prend en compte également  l'impact éventuel d'une future réforme sur l'activité du secteur du tourisme, sur les coûts de transport, etc. Bref, il y a bien longtemps que la question clé qui est de nature pédagogique s'est effacée derrière les préoccupations des ministres, des profs, des parents, des collectivités locales, etc. Et pendant ce temps, le chahut continue.

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Carl Hertel - Classe pendant une leçon de géographie - 1874

Proposons donc à la Ministre de l'Education populaire (puisqu'il y en a une qui a aussi en charge la Jeunesse et les Sports), de venir en aide à son collègue Ministre de l'Education nationale (il y a donc deux Educations au Gouvernement, vous avez bien lu). Elle pourrait lui proposer le marché suivant : avec les associations du sport, de l'animation et de la culture, elle s'occupe des jeunes après leurs 5 heures de cours. Et le Ministre met à disposition Enseignants et locaux pour l'Education populaire des adultes, ainsi instaurée partout en France gratuitement et près des bénéficiaires, au-delà des 5 heures assurées auprès des enfants. Soit au moins 5 heures par semaine par enseignant pour les adultes. Et à ce moment là, on pourra se poser la question de l'articulation du temps des enfants avec celui des adultes.

Antoine Prost - Temps scolaire.pdf

20/05/2012

Evolution

C'est la surprise, l'étonnement qui nous oblige à évoluer.

 

Edgar Morin

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18/05/2012

En avoir ou pas

L'expérience a cette particularité de renvoyer à deux réalités opposées : faire une expérience, expérimenter, c'est tenter quelque chose de nouveau, faire ce que l'on a jamais fait, ou en tous les cas pas de cette manière. C'est innover. Avoir de l'expérience au contraire, être expérimenté, c'est avoir déjà fait et, en principe, être capable de refaire, de reproduire. L'expérience renvoie donc autant à la nouveauté qu'à la reproduction.

Le débat sur l'inexpérience du nouveau Président de la République est venu très tôt. Il ressurgit pour les ministres : 29 sur 34 n'ont jamais été ministre, pas plus que le premier d'entre eux. Voici donc majoritairement à la tête de l'Etat des gens sans expérience qui vont en faire une sacrée.

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Cathy Wilkes - More women never experience - 2004

L'expérience est-elle donc nécessaire pour être compétent ? tout dépend de quoi l'on parle. Car la compétence se construisant dans l'action, il n'y a  à proprement parler jamais de compétence sans expérience. La question est donc plutôt : quelles sont les expériences qui sont nécessaires à la compétence ? sans doute pas des expériences de stricte répétition qui, selon Confucius, sont des lanternes que l'on porte sur son dos et qui n'éclairent que le chemin parcouru. Mais toute expérience dont on a su tirer parti. Car plus que le cumul d'expériences, qui ne s'additionnent pas mécaniquement, la question de la compétence est celle de la capacité de chacun à diversifier ses expériences et à en faire des occasions d'apprendre. Et nul ne sait aujourd'hui ce que les nouveaux gouvernants ont appris au cours de leurs diverses expériences. Quant à leur compétence, elle ne s'appréciera par principe que dans l'action.

17/05/2012

Noël ?

Il est rituel lors de l'annonce des nouveaux gouvernements que chacun surveille si ses intérêts catégoriels sont bien représentés. Ne pas avoir de Ministère est souvent considéré comme un mauvais signe. En effet, disposer d'un Ministre à part entière est à la fois marque d'une reconnaissance et espérance d'une  volonté du Ministre de "faire quelque chose". Dans le premier gouvernement de J-M Ayrault, il n'y a pas de Ministre de la Formation Professionnelle. Mauvais signe ? pas forcément. La formation professionnelle devrait trouver place, sous l'autorité de Michel Sapin, au sein du Ministère du Travail, de l'Emploi et du Dialogue Social.

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Fierro-Weirich - Sapin de Noël et ornements - 2008

Ce positionnement nous délivre trois indications. L'absence d'un Ministère, et même si l'administration de la formation est incluse dans celle du travail, traduit le caractère interministériel par nature d'un domaine qui relève pour partie de l'Education, mais également de la décentralisation et surtout donc du travail. En second lieu, l'absence de Ministre délégué auprès du Ministre du Travail semble traduire un assujettissement assez étroit de la politique de formation à celle de l'emploi, comme cela était le cas au début des années 90.Pas absurde si l'on considère que la formation n'est pas une fin en soi mais un moyen au service d'objectifs qui lui sont extérieurs.

La troisième indication  tient à l'intitulé du Ministère du Travail qui est aussi celui du Dialogue Social. La formation professionnelle a souffert, ces dernières années, d'un conflit permanent de légitimité et de position entre l'Etat et les partenaires sociaux. La volonté ici affichée est de laisser une plus large place à la négociation. Cela constituerait une bonne nouvelle mais parions que les partenaires sociaux, avant de crier à Noël en mai, demanderont à voir ce que l'on a disposé pour eux au pied du sapin.

14/05/2012

Innocence de l'autruche

La remarque est assez fréquente à la fin des formations et séminaires. Elle emprunte souvent la forme ironique dans sa formulation pour mieux dissimuler le sérieux embarras. Elle revient schématiquement à ceci : "Maintenant que je sais à quoi m'en tenir, que je dispose à la fois des clés de compréhension et des outils pour construire des solutions, je suis en fait plus embêté qu'avant car il me faut agir et choisir". Autrement dit, sorti de mon état d'innocence et plongé dans la conscience des situations, me voici chassé du paradis et condamné à vivre pleinement ma condition humaine. Habile manière de tenter la culpabilisation du formateur qui persiste à vouloir faire gagner en autonomie au risque de placer chacun devant ses responsabilités. Bien essayé mais c'est raté.

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Julien Spiedler - Innocence - 2011

Car en ce domaine comme tant d'autres, l'âge d'or de l'innocence n'est souvent qu'un mythe. Et d'ailleurs, si vous êtes venus c'est que le confort n'était sans doute pas si grand, non ? Bon lundi à tous.

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Maurizio Cattelan - Sans titre - 1997

25/04/2012

Efficacité

Dire que le système de formation professionnelle continue est inefficace est devenu quasiment une évidence, ce qui évite à ceux qui reprennent en boucle cette antienne d'avoir à la justifier. Mais d'où vient ce constat sur l'efficacité ? si l'on se réfère au dernier rapport en date, celui du Sénateur Larcher, il s'ouvre sur un diagnostic pointant quatre dysfonctionnements graves : un droit à l'orientation déficient, un nombre de demandeurs d'emploi formés insuffisant, la faiblesse de la formation dans les TPE/PME et une promotion sociale qui serait en panne. Chacun de ces constats pourrait être discuté, mais surtout le rapport ne se pose à aucun moment la question des succès du système de formation professionnelle ni en termes quantitatifs (1 salarié sur 2 va en formation tous les ans par exemple) ni en termes qualitatifs (quid des centaines de milliers de salariés pour lesquels la formation accompagne un parcours, une reconversion, une évolution, etc.) et encore moins en termes d'innovation (il y aurait largement à capitaliser dans toutes les expérimentations conduites par les entreprises, les OPCA, les Conseils régionaux...). Bref, à ne vouloir regarder que ce qui pourrait aller mieux, on en oublie ce qui fonctionne très bien et on ne se pose surtout pas la question de savoir comment on peut s'appuyer sur ce qui fonctionne pour faire encore mieux. Il est vrai qu'il est plus simple d'évaluer l'efficacité d'une lotion capillaire que celle du système de formation. Est-ce une raison pour y renoncer ?

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Faute de disposer d'une grille d'évaluation des forces et faiblesses de notre système de formation professionnelle, chacun y va de son approche personnelle. Rappelons nous que pour l'Institut Montaigne l'inefficacité du dispositif était prouvée par le fait que la formation a peu d'impact sur les salaires et tout aussi peu d'impact sur l'accès à l'emploi. Tant qu'un outil de diagnostic partagé ne sera pas élaboré sur les performances du système, ses succès et ses échecs, les bases d'une véritable évolution ne seront pas posées.

Ce défaut de méthode se retrouve dans les modalités d'élaboration du droit et c'est pourquoi il serait souhaitable que l'Assemblée qui sera élue en juin prochain ne se lance pas dans une énième réforme constituée de dispositions hétéroclites réformant la gouvernance, les dispositifs, les financements, la régulation et d'autres bricoles encore, mais prenne le temps d'élaborer une loi d'orientation fixant des objectifs qui pourraient, enfin, constituer un cadre commun pour l'action. C'est la conclusion de la 4ème chronique "Carnets de campagne" réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF.

CARNETS DE CAMPAGNE 4.pdf

19/04/2012

Aprender trabajando

Il existe tout un courant d'éducateurs et d'enseignants qui voient dans le concept de compétences une énième manipulation pour assujettir les travailleurs aux exigences des entreprises. La compétence est ainsi accusée, dans le désordre, de faire intégrer les contraintes de l'organisation au salarié, de réduire la connaissance à du savoir-faire, de transformer le salarié en acteur mécanique de sa profession, de tayloriser les comportements, de tuer toute velléité de pensée critique ou encore, sans prétendre à l'exhaustivité, de constituer un obstacle permanent à la culture.

C'est oublier que la notion de compétence n'est pas née sous la plume de théoriciens du management cherchant la recette miracle de la motivation du salarié, mais des acteurs associatifs de l'insertion.

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L'approche par les compétences a permis à des organismes travaillant avec des personnes en reprise d'activité ou ayant été éloignées très longtemps du marché du travail, d'utiliser des leviers pour leur reconstruction personnelle, leur confiance et leur professionnalisme. Face à des gens qui exprimaient ne savoir rien faire ou plus simplement ne rien savoir, il s'agissait par un passage en revue méthodique de leurs activités, d'identifier les compétences développées et de conduire ce travail d'explicitation comme un travail de conscientisation et de revalorisation personnelle. L'association Retravailler a été une des premières organisations à développer ces méthodes avec des femmes en situation de retour sur le marché du travail après avoir élevé leurs enfants. Le dessin ci-dessus illustre le travail conduit auprès d'enfants mexicains travaillant dans la rue pour redémarrer un travail éducatif.

Quant au reproche de réduire la connaissance au savoir-faire, il traduit un contresens. Ce n'est pas parce que la compétence s'exprime dans l'activité qu'elle ne mobilise ni culture, ni connaissance, ni réflexion critique, ni capacité de pensée autonome. C'est confondre la finalité de la compétence et la manière dont elle se construit et s'exprime. C'est traiter tout travail comme une aliénation alors que certains emplois seulement sont de cette nature.

La véritable question n'est pas celle de la compétence, ni de sa traduction opérationnelle, elle est plutôt dans le contenu du travail : plus celui-ci est mécanique,  répétitif, dépourvu de toute variabilité et d'évolution, et moins il y aura compétence, mais également culture et connaissance. Par contre, si le travail, ou plus largement l'activité, se déploie sur un champ large, alors est offert un support pertinent pour développer ses compétences, c'est à dire son professionnalisme et soi. Si vous n'y  croyez pas, demandez aux enfants mexicains.

17/04/2012

J'y pense et puis j'oublie

Je me souviens d'une conférence d'Yves Navarre, cet homme-enfant qui ne sortit de l'enfance qu'à ses dépens, au cours de laquelle il expliqua qu'il ne prenait jamais de notes. Lui l'auteur de dizaines d'ouvrages, qui écrivait à souffle perdu, ne notait pas. Vous ne pouviez le voir assis à une table de café sortant le carnet de moleskine pour griffoner la matière du livre à venir. Au café, il partageait ses lectures mais surtout ses regards. Plutôt la vie. L'explication fût brutale : "Je ne note pas car ce que l'on note est mort". Cette phrase m'a profondément impressionné. J'y pense constamment lorsque je prends des notes que jamais je ne relis. On peut relire l'écriture, pas les notes. J'y pense lorsque je vois les participants aux formations que j'anime noircir des feuilles à l'improbable destin. Toutes ces notes pour quoi faire ?

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Arthur Tress - Mask

Parfois je tente un "pas la peine de noter, tout est dans le support", je n'ose pas le "arrêtez de noter, les notes c'est mort, laissez vivre votre pensée". On ne réfléchit pas en notant, au contraire on pose devant la pensée les barrières des mots figés alors qu'il aurait fallu préserver le mouvement. Mais je vois souvent cette fébrilité qui guide l'écriture : la peur d'oublier. Comme si l'on ne pouvait faire confiance à la sélectivité de la mémoire, comme si l'on avait oublié cette phrase d'Yves Navarre : "L'oubli est parfois aussi important que la mémoire". Arrêtez de noter vous vous souviendrez mieux de ce qu'il est important de ne pas oublier.

16/04/2012

Miroir déformant

Le Centre d'Etudes et de Recherches sur l'Emploi et les Qualifications (CEREQ) vient de publier un bilan du DIF qui a la tonalité d'un constat de décès (voir ici). Selon les auteurs de l'étude, seuls 6 % des salariés ont utilisé leur DIF en 2009 et les chiffres 2010 seraient comparables. Un fiasco donc, loin des espoirs que la mesure avait fait naître. Passons sur l'approche scientifique qui consiste à comparer des chiffres et des espoirs et venons en au fond. Tout d'abord, le chiffre de 6 % est rapporté à l'ensemble des salariés. Or, moins d'un salarié sur deux suit une formation chaque année. Ce qui pourrait permettre de présenter les résultats quantitatifs en considérant que 15 % environ des salariés qui vont en formation le font dans le cadre du DIF. Par ailleurs, en 2010 on devrait approcher des 30 % d'entreprises dans lesquelles le DIF est utilisé. L'étude minore ce résultat en estimant que le nombre d'entreprises concernées semble stagner. Les auteurs ont-ils vu le tassement de l'activité de formation des entreprises en 2009 et 2010 ? Le CEREQ pointe également une faible durée moyenne de formation, égale à 23 heures. Mais les deux tiers des actions suvies dans le cadre du plan de formation ont une durée inférieure.Bref, une vision tellement réductrice et si peu mise en perspective qu'elle agit largement comme un miroir déformant.

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Et surtout, vouloir comprendre l'impact d'un dispositif de formation en se basant sur l'exploitation des déclarations fiscales des entreprises, c'est considérer que tout chiffre est une réalité et qu'il suffit de la commenter pour formuler une vérité. En réalité, il faudrait partir du fait que plus de 600 000 salariés se sont formés dans le cadre du DIF et aller voir en quoi ces 15 % de salariés utilisant le dispositif pour accéder à la formation ont contribué, ou pas, à modifier les pratiques de formation. Il faudrait regarder les parcours mis en place par les entreprises, les catalogues, les actions innovantes et se poser quelques questions non réductibles à la statistique. Il faudrait également considérer que le DIF n'est pas forcément utile partout : dans nombre d'entreprises l'accès à la formation est suffisamment garanti pour que le DIF ne soit pas utilisé et il faudrait cesser de considérer que tout salarié a besoin de formation de même que la formation n'est pas le seul ni même le principal moyen de développer ses compétences. Bref, évitons de faire un bilan d'un dispositif en le comparant à ce qu'il n'est pas et essayons d'aller voir de plus près à quoi il ressemble.

13/04/2012

Retrouver le temps

Fugit tempus : le temps qui passe et nous échappe est comme le vent d'autan, un ennemi que l'on ne peut saisir et qui met nos nerfs à rudes épreuves. La seule vraie question philosophique serait d'ailleurs celle du rapport au temps : son infinitude dans l'absolu et sa finitude pour l'être humain. Qui maîtrise le rapport au temps, sait jouer avec ses variations et ne s'offusque de son insaisissabilité, sait sans doute ce qu'est la sérénité. Vénus et Cupidon peuvent alors se retrouver sans craindre le temps et ses méfaits.

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Bronzino - Vénus, Cupidon et le Temps

Dans le flot des rapports et propositions sur la formation professionnelle, il est question d'argent, beaucoup, de dispositifs, souvent, de gouvernance, régulièrement, et de divers autres sujets. Mais il n'est quasiment jamais question du temps. Le temps, c'est pourtant la condition de base de la formation. Le temps de l'apprentissage, le temps de l'appropriation, le temps de la transformation de soi qui accompagne toute véritable formation. C'est peut être en partant du temps que l'on a quelques chances de construire des systèmes solides et durables. La chronique écrite pour l'AEF avec Jean-Marie Luttringer s'efforce d'indiquer pourquoi c'est en prenant le temps de réfléchir au temps que l'on avancera le plus vite.

CARNETS DE CAMPAGNE 3 - LE TEMPS DE FORMATION.pdf

11/04/2012

Temps nouveaux

Parfois, question de moments ou de lieux, le temps n'est plus tout à fait le temps. La continuité linéaire et horlogère qui rythme notre vie a des hoquets. Le temps ne passe plus, ou plus de la même manière, ou alors il vous projette dans un temps que vous avez l'impression d'avoir toujours connu, un temps permanent qui n'est pas l'éternité mais beaucoup mieux que cela. Ou alors au contraire vous est offert un temps inconnu, dans lequel vous vous installez spontanément. Et que vous voudriez voire durer longtemps. Un temps du Sud. Un autre temps.

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Ce temps qui n'appartient à rien de connu, il arrive aux magistrats aussi de le rencontrer. Dans une affaire jugée le 22 mars dernier, une salariée s'était vue proposer avant le début de son contrat de travail une formation de deux semaines lui permettant de se familiariser avec les méthodes de l'entreprise. Son contrat ayant été prématurément rompu, elle demanda la requalification de cette période de formation en période de salariat. Refus des juges, ce temps de formation ne s'est pas traduit par la production d'un temps travaillé pour l'employeur, il ne pouvait donc recevoir la qualification de temps de travail. Le seul fait d'être dans une formation payée par votre futur  employeur ne fait pas de vous un salarié par anticipation.

Au-delà du cas d'espèce, cet arrêt est une contribution des juges à un processus qui semble s'accélérer : le découplement du temps de travail et du temps de formation et la création d'un temps de formation constituant une qualification à part entière et dont le régime serait distinct de celui du travail. Le chemin entamé avec le développement des multiples possibilités de se former en dehors du temps de travail s'ouvre donc à de nouveaux horizons, ceux des temps nouveaux.

Cour de cassation - 22 mars 2012.pdf

10/04/2012

Une bonne surprise !

Pour le lecteur intéressé par le sujet, le rapport Larcher constituera une bonne surprise. Certes, il y a matière à dire sur les 26 propositions qui sont formulées en synthèse, mais chacune d'entre elles a le mérite de partir de l'existant pour tenter de l'améliorer et ne cède ni à la facilité, ni à la démagogie. Du coup, cette bonne surprise s'en avère être une mauvaise pour le commanditaire, dont l'enthousiasme transparaît dans l'accueil fait au rapport (ici) comme nous l'annoncions vendredi dernier.

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Henri Rousseau - Mauvaise surprise

Dans le détail des propositions, relevons tout de même en premier commentaire une incohérence. Le rapport n'instruit pas, comme il le lui était demandé, le procès des corps intermédiaires et au contraire plaide pour un renforcement du rôle des OPCA à qui il est suggéré de confier la collecte de la taxe d'apprentissage. De même, est proposée une négociation du plan de formation à partir de 250 salariés. Mais ces propositions qui, avec d'autres, visent à conforter le dialogue social, s'accompagnent d'une première proposition qui ne va guère dans ce sens. Le rapport Larcher propose de supprimer l'obligation légale de financement du plan de formation pour les entreprises de 10 salariés et plus, ce qui serait une bonne chose. Mais la même proposition vise également à interdire toute obligation conventionnelle qui pourrait s'y substituer. Une telle interdiction n'aurait guère de sens et reviendrait à dénier à une branche professionnelle de pouvoir mutualiser des fonds si elle estime que le secteur en a besoin. Par ailleurs, cela déséquilibrerait considérablement les OPCA que l'on veut par ailleurs conforter et cela réduirait les moyens nécessaires pour la formation, particulièrement dans les PME avec le risque que la formation dans bien des entreprises se limite aux formations obligatoires. Enfin, cela mettrait à bas des années de politiques mutualisées dans des secteurs particulièrement dynamiques sur le champ de la formation. Si l'on compare cette mesure à la tonalité générale du rapport, on peine à trouver sa cohérence. Peut être une petite poussée libérale pour que la mauvaise surprise ne le soit pas trop ? ou une conviction personnelle mal étayée ? quoi qu'il en soit, et malgré l'intérêt qu'il peu présenter, on sait déjà que la probabilité que ce rapport serve de base à une réforme est faible : si le Président est reconduit, ce n'est pas sur ces bases qu'il réformera, et s'il ne l'est pas, ce n'est certainement pas sur la base de rapports commandés par lui que la réforme se fera. Alors un coup pour rien ? c'est peut être là que se niche en réalité la bonne surprise.

Rapport Larcher.pdf

04/04/2012

Cogénération

Les professionnels qui travaillent avec l'Education nationale sur la rénovation des licences professionnelles constatent dépités la faiblesse du niveau moyens des étudiants en langues. Ils en concluent que cela constitue un frein à l'embauche pour les grandes entreprises, mais que c'est moins grave pour les PME puisque 70 % ne sont pas tournées vers l'exportation. Cette appréciation traduit une vision totalement linéaire et instrumentale de la compétence : l'activité serait première et la compétence utilisable ou non dans l'activité. C'est oublier que la compétence modèle l'activité et que si tous les étudiants étaient bilingues, sans doute que beaucoup plus de 30 % des PME seraient exportatrices. Si l'activité nécessite la compétence, la compétence rend possible une activité qui n'existait pas. Plutôt que de manière linéaire, la relation emploi-compétence devrait être envisagée comme une cogénération.

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Picasso - Peintre et son modèle

Si Picasso, ce grand prédateur, a autant peint sur le thème du peintre et son modèle, s'il a autant travaillé sur les toiles d'Ingres, de Velazquez, de Cézanne, c'est parce qu'il savait bien, lui le Minotaure, que l'on se nourrit des autres et que c'est dans cette dynamique qui vous transforme en même temps qu'elle vous permet d'agir que s'ouvre la possibilité de l'innovation.

L'activité, l'emploi, ne sont pas des données préconstruites à l'intérieur desquelles s'insère l'individu, ils sont modelés par les personnes qui les occupent et leur évolution est en partie déterminée par les compétences non requises a priori mais qui vont venir s'exercer malgré tout. L'emploi et les compétences ? un système de cogénération.

29/03/2012

Penser comme un poulet

L'anecdote est rapportée par Gaston Bachelard. Peu inspiré et sans doute bougon, il répond en maugréant à son professeur de philosophie qui l'interpelle : "moi, je ne crois que ce que je vois". Réplique immédiate du professeur : "Vous pensez donc comme un poulet".

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Yves Klein - Anthropométie

Yves Klein, le peintre de l'immatériel c'est à dire des idées, du vide et des traces, aimait beaucoup Bachelard. Ce qui lui a permis de se souvenir qu'en donnant à voir, il fallait aussi qu'il donne à penser. Et c'est ainsi que l'art contemporain est devenu une manière de poser des questions plutôt que l'art d'apporter des réponses comme il le fût pendant des siècles. Et Yves Klein se souvenait également que les faits, s'ils sont indispensables à la connaissance, sont insuffisants. Ce sont la réflexion et l'imagination qui permettent d'échapper à la pensée du poulet.

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