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08/06/2015

Fin d'année

Mais si, vous savez bien. Pour les étudiants la fin de l'année c'est juste après Roland-Garros et les examens pour lesquels on bachote alors que les premières journées d'été sont là. Le Master DRH de la Sorbonne n'échappe pas à la règle et vit sa semaine d'évaluation. Trouvant le mode d'examen le plus couramment pratiqué dans l'éducation parfaitement stupide, et encourageant tous les ans les candidats à tricher par tous les moyens possibles au baccalauréat, il me faut mettre mes actes en cohérence avec mes principes. J'ai donc prévenu les étudiants en début d'année : l'évaluation se fait selon le contrôle continu et l'ensemble des travaux produits dans l'année. L'examen final ne peut qu'ajouter des points mais ce n'est pas lui qui mesure le niveau atteint. Premier point. 

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Bachotage pour les étudiants en contrôle continu

Deuxième point, toute documentation est évidemment autorisée pendant l'examen puisqu'il s'agit moins de s'encombrer de connaissances rapidement obsolètes que d'être capable de mobiliser rapidement de multiples ressources diversifiées. Et d'être évalué en situation professionnelle. 

Troisième point, l'évaluation ne peut consister à reproduire des exercices déjà réalisés tel un musicien répétant ses gammes. Elle doit permettre de vérifier la capacité des étudiants à proposer, argumenter, défendre, imaginer. 

Et enfin, l'indispensable posture réflexive sans laquelle il n'est pas de passage de la connaissance à la compétence. 

Si le coeur vous en dit :

POLITIQUE ET PRATIQUES DE FORMATION.pdf

16/06/2014

Ministre de la plainte

Il aurait pu se rendre sur les quais de Gare plutôt que de rester devant son Ministère, Benoît Hamon. Il aurait pu chuchoter à l'oreille des lycéennes que la grève était l'occasion de voler du temps au temps, lesquels lycéens plutôt qu'un délai supplémentaire auraient du demander l'abrogation du bac et organiser des pique-niques géants dans toutes les gares en protestant contre la stupidité du bachotage et du contrôle de conformité qu'est (et qu'à toujours été) le baccalauréat. Ils auraient même pu discuter avec les syndicalistes les lycéens, cela aurait utilement complété leurs périodes de stages en entreprise. Et ils auraient même pu prendre le temps de se dire qu'en train on peut aller partout ou presque, comme avec la philosophie et plus généralement comme avec l'éducation. 

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Paul Delvaux - Gare forestière

Il aurait pu nous parler Benoît Hamon, quitte à parler, des sujets du jour. On aurait aimé savoir si le Ministre de l'Education vit pour être heureux, s'il est heureux d'être ministre et si le bonheur des élèves et étudiants lui importe plus ou moins que celui des enseignants. On aurait aimé qu'il nous dise, sur le thème de l'artiste et l'oeuvre, s'il est homme occupant une fonction ou fonction faite homme. Mais non, le Ministre ne s'est rendu sur aucun quai de Gare, il n'a parlé ni de bonheur ni de philosophie. Il a juste déclaré que personne n'était en retard et qu'il allait porter plainte contre la jeune fille qui avait tweeté les sujets. On a pensé un instant qu'il était ministre de l'intérieur, et puis on s'est rappelé que l'on a les combats que l'on se donne. 

03/07/2012

Du bon usage de l'examen

En cette période de baccalauréat, un conseil tardif aux impétrants, qui n'en ont que faire et qui ont bien raison. La première épreuve du baccalauréat est celle du français qui, par l'ingénieuse idée d'un gestionnaire de l'éducation de nos enfants, se passe en fin de première ce qui est le plus certain moyen de désintéresser totalement les élèves de la matière pour l'année de terminale. Mais là n'est pas le propos. A cette première épreuve donc, je me présentai fort d'honnêtes résultats obtenus en cours d'année ce qui pouvait contribuer à calmer un peu mon inquiétude. Celle-ci disparut totalement lorsque l'examinatrice, qui constituait un étonnant cumul d'absences - de beauté, d'entrain, de jeunesse, d'amabilité, de présence- tira au sort le sujet qui me revenait : un commentaire du passage du Rouge et le noir dans lequel Julien Sorel fait feu, dans l'Eglise au moment de l'office, sur Mme de Rénal. Joie, bonheur et félicité ! Mon texte préféré et tant de choses à dire. La préparation fut enthousiaste et l'oral quasiment une déclamation ; tout y passa : la passion qui broie ce qu'elle vénère, le destin implacable des êtres qui n'échappent jamais à leur condition, la volonté inconsciente que ce qui paraît être folie advienne, l'amour qui vient bouleverser les calculs les plus rationnels et les plans les plus solidement établis, bref je m'enflammai.

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Mark Rothko - Noir, Rouge sur Noir sur Rouge - 1964

C'est peu de dire que mon excitation trouva peu d'écho. L'absence d'intérêt pour mon propos et l'absence de patience à mon endroit vinrent s'ajouter à toutes les autres. Le plus improbable survint lorsque l'examinatrice me demanda de compter les adverbes du texte et de lui indiquer les figures de style figurant dans le passage. L'hébétude et la stupidité s'installèrent définitivement sur mon visage. Elle me congédia en soupirant et dans un effort ultime marmonna : "Comme vous avez un bon dossier je vous mets 10/20".

De ce premier oral du baccalauréat je tirai la conclusion définitive qu'un examen est totalement dépourvu d'enjeu autre que le fait de l'obtenir. Foin de convictions, de fierté personnelle, de goût ou de reconnaissance d'un travail (et ne parlons pas d'une pensée personnelle). La capacité à reproduire très exactement l'attendu est l'horizon indépassable de ce genre d'épreuves. Je décidai donc, face à un tel néant intellectuel et moral et par esprit de réciprocité, d'une part de tricher autant que faire se peut (et cela se pût) et d'autre part de m'en tenir strictement à ce qui était demandé. Rien n'indique à ce jour que ces deux résolutions aient perdu de leur pertinence.

Note : Une pensée pour Sylvia Kristel plongée dans le coma, qui demeure comme un écho de l'Atlantide. Voir ici.

11/08/2011

A quoi sert l'art ?

C'est un classique des sujets de philosophie au bac, et des thématiques récurrentes qui permettent de combler les pages d'été des journaux lorsque l'actualité s'assoupit, à moins que ce ne soient les journalistes. La question se décline avec de multiples variantes : l'art est-il utile ? que vaut une oeuvre d'art ? faut-il subventionner l'art ? l'art pour quoi faire ? etc.

Au lecteur alangui par le soleil d'août, nous éviterons les longues dissertations au profit d'une démonstration par l'image. Si vous regardez ça :

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Vous risquez fort de devenir ça :

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Et si la démonstration ne vous suffit pas, vous pouvez comme dans tout bonne copie bachoteuse, ajouter l'indispensable citation de Nietzsche : "Il faut danser sa vie". La suite est dans le mouvement.

16/06/2011

Et surtout, trichez !

Injonction de jour de bac : Trichez ! ne lésinez pas sur les moyens, connectez vos portables, utilisez vos oreillettes, allumez vos I-pad, sortez vos micro-fiches, pianotez sur vos calculettes, allez bouquiner dans les toilettes, déroulez vos papyrus, utilisez les technologies, les ruses potaches, la coopération subsersive, bref résistez en trichant.

Mais résister à quoi au juste ? à ces examens qui ne sollicitent que votre mémoire, votre capacité de régurgitation, votre conformisme reproductif, votre capacité à réciter par écrit, votre absence de créativité, votre formatage par le corrigé type et l'obéissance aux canons de l'examen. Vos examinateurs sont des sots ? ne tombez pas dans le panneau, soyez moins stupides qu'eux, trichez. Et obtenez votre examen haut la main et sans scrupule car la capacité d'adaptation, l'inventivité et la résistance à l'inutile méritent récompense. Dans ces conditions, comme l'avait compris Marcel Carné, les tricheurs, c'est l'avenir.

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L'Education nationale aura réussi son rôle d'éducateur le jour où tous les documents seront autorisés aux examens. Où l'accès à l'information sera libre. Et où on demandera aux impétrants de démontrer leur capacité à gérer cette information, à l'utiliser pour des productions qui font sens, à faire preuve d'engagement personnel, de capacités de choix, d'argumentation et de mise en relation de compétences pluridisciplinaires. Où les méthodes de travail n'apprendront pas à reproduire mais à travailler, où la compétence ne sera pas considérée comme un avatar de la connaissance mais comme sa sublimation. C'est pas demain ? et non, demain c'est le jour où il faut tricher.