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26/04/2013

Du courage

Du courage il en faudra aux salariés de Florange, condamnés après l’arrêt définitif des hauts-fourneaux à voir se détériorer lentement mais irrémédiablement un outil de travail qui est aussi le totem de la vallée et une part de l’identité professionnelle mais aussi personnelle. Pour ceux qui souhaiteraient voir de près ce courage, on ne peut que recommander l’excellent film d’Anne Gintzburger « La promesse faite à Florange ».

Et à propos de promesse, ce fût jour d’enterrement à Florange, comme 4 ans plus tôt à Gandrange.

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Du courage, il en aurait fallu aux Présidents de la République non pas pour tenir des promesses intenables, mais pour ne pas les faire et pour dire publiquement les limites de leur action et cesser de faire croire que la volonté peut tout, que la politique se réduit à la question du chef et de l’homme providentiel et que le destin d’un pays dépend du caractère d’un homme. Du courage il en faudrait pour qu’un Président accepte de dire, voilà ce qui relève de mon pouvoir et voilà ce sur quoi je ne peux agir. Du courage il en faudrait pour assumer, comme l’avait fait Lionel Jospin de dire que l’Etat ne peut pas tout. Et du courage il en faudrait également pour que, si l’Etat ne peut pas tout, il aille au moins au bout de ce qu’il peut. 

22/04/2013

Inversion

Le Sénat a adopté, samedi 20 avril, la loi de sécurisation de l'emploi, après un esclandre des communistes qui ont quitté la séance pour protester contre le raccourcissement des débats. Le groupe communiste dénonce d'ailleurs, comme la CGT et FO qui n'ont pas signé l'ANI du 11 janvier 2013 à l'origine du projet de loi, un texte qui comporte plus de régressions que de droits nouveaux pour les salariés. On pourrait penser, en effet, qu'un texte signé par toutes les organisations patronales mais une partie seulement des organisations syndicales, un texte sur lequel l'UMP s'abstient en période d'opposition féroce et qui voit la majorité de gauche s'affronter et se diviser, n'est pas franchement une loi qui penche en faveur des droits des salariés. D'ailleurs, si opposition et majorité avaient été inversées, l'UMP aurait voté ce texte comme un seul homme en lui reconaissant mille vertues, alors que le PS se serait abstenu en regrettant que le texte n'aille pas plus loin et soit un faux-semblant pour les salariés. Ainsi vont les vicissitudes du petit monde politique.

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Man Ray - Positif, négatif

Oui mais voilà, tout ceci sent trop la réaction superficielle, de circonstance, de positionnement politique. Et du coup, que penser de ce texte ? Peu de droits supplémentaires pour les salariés, et qui restent à construire, contre des reculs immédiats et bien plus graves ? c'est l'avis du PC, de certains aussi au PS, de la CGT et de FO. Pourtant, lorsque l'on présente les dispositions du texte à des entreprises, que l'on explique la généralisation de la couverture santé et de la prévoyance, la refonte des obligations d'information des représentants du personnel et la mise en place de la base de données unique, les négociations nouvelles obligatoires, le renforcement des droits du comité d'entreprise, l'obligation de négocier davantage avec les organisations syndicales, la validation des PSE par les syndicats ou l'administration, la soumission des accords de mobilité ou de compétitivité emploi à des accords majoritaires, on voit les mines s'allonger et l'atmosphère n'est pas à la satisfaction d'avoir arraché de nouvelles flexibilités et sécurité pour l'entreprise. Il paraît même que lorsque les représentants patronaux expliquent le texte à leur base, ils se font engueuler. Signe que tout n'est certainement pas blanc ou noir dans ces dispositions dont on ne sait toujours pas si elles auront vraiment un impact sur l'emploi, ni surtout s'il sera positif ou négatif, ces deux représentations d'une même réalité comme a su nous le montrer Man Ray.

10/04/2013

Ils n'en veulent plus

Il en reste plein qui en veulent. La majorité peut être. Mais il y en a de plus en plus qui n'en veulent plus. Il n'en veut plus ce dirigeant qui demande à reprendre une fonction d'expertise, elle n'en veut plus cette directrice administrative qui devient consultante, elle n'en veut plus cette responsable ressources humaines qui reprend un poste d'adjointe, ils n'en veulent plus tous ces managers épuisés. Epuisés par quoi et qui ne veulent plus de quoi ? manager. Ils n'ont pas peur des objectifs, de la pression économique, de leur travail, de la technique, des challenges, des défis. Ils sont laminés par la relation manageriale, par le rapport à autrui, par les discussions permanentes, par le concours Lépine de l'autre manière de faire qui est toujours meilleure que celle proposée, par la contestation érigée en mode de relation, par le fait de passer pour le grand Satan représentant de la direction, par l'écoute des problèmes personnels déballés à toute occasion et que l'on se verra reprocher de prendre en compte, ou pas, selon les cas, bref les fatigués de l'encadrement, les mortifiés de l'animation d'équipe, les écoeurés de la concertation, les dézingués du collectif. Pour eux, l'enfer c'est les autres.

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Photo : Sarahfisthole

Certes, on pourrait trouver la réciproque : les révoltés de l'arbitraire managerial, les excédés du petit chef vraiment petit, les lassés de l'incompétent qui les dirige, les désespérés de l'imbécile qui nie leur intelligence, les blasés d'être managés par des promoteurs d'eux-mêmes avant que d'être des promoteurs de l'activité, et tous les démotivés, retirés, absents, découragés, déboussolés ou désorientés par leur hiérarchie. Pour eux aussi l'enfer c'est les autres. Au total, jamais la relation à l'autre n'aura été si problématique, conflictuelle, compliquée, ingérable. Le problème, c'est qu'elle demeure aussi une source de satisfaction, car si l'enfer c'est les autres, le paradis aussi.

26/02/2013

Le retour

Le retour a ses ambivalences. Il peut être madeleine de Proust, voyage vers les odeurs, les senteurs, les lieux, les couleurs qui nous ont marqués. Il peut être l'émotion de retrouver ceux que l'on ne devrait jamais quitter. Il peut vous saisir par tous les sens. Mais il y a des retours moins fringands, qui sonnent comme des défaites, de piteux replis sur des cases de départ dont on est plus sûr du tout qu'elles en connaîtront un nouveau. J'ai souvenir d'un pot de départ en l'honneur d'une responsable formation qui avait temporairement remplacé la titulaire, lors de son congé maternité. Le discours qu fit ce jour là le DRH signifiait clairement à la remplacée que ce que l'on appréciat le plus chez elle, c'était ses absences et que l'on regretterait bien fort la remplaçante. Le DRH attribua sans doute aux suites de la maternité, qui perturbe l'équilibre féminin  c'est bien connu, les quelques larmes qu'il aperçut peut être sur les joues de la remplacée, ce qui n'est pas certain tant il n'avait d'yeux que pour la remplaçante.

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Georges Mazilu - Le retour du fils prodigue

Dans l'affaire jugée le 12 février dernier (Cass soc, 12 février 2013, n° 11627.689), le retour des salariés n'avait rien d'une madeleine. L'entreprise avait en effet pour pratique de les convoquer systématiquement à un entretien de retour au cours duquel leur était expliqué les désastreuses conséquences de l'absence en terme d'organisation et surtout de désorganisation. Cet entretien concernant également les absences pour maladie, un salarié considéra qu'il était discriminatoire. A raison selon les juges. Ni le rappel moral, ni la culpabilisation ne sont admissibles dès lors que, comme nous l'avons constaté hier, le salarié ne peut être tenu pour responsable de son absence en l'absence de toute décision de sa part. L'entretien de recadrage, sensibilisation dans le langage de l'entreprise, constitue donc une discrimination. Nouvelle preuve que le droit et la morale font rarement bon ménage.

25/02/2013

Allo docteur ?

Le Gouvernement souhaite supprimer la journée de carence dans la prise en charge des arrêts maladies des fonctionnaires. On saisit mal, en effet, pourquoi des personnes qui cotisent pour garantir leur revenu en cas de maladie devraient en être privés le premier jour. Par souci d'égalité avec le privé, rétorque-t-on le plus souvent, puisqu'un salarié est soumis à une carence de trois jours. Sauf que si l'entreprise a souscrit une prévoyance, ces trois jours sont souvent ramenés à zéro. Résultat, comme souvent, la ligne de partage n'est pas entre public et privé mais entre salariés des grandes entreprises et fonctionnaires et salariés des petites entreprises.

Au-delà de l'égalité, on a pu entendre des commentaires sur les abus des arrêts maladies et voir ressurgir la notion de "faux-arrêts maladie". C'est ici qu'il faut à la fois faire un peu de droit et appeller le docteur.

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Van gogh - Le docteur Gachet

Car en droit, seul celui qui a la capacité de décider est coupable. Or, en matière d'arrêt maladie, le salarié ne décide rien. Seul le médecin peut prendre la décision d'arrêter un salarié pour cause de maladie. Du point de vue du salarié, la notion de "faux arrêt maladie" est donc absurde. Peut être l'est-elle moins du point de vue du toubib. Inutile donc de refaire le procès des salariés et ici, en l'occurence, des fonctionnaires. Si l'on considère qu'il y a des arrêts de complaisance, il faut appeler les docteurs.

21/02/2013

En souvenir des travailleurs

Je ne parle pas aux cons, ça les instruits ! Arnaud Montebourg aurait du se souvenir de cette phrase de Michel Audiard avant de prendre sa plume pour répondre au patron de Goodyear. Pourquoi argumenter en réponse à un courrier dans lequel les ouvriers sont des feignants, les syndicalistes des fous et les politiques des incapables ? dans lequel seul l'entrepreneur fort de la valeur ajoutée produite, ne l'oublions pas, par quelques milliers de travailleurs, débite d'arrogantes certitudes ? lorsque le dialogue est impossible, il faut user d'autres moyens.

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Montebourg aurait pu se contenter d'envoyer à ce patron qui tenait tant à nous démontrer que la lutte des classes n'est pas morte,  ce tract clandestin espagnol des années Franco, qui nous rappelle que l'émancipation ouvrière reste un projet d'actualité, et que la vraie vie est au Sud. Pour le coup, c'eût été bien suffisant.

12/02/2013

Prométhéen !

C'est peu de dire que la démission du Pape est un moment de pur bonheur. Non pas parce que Benoît XVI quitte la fonction, on ne peut souhaiter le départ d'un Pape qui écrit aussi bien sur l'eros, le corps et l'âme (c'est ici), mais parce que cet acte est une bouquet d'ambivalences et de subtilités. Tout d'abord, il est amusant de percevoir l'embarras de ceux qui pensent que le Pape doit se soumettre à Dieu et aliène sa personne à la fonction et en même temps font leur le dogme de l'infaillibilité pontificale. Pour eux, le geste est une contradiction insoluble. Ensuite, on peut sourire également de l'humilité contenue dans le geste, celui qui renonce aux honneurs et se retire, mais aussi le formidable orgueil dont il est porteur : j'ai regardé Dieu dans les yeux, et j'ai choisi de reprendre ma liberté !

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Heinrich Fueger - Prométhée offrant le feu aux hommes

Et s'agissant de liberté, il est désormais impossible  à quiconque d'expliquer que sa démission a été refusée. On pourra lui répondre en rigolant que même Dieu ne peut rien devant celui qui veut vraiment démissionner. Mais le plus important est sans doute la démonstration que la volonté peut faire son lit de la nature, ou de ce qui se prétend tel. Toute la tradition, sinon la règle canonique, s'opposeait à la démission du Pape. Et pourtant, son geste, celui qui met la liberté de l'homme avant  l'ordre établi, s'impose. S'il avait voulu fournir un argument en faveur du mariage entre personne de même sexe, le Pape n'aurait pu trouver meilleure démonstration. Benoît XVI démissionnant, c'est Prométhée qui offre le feu aux hommes et sa bénédiction à tous les affranchis. Amen !

11/02/2013

Rompez !

C'est écrit comme un publi-reportage, mais ce n'en est pas un. Le Monde, sous la plume de Louise Couvelaire, nous raconte comment les grandes écoles, et les entreprises, envoient leurs plus brillants étudiants ou managers passer quelques jours, parfois une année, dans des unités militaires, pour apprendre véritablement le management. Rien ne manque à l'hagiographie, pas même le DRH réticent qui résiste longtemps mais qui, une fois qu'il y a goûté, enverrait bien toute l'entreprise sous l'uniforme. Surtout que l'armée mène à tout : on peut apprendre à commander, à faire adhérer, à donner du sens, à prendre des décisions et on découvre le collectif. Après être passés entre les mains des militaires, les intellectuels individualistes dépourvus de la moindre capacité d'action osent enfin se prendre en main. Que serait-ce si nous étions en Chine !

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Mais à aucun moment l'article n'aborde les trois supercheries qui gouvernent tout cela. La première est de laisser croire, comme le dit un colonel, que le management est la forme civile du commandement. A ce titre, les relations sociales constituent la forme civile de la guerre et la démission la forme civile de l'insoumission. La seconde est de ne jamais mettre en doute que des méthodes qui ont leur logique dans le contexte particulier du monde clos qu'est l'armée, dont toute l'organisation rappelons-le est tournée vers la capacité à faire la guerre, soient transposables dans le cadre d'une entreprise. Qu'il ne soit pas fait de différence entre un militaire et un salarié du point de vue du management laisse pantois. Mais le pire c'est que des grandes écoles confient à l'armée ce qu'elles se résignent à ne pouvoir enseigner. Plutôt que de découvrir le monde dans le cadre d'une année de césure, on s'enfermera dans l'uniforme et les casernes pour apprendre à faire travailler les autres. Peut être l'auteure de l'article aurait-elle pu interroger des (jeunes) retraités de l'armée qui après 20 ans passés sous l'uniforme ont tant de mal à s'intégrer au monde de l'entreprise et à y exercer une fonction de manager. Ce sera pour une autre fois (peut-être).

Les managers enfilent des rangers.pdf

06/02/2013

Intérimaire permanent

Vous prenez une photo, puis une autre, puis un dessin, puis une photo, puis des dizaines d'autres, vous coupez, vous déchirez, vous morcellez, puis vous assemblez, morceau après morceau, élément par élément, et au final le résultat, pour peu que vous soyez dans un bon jour, vous paraît s'être imposé à vous. Chaque chose est à sa place, le disparate trouve sa cohérence, les éléments épars, sans lien apparent, ont recomposé une figure qui a soudain l'allure de l'évidence.

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Ainsi en va-t-il du collage, où l'hétéroclite soudain trouve sens. Ainsi en ira-t-il peut être demain du travail intérimaire, lorsque les sociétés d'intérim pourront recruter les intérimaires en CDI et les affecter à des missions successives en leur garantissant un emploi permanent. Bonne nouvelle pour tous ? Pas forcément, les intérimaires enchaînant les missions avec indemnités de précarité et de congés payés (soit 20 % du salaire) pourraient considérer qu'ils sont perdants. Mais tout de même, pour beaucoup une embauche durable, un statut social mieux établi et une situation qui se rapproche du droit commun. Si le principe est acté, reste à négocier les modalités, c'est ce qui devrait être fait à partir du 1er mars prochain. Souhaitons que les partenaires sociaux aient le souci de préserver le sens d'un emploi composé d'une juxtaposition de missions, ce qui sera le lot des futurs intérimaires permanents.

01/02/2013

De l'exécution et de ses avantages

Il existe peut être des responsables ressources humaines naïfs, tout est possible, mais ce n'est clairement pas la majorité. D'ailleurs on vieillit souvent vite dans ce métier qui use. Il existe peut être des responsables ressources humaines qui pensent que lorsque la direction a décidé qu'ils avaient fait leur temps, il y avait toujours matière à discuter. Tout est possible. Mais la grande majorité des responsables ressources humaines savent que lorsque c'est terminé, il n'y a plus à discuter, sauf des conditions de départ. Ils ont en général pratiqué cela eux-mêmes, avec professionnalisme. Ils pourraient donc partir sans heurt, connaissant la règle du jeu. Et bien non, manifestement ce n'est pas suffisant et l'exécution est nécessaire.

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Yue Minjun - L'exécution

Elle peut prendre des formes différentes : le bureau fermé et le matériel inaccessible, un rendez-vous hâtif, la signification de la décision et au revoir. Ou bien le sempiternel : "Bon vous savez comment cela se passe, pour vous c'est terminé, rentrez chez vous, aucun mail, aucun contact avec vos collaborateurs". Cela pour s'en tenir aux formes les plus convenables. Pourquoi s'acharner ainsi, avec ceux qui sont les mieux placés pour accepter la loi qu'ils ont fait régner ? Par mesquinerie pour briser l'individu avant son départ ? Pour lancer un avertissement à son successeur ? Pour montrer aux salariés que cela peut concerner n'importe qui, et donc tout le monde ? à titre d'exemple ? pourquoi vouer aux gémonies celle ou celui que hier encore on traitait quasiment comme un ami ? Par goût du pouvoir et plaisir de ses abus ? ou tout simplement pour l'exemplarité de la peine ? Tant pis pour celui qui part, en quelque sorte, il aura joué son rôle auprès de ceux qui restent. Une manière de rester en fonction jusqu'au bout après tout.

NB : les peintures de Yue Minjun sont actuellement visibles à la Fondation Cartier.

24/01/2013

PUB !

Il a souvent la tête d'une souris qui a trouvé un fromage (voir ci-dessous). D'ailleurs, dans son dernier bouquin, il y a des petits rongeurs partout qui y vont de leurs commentaires avisés. On sent que le consultant est parfois agacé par ceux qui font un peu trop les malins et que les souris sont les bienvenues pour rappeler à chacun qu'il n'a pas le monopole de la science infuse. Par contre, notre auteur et ami, lui, a quasiment le monopole de la compréhension des systèmes de classification et de leur utilisation en vue de la rétribution du travail. Et dans son dernier ouvrage, publié par les excellentes éditions Liaisons sociales, il traite à la fois de la rémunération du travail et de la rémunération de la performance. Car l'on gagne paraît-il, et ceux qui en doutent liront l'ouvrage avec profit, à nettement distinguer les deux.

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Bien sur, il y a quelques années a été publié un bouquin au titre alléchant : "Le salaire ne fait pas tout". Mais avec son faux air de Tintin et Tournesol à la fois, l'ami Denimal, puisque c'est de lui qu'il s'agit, ne perd pas de vue que si le salaire ne fait pas tout, il est tout de même l'essentiel. Et il vous offre donc l'essentiel sur l'essentiel. Une sorte de quintessence. Ce serait dommage de rater ça non ? Et puis refuseriez vous de faire plaisir à un homme aussi souriant et avenant ? bon, alors courrez y vite !

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Philippe Denimal himself

14/01/2013

Comme au Rugby

Alors, un bon accord ce texte du 11 janvier 2013 ? Un accord au rabais? un accord perdant-perdant ? une ruine pour les entreprises et une réduction des droits des salariés ? un accord sous pression signé par des organisations qui ne représentent qu'elles mêmes ? tous ces commentaires sont venus qualifier le résultat de la négociation entamée en septembre 2012 et conclue vendredi dernier. Il ne sera, dans un premier temps, question que de la négociation elle-même pour voir de quoi il retourne, les dispositions de l'accord faisant l'objet de commentaires complémentaires dans les jours qui suivront. Et si l'on s'en tient au déroulement de la négociation, on peut constater qu'elle emprunta pas mal au rugby : il y eut de la confrontation, brutale, des provocations, de la percussion, mais comme le rugby est un sport de contact, la négociation est une pratique de combat.

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Il y eût aussi les coups de gueule dans les vestiaires : la partie patronale s'est parlé près de la figure et les organisations syndicales ont préféré ne plus se parler à un moment donné pour ne pas dire les môts qui fâchent. Et dans les moments de tension, l'arbitre est intervenu, sans que cela ne perturbe trop le match, pour rappeler les règles. Et au final, aucun des acteurs n'a vu le même match et tout le monde raconte la sienne.

Tout ceci est plutôt bon signe et montre qu'au moins, il y a véritablement eu négociation. Reste à savoir comment va se tenir la troisième mi-temps et...à attendre les prochains matchs, parce que si c'était une belle partie, ce n'était pas encore la finale.

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11/01/2013

Flexibilité

Le sport est plein d'enseignements, mais si les managers apprécient souvent les conférences des grands entraîneurs, il est rare que les méthodes sportives trouvent une traduction concrète dans les pratiques professionnelles non sportives. Dans l'attente de savoir si l'accord sur la flexisécurité de l'emploi sera signé ou non, et par qui si jamais il l'était, on peut se tourner vers le sport pour en savoir un peu plus sur la flexibilité.

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N'importe quel gymnaste pourrait répondre à la question : la flexibilité c'est, comme souvent, un long apprentissage, un travail régulier et constant, qui permet de développer et de porter à ses limites la souplesse des muscles, des chairs et des tendons, une fois que l'on a compris que pour les os cela ne marchait pas. En d'autres termes, il s'agit par un travail long et minutieux, de déterminer le possible, de tenter de le porter toujours un peu plus loin tout en ayant conscience qu'au-delà d'un certain point, cela casse et que si l'on brûle les étapes, cela casse aussi. On en concluera aisément que la flexibilité cela ne se décrète pas, qu'il ne sert à rien de prendre pour modèle ceux qui la pratiquent depuis de longues années car leurs muscles et tendons ne sont pas dans le même état que les notres et que si l'on a oublié tout cela, gare aux fractures. On pourra peut être vérifier lundi, si accord il y a, le degré de culture sportive des négociateurs.

18/12/2012

Des syndicats plus représentatifs que les partis

Dans l'indifférence générale, ou presque, se sont tenues du 28 novembre au 12 décembre les élections professionnelles dans les Très Petites Entreprises (TPE, moins de onze salariés). Plus de 4,6 millions de salariés ont eu la possibilité de voter par internet ou par correspondance pour l'organisation syndicale de leur choix. Ce vote doit permettre de mesurer l'audience des organisations syndicales dans l'ensemble des entreprises et s'ajoutera aux résultats des élections professionnelles qui se tiennent dans les entreprises de 11 salariés et plus pour élire des délégués du personnel ou, à partir de 50 salariés, un comité d'entreprise. Avant que ne soient proclamés les résultats, on sait déjà que la participation devrait au final s'établir à environ 11 %. Soit un chiffre très faible, qui ressemble à un fiasco annoncé.

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Il ne manquera pas de journalistes ou responsables politiques pour faire remarquer, en tentant de prendre l'air de le regretter sans tromper personne, que ce taux de participation ne fait que refléter l'absence de représentativité des syndicats dans notre pays. Ce qui, au moins de la part d'un politique, sera un commentaire déplacé. Que l'on en juge : l'UMP revendique 300 000 adhérents et le PS 200 000. La CGT en compte 500 000 , la CFDT 400 000 et F0 300 000. Il y a bien plus de militants syndicaux que de militants politiques. Et si l'on regarde les élections, le taux de participation aux élections professionnelles est de 65 % en moyenne, soit un score qui n'est devancé que par l'élection présidentielle mais qui est au-dessus de la moyenne de la participation aux législatives, aux municipales, aux européennes ou aux cantonnales. Soit moins d'adhérents pour un parti, et moins de votants, que pour un syndicat. Mais les politiques persistent à dénoncer la non-représentativité des organisations syndicales, fidèlement relayés par des journalistes qui, paraît-il, ne s'intéressent qu'aux faits. A tous, encore un effort pour sortir du déni de réalité.

10/12/2012

1000 et une familles

De 1996 à 2000, Uwe Ommer a parcouru le monde avec son appareil photo pour photographier des familles. Il en est résulté un livre et une exposition itinérante qui, à son tour, parcours le monde. Ici à Lisbonne en 2010.

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Si Uwe Ommer refaisait son tour du monde, et particulièrement en Europe, peut être trouverait-il des familles encore plus diversifiées. Parfois réduites, parfois nombreuses, avec des parents qui ne sont pas forcément les pères et mères, mais après tout, il y a bien longtemps Serge Lama chantait déjà que le père pour l'enfant c'est celui qui est là. La loi vient d'en prendre acte. A compter du 1er janvier 2013, le congé paternité, renommé congé paternité et d'accueil de l'enfant, sera ouvert au conjoint de la mère, à la personne liée à elle par un Pacs ou vivant maritalement avec elle. Le congé paternité sera donc accessible aux femmes ou aux hommes qui ne sont pas le père. Repères brouillés diront certains, les leurs sans doute, ceux de l'enfant, c'est une autre affaire.

25/11/2012

Le sens du vent

Le Figaro publie un sondage démontrant que les salariés sont prêts à faire des concesssions sur les salaires et le temps de travail pour préserver leur emploi. Il faut bien soutenir les demandes du FMI, de l'OCDE, de l'Institut Montaigne, de l'Institut de l'Entreprise, des agences de notation et de quelques autres qui mettent invariablement sur le compte de salariés coûtant trop cher et bénéficiant de trop de congés  le défaut de compétitivité de la France. Et puis, comme ce sont les positions des organisations d'employeurs dans la négociation sur la sécurisation de l'emploi, il faut bien donner un  coup de main aux discussions pour éviter qu'elles ne s'enlisent.

On attend tout de même avec intérêt le jour où le Figaro sondera les actionnaires pour savoir s'ils sont prêts à renoncer à leurs dividendes pour préserver l'emploi ou s'ils sont prêts à investir de manière durable et non à faire du capital-risque sur des portefeuilles d'action. Mais il y a aussi peu de chances que ces questions soient un jour posées, qu'il y en a que ces girouettes fournissent le sens du vent.

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Ce n'est pas le vent qui tourne, c'est la girouette, aimait dire Edgar Faure. Si vous souhaitez que la girouette ne tourne pas, il suffit de lui donner une forme d'avion et de la fixer définitivement au bout d'un mât. Ainsi,vous pouvez avoir l'illusion que le vent souffle toujours dans le même sens. Et même quand ce n'est pas le cas, en ayant ainsi pris vos précautions vous pourrez croire qu'il souffle dans le bon sens, c'est à dire le vôtre. C'est un peu pareil avec le Figaro et ses sondages : le vent souffle toujours dans la même direction et le salarié l'a souvent de face ! Bon lundi à tous.

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21/11/2012

Triple portion

C'est un proverbe espagnol : "A qui refuse le bouillon, donnes-en triple portion". La purge, la purge, la purge auraient déclamé les médecins de Molière. C'est le sentiment que l'on peut avoir après la décision de l'agence Moody's de déclasser la France et d'abaisser sa notation, lui retirant ainsi le Graal du triple A. Dietmar Hornung, analyste en chef pour la France chez Moody's, explique, notamment, la décision de l'agence par la rigidité du marché du travail. Appelé à préciser ce qu'il entend par rigidité, il nous livre le diagnostic suivant : "Je note que la France affiche un degré très élevé de règlements juridiques et de contrats à durée indéterminés qui rendent difficiles l'adaptation des emplois aux cycles économiques. Les incertitudes juridiques liées aux licenciements élèvent en outre le coût implicite du travail et n'incitent pas à embaucher". Si la notation doit se baser sur des faits, ici nous sommes en pleine idéologie. Une triple ration de réalité ne serait pas de trop pour Mr Hornung.

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Steve Kaufman - Triple pop criying girl (d'après Roy Lichtenstein)

Sans revenir sur les 800 000 licenciements annuels (soit 5 % des salariés licenciés  chaque année), on pourrait aussi parler de l'emploi temporaire. Près de 5 % de l'emploi salarié est de l'intérim et 10 % des CDD. Ces deux formes d'emploi représentent 80 % des embauches. Ce qui signifie qu'entre les licenciements, les ruptures conventionnelles et l'emploi précaire, plus de 20 % des salariés connaissent une fin de contrat de travail chaque année, hors retraite et démission. Et l'on ne parle pas de la sous-traitance qui constitue, dans l'industrie et le BTP, un traditionnel coussin amortisseur en période de crise.
Dans ces conditions, parler de rigidités du marché du travail en France d'une manière aussi générale, c'est au mieux de l'incompétence, au pire un parti pris idéologique. La troisième option, serait que ce soit les deux à la fois, ce qui n'est pas exclu. Une triple erreur en quelque sorte.

18/11/2012

Un texte en forme de vol de bicyclette

En 1986, Yvon Gattaz, Président du CNPF, réclamait la suppression de l'autorisation administrative de licenciement. Cette seule mesure, en facilitant le licenciement, encouragerait l'emploi au point qu'il pourrait en résulter la création de 300 à 400 000 emplois. On vota la suppression de l'autorisation, mais à défaut de pouvoir voter les embauches, elles restèrent au rang des promesses qui n'engagent que ceux qui y croient.

Plus de 25 ans plus tard, les positions des organisations d'employeurs n'ont guère évolué, comme le montre le texte remis aux syndicats lors de la négociation sur la sécurisation de l'emploi. Les principales mesures du texte ? faciliter les licenciements, limiter leur coût, réduire les possibilités de recours judiciaire pour les salariés et, surprise, réintroduire l'homologation des plans sociaux par l'administration, dont on s'aperçoit après coup que cette mesure sécurisait peut être davantage l'entreprise que les salariés en empêchant la saisine du juge judiciaire. Certes, la négociation n'est pas achevée, mais trouver un accord équilibré paraît aujourd'hui aussi improbable que l'équilibre de cette bicyclette, photographiée par Manuel Alvarez Bravo dont on peut voir les poétiques et émouvantes photographies au Jeu de Paume.

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Alors que la négociation sur la sécurisation de l'emploi se voulait audacieuse, novatrice et débouchant sur des mesures historiques, situation économique et sociale oblige, force est de constater que les vieilles recettes sont toujours à l'oeuvre et qu'il est très difficile de dépasser les formules magiques qui sonnent comme des slogans : facilitons le licenciement, on encouragera l'embauche. Que jamais la réalité de cette affirmation n'ait été démontrée importe peu, elle n'est manifestement pas discutable. Et il importe encore moins de constater que plus de 800 000 licenciements sont réalisés tous les ans, dont les 3/4 ne donnent pas lieu à contentieux, et de continuer d'affirmer que licencier en France est très difficile pour ne pas dire impossible.

A partir de là, personne ne devrait s'étonner de voir une bicyclette se promener le long des fils électriques.

Proposition patronale Securation de l'emploi.pdf

16/11/2012

Franchir le seuil

Les obligations sociales des entreprises sont assujetties à des effets de seuil. L'employeur de moins de 10 salariés n'a pas les mêmes obligations que celui qui en compte plus de 50 ou plus de 300 ou plus de 1000 pour ne retenir que les principaux seuils sociaux. Dans le cadre de la négociation sur la sécurisation de l'emploi, les organisations patronales souhaitent réduire les effets liés aux seuils. Elles proposent pour cela de différer l'application des obligations nouvelles et de réduire ces obligations en dessous de certains seuils. C'est reproduire en pire ce que l'on souhaite éviter, car si les obligations sont réduites, elles inciteront d'autant moins à franchir le seuil, serait-ce avec un effet différé.

Il est pourtant vrai que les seuils ont de quoi faire peur, notamment celui de 50 salariés qui est, de loin, celui qui est le plus coûteux pour l’entreprise, dans des proportions qui peuvent s’avérer exorbitantes. Ainsi, le passage à plus de 50 salariés entraîne la mise en place d’un Comité d’entreprise (0,2 % masse salariale pour le fonctionnement, plus temps de réunion, plus temps de délégation, plus le financement des activités sociales…), mais également de la participation obligatoire, soit  le reversement d’une partie du résultat aux salariés, la possibilité d’avoir jusqu’à 5 organisations syndicales, la mise en place d’un CHSCT, le recours à un PSE en cas de licenciement économique, etc.  A dissuader effectivement le mieux disposé des chefs d’entreprise, et ce qui aboutit à une surreprésentation des entreprises de moins de 50 salariés et au final à priver les salariés de certains droits. Au final, personne n'est véritablement gagnant.

Le seuil du jardin.jpg


Mais voyons les choses autrement. Plutôt que de remonter les seuils ou différencier encore plus les obligations, ne serait-il pas possible de les lisser en instaurant soit des règles communes à toutes les entreprises (par exemple la participation dès le premier salarié), des instances de représentation simplifiées pour toutes les entreprises et des  moyens proportionnels à la taille (par exemple des crédits d’heures augmentant proportionnellement au nombre de salariés plutôt que fixes à partir de seuils…). S'il est effectivement urgent de mettre en chantier la question des seuils sociaux, il est peut être encore plus important de faire simple et intelligent, c’est une tentation à laquelle ni les négociateurs ni le législateur ne devraient normalement résister, même si on constate qu'ils persistent souvent à faire l'inverse.

Et pour tous ceux qui trouveraient ces histoires de seuil un peu arides, vous pouvez avec le week-end qui s'annonce franchir le seuil du jardin avec André Hardellet, la réalité prendra tout de suite une autre dimension.

15/11/2012

Encore des lyonnaises !

On se souvient de Florence, Céline et Sandrine, les trois juges du TGI de Lyon qui ont condamné la Caisse d'Epargne pour un système de management générateur de stress (voir ici). Voici maintenant un nouveau trio lyonnais, ou plutôt un nouveau trio de lyonnaises, magistrates à la Cour d'Appel de Lyon : Nicole, Hélène et Marie-Claude. Les prénoms laissent deviner une moyenne d'âge un peu supérieure aux précédentes, mais quant aux décisions, ça décoiffe tout autant. Pour la première fois, une faute inexcusable est reconnue à l'encontre d'une entreprise de travaux publics en raison du décès, suite à un cancer, d'un salarié chargé de la pose d'enrobés (bitume). La société a, un peu maladroitement, essayé de se défendre par un discours assez général sur les conditions de travail dans les travaux publics et le fait que finalement pour poser du bitume il faut nécessairement l'approcher et être exposé au soleil puisque ces activités se réalisent essentiellement pendant les périodes d'été. Le trio de magistrate n'a guère entendu ces arguments, renvoyant l'entreprise à ses obligations.

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Lucas Cranach - Les trois Grâces

Voilà dix ans que toute entreprise doit élaborer un document unique d'évaluation des risques professionnels. Lequel consiste en un diagnostic exhaustif des risques auxquels sont exposés les salariés du fait de leur activité. Le point clé du jugement est le refus de l'entreprise de produire ce document en justice, ce que les trois magistrates ont traduit comme une absence totale de travail d'évaluation, d'où l'inexorable faute inexcusable. Les motivations des juges constituent à ce titre un rouleau compresseur qui n'a rien à envier à ceux qui aplanissent les enrobés. Voilà des années que j'attends, et ces décisions ne font qu'attiser mon impatience, qu'un sociologue se penche sur les évolutions de jurisprudence depuis que les femmes ont remplacé les hommes sous les robes noires. Après la justice de classe, on découvrirait peut être une justice de sexe.

CA Lyon - 13 novembre 2012.pdf