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11/02/2013

Rompez !

C'est écrit comme un publi-reportage, mais ce n'en est pas un. Le Monde, sous la plume de Louise Couvelaire, nous raconte comment les grandes écoles, et les entreprises, envoient leurs plus brillants étudiants ou managers passer quelques jours, parfois une année, dans des unités militaires, pour apprendre véritablement le management. Rien ne manque à l'hagiographie, pas même le DRH réticent qui résiste longtemps mais qui, une fois qu'il y a goûté, enverrait bien toute l'entreprise sous l'uniforme. Surtout que l'armée mène à tout : on peut apprendre à commander, à faire adhérer, à donner du sens, à prendre des décisions et on découvre le collectif. Après être passés entre les mains des militaires, les intellectuels individualistes dépourvus de la moindre capacité d'action osent enfin se prendre en main. Que serait-ce si nous étions en Chine !

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Mais à aucun moment l'article n'aborde les trois supercheries qui gouvernent tout cela. La première est de laisser croire, comme le dit un colonel, que le management est la forme civile du commandement. A ce titre, les relations sociales constituent la forme civile de la guerre et la démission la forme civile de l'insoumission. La seconde est de ne jamais mettre en doute que des méthodes qui ont leur logique dans le contexte particulier du monde clos qu'est l'armée, dont toute l'organisation rappelons-le est tournée vers la capacité à faire la guerre, soient transposables dans le cadre d'une entreprise. Qu'il ne soit pas fait de différence entre un militaire et un salarié du point de vue du management laisse pantois. Mais le pire c'est que des grandes écoles confient à l'armée ce qu'elles se résignent à ne pouvoir enseigner. Plutôt que de découvrir le monde dans le cadre d'une année de césure, on s'enfermera dans l'uniforme et les casernes pour apprendre à faire travailler les autres. Peut être l'auteure de l'article aurait-elle pu interroger des (jeunes) retraités de l'armée qui après 20 ans passés sous l'uniforme ont tant de mal à s'intégrer au monde de l'entreprise et à y exercer une fonction de manager. Ce sera pour une autre fois (peut-être).

Les managers enfilent des rangers.pdf

18/09/2012

Solitude du manager

Je ne me souviens plus pourquoi j'avais été invité à participer à ce comité de direction. Ni de son objet. Je me souviens juste qu'après avoir bouclé l'ordre du jour, la conversation avait porté sur divers sujets, jusqu'à cet échange, dont j'ai gardé un souvenir très précis :

"- il y a quand même une population dont il va falloir s'occuper...

- (silence des autres)....

- ah bon, laquelle ? les seniors, les femmes...

- non, notre middle management. Pour l'encadrement supérieur on a fait ce qu'il fallait. Mais pour l'encadrement intermédiaire, on leur demande beaucoup, de plus en plus, ce sont eux qui font tourner la boutique et on ne peut pas dire qu'ils aient été particulièrement bien traités...

- oui, tu as raison, il va falloir s'en occuper...

- c'est vrai, ça tiendra pas toujours dans ces conditions...

- bon, sur ces bonnes paroles messieurs il est temps d'aller dîner."

Sans grande surprise, de cette population dont il fallait s'occuper, on ne s'occupa guère.

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Je rencontre parfois des managers qui n'y vont plus. Ils ont donné, ils sont soit épuisés, soit lassés, soit blasés, soit devenu cyniques, soit désinvestis. Mais je rencontre encore plus souvent des managers qui ont de l'énergie, qui sont prêt à faire face aux conflits d'intérêts, aux conflits de personnes, aux situations inexticables ou même à l'inconnu. Des managers qui veulent bien traverser la jungle avec le pagne pour tout vêtement et un canif pour la survie. Des managers qui aiment ce qu'ils font, qui prennent sur eux-même et qui sont prêt à faire bouger quelques montagnes. Et tout cela bute sur une condition, celle qui est la clé de tout : le fait que le DG, le Codir, sortent de leur logique propre et de leur niveau d'action pour venir appuyer, conforter et soutenir leur encadrement. Des managers qui ont porté si loin la loyauté qu'ils n'en attendent pas moins de leurs dirigegants. Des managers qui font fi des différences de statut et n'aspirent qu'à une reconnaissance de leur action et d'eux-même à travers elle. Des managers très sensibles, sous le détachement feint, aux marques d'attention et de personnalisation. Et des managers qui souvent attendent le geste qui jamais ne viendra, comme ne pas les désavouer lorsqu'ils tiennent des positions de principe, même si du coup le dialogue social à leur niveau s'en trouvera tendu. Mais on est plus souvent paralysé par la peur que par l'ennemi. Et ça, les managers ils ont quand même bien du mal à l'accepter. C'est pourquoi il leur arrive d'éprouver pleinement un lourd sentiment de solitude. Pour l'alléger, ils peuvent, et nous aussi, se plonger dans les aventures du détective gastronome Pépé Carvalho écrites par le catalan Manuel Vasquez Montalban.

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13/09/2012

Créativité juridique

Pour les adultes, comme pour  les jeunes élèves, lorsque l'on fait un travail technique, parfois ingrat, le meilleur moyen de le valider est de le faire fonctionner à la fois sur les sujets qui s'y rapportent, mais également sur d'autres, sans rapport apparent, pris au fil de l'actualité. Et dans le fil en ce moment il y a le mariage, ou plutôt l'union civile à trois qui a été reconnue au Brésil. Pour travailler sur le fait qu'il n'y a pas de vide juridique et que le droit a eu une réponse pour chaque situation, c'est un bon point de départ. Car il se trouve, ce n'est pas grave bien évidemment, que les journalistes ne lisent pas ce blog. Où alors ils se contentent de regarder les photos. Du coup on peut entendre et lire que cette union a été possible grâce à un vide juridique : la loi ne précisant pas que le mariage est réservé à deux personnes, il est donc possible pour trois. Un quatuor aurait d'ailleurs déjà saisi la notaire qui a enregistré la première union.

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Nouvelles unions, nouveaux bébés ?

En réalité, la Constitution brésilienne reconnaît comme famille "une union stable entre un homme et une femme". Avec une définition semblable, la Cour de cassation en France a estimé que le mariage était réservé aux couples hétérosexuels, respectant la lettre du texte. L'esprit du carnaval a du souffler sur la Cour suprême brésilienne car les magistrats cariocas ont estimé eux que cette définition de la famille avait valeur d'exemple mais n'était pas exhaustive. Ce n'est donc pas un vide juridique, dont on répète qu'il n'existe pas (voir ici ou ) qui a permis l'union du trio mais la créativité des juges. Car voilà la seconde démonstration que nous fournit cet exemple : à partir des mêmes textes, les juges français et brésiliens ont pu prendre des décisions totalement opposées. Preuve, s'il en fallait, que le juge peut décider ce qu'il veut et construire le raisonnement adéquat ensuite. Apparemment les managers ont apprécié, à l'exception du juriste de l'entreprise qui se montra plus réservé. Un petit tour au Brésil peut être ?

27/05/2011

Bonheur des autres

Mais non nous ne vivons pas dans un monde de brutes. Il y a des milliers de biens intentionnés qui ne pensent qu'au bonheur...des autres. Par exemple, le Responsable formation qui va dépenser une énergie considérable pour que les salariés puissent partir en formation,  utiliser leur DIF et s'intéresser à leurs compétences. Ou alors le Responsable ressources humaines qui va rendre service au manager en lui mettant à disposition une information complète sur la formation et un guide très détaillé à propos du DIF. Mais aussi les OPCA qui inondent les entreprises d'information sur les dispositisf de formation pour qu'elles soient mieux informées. Est-ce que le salarié a le désir de formation ? est-ce que le manager est disponible pour partager la technicité du responsable formation ? est-ce que l'entreprise a vraiment besoin de ces dispositifs que l'OPCA voudrait lui faire découvrir ? pas la peine de poser la question, la réponse est présupposée et la parole des intéressés, qui ne savent pas ce qui est bon pour eux, superflue. Et après, vous vous étonnez que les salariés, les managers et les entreprises vous envoient paître en vous demandant de les laisser vivre !

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Matisse - Le bonheur de vivre

Voilà des enquêtes qui vous disent que le DIF est un échec parce que 10 % seulement des salariés l'utilisent. Comme si 100 % était un objectif réaliste. Voilà des responsables ressources humaines qui se plaignent du peu d'intérêt des managers pour les ressources humaines. Et de leur propre intérêt pour le travail des managers, ils en sont satisfaits ?

On connait la formule : "Gardez moi de mes amis, mes ennemis je m'en charge". Et si certains veulent faire le bonheur d'autrui, on leur conseille humblement de commencer par demander à ces autruis où ils mettent leur bonheur.

DIF ENTREPRISES ET CARRIERES.pdf

08/07/2010

Manager

Qu'est-ce que manager, qu'est-ce qu'un manager ? les définitions ne manquent sans doute pas plus que les avis sur la question. Mais puisque la question m'était posée, il fallait répondre : "Celui qui créé les conditions les plus favorables pour que ses objectifs puissent être atteints, en tenant compte des personnes qui vont agir mais sans en faire le point de départ". Soit le modèle du manager jardinier. Celui qui a la préoccupation écologique de l'action. En d'autres termes, celui qui pense que l'action humaine, comme celle de tout organisme vivant, est probabiliste et non mécanique. A lui donc de créer les meilleures probabilités pour que les fleurs puissent éclore et le jardin s'épanouir en forme de jardin des délices.

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Jérome Bosch - Le jardin des délices (détail)
Et puis je me suis demandé si cette définition du manager n'était pas un peu trop "pédagogique". Si ce manager ne ressemblait pas au formateur qui créé les conditions pour que l'apprentissage se réalise en tenant compte des personnes mais sans en faire le point de départ. En fait non. La définition peut être la même, ce sont les moyens qui diffèrent. Là où le formateur mobilisera des méthodes pédagogiques diversifiées, le manager utilisera des moyens de nature différente : prise de décision, reconnaissance, soutien, recadrage, accompagnement, etc. Toutes ses interventions auront pour objectif de créer les conditions pour que l'action opère dans le sens souhaité. Et bien évidemment, pour rester dans le domaine du management et ne pas basculer dans la manipulation, les objectifs seront au mieux partagés et au moins identifiés. A défaut, point de délices.

26/11/2008

On ne produit jamais seul

Qui n'a entendu un dirigeant dire : "j'ai développé l'entreprise pendant mon mandat" ou un manager déclarer : "j'ai fait progresser le chiffre d'affaires du service de 20 %". Qui est je ? ici non pas un autre, comme le dirait Rimbaud, mais plutôt les autres.

Lorsque Rodin sculpte ses grands marbres, il a d'abord pétri et modelé une ébauche de plâtre puis laissé divers sculpteurs s'attaquer au bloc de marbre. Il donnera la touche finale. Au fil des ans il cessera d'ailleurs d'élaborer des modèles pour se consacrer davantage au suivi et à la guidance du travail des sculpteurs de son atelier.

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Rodin - Le baiser - 1890

Qui est l'auteur de l'oeuvre : le marteau et le ciseau, les sculpteurs de l'atelier, Rodin, les modèles, ceux dont Rodin s'inspira dont Camille Claudel ? renonçons à la personnalisation excessive et considérons que toute oeuvre, et tout résultat, sont collectifs sans que cela n'enlève rien à la gloire de Rodin ni à la grace du baiser.

06/05/2008

Les managers français ont mauvaise presse

 C’est dans le numéro du mois de mai de Liaisons Sociales magazine (voir l'article en pièce jointe ci-dessous) : plusieurs enquêtes témoignent d’un désaveu de la culture manageriale à la française. Trop éloigné du terrain, peu enclin à la remise en cause car définitivement légitimé par sa position hiérarchique, son diplôme ou son salaire, peu rompu au travail de groupe, peu partageur d’une information qu’il considère comme une des clés de son pouvoir, pas vraiment support de ses collaborateurs…le manager français paraît empêtré dans un ensemble de lacunes rédhibitoire. On pourrait se demander si les travaux qui conduisent à ces conclusions ne sont pas excessivement négatifs et quelque peu caricaturaux.
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Max Ernst - Ubu Imperator - 1923

On ne peut toutefois s’empêcher de les mettre en relation avec une étude conduite il y a quelques années qui indiquait qu’en France 75 % des dirigeants des 200 entreprises les plus importantes sont issus des grandes écoles (Polytechnique, Mines, HEC, ENA…). En Allemagne, 75 % des dirigeants des 200 entreprises les plus importantes sont issus de la promotion interne. On conviendra que le mode de management ne peut être tout à fait le même.

Les gros défauts du management à la française.doc