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03/03/2016

S comme....SECURISATION

Si tu es prêt à sacrifier un peu de liberté pour te sentir en sécurité,

tu ne mérites ni l’une ni l’autre (Thomas Jefferson)

La formule « parcours professionnels sécurisés » est un oxymore, comme l’est la flexisécurité dont elle procède. Moins littéraire que l’obscure clarté des étoiles de Corneille, le silence assourdissant de Camus ou les splendeurs invisibles de Rimbaud, la formule n’en conserve pas moins sa contradiction. Sauf à ne pouvoir la concevoir que linéaire et ascendante sur le modèle de la «carrière», la notion de parcours inclut nécessairement la possibilité de prendre des orientations différentes, d’avoir à faire des choix, éventuellement même de prendre de fausses routes et ne peut donc exclure totalement la possibilité de se perdre.

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Apprentissage des choix rapides

Par nature, le parcours ne renvoie pas à la sécurité mais davantage à la liberté et aux risques inhérents. Sécuriser les parcours cela reviendrait-il à le programmer entièrement puis à le confier à un GPS de l’emploi et de la formation qui nous en indiquerait toutes les étapes ? Cette vision-là n’est ni réaliste ni opératoire. Le parcours professionnel est une construction permanente qui évolue au gré des évolutions de l’individu lui-même et de son environnement. Une arabesque, une ligne droite, une ligne brisée, ou tout à la fois. Le principal n’est pas là, il est dans le plaisir de jouer avec le taureau.

11/01/2013

Flexibilité

Le sport est plein d'enseignements, mais si les managers apprécient souvent les conférences des grands entraîneurs, il est rare que les méthodes sportives trouvent une traduction concrète dans les pratiques professionnelles non sportives. Dans l'attente de savoir si l'accord sur la flexisécurité de l'emploi sera signé ou non, et par qui si jamais il l'était, on peut se tourner vers le sport pour en savoir un peu plus sur la flexibilité.

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N'importe quel gymnaste pourrait répondre à la question : la flexibilité c'est, comme souvent, un long apprentissage, un travail régulier et constant, qui permet de développer et de porter à ses limites la souplesse des muscles, des chairs et des tendons, une fois que l'on a compris que pour les os cela ne marchait pas. En d'autres termes, il s'agit par un travail long et minutieux, de déterminer le possible, de tenter de le porter toujours un peu plus loin tout en ayant conscience qu'au-delà d'un certain point, cela casse et que si l'on brûle les étapes, cela casse aussi. On en concluera aisément que la flexibilité cela ne se décrète pas, qu'il ne sert à rien de prendre pour modèle ceux qui la pratiquent depuis de longues années car leurs muscles et tendons ne sont pas dans le même état que les notres et que si l'on a oublié tout cela, gare aux fractures. On pourra peut être vérifier lundi, si accord il y a, le degré de culture sportive des négociateurs.

17/12/2012

Courageux découragement

Il y en a eu un. Mais comme c'était le premier, il pouvait s'agir d'un cas isolé. Et puis il y en eût un second. Et un troisième. Et quelques autres encore. Pas un raz de marée. Pas un mouvement profond. Non, juste une somme de cas individuels qui sont peut être le signe que quelque chose se passe. Quels cas ? des salariés dont le statut, la rémunération et les fonctions sont plutôt enviables. Et qui décident de quitter leur entreprise alors que personne ne les y pousse, encourage ou contraint. Ils n'ont pas d'autre job en vue. Ils sont conscients de la difficulté du marché du travail, et pourtant ils choisissent de partir, non sans appréhension mais avec une pleine détermination. 

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Félix Labisse - Société de découragement - 1969

Pourquoi partir ? parce qu'il n'est plus possible de cautionner ce que propose l'organisation. Parce que les logiques de fonctionnement qui se mettent en place conduisent inévitablement à perdre le sens de l'activité, parce que la gouvernance créé les conditions de la perte d'efficacité au nom de la rationnalité, parce que le contrôle central, les reporting sans fin, les indicateurs dignes du gossplan et l'absence totale de considération de l'individu deviennent insupportables. Parce qu'il ne s'agit pas de se poser en  contestataire d'un système mais de mettre dans la balance ses valeurs personnelles et de dire "plus pour moi". Parce que l'on refuse de faire semblant encore et encore et que l'on ne souhaite pas s'installer dans un placard, fût-il pourvu de quelques dorures.  Parce qu'au final, et paradoxalement, on se sent mieux sans la sécurité, même si tout cela n'est pas toujours évident à vivre, et que l'on prend plaisir à la liberté. Et constater que même en période de difficultsé, avec les risques que cela comporte, il y a encore beaucoup de choix qui sont faits en faveur de la liberté contre la sécurité, c'est une sacrée bonne nouvelle.

09/11/2012

Un parcours à étapes

Certes rien ne presse, vous avez jusqu'au 17 mars, mais ne manquez surtout pas l'exposition consacrée à Van Gogh et Hiroshige à la Pinacothèque. Les peintures de Van Gogh sont, comme toujours, flamboyantes et inspirées, mais en l'occurence elles constituent une excellente mise en bouche avant d'admirer les estampes d'Hiroshige. Peintre du voyage, Hiroshige a notamment peint les 50 étapes du parcours qui relie Tokyo (Edo à l'époque) à Kyoto. Le parcours comme un carnet de voyage, une carte routière, une oeuvre d'art, un temps de contemplation où le chemin est plus important que l'arrivée. Car un voyage a une unité, sa vérité propre, inscrite dans le temps de sa réalisation. Et celui qui parvient au terme du voyage n'est jamais exactement celui qui fit le premier pas.

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Dans les estampes d'Hiroshige, chaque étape ne prend sens qu'en ce qu'elle est un moment du parcours. Et c'est en embrassant l'ensemble de la marche que l'on peut prendre conscience des transformations que le cheminement opère sur le marcheur.

Si les partenaires sociaux et les pouvoirs publics souhaitent que les parcours professionnels, et leur sécurisation, ne restent pas que des mots, alors il devient urgent de donner au parcours une réalité tangible, d'en reconnaître l'unité et de ne pas se contenter d'en gérer les étapes. C'est dans son ensemble que le parcours doit pouvoir être appréhendé, géré, financé, accompagné. Tel est le sens de la chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF qui invite les partenaires sociaux à franchir le Rubicon à l'occasion des négociations en cours sur la sécurisation de l'emploi. Parce que là, il y a urgence.

À LA RECHERCHE DU PARCOURS.pdf

12/04/2011

Sécurité prioritaire ?

La sécurité, sous toutes ses formes, est à l'ordre du jour. De la sécurisation des parcours à la flexisécurité en passant par la sécurité de l'emploi,  celle des personnes et des biens ou encore la sécurité sociale, que d'aucuns voudraient professionnelle, le mot sécurité se conjugue à l'infini  et s'assaisonne à toutes les sauces.

Pourtant, la question de la formation à la sécurité continue de faire débat. Malgré des dispositions légales relativement claires, l'administration tient des positions restrictives. Malgré leur autonomie politique et au nom sans doute d'un principe de précaution, les OPCA en rajoutent. Et au final, le soutien financier fait défaut pour les politiques de formation à la sécurité. Preuve qu'il ne s'agit pas vraiment d'une priorité. Les Tartuffes ont bon dos de s'écrier : c'est une obligation de l'entreprise, qu'elle paie. On connaît de multiples obligations de l'entreprise qui font l'objet d'un soutien financier (aides à l'embauche des jeunes malgré le quota alternance, aides à l'embauche de travailleurs handicapés malgré l'obligation d'emploi, etc.).

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 Oscar Dominguez - L'épingle de surêté

La peur de se faire épingler, ou l'abri confortable du droit mou de circulaire, sert de paravent aux refus de prise de position politique de nombre d'OPCA sur ce sujet. La question des formations n'est pas une question juridique, comme le montre la note ci-dessous, mais une question politique, de priorités.

On ne se sécurise vraiment qu'en acceptant de prendre des risques. Les OPCA pourraient en ce domaine faire de véritables choix politiques basés sur la question de la santé au travail plutôt que de s'abriter derrière une position de l'administration qui a revêtu son habit de garde-champêtre fiscal qui n'en fait qu'à sa tête. Ce serait en réalité maigre risque, pour grand profit de tous.

Le Financement des formations à la sécurité.pdf

26/04/2010

Le temps ne passe qu'une fois

Une amie enseignante me donna un jour cette étranger définition de l'histoire : "L'histoire c'est quand on ne peut plus rien changer". On peut toujours tenter de réécrire l'histoire, mais rien ne fera que ce qui a été n'ait pas été. On connait la formule épicurienne sur les tombes latines : F NF NS NC. Fui. Non fui. Non sumo. Non curo. Je n'ai pas été. J'ai été. Je ne suis plus. Je n'en ai cure. Un jour sans doute le rocher Percé à force d'effritements aura disparu. Rien ne pourra faire qu'il n'ait pas été.

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Le rocher Percé - Photo Jean-Louis Lebreux

L'inexorable passage du temps vient de rattraper un employeur qui aura désormais un point d'appui pour réfléchir à l'histoire et au droit. Une salariée a été victime de harcèlement. L'employeur prend des mesures pour lui permettre de poursuivre son travail. Le harceleur démissionne. La salariée prend tout de même acte de la rupture de son contrat de travail et quitte l'entreprise en demandant des dommages et intérêts. Refusés par la Cour d'appel, l'employeur ayant mis fin à la situation. Accordés par la Cour de cassation : le harcèlement a eu lieu et s'il a pu avoir lieu c'est que l'entreprise a manqué à son obligation de prévention des risques. Après coup il est trop tard, rien ne peut faire que le harcèlement n'ait pas eu lieu, les mesures prises par l'employeur sont trop tardives (Cass. soc., 3 février 2010). Une raison de plus, s'il en fallait, pour agir ici et maintenant, avant que le rocher ne disparaisse.
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