30/06/2008
Licenciements boursiers
Que nous dit le droit du travail sur les licenciements boursiers ?
L’actualité vient nous rappeler, à travers la condamnation le 28 juin 2008 de la société Recyclex (Ex Metaleurop) par le Conseil des Prud’hommes de Lens qui a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de 495 salariés, que le droit sanctionne de longue date les licenciements boursiers. Quelques exemples :
- Une fermeture d’usine pour des raisons liées aux nuisances causées à l’environnement n’est pas légalement justifiée (Cass. soc., 13 février 2008, n° 06-44.358 F-D) ;
- Une délocalisation de France en Israël en raison d’incitations financières et fiscales attractives n’est pas un motif économique justifiant des licenciements (Cass. soc., 18 septembre 2007, n° 06-42.401 F-D ) ;
- La simple recherche d’une amélioration de la marge de l’entreprise par la réduction des coûts ne justifie pas des licenciements économiques (Cass. soc., 31 mai 2006, n° 04-47.376 F-P, Geslin c/Sté Catimini) ;
- Un regroupement de fonctions sur un lieu unique pour faire des économies n’est pas un motif de licenciement (Cass. soc.,21 mars 2006, n° 04-45.749 F-D) ;
- De même, le regroupement de la production sur un seul site ne justifie pas à lui seul des licenciements économiques (CA Chambéry, ch. sociale, 21 mars 2006, Fromageries Bell) ;
- Lorsqu’en l’absence de difficultés économiques, la finalité de la réorganisation est de bénéficier d'une réduction importante de charges sociales et de réaliser des bénéfices plus importants, les licenciements ne reposent pas sur une cause réelle et sérieuse (Cass. soc.,10 mai 2000, n° 98-41.066 D, Dedies c/Bertrand) ;
- La réduction des coûts salariaux sans nécessité économique ne peut fonder un licenciement qui ne peut reposer que sur la sauvegarde, et non l’amélioration, de la compétitivité (Cass. soc., 1er décembre 1999, n° 98-42.746 P, SA Miko c/Schaffer).
Ces multiples exemples nous démontrent que d’une part le droit s’est déjà saisi de la question et que d’autre part son traitement médiatique n’a pas grand-chose à voir avec les réalités juridiques : les licenciements boursiers sont bel et bien, et depuis longtemps, illicites.
11:29 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : licenciement, metaleurop, recyclex, boursier, prud'hommes
27/06/2008
Chronique de la réforme annoncée (VI)
Le droit différé à l'éducation : reconnaître aux salariés qui sont sortis précocément du système de formation initiale, et qui par leur travail et leurs impôts ont financé les études de ceux qui y sont restés, un droit à la reprise d'étude, l'idée n'est pas neuve mais nécessite la création d'un compte épargne formation pour être opérationnalisé. Est-ce que le DIF peut être ce compte épargne ? pas vraiment si l'on s'en tient à l'analyse de la transférabilité et de la portabilité du DIF telle que voulue par les partenaires sociaux.
01:35 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : dif, formation, réforme, compte épargne, crédit, éducation
26/06/2008
Tyrannie du court terme
Le projet de loi présenté par le Gouvernement cette semaine sur l'intéressement (20 % de crédit d'impôt sur les sommes distribuées par les entreprises qui concluent un premier accord d'intéressement ou 20 % de crédit d'impôt sur les augmentations de versement d'intéressement pour les entreprises qui ont déjà un accord) vient s'ajouter à différentes mesures destinées à soutenir le pouvoir d'achat : possibilité de déblocage anticipé de la participation, exonération sur les heures supplémentaires, bonus de 1 000 euros, rachat de jours de RTT.
Ces différentes mesures ont deux points communs : en premier lieu, elles permettent aux entreprises de distribuer des sommes exonérées socialement et fiscalement aux salariés. En ces périodes de déficit budgétaire et des comptes sociaux, cela signifie que ce qui est donné aujourd'hui devra être payé demain : comment et par qui ? en second lieu, elles ramènent des dispositifs qui ont pour fonction la gestion des rémunérations et du temps à de simples modalités techniques de versement d'un revenu supplémentaire immédiat.
Comme l'a rappelé le patron d'Auchan, Gérard Mulliez, au Gouvernement, la participation a pour objectif de consolider le lien entre l'entreprise et les salariés, l'intéressement, quant à lui, est un outil de gestion et de pilotage de la motivation et de la performance ( et un des rares outils dans ce domaine a avoir une dimension collective), les jours de RTT permettent une gestion lissée du temps et les heures supplémentaires ont fondamentalement pour fonction la gestion des variations d'activité. En aucun cas ces différents outils n'ont vocation à n'être que des moyens d'augmenter le revenu des salariés.
Pour les entreprises, et les services de ressources humaines, le risque est grand d'avoir un brouillage des cartes et une confusion regrettable entre différents outils de la politique RH, qui seraient dorénavant perçus exclusivement comme des machines à distribuer de la ressource immédiate. Le temps du politique n'est décidément pas le temps du social. Ajoutons pour terminer que si le pouvoir d'achat ainsi distribué ne trouve pas d'autre usage que l'absorption du prix de l'essence et l'achat massif de jouet chinois à Noël, le fiasco sera à peu près total.
06:36 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : intéressement, participation, gouvernement, tepa, pouvoir d'achat, rtt
25/06/2008
DIF et maladie
Deux questions relatives au DIF et à la maladie. Peut-on se former pendant un congé maladie et le congé maladie est-il pris en compte pour le calcul du DIF ?
Peut-on faire un DIF pendant un arrêt maladie ?
Sur le principe, c’est envisageable. En effet, la formation en DIF en dehors du temps de travail n’est pas une activité professionnelle, il s’agit d’un temps personnel consacré à la formation et indemnisé à ce titre, qui n’est pas incompatible avec la maladie dès lors que les temps de présence obligatoires à domicile sont respectés. Par exemple, une entreprise a réalisé en DIF des cours de langue par téléphone avec un salarié immobilisé chez lui du fait d’une jambe cassée. Ou encore, un salarié en longue maladie a suivi une formation (horaires libres) avant la reprise de son activité. Au plan juridique, pas d’incompatibilité donc. Par contre, subsiste la question d’un éventuel accident du travail pendant la formation. La sécurité sociale accepte difficilement, pour ne pas dire pas du tout, une déclaration d’accident du travail pour quelqu’un qui est déjà arrêté. Ce type de difficulté existe déjà pour les représentants du personnel. La Cour de cassation juge depuis des années que la suspension du contrat de travail ne suspend pas le mandat. Un salarié en arrêt maladie, en congés payés ou en congé maternité peut donc exercer son mandat de représentation, et avoir des heures de délégation cumulables avec le congé. En cas d’accident, le contentieux est toutefois inévitable avec la CPAM qui a du mal à admettre ce qui est pourtant juridiquement possible.
Le congé maladie est-il pris en compte pour le calcul du DIF ?
L’article D. 6323-3 du Code du travail prévoit que les congés de maternité, d’adoption, de présence parentale, de soutien familial ou de congé parental d’éducation sont pris en compte pour le calcul du DIF. Faut-il en conclure que les autres congés (maladie mais aussi maternité, de formation, sans solde,…) ne sont pas pris en compte pour le DIF ? Non. La loi prévoit que tout salarié titulaire d’un contrat de travail bénéficie de 20 heures de DIF par an. Le ministère du travail a refusé d’étendre les accords prévoyant que les congés non rémunérés par l’entreprise n’étaient pas pris en compte au titre du DIF au motif que le DIF était acquis que le contrat soit exécuté ou non. Il faut en fait distinguer la suspension du contrat, prise en compte au titre de l’ancienneté et qui ouvre droit au DIF que le congé soit rémunéré ou pas, et l’interruption du contrat, qui n’est pas prise en compte pour l’ancienneté et qui n’ouvre pas droit au DIF. L’interruption est la règle pour un congé sans solde, pour un congé sabbatique ou pour un congé création d’entreprise à temps plein. Pas pour un congé maladie qui doit donc être pris en compte dans le calcul du droit au DIF.
00:50 Publié dans DROIT DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : dif, maladie, formation, temps de travail, congé
24/06/2008
De l'art de prévoir l'avenir
On connaît le mot de Pierre Dac : « La prévision est difficile surtout quand elle concerne l’avenir ». Pourtant, l’injonction de prévision se décline à tous les étages de nos systèmes d’emploi et de formation. Le demandeur d’emploi : tenu d’avoir un projet professionnel définissant les emplois qu’il est prêt à accepter, sinon radié. Le salarié : doit décliner ses souhaits d’évolution dans le cadre de son entretien professionnel, sinon sa passivité pourra lui être reprochée comme un manque d’initiative sur son employabilité. L’entreprise : a l’obligation de faire de la GPEC au niveau collectif en négociant et/ou en présentant ses perspectives d’évolution des activités et de l’emploi au comité d’entreprise, mais également au niveau individuel en livrant au salarié son propre diagnostic sur l’évolution de son emploi ou de sa situation dans le cadre de l’entretien professionnel. A défaut, elle ne pourra mettre en cause l’emploi des salariés ou leur compétence.
Le droit du travail connaît donc une frénésie prévisionnelle qu’il ne craint pas d’assortir de sanctions. Injonction paradoxale à une époque où toutes les évolutions se produisent à un rythme toujours plus rapide et dans lequel la prévision peut relever, au choix, de la prédiction ou de la galéjade mais sans doute pas d’une rationalité scientifique. Qui avait prévu la crise des subprimes, le pétrole à plus de 150 euros, les pénuries alimentaires dans un monde en surproduction agricole, etc.
Bien évidemment, entre le gosplan (en russe Госплан, abréviation de Государственный комитет по планированию ou comité étatique pour la planification) et le demain n’est pas écrit, il existe sans doute une ligne d’horizon réaliste ne relevant pas du mirage et qui peut constituer un repère pour l’avenir.
Mais constatons que plus l’avenir nous échappe et plus nous nous contraignons à essayer de le prédéterminer, que le droit du travail n’échappe pas à cette tentation et que plus que d'aléatoires prévisions c’est sans doute la capacité de réactivité qu’il importe de développer.
06:30 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : prévision, projet, apollinaire, chirico, droit
23/06/2008
Le champ du négociable
Peut-on se fier à une convention collective ? non nous répond la Cour de cassation à l'occasion d'un litige relatif à une clause de non-concurence (Cass. soc., 4 juin 2008, n° 04-40.609).
Il s'agit en l'espèce d'un salarié licencié pour faute grave qui demande à bénéficier de l'indemnité de non-concurrence prévue par son contrat de travail. L'employeur la lui refuse conformément à la convention collective qui prévoit que l'indemnité n'est pas due en cas de faute grave. La Cour de cassation censure la décision de la Cour d'appel qui avait donné raison à l'employeur : la clause de non-concurrence doit obligatoirement faire l'objet d'une contrepartie financière versée après le contrat et la négociation collective ne peut remettre en cause ce principe. Le champ du négociable n'est pas ouvert sans limite.
08:17 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : van gogh, négociation, droit, non concurrence, clause
20/06/2008
Heures de délégation : le temps libre
La Cour de cassation, présidée pour l'occasion par une Toulousaine, vient de réaffirmer un principe absolu : il appartient aux représentants du personnel de déterminer librement le moment où ils bénéficient de leur crédit d'heures. L'employeur n'a pas à s'immiscer dans le choix du représentant du personnel qui est libre d'utiliser son temps comme bon lui semble. En fait, ce sont deux principes qui ont été rappelés :
- le représentant du personnel peut librement déterminer le moment auquel il prend ses heures de délégation, indépendamment des plages de temps que lui octroit l'enreprise ;
- lorsque des heures liées au mandat sont effectuées en dehors du temps de travail à l'initiative de l'employeur, elles donnent lieu à paiement majoré comme des heures supplémentaires (Cass. Soc. 11 juin 2008, T 07-40.823/1134, Sté DPSA Ile de France c/ M. Mathieu K., F-P+B)
00:37 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : heures de délégation, droit, travail, cour de cassation, jurisprudence, représentants du personnel
19/06/2008
Chronique de la réforme annoncée (V)
La cinquième chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer et publié par l'AEF (Agende éducation formation - http://www.aef.info) est consacrée aux OPCA.
Souvent dénigrés, considérés comme peu transparents, prenant des décisions arbitraires, faussant la concurrence, fonctionnant peu dans une logique de service-client....les OPCA ont essuyé ces dernies mois le feu des critiques. Le rapport de l'IGAS les concernant est pourtant plutôt favorable (voir chronique du 15 avril 2008).
06:20 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réforme, formation, opca, droit
18/06/2008
La liberté est un combat
Le principe est pourtant consacré dans l'article 1 du nouveau code du travail : le Gouvernement s'impose avant toute réforme dans le champ des relations de travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'engager une concertation avec les partenaires sociaux. Ceux-ci font ensuite connaître au Gouvernement leur intention de négocier, ou pas, et en cas de négociation le délai nécessaire pour la mener à bien.
Jamais la démocratie sociale n'avait été affirmée avec autant de force. Priorité à la négociation, le Gouvernement et le Parlement conservant ensuite, bien évidemment leur rôle.
Mais ce scénario raisonnable n'est pas exactement celui qui se joue dans la négociation sur la réforme de la formation professionnelle, preuve que laisser la liberté de négociation aux partenaires sociaux est plus facile à écrire qu'à mettre en oeuvre. Pour ces derniers, l'autonomie de la négociation est un combat.
Ce même jour, Laurent Wauquiez a déclaré réfléchir à une loi qui viendrait préalablement fixer le cadre de la négociation ou bien à la définition, toujours préalable, de ce qui relève de la loi et ce qui relève de la négociation. Or en matière de formation professionnelle, la compétence des partenaires sociaux n'est pas bordée par celle du législateur. Les champs de compétence sont les mêmes, ce n'est que la nature de la règle produite qui diffère.
Notre tradition jacobine a manifestement la vie dure. Nos gouvernants pourraient toutefois se souvenir que lorsque l'accord a précédé la loi (en 1970, en 1982-82, en 1991, en 2003), les résultats sur les dispositifs de formation ont été bien meilleurs que lorsque la loi est intervenue préalablement à la négociation (en 1993 par exemple).
06:12 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : formation, réforme, wauquiez, négociation, autonomie, partenaires sociaux
17/06/2008
Le DRH et l'apologue de Kant
Une société vit sur une île volcanique depuis plusieurs générations. Le volcan a déjà fait éruption, mais les signes avant coureurs de celle qui se prépare ne laissent pas de doute : l'île va être réduite à néant par l'explosion totale du volcan. La décision a été prise de quitter l'île. L'émigration ne se fera pas de manière groupée et consensuelle : différents groupes partiront dans des directions opposées. C'est donc la fin de la civilisation telle qu'elle a vécu sur l'île. Avant de partir, une dernière décision doit être prise. Dans la prison de l'île, un condamné à mort attend son exécution. Il a commis des crimes et le jugement qui le condamne à mort en vertu des lois en vigueur est exécutoire, toutes les voies de recours ayant été épuisées. Faut-il exécuter l'homme avant de partir ou bien considérer que son exécution n'a plus de sens et lui permettre de se joindre à un groupe ? sur quoi fondez-vous votre décision ? (faire le choix postule que la question de la peine de mort ne peut être posée en elle-même. Il s'agit de choisir dans une société où la peine de mort fait partie des règles, on ne peut choisir en disant simplement que l'on n'exécute pas par opposition à la peine de mort).
06:32 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : kant, philo, drh, ressources humaines, management, philosophie, miro
16/06/2008
Défaut de cohérence
Deux dispositions législatives nouvelles sont en voie d’être adoptées. La première concerne la rupture conventionnelle du contrat de travail (voir chronique du 13 juin 2008) et la seconde l’offre raisonnable d’emploi (voir chronique du 23 mai 2008). Or ces deux textes recèlent une contradiction majeure sur la nature du régime d’assurance chômage qui peut faire douter des capacités de discernement et de cohérence de nos députés.
Avec le nouveau régime de la rupture conventionnelle du contrat de travail, les partenaires sociaux et le législateur à leur suite, ouvrent à un salarié qui quitte volontairement l’entreprise un droit à bénéficier de l’assurance chômage. Cet accès volontaire à l’indemnisation démontre que l’assurance chômage ne vise pas simplement à couvrir un risque, la perte involontaire d’emploi, mais permet à un salarié de bénéficier de prestations en contrepartie de ses cotisations. On se rapproche du régime de la retraite : toute cotisation ouvre un droit à prestation. Certains diraient qu’il s’agit de salaire différé.
Avec le régime de l’offre raisonnable d’emploi, au contraire, le législateur considère que le fait de ne pas accepter d’occuper un emploi doit conduire à la suppression de l’indemnisation. Ici, le régime d’assurance chômage est exclusivement considéré dans sa dimension assurantielle : si je participe au sinistre, je perds le droit à indemnisation.
Il faut bien avouer que ces deux conceptions ne sont guère compatibles et qu’il faudra expliquer au chômeur à qui l’on retire son indemnisation parce qu’il a refusé un emploi à une heure de son domicile pourquoi on indemnise le salarié qui part volontairement de son entreprise avec en prime une indemnité exonérée d’impôt et de cotisation. Trouver de la cohérence à ce qui n’en a guère ne sera pas exercice facile.
06:40 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chomage, indemnisation, rupture conventionnelle, droit
13/06/2008
La rupture conventionnelle : un faux-ami ?
La loi sur la modernisation du marché du travail rénove le régime de la rupture conventionnelle. Jusque-là, ce mode de rupture dont le code du travail ne prévoyait pas précisément le régime, était assimilé à une démission quant à ses conséquences : le salarié donnant son accord pour quitter l'entreprise, il n'avait pas droit à percevoir une indemnité et n'était pas pris en charge par l'assurance-chômage. De ce fait, mais aussi souvent pour éviter des licenciements économiques ou pour contourner les régles restrictives en matière de mise à la retraite, on a vu proliférer ces dernières années les "faux" licenciements avec transaction à la clé pour permettre au salarié de percevoir une indemnité exonérée de charges et d'impôts et de percevoir l'assurance chômage.
Conscients de ces dérives, les partenaires sociaux ont négocié un nouveau régime de rupture destiné à donner un cadre juridique adapté à ces pratiques illicites. Comme pour la période d'essai (voir chronique précédente) il s'agit d'éviter l'illégalité en tenant compte des pratiques et en faisant évoluer le droit pour redonner un cadre légal. L'intention est louable et les employeurs ont d'autant plus consenti à la négociation qu'ils considèrent que la rupture conventionnelle clôt de meilleure manière le litige que la transaction, ce qui est vrai : alors que les juges remettent en cause la transaction de plus en plus souvent, notamment si le salarié démontre que des négociations ont précédé le licenciement, il sera très difficile de remettre en cause une rupture conventionnelle établie selon un process qui offre des garanties pour le salarié et l'imprimatur de l'administration.
Toutefois, à l'usage, cette nouvelle rupture conventionnelle pourrait se révéler pour les entreprises et les salariés un faux-ami.
Avant de se précipiter sur la mesure, il est donc important de prendre le temps de la réflexion et de déterminer quels objectifs l'entreprise va poursuivre sur ce dispositif nouveau qui va nécessiter un temps d'appropriation. Dans cette réflexion, il faudra prendre en compte le taux de turn-over souhaité, le message que tout départ peut s'acheter, l'effet de prolifération, etc. Décidément, il n'est vraiment pas évident que la vie des DRH s'en trouve simplifiée.
En pièce jointe, les nouvelles dispositions du Code du travail avec les commentaires : La Rupture Conventionnelle.doc
00:28 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (25) | Tags : rupture conventionnelle, droit du travail, max ernst, transaction, modernisation du marché du travail
12/06/2008
L'essai transformé
Le dilemne est toujours le même : faut-il tenir compte des fraudes et faire des textes spécifiques pour tenter de les éviter ou bien faut-il s'en tenir aux textes généraux et les faire respecter ?
Les partenaires sociaux ont choisi, dans l'ANI du 11 janvier 2008 la première hypothèse. Constatant que 30 % environ des CDD et contrats d'intérim sont des contrats de pré-recrutement, illicites il va sans dire, les organisations patronales et syndicales ont décidé d'augmenter la durée des périodes d'essai pour favoriser le recours direct au CDI.
00:24 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : période d'essai, rupture, contrat, réforme, montaigne, rugby
11/06/2008
Le CHSCT, nouvel épouvantail des DRH ?
Le CHSCT deviendrait-il le cauchemar des employeurs ? plusieurs décisions de la Cour de cassation prises ces derniers mois témoignent de la montée en puissance de cette instance, trop souvent déconsidérée dans l'esprit des représentants du personnel eux-mêmes et des employeurs.
Dans la première affaire, la Cour de cassation indique : "Ayant relevé que les modalités et les enjeux de l'entretien étaient manifestement de nature à générer une pression psychologique entraînant des répercussions sur les conditions de travail, la cour d'appel a exactement décidé que le projet de l'employeur devait être soumis à la consultation du CHSCT" (Cass. soc., 28 novembre 2007, n° 06-21.964). Doit donc être soumis pour consultation au CHSCT, avant la consultation du comité d'entreprise qui est également obligatoire, un projet d'entretien d'appréciation qui débouche sur des décisions en matière de rémunération ou d'appréciation de la compétence professionnelle pouvant donner lieu à prise de décisions individuelles.
(revue Supérieur inconnu N°1, 1995)
Dans la deuxième affaire, la Cour de cassation considère que "L’obligation de sécurité de résultat à laquelle est soumise l’entreprise, lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs. Elle lui est interdit, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés (Cass. soc., 5 mars 2008, n° 06-45.888). Un CHSCT peut ainsi demander au juge de bloquer un projet de réorganisation pouvant avoir des impacts négatifs sur la santé des salariés.
Dans le droit fil de l'extension du champ de la santé au travail, les pouvoirs du CHSCT s'étendent donc à de multiples secteurs : lieux de travail, matériels et produits utilisés par les salariés, durée et organisation du travail, process et ergonomie des postes de travail, organisation du travail, management et climat social, relations clients, etc. Nous sommes loin de l'ancienne approche étroite de l'hygiène et de la sécurité envisagée quasi-exclusivement du point de vue des risques corporels immédiats.
Les DRH découvrent ainsi que le CHSCT dispose souvent de leviers d'action plus efficaces et plus nombreux que le comité d'entreprise lui-même. Le CHSCT sera un véritable épouvantail lorsque les membres du CHSCT eux-mêmes l'auront eux aussi découvert.
00:10 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : chsct, drh, droit du travail, épouvantail
10/06/2008
L'interculturel près de chez vous
Lorsque l'on parle d'interculturel, on traduit souvent par international. Comment faire travailler ensemble des personnes de cultures nationales différentes, comment appréhender les relations interculturelles sans les stéréotypes habituels (des fiers espagnols et japonais en passant par les italiens truqueurs et les français malins...vus de France) et comment assurer une communication efficiente entre des personnes qui n'ont pas les mêmes repères culturels ? Comment éviter que l'entreprise ne devienne une Tour de Babel ?
00:59 Publié dans TABLEAUX PARLANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tour de babel, interculturel, management
09/06/2008
Le Ranking et les chaises musicales
L'évaluation se généralisant dans les entreprises, les pratiques se diversifient et l'on voit ressurgir les pratiques de ranking, ou classement forcé, dont les tribunaux ont déjà validé le principe. Il s'agit de demander à un manager d'évaluer ses collaborateurs mais surtout de les classer dans trois catégories : surperformeur, performeur en ligne, sous-performeur. Parfois les catégories vont jusqu'à 5, avec un niveau supplémentaire de différenciation pour les surperformeurs et les sous-performeur. Le ranking consiste, pour éviter les évaluations de type école des fans ou tout le monde a 10, à exiger du manager que la catégorie surperformeur isole les 20 % des salariés les plus performants, et la catégorie sous-performeur les 20 % de salariés les moins performants. En cas de passage à 5 catégories, l'intermédiaire permet de distinguer la très bonne performance de la performance exceptionnelle et en bas de l'échelle la performance médiocre et la très mauvaise performance.
Les salariés classés dans la dernière catégorie font l'objet d'une attention particulière : plan individuel de performance, accompagnement, formation, suivi spécifique à échéances rapprochées...bref on accompagne et on met de la pression. A terme soit le collaborateur progresse, soit il s'en va. Mais inévitablement le système réidentifiera l'année suivante les salariés les moins performants, avec l'objectif de pousser l'ensemble des performances vers le haut. Un tel système finit par furieusement ressembler au jeu des chaises musicales.
00:05 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ranking, management, performance, van gogh
06/06/2008
Reproduire ou produire ?
-De laisser le temps de la réflexion ;
-De laisser le temps de découvrir la culture non-officielle »
Est-ce une phrase de Cohn-Bendit en 68 ? de philippe Meirieu qui débat avec Finkielkrault sur les mérites comparés des savoirs et de la pédagogie ? d'un enseignant pris d'un doute sur son métier ?
Souvent centrés sur la restitution conformiste de masses d'informations peu ou pas digérés, nos systèmes d'examens à l'Université perpétuent ces vices ancestraux.
On peut s'en apercevoir lorsque l'on tente de rompre avec de telles pratiques. Donnant à des étudiants une évaluation pour clore un module d'enseignement, j'eu droit à cette récrimination : "Mais monsieur vous nous avez donné à traiter un cas que l'on n'avait jamais étudié et qui faisait appel à d'autres connaissances que votre matière !".
Peut-on sans passer pour un donneur de leçon expliquer que la vie ne se présente pas à vous sous forme disciplinaire et que l'on passe son temps à traiter des situations jamais rencontrées ? espérons que oui parce que telle fut ma réponse
07:31 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : enseignement, pédagogie, nietzsche, évaluation, examen
05/06/2008
Chronique de la réforme annoncée (IV)
Et Cheval aurait-il tiré fierté de ces diplômes ou l'oeuvre réalisée suffisait-elle à son apaisement ?
La quatrième chronique de la réforme de la formation professionnelle réalisée avec Jean-Marie Luttringer et publiée par l'AEF (Agence Education Formation : http://www.aef.info/) porte, on l'aura compris, sur la certification professionnelle.
La certification était une forme de valorisation des personnes, elle risque de devenir demain une condition de circulation à l'intérieur du marché du travail. Pour éviter une telle évolution, les négociateurs de la réforme devront nécessairement distinguer entre les certifications techniques qui valident des capacités à faire et les certifications qui permettent de construire sa qualification personnelle.
00:18 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réforme, formation, certification, diplôme, qualification
04/06/2008
Bonus individuel ou collectif ?
Le joueur de rugby s'est ouvert des espaces. Les cuisses brûlent, l'oxygène commence à manquer, mais il a échappé à la meute et en face de lui la ligne d'essai se rapproche.
Il voit bien l'arrière adverse qui s'est planté devant lui et qu'il va devoir affronter dans vingt mètres. 1,90m et 100 kgs à contourner. Sur la gauche, il reste un espace entre l'arrière et la ligne de touche. Pas large, mais jouable sur un cadrage débordement d'école. Il se prépare et pense à ses appuis quand il entend un appel, sur sa droite. Son centre vient à sa hauteur et lui réclame la balle. Une passe de cinq mètre et l'essai est assuré.
00:05 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bonus, rémunération, ressources humaines, management
03/06/2008
Modifier la qualification ou modifier les fonctions
Une salariée initialement embauchée en qualité d'assistante de direction a pris en charge la création du centre de documentation interne. A la suite de l'informatisation de son poste et de l'embauche d'un informaticien pour exercer les fonctions qu'elle occupait l'employeur lui a proposé de retrouver son ancien poste d'assistante. Devant le refus de la salariée, l'employeur la licencie pour faute grave.
Les juges du fond ont considéré que le licenciement était fondé sur une cause réelle, le changement de service ne constituant pas une rétrogradation, le contrat de travail de la salariée n'étant pas modifié aussi bien du point de vue statutaire que du lieu d'exercice de son activité ou de sa rémunération. Décision que censure la Cour de cassation qui retient qu'il appartenait aux juges de rechercher si le changement de fonction imposé à la salariée n'entrainait pas une diminution de ses responsabilités et l'accomplissement de tâches inférieures à sa qualification (Cass. soc., 18 avril 2008, n° 07-41.222).
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : modification, contrat de travail, droit du travail, licenciement