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03/06/2016

Des textes au double visage

Pas de procès d'intention, c'est un principe et en droit la bonne foi est présumée. Mais force est de constater que les décrets censés mettre en musique les lois novatrices peinent parfois à prolonger l'innovation et s'enlisent dans un conservatisme consternant. Dernière illustration : le projet de décret qui vient préciser les informations sociales à communiquer au comité d'entreprise, suite aux trois réformes de 2013 (loi de sécurisation de l'emploi), 2014 (formation) et 2015 (dialogue social). La réforme n'était pourtant pas mineure : suppression des consultations spécifiques sur la formation, articulation de la formation à la stratégie et à la politique RH, mise en place de la base de données économique et sociale, passage d'une information quantitative à une information qualitative, recentrage sur la politique et les objectifs et moins de place donnée aux moyens. Une révolution. Sauf que...

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Sauf que le projet de décret préparé par le Ministère du Travail reprend quasi mot à mot les dispositions antérieures, sauf que l'occasion d'enfin réformer le bilan social (qui est totalement obsolète sur la partie formation articulée à la règlementation de....1972 !) n'est pas saisie et sauf que toutes les nouveautés en matière d'investissements, d'élargissement du champ de la formation au développement de compétences et du glissement de la formation vers la compétence ne sont en rien prises en compte. Alors conservatisme ? négligence ? réflexion insuffisante dans l'urgence ? incompétence ? je laisse à d'autres le pourquoi et me contente du triste constat de textes incohérents (le projet de décret est en décalage profond avec les dispositions légales) et le travail qui en résulte pour les responsables formation : expliquer aux représentants du personnel qu'il vaut mieux s'inscrire dans les dispositions légales, se détacher de la lettre des textes règlementaires et centrer son action sur les objectifs et les résultats. Pour peu que l'on ait des interlocuteurs qui peinent à quitter le monde ancien de peur de perdre leurs repères, on mesure le service rendu par ces textes indigents. 

ProjetDecretIRP.pdf

tableau_comparatif_relatif_au_projet_de_-399450.pdf

20/06/2008

Heures de délégation : le temps libre

La Cour de cassation, présidée pour l'occasion par une Toulousaine, vient de réaffirmer un principe absolu : il appartient aux représentants du personnel de déterminer librement le moment où ils bénéficient de leur crédit d'heures. L'employeur n'a pas à s'immiscer dans le choix du représentant du personnel qui est libre d'utiliser son temps comme bon lui semble. En fait, ce sont deux principes qui ont été rappelés :

- le représentant du personnel peut librement déterminer le moment auquel il prend ses heures de délégation, indépendamment des plages de temps que lui octroit l'enreprise ;

- lorsque des heures liées au mandat sont effectuées en dehors du temps de travail à l'initiative de l'employeur, elles donnent lieu à paiement majoré comme des heures supplémentaires (Cass. Soc. 11 juin 2008, T 07-40.823/1134, Sté DPSA Ile de France c/ M. Mathieu K., F-P+B)  

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Chirico - L'énigme de l'heure 
 
En l'espèce, il s'agissait d'un représentant du personnel travaillant la nuit et prenant fréquemment ses heures de délégation de jour. L'employeur, soucieux de sa masse salariale, établissait des plannings d'activité incluant des absences dans les horaires de nuit pour tenir compte des heures de délégation. Impossible nous dit la Cour suprême : l'employeur ne peut se substituer au représentant du personnel pour fixer la prise des heures de délégations et doit prendre acte du moment où il décide d'utiliser son crédit d'heures. Si le représentant du personnel ne peut prendre ses heures en dehors du temps de travail que dans l'intérêt du mandat, celui-ci est largement entendu et recouvre la possibilité pour un travailleur de nuit de prendre des heures en dehors de ses heures de travail. D'une manière plus générale, les tribunaux sont très réticents à fixer des limites à la liberté d'utilisation des heures de délégation. On a ainsi vu des refus de considérer qu'est une pratique abusive le fait de prendre les heures de délégation tous les vendredi après-midi ou lundi matin, ou encore de prendre 1 heure de délégation systématiquement tous les matins à l'heure où se fait la répartition du travail. Le principe de liberté dans l'utilisation du temps de délégation est donc très largement affirmé, et confirmé une nouvelle fois par la décision du 11 juin.
 
Sur la seconde partie de la décision,  la Cour de cassation rappelle que lorsque le représentant du personnel doit prendre ses heures en dehors du temps de travail du fait de l'employeur, les heures doivent lui être payées en heures supplémentaires. Il en est ainsi lorsque l'employeur fixe les réunions du CHSCT en dehors des plages d'activité des membres désignés de cette instance.
 
En pièce jointe, l'intégralité de la décision de la Cour de cassation.