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30/06/2010

Le juge et la formation

Kouzen o
Siw pa metem lekòl
Ma fè jandam aretew

Ce chant Vaudou Haïtien signifie à peu près ceci : Kouzen (dieu de l'agriculture) si la culture du sol t'empêches de me  mettre à l'école, je te ferai traduire en justice. Ce chant, de tradition orale, est rapporté par Claude Dauphin. L'illettrisme ne fait donc pas obstacle à la conscience du droit à l'éducation pour tous et de la possibilité de recourir au juge pour le faire reconnaître.

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Frantz Zephirin - Tambour Rada
On ignore si les juges se livrent, dans le secret des alcoves de délibéré, à des cultes vaudou. Mais si l'on doutait qu'ils ont eux aussi conscience que la formation pour tous est un droit qui ne saurait être mis en échec par l'illettrisme,  la décision de la Cour de cassation du 2 mars 2010 pourrait nous rassurer. Pour mieux apprécier la portée de cet arrêt, la Chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF met en perspective 25 ans de jurisprudence en matière de formation professionnelle et de contrat de travail, ou comment le juge après s'être occupé de la formation de ceux qui ont une carrière commence à s'intéresser à la formation de ceux qui n'en ont pas.

Commentaires

Bonjour,

Article intéressant qui pourrait susciter moult commentaires (attention, un commentaire n'est pas nécessairement une critique ! )

Un tout petit point cependant : apparemment, l'arrêt du 2 mars dernier vous a étonné (vous écrivez d'ailleurs : "le juge peut toujours être surprenant et ses desseins impénétrables.")

Pourtant, cet arrêt est dans le prolongement direct de l'arrêt Union des opticiens... (un intéressant commentaire sur ce dernier arrêt extrêmement important : Bernadette Lardy-Pelissier dans "Droit ouvrier" - mai 2008 pp 296-298).

L'arrêt du 2 mars n'a pas été publié au bulletin. Mais on sait que le choix ou non de la publication est quelquefois étrange : des arrêts que l'on estime peu importants ne sont pas publiés et d'autres dont on voit mal l'intérêt le sont. Alors oui, ici " le juge peut toujours être surprenant et ses desseins impénétrables".

Maintenant, les exigences que formule la Cour de Cassation et que vous exposez doivent être mises en parallèle avec les termes de l'article L1233-4 du code du travail , texte extrêmement dangereux : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés (...)." et en insistant tout particulier sur le "et"...

Comme l'écrit Jean-Emmanuel Ray, un tel texte poussé au bout de sa logique...

Écrit par : Bruno Callens | 30/06/2010

Bonjour,

Les commentaires et critiques sont toujours les bienvenus. Si l'arrêt est étonnant c'est justement parce qu'il n'a pas été rendu à propos d'un licenciement économique et d'une obligation de reclassement. Il dit simplement que l'on ne peut passer une période de longue durée dans une entreprise sans être formé, même si le poste occupé ne le nécessite pas. Jamais la Cour de cassation n'avait pris une position de cette nature. Reste à savoir si le juge a vraiment eu conscience de poser un principe aux conséquences redoutables ou s'il a simplement traité une affaire et jugé ce qui lui semblait équitable. C'est en cela que les desseins du juge sont impénétrables : quel que soit l'argumentaire utilisé, les véritables motivations du juge lui appartiennent.

Concernant 1233-4 il confirme la distinction entre formation et adaptation et la possibilité d'utiliser d'autres moyens que la formation. Mais en quoi trouvez-vous ce texte dangereux ? pour le potentiel d'obligation qu'il recèle pour l'entreprise ?

Écrit par : jpw | 30/06/2010

Bonjour,

Quant je disais que l'aticle L1233-4 était "dangereux", je voulais dire "dangereux pour l'employeur" engagé dans un contentieux.

Tout simplement parce que le degré d'exigence qu'il implique est indéterminé et est totalement à la discrétion du juge. Concrètement, ce dernier fixe la barre où il veut...

Bruno Callens

Écrit par : Bruno Callens | 01/07/2010

Les commentaires sont fermés.