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29/09/2013

Ouvert la nuit

Lorsque l'on pose la question de la légitimité d'une loi, par nature générale, exclusivement en terme d'intérêt individuel, le débat s'en trouve naturellement faussé et impossible. Que travailler la nuit ou le dimanche soit une solution qui convienne à certains, personne n'en doute. Considérer pour autant que toute loi restreignant cette possibilité est liberticide reviendrait à faire de l'intérêt de chacun, la seule mesure de tout chose. Soit rien de moins que nier le fait que nous vivons en société. Sur le travail du dimanche lui-même, il me souvient avoir écrit une chronique aux premiers temps de ce blog, alors que le Gouvernement de l'époque s'apprêtait à faire voter de nouvelles dérogations au principe de l'interdiction, lesquelles dérogations ont d'ailleurs largement contribué à créer la situation actuelle (on se reportera ici). A ce qui fût écrit à l'époque, pas un mot à changer.

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Ouvert le dimanche depuis 1927

Juste à rajouter que si le droit du travail contient des restrictions à l'exercice d'activités salariées (car ce n'est pas le travail qui est interdit mais le travail salarié), c'est pour deux raisons. La première, historiquement, est la protection de la santé du salarié. Personne ne trouve la ceinture de sécurité liberticide. La seconde a trait à la préservation de temps sociaux. Pour que des activités collectives familiales, sportives, culturelles soient possibles, il est nécessaire que des temps collectifs soient préservés du travail. Une troisième pourrait être le souhait de ne pas réduire l'individu à un homo economicus qui ne saurait faire rien d'autre que produire et consommer. On pourrait résumer tout ceci avec une phrase de Paul Morand, extraite de "Ouvert la nuit" : "L'apéritif, c'est la prière du soir des français". Sauf ceux qui travaillent la nuit.

Ecrit dimanche 29 septembre, à 22h44.

26/09/2013

La beauté du geste

Délibération mardi soir du jury des Trophées du Responsable Formation, organisés par DEMOS, dont les résultats seront présentés le 10 octobre. Parmi les critères, la beauté du geste, celui du professionnel. Ce qui donne l'occasion de laisser la parole  à Tchouang-Tseu :

Le cuisinier Ting dépeçait un beuf pour le prince Wen-houei.

On entendait des « houa » quand il empoignait de la main l’animal, qu’il retenait sa masse de l’épaule et que, la jambe arqueboutée, du genou l’immobilisait un instant.

On entendait des « houo » quand son couteau frappait en cadence, comme s’il eût exécuté l’antique danse du Bosquet ou le vieux rythme de la Tête de lynx.

-C’est admirable ! s’exclama le prince, je n’aurais jamais imaginé pareille technique !

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Alain Garrigue - Taureau

Le cuisinier posa son couteau et répondit :

Ce qui intéresse votre serviteur, c’est le fonctionnement des choses, non la simple technique. Quand j’ai commencé à pratiquer mon métier, je voyais tout le boeuf devant moi. Trois ans plus tard, je n’en voyais plus que des parties. Aujourd’hui, je le trouve par l’esprit sans plus le voir de mes yeux. Mes sens n’interviennent plus, mon esprit agit comme il l’entend et suit de lui-même les linéaments du boeuf. Lorsque ma lame tranche et disjoint, elle suit les failles et les fentes qui s’offrent à elle. Elle ne touche ni aux veines, ni aux tendons, ni à l’enveloppe des os, ni bien sûr à l’os même. (…)Quand je rencontre une articulation, je repère le point difficile, je le fixe du regard et, agissant avec une prudence extrême, lentement je découpe. Sous l’action délicate de la lame, les parties se séparent avec un « houo » léger comme celui d’un peu de terre que l’on pose sur le sol. Mon couteau à la main, je me redresse, je regarde autour de moi, amusé et satisfait, et après avoir nettoyé la lame, je le remets dans le fourreau. (…)

Tous les sportifs le savent, le geste le plus juste est également le plus beau et le plus efficace. Ainsi en va-t-il également pour le boucher et pour le responsable formation.

24/09/2013

Une taffe, chef ?

Le manager passait par là. Le salarié fumait un joint, ou plutôt un présumé joint devrais-je dire pour rester juridiquement correct. Mais le manager voulût en avoir le coeur net : un test salivaire plus tard, l'affaire était faite et dans la foulée le salarié licencié pour faute grave au motif que le règlement intérieur proscrit de venir travailler sous l'effet de drogues ou d'en consommer dans l'entreprise. Le CHSCT ne l'entend pas de cette oreille et saisit le Conseil des Prud'hommes en référé pour faire annuler le test salivaire, considéré comme portant atteinte à la dignité du salarié et à sa santé mentale (toutes choses auxquelles le joint n'a pas accès). Le Conseil suit l'avis des représentants du personnel et annule le contrôle, en rappelant une règle générale : l'entreprise peut procéder à un test salivaire mais uniquement s'il est prévu par le règlement intérieur et s'il concerne exclusivement les salariés occupant un emploi qui peut présenter un danger pour leur sécurité ou celle d'autrui. Autrement dit, il ne peut y avoir, comme pour l'alcool, de proscription générale. Aussi, l'inoffensif consultant peut-il toujours fumer au travail puisqu'il ne menace la sécurité de personne. 

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Il serait bon, dans ce domaine, que les entreprises conservent quelques principes en tête : le premier est qu'elles ne gèrent pas des personnes mais le travail de ces personnes. C'est d'ailleurs pour cela que l'on peut parler de ressources humaines, car le salarié n'est envisagé qu'en sa qualité de personne au travail et non d'individu.  Et de ce fait, toute décision doit être contextualisée et ne peut être déconnectée du travail. Le second principe est qu'en matière de stupéfiants,  la France est, de loin, le pays le plus fortement consommateur de médicaments en Europe et que les substances de nature à modifier le comportement sont diverses et variées. En l'occurrence, fumer un joint est d'un point de vue juridique la même chose qu'avaler un lot de pastilles ou  se jeter une rasade de whisky. Le salarié aurait-il été licencié s'il avait été pris la flasque à la main ? et cela nous amène à un troisième principe : en ces domaines, il vaut mieux se pencher sur les conséquences que sur les causes. En l'absence d'impact sur le travail, le comportement du salarié n'est répréhensible qu'au plan moral et la morale, comme on le sait, ce n'est pas le droit. Et puis franchement, si l'on se met à licencier les fumeurs de joints, ce n'est pas demain qu'on va inverser la courbe du chômage.

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23/09/2013

Le changement, c'est maintenant

Je pensai que le schéma avait disparu de la circulation après sa publication dans le Canard Enchaîné qui rapportait les méthodes de formation des managers d'un grand groupe. Le changement était présenté comme un deuil qu'une communication adaptée fera passer d'un déni à l'adhésion. L'ineptie d'un tel schéma comme mode explicatif des comportements aurait pu sauter aux yeux de chacun sans effort. Que nenni ! voilà qu'il ressurgit dans les supports de formation des managers d'un autre grand groupe.

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C'est le schéma avec lequel vous avez toujours raison, clé sans doute de son succès. Jugez-vous même : vous annoncez un changement à un salarié, or le nouveau projet, la nouvelle organisation est une ineptie. Il vous exprime son opposition. C'est le déni de la première étape du deuil. Ensuite, devant votre sourire narquois de celui qui sait  à quoi s'en tenir, il se mettra en colère. Et vous penserez : "Etape 2". Devant l'absence totale de prise en compte de son opinion, il déprimera "étape 3". Puis, lassé de se battre contre des moulins, il capitulera "Etape 4". Et vous aurez managé le changement de main de maître. Cela s'appelle la prophétie autoréalisatrice, mais il n'est pas besoin d'être prophète pour se dire que se dire que si l'on se met à manager le deuil, il ne faut pas s'étonner que les gens se tuent au travail.

19/09/2013

Ah, la perfection !

Un peu longue la réunion sur le projet. Chaque étape est reprise, détaillée, disséquée, analysée. Tous les imprévus prévisibles sont envisagés méthodiquement, le diable et 1000 de ses avocats semblent planer au-dessus de la table pour souffler à la responsable du projet toutes les objections, les impossibilités, les obstacles, les empêchements, les accidents qui ne manqueront pas de faire irrémédiablement capoter ce que nous sommes en train de laborieusement tenter de construire. Les tunnels de négativité de cette espèce me plongent toujours dans une sourde torpeur dont je préfère ne pas imaginer la mine imbécile qu'elle dessine sur mon visage. Tout juste si je tends l'oreille parce que soudain l'une des participantes interpelle la chef de projet :

"- De toute façon, toi tu vises toujours la perfection...

- Non, ce n'est pas vrai, je ne cherche pas toujours à atteindre la perversion..."

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Pierre Molinier - Hanel - 1956

Le lapsus éclaire ma journée. Après cela, on peut bien rester trois heures encore sur l'étape 2, cela n'a plus d'importance. La perfection est-elle une perversion ? comme tous les excès sans doute. Comme le sportif de haut niveau qui, au pic de sa forme, présente un bilan de santé qui ferait bondir plus d'un médecin. Mais il ne faut surtout pas oublier, surtout pas, que la perversion est aussi un plaisir. Belle réunion, et belle journée, un esprit impartial la trouverait parfaite.

18/09/2013

Le droit et la justice

Si l'image retient souvent l'attention des hommes, ce sont les femmes qui réagissent plus spontanément au discours qui l'accompagne. Lorsque j'affirme que le droit et la justice sont deux champs distincts, je n'ai jamais rencontré, et je ne crois guère au hasard, que des protestations féminines pour tenter d'argumenter en sens inverse. Soit, dans une acceptation judiciaire de la justice, en me rappelant que les tribunaux sont là pour faire respecter la loi, soit, dans une optique plus philosophique, pour affirmer que toute règle a un fondement moral. J'apprécie toujours que l'on me porte la contradiction, mais en l'occurence les arguments ont du mal à porter.

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Lucas Cranach - La justice - 1537

Concernant les tribunaux, ils veillent moins à l'application du droit qu'ils ne tranchent des litiges. L'horizon du juge c'est moins la règle, qui n'est jamais qu'un moyen, que de démêler une situation et d'y apporter une solution. Pour l'approche philosophique, si la règle peut être, ou avoir été, porteuse de morale, il n'en reste pas moins qu'elle est avant tout une règle technique et que l'esprit des lois est plus souvent dans l'usage que l'on en fait que dans la règle elle-même. Un texte, lorsqu'il a été adopté, échappe à ses auteurs et devient une norme technique que chacun va tenter d'interpréter et d'utiliser au mieux des intérêts qu'il défend. Inutile dès lors de se réfugier derrière la règle. Chacun est responsable personnellement de l'usage qu'il fait du droit. Et c'est pourquoi, judicieusement, Lucas Cranach n'a surtout pas bandé les yeux de la justice.

16/09/2013

Trop c'est trop

Le néerlandais Erik Kessels a imprimé toutes les photos qui ont été publiées sur Flickr pendant une période de 24 heures. Ces photos sont toutes différentes, uniques, et pourtant elles constituent un ruban de moebius de la photographie personnelle. L’impression d’avoir déjà vu, revu et rerevu tout cela et finalement, l’accumulation finit par tuer toute vision tant l’œil est submergé par l’entassement.

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Comme dans une décharge à ciel ouvert, ce qui pourrait être une des définitions possibles d’internet, on se dit qu’il y a sans doute, dans le tas, quelques pépites qui s’amusent à se dissimuler, à éprouver leur clandestinité et prennent un malin plaisir à jouer à la lettre volée. Mais oui, je suis là, devant toi, tu ne vois rien ? et bien non, rien de rien, carrément rien. Trop c’est trop.

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Et pourtant les centaines de photos de Daido Muriyama ne produisaient pas cet effet de chantilly au kilomètre. Peut-être tout simplement parce que peu importe le nombre, comme au Tango, ce qui compte c’est le geste juste.

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Les photos d'Erik Kessels invitent à penser que ce qui tue le droit, c’est moins l’invraisemblable quantité de textes, même si elle ne facilite rien, que la médiocrité de leur qualité. Et  l’on se dit qu’il faut la ténacité, ou la folie, d’un chercheur d’or pour s’évertuer encore à traquer dans tout ce fatras quelques pépites.

15/09/2013

Echappée

On peut toujours sauter dans un train pour Arles afin d'échapper aux pluies venues de l'Ouest, qui ne balaient pas ce Sud là, mais décidément on ne peut échapper au Japon. Et si l'on ne partage pas l'enthousiasme un peu convenu à l'égard des grands tirages de Hiroshi Sugimoto, en revanche les obsessions foisonnantes de Daido Moriyama excitent les sens sans retenue.

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Et c'est un nouveau clin d'oeil au Japon que la fête du riz, pour laquelle le bel Onyx pose tout de blanc vêtu devant un rouge qui rappelle le drapeau japonais.

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C'est le risque avec le soleil : l'hallucination vous guette qui, couplée au rêve permanent japonais, fais que l'on ne s'étonne guère de voir apparaître un escalier volant.

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Ont-ils empruntés cet escalier les Evêques de Christian Lacroix qui, tels des Shoguns, abusent de la terreur au nom de la paix de Dieu. 

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Faut-il vraiment sortir du rêve ? à la pause qui s'impose, c'est Saul Leiter, croisé au printemps à Vienne, qui colorie un clin d'oeil sur les vitres du cafés.

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La photo, comme la peinture, c'est avant tout de la lumière. Ce dont nous avons tant manqué depuis le début de l'année. Nul doute que pour compenser, il faudra d'autres échappées.

12/09/2013

Esquisse d'une réforme annoncée

On commence à y voir plus clair. Au moins en ce qui concerne les bases sur lesquelles va s'engager la nouvelle (jusqu'à la prochaine ?) réforme de la formation professionnelle. Et contrairement à ce qu'en disent certains sceptiques, il ne s'agira pas d'une réformette. Le deal passé entre le Gouvernement et le MEDEF sur le sujet paraît assez limpide : vous faites un effort supplémentaire pour les salariés les moins qualifiés et on vous libère de toute obligation fiscale pour ce qui concerne les formations qui accompagnent la performance de l'entreprise. Plus concrètement, on met en place le compte personnel, on augmente la part obligatoirement versée à l'OPCA et on supprime le 0,9 %. Ou encore, au lieu de verser 50 % de votre obligation de 1,6 % à l'OPCA et de gérer le reste selon votre choix, on passe à 1% de versement obligatoire pour des dispositifs d'intérêt général et pour le reste cela relève de la responsabilité de l'entreprise vis à vis de ses salariés et d'avantage d'obligations sociales que fiscales.

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Ingres - Le jugement de Salomon

On remarquera que la logique est la même que celle de la jurisprudence commentée dans la chronique précédente : des obligations renforcées pour les salariés les moins qualifiés ou placées dans des situations précaires, mais une grande liberté de négociation avec ceux qui bénéficient d'un niveau de qualification plus important. Ce n'est toutefois pas la première fois qu'un tel deal est posé sur la table : c'était déjà le cas en 2003/2004 et, de manière encore plus explicite, en 2008 lorsque Christine Lagarde alors en charge du dossier, avait écrit aux partenaires sociaux avant qu'ils n'ouvrent la négociation qui devait aboutir à l'ANI du 7 janvier 2009, qu'elle était prête à envisager la suppression de l'obligation fiscale sur le plan de formation. La troisième tentative sera-t-elle la bonne ? il semble que le fruit soit plus mûr que jamais et si ce n'était pas le cas, les contrôles lancés par la Cour des comptes sur quelques OPCA voire quelques articles de presse opportunément publiés en début de négociation (parions que Le Point parlera de formation et de financement paritaire dans les semaines qui viennent) viendront rappeler que cette fois-ci, il va peut être falloir aller plus loin que l'esquisse.

10/09/2013

C'est permis

La salariée et son avocat pensaient sans doute que la protectrice Chambre sociale remettrait au pas ces juges de la Cour d'appel manifestement intoxiqués par la petite musique libérale. Enfin, quoi ! c'est à l'employeur de former les salariés et il n'est pas question de remettre sur ceux-ci la charge de l'obligation. C'est ce que nous dit le Code du travail qui oblige l'employeur à adapter le salarié à l'évolution de son poste de travail. En l'espèce, l'entreprise qui a recruté une salariée en qualité d'ingénieur commercial en prévoyant qu'elle aurait une voiture de fonction dès qu'elle obtiendrait le permis de conduire dont elle était dépourvue, peut la licencier pour motif disciplinaire quelques mois plus tard en l'absence de toute démarche de sa part pour obtenir le permis. La Cour de cassation le dit explicitement : il est possible de mettre à la charge du salarié lors de la conclusion du contrat une obligation de se former sur son temps personnel et à ses frais. Négocier le permis, c'était donc permis.

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Sans permis

Si à première vue la décision de la Cour de cassation peut surprendre, elle trouve à la réflexion deux explications. La première est que la salariée a qualité d'ingénieur commercial. Compte tenu du niveau de qualification, et sans doute de rémunération, les tribunaux ne considèrent pas comme illégitime que le contrat de travail comporte une obligation particulière. La seconde explication est qu'en réalité l'article L. 6321-2 vise l'adaptation au poste de travail, c'est à dire la situation d'un salarié déjà recruté dont le poste évolue. Ici, il s'agit d'une personne qui candidate à un emploi pour lequel elle ne remplit pas les conditions, que l'employeur embauche malgré tout en lui laissant un délai pour remplir ces conditions. On regrettera donc la formule des juges : ce n'est pas l'obligation d'adaptation qui peut être négociée lors de la conclusion du contrat, mais le fait que le salarié assume à ses frais  le coût de formation nécessaire à l'obtention des compétences requises. les conditions exigées à l'embauche ne relevant pas d'une adaptation mais constituant des exigences préalables à l'embauche. Sous ces réserves là, on sait dorénavant que négocier c'est permis.

Cass. Soc 10 juillet 2013.pdf

06/09/2013

Des comptes, comme s'il en pleuvait

On savait que la période était aux comptables, on ne s'étonnera donc pas de la prolifération des comptes. A peine le compte personnel de formation est-il né de la loi de sécurisation de l'emploi, sans que pour autant personne sache à quoi il ressemblera, que voici le petit frère, le compte personnel de prévention de la pénibilité. Et comme dans les bonnes fratries on va faire en sorte qu'ils s'entendent bien à prévoyant qu'ils fonctionneront de concert. Les principes du compte personnel de prévention de la pénibilité (le C3P donc) sont relativement simples : tout salarié occupant un emploi répertorié comme pénible acquiert 1 point par trimestre. Le cumul des points lui ouvre droit  soit à formation pour exercer un métier moins pénible, soit à passage à temps partiel avec salaire maintenu soit à une retraite anticipée. Trois manières d'alléger la pénibilité.

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Futur bénéficiaire du compte ?

Selon le Gouvernement, 10 points (soit 2,5 ans) ouvriront droit à 50 jours de formation pour exercer un métier moins pénible. Ce qui va réouvrir le dossier du classement des emplois dans les métiers pénibles ou pas, selon les dix facteurs définis par la règlementation (Les manutentions manuelles de charges lourdes ; les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ; les vibrations mécaniques ; les agents chimiques dangereux, y compris les poussières et les fumées ; les activités exercées en milieu hyperbare ; les températures extrêmes ; le bruit ; le travail de nuit ; le travail en équipes successives alternantes ; le travail répétitif.) et mettre une pression supplémentaire, en complément du compte personnel de formation, pour que l'entreprise forme les salariés qui se forment habituellement le moins, et pas sur des formations de deux jours.  Au final, c'est pour les services ressources humaines que la mise en oeuvre du compte risque de s'avérer pénible.

05/09/2013

DISTRIBUTEUR (2)

Le 10 Octobre prochain DEMOS  organise les premiers Trophées du Responsable Formation (Ici). Les candidats seront invités à un séminaire consacré aux compétences durables, puisque seront récompensées principalement les responsables formation qui ont contribué à développer des compétences durables. Mais qu'est-ce qu'une compétence durable ? encore un effet de mode qui surfe sur les bonnes intentions ou tente d'habiller de formules nouvelles de vieilles idées ? peut être pas. Juste la conviction qu'il ne suffit pas d'être passé par le distributeur de compétences, la formation par exemple, pour disposer de compétences durables.

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La compétence non durable, c'est celle qui se limite à des capacités d'exécution, de mise en oeuvre, de reproduction et qui finalement est la négation même de l'autonomie professionnelle. C'est celle qui est faite de normalisation, de prescription, de conformité, de contrôle et de standardisation des comportements. La compétence durable c'est celle qui structure l'activité, augmente l'autonomie, libère les capacités créatives, permet de faire face à l'inattendu, inclut la capacité à apprendre de ses expériences, donne des outils tout terrain qui permettent de structurer une démarche, une réflexion, une action. Ce sont des compétences de la confiance, par opposition aux compétences de la défiance que sont ces recettes que l'on souhaite inculquer et que l'on vérifier à coup de quizzs déshumanisants. Et avec tout ça, je ne sais même pas si le créateur ou la créatrice de Kumamon avait des compétences durables.

04/09/2013

DISTRIBUTEUR

Certes, ils sont nombreux à me dire la même chose. Que cette année c'est particulièrement difficile de s'y remettre. Pourquoi ? mystère. L'insuffisance d'été après l'absence de printemps, le trop peu de congés, les mistoufles de la rentrée (factures, impôts, ...), les déprimants et lénifiants éléments de langage, comme ils disent, de politiques en manque total d'imagination et de créativité, l'inexorable montée du chômage qui conduit à se réjouir, comme sous le Gouvernement précédent, qu'il augmente moins vite que le mois d'avant, l'interminable sortie d'une crise financière, puis économique, puis budgétaire et qui finit par n'être plus qu'interminable ou bien quoi encore ? je n'en sais rien. Mais ce que je sais c'est que si par hasard je croise un distributeur de voyages, j'aurai du mal à résister. Il fait encore soif.

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03/09/2013

Ricochet

Rentrée des classes sous le signe de l'été indien, qui annonce les lents changements de saison. En matière de rythmes scolaires, par contre, le changement est plutôt rapide. Sur le fond, travailler moins chaque jour et avoir d'autres activités que la classe, il n'y a pédagogiquement rien à redire et il n'était que temps de rompre avec les longues journées dont la linéarité s'accorde mal avec la sinusoïdale concentration humaine. Il est plus difficile de comprendre pourquoi, en maternelle, il faut aussi adopter le rythme nouveau qui impose un lever supplémentaire dans la semaine, alors qu'il ne s'agit pas d'alléger des enseignements mais d'ajouter des activités à d'autres activités. Pas d'autre explication que l'effet ricochet.

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Pierre Haeder -  Ricochet

L'effet ricochet c'est que dans une école primaire, difficile de gérer les différentes classes sur des rythmes non homogènes, et le temps de travail des enseignants avec. Donc, les petits comme les plus grands, et en avant ! le problème avec les ricochets c'est que ça se termine toujours par un plouf. Mais faisons confiance aux intéressés pour franchir allègrement tous ces petits obstacles et foncer droit devant.

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02/09/2013

La dernière loi

Le conseil des prud’hommes de Compiègne a donc donné raison aux salariés de CONTINENTAL, pour trois raisons. La première est que le droit des sociétés ne peut faire obstacle au droit social et que lorsqu’une filiale obéit aux injonctions de sa société mère, celle-ci acquiert la qualité de coemployeur et les responsabilités qui vont avec. La seconde est que réduire les coûts après un endettement du à des choix stratégiques hasardeux n’est pas un motif économique. La troisième est que l’obligation de reclassement ne peut se réduire à l’envoi de mails entre services RH. Soit trois questions fondamentales en une seule décision.

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Henri Rousseau - Le lion, ayant faim, se jette sur l'antilope

Les réactions des mécontents n’ont pas tardé. Tout d’abord ceux qui pensent que juridiquement tout cela ne tient pas la route, que les Conseils des prud’hommes ne font pas du vrai droit et que la Cour d’appel y remettra bon ordre. Ceux-là devraient se souvenir que le juge administratif s’est déjà prononcé exactement dans le même sens en février dernier s’agissant des autorisations de licenciement des salariés protégés qui ont été annulées faute de motif économique suffisant. Et puis ceux qui pensent que la décision est juridiquement fondée mais qu’elle aura des effets désastreux sur les investisseurs, dissuadés par ces lois scélérates de venir s’installer en France. A ceux-là on rappellera que la dernière loi à s’appliquer après l’abolition de toutes les autres, c’est celle de la jungle.

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01/09/2013

Looping

Personne ne l'a vu arriver. Personne ne s'est rendu compte qu'il a commencé à chanter, parce qu'il a chanté ces airs qui traînent toujours dans un coin de nos têtes. Alors peut être qu'il chantait ce que chacun fredonnait intérieurement, ce qui le rendait absolument invisible.

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Il a chanté longtemps en regardant un par un  ceux qui ne le regardaient pas. Il a chanté pour chacun. Il a aussi chanté pour le carrefour, la rue, les boutiques, la dame qui passait l'aspirateur à l'étage au dessus, mais il ne semblait pas chanter pour lui-même. Il n'a rien demandé, n'a pas fait la manche, n'a sollicité ni sourire, ni applaudissements, ni quelque autre forme de remerciement. Personne ne s'est aperçu que, tout d'un coup, il était parti.

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Ils ont déballé tout leur matériel, comme si le caddy était un chapeau sans fond duquel on peut extraire sans fin toutes sortes d'objets qu'il fallût bien inventer un jour, mais on ne sait plus trop pourquoi. Lorsque tout fût déballé, la vieille prit une chaise, se posa très exactement face à l'axe du soleil qui déclinait, et elle s'endormit. Tous ceux qui traversaient la place n'étaient qu'un instant du rêve de la vieille dame au soleil.

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D'un côté de la ficelle, il y a 22 camions dont l'ordre dans la file procède d'un indéchiffrable calcul qui associe les caractéristiques de chaque camion, la longueur de l'attelage, la place relative de chacun, le trajet à parcourir, la configuration astrale et l'humeur de Looping.

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Looping c'est l'homme au gilet de signalisation qui tire ses camions dans le 15ème arrondissement. Looping, ce n'est jamais que la vie de chacun qui tourne en boucle à l'intérieur du monde qu'il s'est créé.

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