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24/09/2013

Une taffe, chef ?

Le manager passait par là. Le salarié fumait un joint, ou plutôt un présumé joint devrais-je dire pour rester juridiquement correct. Mais le manager voulût en avoir le coeur net : un test salivaire plus tard, l'affaire était faite et dans la foulée le salarié licencié pour faute grave au motif que le règlement intérieur proscrit de venir travailler sous l'effet de drogues ou d'en consommer dans l'entreprise. Le CHSCT ne l'entend pas de cette oreille et saisit le Conseil des Prud'hommes en référé pour faire annuler le test salivaire, considéré comme portant atteinte à la dignité du salarié et à sa santé mentale (toutes choses auxquelles le joint n'a pas accès). Le Conseil suit l'avis des représentants du personnel et annule le contrôle, en rappelant une règle générale : l'entreprise peut procéder à un test salivaire mais uniquement s'il est prévu par le règlement intérieur et s'il concerne exclusivement les salariés occupant un emploi qui peut présenter un danger pour leur sécurité ou celle d'autrui. Autrement dit, il ne peut y avoir, comme pour l'alcool, de proscription générale. Aussi, l'inoffensif consultant peut-il toujours fumer au travail puisqu'il ne menace la sécurité de personne. 

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Il serait bon, dans ce domaine, que les entreprises conservent quelques principes en tête : le premier est qu'elles ne gèrent pas des personnes mais le travail de ces personnes. C'est d'ailleurs pour cela que l'on peut parler de ressources humaines, car le salarié n'est envisagé qu'en sa qualité de personne au travail et non d'individu.  Et de ce fait, toute décision doit être contextualisée et ne peut être déconnectée du travail. Le second principe est qu'en matière de stupéfiants,  la France est, de loin, le pays le plus fortement consommateur de médicaments en Europe et que les substances de nature à modifier le comportement sont diverses et variées. En l'occurrence, fumer un joint est d'un point de vue juridique la même chose qu'avaler un lot de pastilles ou  se jeter une rasade de whisky. Le salarié aurait-il été licencié s'il avait été pris la flasque à la main ? et cela nous amène à un troisième principe : en ces domaines, il vaut mieux se pencher sur les conséquences que sur les causes. En l'absence d'impact sur le travail, le comportement du salarié n'est répréhensible qu'au plan moral et la morale, comme on le sait, ce n'est pas le droit. Et puis franchement, si l'on se met à licencier les fumeurs de joints, ce n'est pas demain qu'on va inverser la courbe du chômage.

test_salivaire.pdf

Commentaires

Henri Lachmann a dit un jour que l'entreprise était en France à peu près la dernière institution qui tenait la route et qui structurait les individus. Ces arrêts à répétition qui autorisent tout et n'importe quoi sous prétexte de liberté individuelles (on sait très bien que les fumeurs de pétards sont peut être de bons musiciens mais rarement fiables et au top au travail), ces arrêts précipiteront un peu plus notre économie vers la fin du salariat. Mettez vous à la place d'un patron (pas un PDG qui attend son parachute plus ou moins doré) et vous lui expliquez que ses salariés ont 18 % d’absence en plus depuis 2 ans, qu'ils peuvent se "droguer" sur les lieux de travail (le joint est de la drogue et les jeunes qui en fument sont en général désocialisés et perdus pour de vraies études), qu'ils peuvent regarder raisonnablement des films porno (ou leur série TV préférée) pendant leurs heures de travail, avoir des dossiers personnels sur leur PC de travail, faire leurs courses l'après midi avant de quitter le travail, avoir des PV et ne pas les payer, qu'ils peuvent ne pas revenir de vacances mais ne pas être considérés comme démissionnaires... bref vous imaginez la vie du patron d'une PME de 10 personnes qui doit garder des clients et se battre 60 h par semaine pour assurer la survie de sa boîte.
Quel est sans doute son but le plus cher : il va liquider sa boîte, revendre pendant qu'il en est temps, le repreneur gardera quelques experts dans l'entreprise (ou la dépécera) et le travail aura fuit de notre pays une fois de plus.

Tout le monde le sait, tous les rapports internationaux le disent : le problème du travail en France, c'est avant tout le code du travail. En Suisse il y a 3 % de chômeurs, pas de SMIC, un code du travail de 20 pages et les Suisses gagnent 2 fois mieux leur vie que les français (ah oui j'oubliais ils travaillent non seulement tous, mais plus de 40 heures par semaine et souvent au delà de 65 ans sans se plaindre que la vie est trop dure et les vacances trop courtes.

Nous allons dans le mur avec le toujours plus et la générosité ne doit pas empêcher la lucidité

Écrit par : cozin | 24/09/2013

Loin de moi l'idée de passer pour un "vieux con réac.", mais je dois avouer que je partage la même analyse que mon collègue de commentaire...
Sur le fond de la problématique exposée, rien à dire, c'est légalement parfaitement dans les clous, ce qui est bien. Il ne faut pas permettre à n'importe qui de s'ériger en "justicier" et de contrôler sans limite ce que font les salariés.
Le développement fait par J.Pierre Willems est, comme à son habitude, remarquable (flatterie gratuite et sincère ...).
Ce qui m'interpelle est l'attitude du salarié qui, malheureusement, fait montre d'un je-m’en-foutisme de haut niveau, ce qui est de plus en plus répandu... Dans mon métier des Ressources Humaines, le mot "humain" revêt pour moi une importance fondamentale, mais ce n'est pas une raison pour nier ce que je constate malheureusement tous les jours... Une Entreprise se doit d'avoir des règles qui régissent son fonctionnement... Le nombre de start-up disparues aujourd'hui peut attester de ce fait. Comme tout fonctionnement grégaire, l'être humain a besoin de règles.
De plus, vous vous focalisez sur l'Entreprise, mais il est aujourd'hui prouvé que fumer des"substances illicites" est dangereux au volant. l'Employeur est responsable d'un salarié qui aurait bu au sein de l'Entreprise, et aurait causé à sa sortie un accident de la route, quid de la drogue? Un salarié de nuit, qui prendra le volant fatigué et drogué ne serait-il pas également sous la responsabilité de son Employeur?
D’ailleurs, la photo qui illustre cette chronique est sans appel... on peut aisément constater les effets du pétard sur l'être humain, aussi brillant soit-il ...
Au fait, n'est-il pas interdit de fumer dans une Entreprise??? et ce que ce soit du tabac ou autre substance ...

Écrit par : Shrek 66 | 24/09/2013

Dans le prolongement de ce qui vient d'être dit, un arrêt récent de la Cour d'Appel de Bordeaux (13 juin 2013) :

http://bit.ly/18eqfsH

Écrit par : bcallens | 25/09/2013

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