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10/10/2014

Binaire

Ce n'est pas parce que le droit est binaire qu'il manque de subtilité. La cour de cassation vient d'en faire la démonstration en requalifiant en CDI des CDD successifs conclus sans délai de carence.

Le Code du travail prévoit en effet deux règles : la première est que le délai de carence ne s'applique pas entre des contrats conclus pour remplacer un salarié absent. La seconde est qu'un délai de carence s'applique entre deux contrats conclus pour accroissement d'activité. D'où l'angoissante question : oui mais entre un CDD de remplacement et un CDD pour surcroît, faut-il appliquer une carence ? le juriste prudent (ce n'est pas un pléonasme, n'en déplaise aux juristes prudents...) dans le doute appliquait le délai de carence. Mais nombre de revues juridiques avaient retenu que le délai de carence n'étant pas expressément prévu, il suffisait de respecter "un certain délai" avant de conclure un autre contrat. D'autres estimaient que faute d'interdit, il n'y avait pas matière à imposer un quelconque délai.

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La décision de la Cour de cassation du 29 septembre 2014 tranche l'affaire. Se basant sur le fait que les CDD sont interdits (principe qu'il est bon de rappeler lorsque 80 % des embauches se font sous ce régime) sauf dans les cas autorisés par la loi, elle en conclut que l'interdiction est le principe et que l'autorisation doit être expresse. Et constatant que l'absence de délai de carence n'est prévue que pour une succession de CDD de remplacement, elle juge qu'entre un surcroit d'activité et un remplacement le délai de carence s'impose, même si le code du travail n'en parle guère. Nouvelle preuve qu'il n'y a pas de vide juridique pour la raison que dès qu'un vide se profile à l"horizon, il est aussitôt rempli par un principe. Reste à prendre des paris pour savoir si l'on utilisera le même que le juge.

16/01/2014

Au seuil de l'orage

La décision était attendue depuis presque deux ans, la Cour de cassation ayant demandé en avril 2012 à la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) s'il était conforme à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne d'exclure les contrats aidés du calcul de l'effectif pour l'application des seuils sociaux. La décision vient d'être rendue le 15 janvier 2014.  Le litige était né dans une association d'insertion, comptant une dizaine de permanents mais plus de 100 contrats aidés, et qui pour autant n'avait pas à mettre en place un comité d'entreprise. Le droit fondamental mis en cause en l'espèce était celui du droit à l'information et à la consultation des travailleurs. Certes le juge a donné tort à la CGT, à l'origine de la question, sur le fond de l'affaire mais au motif qu'un particulier ne pouvait directement invoquer la Charte et qu'il devait se retourner contre l'Etat pour engager sa responsabilité du fait de n'avoir pas mis la loi nationale en conformité avec le droit européen. Le détour tiendra l'orage à distance pendant quelques temps encore, mais il ne saurait être infranchissable.

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Potentiellement, l'impact est énorme car aujourd'hui tous les contrats d'insertion bénéficient d'une mesure d'exclusion des seuils, mais également tous les contrats en alternance. L'application stricte du droit européen devrait donc conduire à réintégrer dans les effectifs des entreprises tout ce beau monde et à compter tout le monde, contrats de professionnalisation et d'apprentissage inclus. Mais pour cela, il faudra attendre que le Gouvernement, qui risque fort de traîner les pieds au mépris du droit mais avec le souci de ne pas alourdir les charges des entreprises, propose une modification de la loi. Pour l'instant, donc, il continue à ne pleuvoir que dans la mer.

18/12/2013

Action collective

Il n'y a pas que la formation professionnelle qui connaisse son big-bang. La prévoyance est également en train de connaître le sien avec la décision du Conseil Constitutionnel en date du 13 juin dernier, qui interdit les clauses de désignation dans les accords collectifs. Par clause de désignation, on entend possibilité pour une convention collective de rendre obligatoire l'adhésion et la cotisation de toutes les entreprises d'un même secteur à un organisme de régime complémentaire de santé. Pour le Conseil Constitutionnel, la possibilité de choix et la possibilité de concurrence doivent prévaloir sur l'obligation. C'est oublier un peu vite qu'il est des secteurs ou l'action n'est efficace que lorsqu'elle est collective.

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Dans une remarquable tribune publiée par l'AEF, Jacques Barthélémy explicite pourquoi sous couvert de libre concurrence, on fait prévaloir les intérêts particuliers, dont on sait que la somme n'a jamais constitué l'intérêt général, sur les intérêts bien compris des entreprises et des salariés. L'exemple donné du secteur de la boulangerie est parfaitement éclairant. Et le parallèle avec la formation pourrait être frappant : moins de mécanisme collectifs et plus de renvoi vers le libre choix de chacun, il n'est pas certain au final que ces "chacun"ne soient pas perdants.

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28/10/2013

Malade pas incapable

Cette fois-ci, l'affaire est entendue : le salarié est un individu autonome, capable de prendre des décisions, et dont la subordination ne doit pas être confondue avec la soumission. Résultat, même si le salarié est en arrêt maladie, et donc par définition pas dans son état normal, il n'est pas exclu qu'il soit en capacité de conclure une rupture conventionnelle. C'est en tout cas ce que vient de décider la Cour de cassation dans une décision du 30 septembre dernier.

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Il était déjà acquis qu'une rupture conventionnelle pouvait intervenir dans un contexte conflictuel dès lors que la volonté du salarié n'avait pas été forcée. Il en est donc de même en cas de maladie, serait-elle due selon le salarié à ses conditions de travail. Il n'y a donc plus que les cas de fraude à une protection du salarié (accident du travail ou maladie professionnelle, inaptitude, maternité,...) qui constituent des situations limitant pour l'entreprise et le salarié la possibilité d'engager une négociation sur la fin du contrat de travail.

Et sinon, l'illustration n'a rien à voir avec le sujet, je sais, mais avec Lou Reed, ce sont les années 70 qui continuent de s'effacer, et avec lui, avec elles, le monde d'avant. Hey Honey, take a walk on the wild side !

Cour de cassation 30 septembre 2013.pdf

27/06/2013

On vous l'avait bien dit...

...qu'il était inutile d'essayer de faire jouer à la rupture conventionnelle le rôle d'une transaction en insérant dans l'accord une clause par laquelle le salarié s'interdit tout recours ultérieur à propos de la rupture de son contrat de travail mais aussi, tant qu'on y est, pour tout autre motif. La Cour de cassation vient de juger qu'une telle clause est dépourvue d'effet mais que pour autant elle ne remet pas en cause la rupture conventionnelle. Encore raté pour ceux qui croient toujours que l'on peut se protéger d'un contentieux par une petite phrase en bas du contrat. 

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On peut donc toujours conclure une rupture conventionnelle et assigner ensuite son employeur soit pour contester la validité de l'accord donné (ce qui reste très difficile à établir), soit pour formuler des demandes distinctes de la question de la rupture. En fait, il n'y a qu'un évènement qui protège véritablement de tout contentieux à venir : c'est le contentieux. Le principe d'unicité d'instance interdit en effet de s'y reprendre à deux fois en matière prud'homale. Le meilleur moyen de transiger, de manière définitive, est donc de le faire devant le juge. Mais cela n'empêchera pas certains avocats de continuer à conseiller de faire du droit psychologique, celui qui marche tant que l'autre y croit. En quelque sorte, l'inverse du pari sur l'intelligence. Du coup, quand c'est raté, on va pas pleurer.

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13/12/2012

Vie privée, vie publique

L'employeur ne peut s'intéresser à la vie privée de ses salariés. Cela constituerait une discrimination puisque la situation de famille fait partie de la liste des 18 discriminations prévues par le Code du travail (art. L. 1132-1). Mais la vie privée du salarié peut être opposée à l'employeur, qui la découvrira donc à cette occasion. Dans une affaire jugée le 12 octobre dernier, la Cour de Cassation a une fois de plus confirmé que la vie privée du salarié constituait un casse-tête pour les entreprises qui auront sans doute du mal à se repérer dans les règles à appliquer, notamment en matière de mobilité.

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Il s'agissait d'une salariée dont le contrat de travail comportait une clause de mobilité. Son entreprise la mute de la Rochelle à Niort en application de cette clause. La salariée refuse, invoquant notamment que son mari est entrepreneur à La Rochelle. La Cour d'appel valide le licenciement par l'entreprise pour non-respect de la clause de mobilité. Pas la Cour de cassation qui censure au motif que la mutation portait atteinte au droit de la salariée à une vie personnelle et familiale. Passons sur l'inégalité fondamentale, discriminatoire, qu'une telle décision porte en germe : la situation de famille d'un salarié permettra de justifier ou non une décision puisqu'ici une salarié célibataire n'aurait pu s'opposer à la clause de mobilité. Et constatons que ce que l'employeur n'a pas le droit de connaître ni de considérer, par principe, il doit le prendre en compte lorsque le salarié l'invoque. A multiplier ainsi les injonctions contradictoires à l'encontre des employeurs, il n'est pas certain que l'on contribue à l'atteinte de l'objectif recherché. Car qui pourra légitimement expliquer à un employeur qu'il ne doit pas tenir compte de la situation de famille d'un salarié et ne poser aucune question à ce sujet, si c'est cette situation qui détermine le champ de sa capacité de décision ? les juges sont-ils naïfs à ce point ? toujours est-il qu'ils viennent de se tirer une balle dans le pied et peut être, contrairement aux apparences, dans celui des salariés qui ont parfois déjà bien du mal à protéger leur vie privée.

Cass. soc., 17 octobre 2012.pdf

09/12/2012

Transmission versus acquisition

En 1907, Picasso a 26 ans, il a déjà peint un des tableaux les plus importants de l'art moderne et de toute sa production, qui sera encore longue. En 1862, Ingres a 82 ans, il peint  5 ans avant sa mort un chef d'oeuvre qui est une synthèse de tout son art et dont la modernité est époustouflante. Si les deux hommes s'étaient rencontrés, qui aurait été le tuteur de l'autre ? aucun bien évidemment, mais ils auraient échangé ou plus surement encore, ils se seraient montré leurs productions et auraient bu des coups ensemble. Peut être auraient-ils commentés cette phrase de Picasso : "A dix ans, je peignais comme Raphaël, mais cela m'a pris toute ma vie de dessiner comme un enfant".

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Picasso - Les demoiselles d'Avignon - 1907

Les partenaires sociaux ont signé le 19 octobre 2012 un accord sur les contrats de génération. Dans ce texte, est abordée la question de la transmission des compétences. La modernité est ici présente dans le refus de la figure traditionnelle de l'ancien qui initie le plus jeune. Le texte invite à mettre en place des actions organisant la transmission des compétences, qui concerne sans hiérarchie préétablie les deux acteurs principaux du dispositif. Encore mieux, le texte invite à créer des situations de travail qualifiantes, car c'est bien là que se situe la véritable question : plutôt que de transmission linéaire, il s'agit de créer les conditions de nouvelles acquisitions, le plus souvent partagées. Apprendre ensemble plutôt qu'apprendre de l'autre. Faciliter l'acquisition sans transmission, c'est sans doute la condition d'une véritable qualification de tous. Pour en savoir plus, vous pouvez lire ci-dessous la chronique écrite avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF qui commente plus en détail l'ANI du 19 octobre 2012. Mais n'oubliez pas auparavant de passer par le bain turc. Bon lundi à tous.

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Le Bain Turc - Ingres - 1862

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06/09/2012

My Generation

C'est parti ! après les contrats d'avenir qui ressemblent furieusement aux contrats du passé (désolé, pas résisté) sans toutefois arriver à innover comme le faisait le dispositif des nouvelles qualifications au début des années 80, voici les contrats de génération qui vont associer un jeune et un senior dans un bel élan paternaliste ou le papa senior sera tuteur du fiston junior pour lui mettre le pied à l'étrier et lui apprendre les bons vieux trucs des anciens. C'est pas touchant ça ? pour le coup, l'imagination a encore oublié de s'inviter au pouvoir et l'on nous ressert la transmission des compétences, comme l'horizon indépassable du senior. Ce faisant, on continue à reproduire le modèle de l'ancienneté des trente glorieuses comme si quelques révolutions culturelles et technologiques n'étaient pas passées par là. Avec le retour de la morale à l'école, antienne de nos gouvernements successifs, on a tout de même l'impression que le passé ne passe pas et qu'inventer des solutions nouvelles adaptées à un contexte qui évolue plus vite que les individus qui tentent d'y survivre est hors de portée de nos gouvernants successifs. Pas très excitant tout ça. Mais enfin, tout le monde à l'air content. Plus ou moins, mais content, du MEDEF à la CGT. Pour ma part, quitte à retourner dans le passé, au contrat de génération je préfère mille fois My Generation, c'est carrément plus Rock'n Roll et surtout c'est pas démodé.


28/08/2012

Et la liberté devra être homologuée...

La loi du 25 juin 2008 a créé la rupture conventionnelle homologuée. Ce dispositif, qui concernera plus de 250 000 salariés en 2012, n'était pas une innovation dans son principe : ce qu'une volonté a faite, une même volonté peut le défaire. La rupture conventionnelle existait déjà, elle n'est pas remise en cause par la rupture conventionnelle homologuée. Simplement la première produit les effets sociaux et fiscaux d'une démission (rupture volontaire du contrat), alors que le passage par une rupture conventionnelle homologuée permet de bénéficier d'un régime favorable pour les indemnités versées dans le cadre de la rupture et pour l'accès au régime d'assurance-chômage. Comme Jean-Emmanuel Ray le fait, on peut donc distinguer la RC1 (mode général de rupture d'un contrat) et la RC2 (rupture homologuée) qui ouvre des droits particuliers. Tel n'est pas l'avis des juges de la Cour d'appel de Riom qui considèrent que seule une rupture homologuée peut permettre à un employeur et un salarié de défaire le contrat qu'ils ont signé. Et voilà comment la liberté contractuelle se trouve assujettie à l'imprimatur de l'administration.

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Philippe Hortala - Les jours heureux, liberté chérie - 1986

Dans une décision du 12 juin 2012, la Cour d'appel de Riom pose en effet en principe que toute rupture amiable du contrat de travail doit obéir aux règles de la rupture homologuée. Le dispositif particulier de la rupture homologuée vient donc supplanter le droit commun de la rupture des contrats et le principe général de la possibilité de résiliation amiable. Adopter une telle position liberticide n'a pas semblé une préoccupation majeure pour les magistrats sans que l'on sache très bien si cela résulte d'une mauvaise humeur passagère, d'un assoupissement regrettable ou des effets indésirables d'une cure thermale draconienne dans les villes d'eau des jolis monts d'Auvergne. Vite une cassation et un renvoi vers la Cour d'appel de Bordeaux afin que l'esprit de Montaigne, de Montesquieu et du Médoc fasse souffler de nouveau la liberté.

12/06/2012

Le provisoire ne dure pas

Au grand jeu de la Cour de cassation, chacun peut tenter sa chance, même sans garantie sur le résultat. Ayant sans doute en tête que les juges suprêmes n'apprécient guère les avenants au contrat de travail qui permettent, en augmentant provisoirement la durée du travail, de contourner les règles du travail à temps partiel, l'avocat a conseillé à son client de contester la validité d'un avenant au contrat organisant l'exercice provisoire d'une fonction complémentaire à son travail. En l'espèce il s'agissait d'effectuer les missions d'un salarié malade pendant le temps de la maladie, en sus de son propre travail. Un avenant a été conclu prévoyant une indemnisation supplémentaire du salarié pour la charge de travail et une fin de cette situation au retour du malade. Le salarié conteste cette possibilité de retour arrière : il a donné son accord au départ, il doit le donner également à la fin, sinon la situation doit perdurer. Erreur de jugement lui répond la Cour de cassation (Cass. soc., 31 mai 2012), l'avenant temporaire est parfaitement valable en matière de missions supplémentaires. Perdu.

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Plutôt que d'envisager le gain potentiel, le salarié et son avocat auraient du penser à ces sculptures de sable dont la période va bientôt revenir. Elles durent au mieux un été puis se fondent dans la plage et ne laissent guère de trace. Car ce qui est conçu pour être provisoire ne saurait devenir permanent. La beauté du provisoire est aussi dans l'instant, qu'il est vain de vouloir prolonger. Pour l'avoir oublié, le salarié se retrouve n'avoir bâti avec son contentieux que des châteaux de sable.

06/06/2012

Concurrence interne compétitive

Elle répond au doux acronyme de CIC. La concurrence interne compétitive est une de ces trouvailles manageriales construites sur des clichés promus au rang de concepts sociologiques voire philosophiques. Ceux qui sont à l'oeuvre ici sont assez simple: l'individu n'est motivé que par l'argent, la concurrence créé une émulation positive. Et c'est ainsi que certains dirigeants, expliquent à leur encadrement médusé, atterré, catastrophé, désespéré ou hilare selon la distance qu'ils arrivent à prendre, qu'au lieu d'organiser la coopération entre les salariés pour être efficace il faut au contraire les mettre en concurrence en interne, d'ailleurs la preuve cela se pratique dans certaines équipes de football (pendant ce temps, les rugbymen travaillent le collectif). En remontant un peu plus loin, ils auraient pu, mais cela aurait sans doute gâché la démonstration remonter à la concurrence fratricide de Caïn et Abel ou à Cronos, Saturne pour les latins, qui dévora ses enfants parce qu'une prédiction lui avait indiqué qu'un de ses fils lui ravirait le pouvoir. Mais peut être ces exemples de concurrence entre proches n'auraient-ils pas été les bienvenus dans la démonstration.

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Goya - Saturne dévorant un de ses enfants

Le salarié pensait benoitement que la concurrence au sein d'un même groupe, cela n'existait pas. Ancien directeur d'un hypermarché Leclerc et tenu par une clause de non concurrence, il savait ne pas pouvoir prendre la direction d'une autre enseigne. Alors il se fit embaucher par un autre hypermarché Leclerc et somma son ancien employeur de lui verser la contrepartie de la clause de non-concurrence. Refus de ce dernier au motif que la clause n'était pas respecté et rendez-vous pour tout le monde devant le juge. Le salarié candide expliqua au tribunal  qu'il ne saurait y avoir de concurrence au sein d'un même groupe. Le juge, qui connaît la Bible et la Mythologie, lui rétorqua que c'est souvent auprès de ses proches que l'on trouve ses principaux concurrents (Cass. soc., 16 mai 2012, n° 11-10.712). L'histoire ne dit pas si les hypermarchés s'en portent mieux.

08/05/2012

Contractuel ?

Curieuse inversion des temps. Nous étions habitués à une gauche législative et une droite préférant la négociation et le contrat, la liberté des parties, plutôt que la contrainte légale. Or en cinq ans plus de 250 lois ont été votées et c'est le nouveau Président qui annonce que le contractuel lui tiendra lieu de méthode de gouvernement. Voilà d'ailleurs peut être une des raisons qui ont donné le résultat que l'on sait :un Gouvernement de droite qui a aussi souvent recours à la contrainte législative a du désespérer au sein même de son électorat. La multiplication, dans le champ des ressources humaines, des obligations de négocier (sans même percevoir l'oxymore que recèle l'expression) pourrait en être une illustration. Reste donc le contractuel qui nous est annoncé. Sera-t-il au rendez-vous ou bien les vieux réflexes ressurgiront-ils dès l'automne avec les premières chutes de feuilles ?

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Car il existe à gauche une solide tradition de jacobinisme centralisateur appuyé sur un principe d'égalité et d'unité républicaine. Paradoxe encore, c'est pourtant la gauche qui est à l'origine de la décentralisation et notamment celle de la formation professionnelle. Deux cultures seront mises en tension. La première militera pour une action législative visant à renforcer, ou plutôt refonder, un service public de la formation considéré comme vertueux par nature. La seconde, héritière du social-delorisme, n'aura recours à la loi que pour fixer des orientations et laissera les corps intermédiaires, remis de leurs émotions, en responsabilité pour conduire les évolutions nécessaires. On nous annonce que le Président d'après le 15 mai s'inscrirait clairement dans la seconde perspective. Encore un qui va faire des mécontents dans son propre camp.

Quotidien de la Formation - Centre INFFO.pdf

26/04/2012

Un vrai travail

Lorsque les partenaires sociaux ont créé le contrat de professionnalisation en 2003, et non un énième contrat de formation, c'est bien pour signifier à toutes les parties concernées que la formation ne résultait pas exclusivement de l'action de formation suivie en dehors du poste de travail, mais également de l'exercice de ce travail. Venant après la VAE, la professionnalisation, qui vaut tant pour les contrats que pour les périodes, c'est la reconnaissance que le travail apporte, comme la formation, des compétences mais pas les mêmes et pas de la même manière. Un parcours de professionnalisation, ce n'est pas une formation où on apprend et un travail dans lequel on applique ce que l'on a appris en formation. C'est deux moyens différents d'acquérir des compétences distinctes qui concourrent ensemble à la professionnalisation. Dans une décision du 12 avril dernier, la Cour de cassation valide la prise d'acte de la rupture d'un contrat de professionnalisation par un salarié parce que l'entreprise ne lui a pas confié un travail lui permettant de se professionnaliser. Au regard de l'objet du contrat, pas un vrai travail donc.

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La formule des juges est lapidaire : en ne donnant pas un travail au contenu suffisant, l'employeur n'a pas assuré l'obligation de formation qui lui incombe.

On souhaite que cette décision serve de point d'appui pour cesser de traiter le contrat de professionnalisation comme le seul support du suivi d'une formation. Combien d'OPCA aujourd'hui, puisque c'est désormais eux qui ont en charge de valider les contrats, vérifient le contenu de l'emploi occupé, exigent la fiche de poste et valident un parcours associant des compétences développées dans le travail et en formation ?  le jour où tout les emplois seront qualifiants et apporteront des compétences, le jour où l'on cessera de bâtir des modèles d'activité sur la standardisation des comportements et au final sur la déqualification des salariés, ce jour-là on saura peut être ce qu'est le vrai travail. En nous en proposant une définition, les juges ont ouvert la voie.

Cour de cassation - 12 Avril 2012.pdf

13/12/2011

Le casse-tête du droit à la vie de famille

Le juge persiste et signe dans sa volonté de faire du droit à la vie personnelle et familiale un principe de droit du travail opposable aux employeurs. L'intention est louable, mais comme on le sait, sous la plage des bonnes intentions surgissent souvent les pavés de l'enfer. Illustration dans une affaire récente. Un salarié travaille selon des horaires un peu alambiqués mais essentiellement le matin. L'employeur, tel un agent des chemins de fer, lui annonce que ses horaires seront modifiés et prendront dorénavant place essentiellement l'après-midi. Le salarié considère qu'il ne s'agit plus de modifications de ses horaires mais de véritables bouleversements qui modifient son  contrat de travail. Il refuse donc. Saisi de la question le juge répond par un principe : "sauf atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa  vie personnelle et  familiale ou à son droit au  repos, l’instauration d’une nouvelle répartition du travail sur la  journée relève du  pouvoir de  direction de  l’employeur" (Cass. soc., 3 novembre 2011, 10-14.702).

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Lisa Carletta - Famille Beaupoil de Sauveboeuf - 2009

Voilà donc le salarié doté d'un droit à la vie personnelle et familiale et l'employeur sommé de le respecter. Rappelons tout de même que la vie personnelle et familiale du salarié ne peut fonder une décision de l'employeur, au risque de constituer une discrimination. L'entreprise est donc placée dans la difficile situation de tenir compte de ce qu'elle ne saurait connaître : "Cachez ce sein que je ne saurai voir"...mais montrez le s'il devait vous permettre d'en tirer avantage. Et au passage, l'employeur devra adopter des solutions différentes envers les salariés en considération de leur situation personnelle, déclarativement établie, au risque de ne plus maintenir l'égalité de traitement entre les salariés qui ont des personnes à charge, ceux qui n'en ont pas, ceux dont le conjoint travaille ou non, ceux qui n'ont pas de conjoint, etc. A ce stade, les angles coupants qui caractérisent les pavés des bonnes intentions produisent les effets que connaissent bien les coureurs de Paris-Roubaix : foutre en l'air en quelque seconde ce qui a été patiemment construit de longue date. La voie empruntée par les juges n'est pas plus sûre que la tranchée d'Aremberg. Il est à craindre que le juge qui s'y est égaré ne contribue à distribuer de la confusion dans les entreprises et en voulant tracer des frontières protectrices atteigne le paradoxal effet de les abolir. Bon courage en tous cas à ceux qui vont devoir traduire ces jurisprudences en décisions manageriales.

23/06/2011

Quitte ou double

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail connaît un succès croissant : harcèlement, modification unilatérale du contrat, non paiement d'heures supplémentaires, ...toute faute de l'employeur peut être propice à un départ du salarié, qui cherchera ensuite à obtenir devant le Conseil des prud'hommes des dommages et intérêt pour licenciement injustifié. La formule peut s'avérer intéressante pour le salarié et certains ne résistent pas à l'envie de tenter leur chance devant le juge. Mais comme au Casino, il est possible de perdre sa mise devant le juge. La prise d'acte est souvent un dangereux quitte ou double.

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Marce Ferrero - Quitte ou double

Le salarié peut certes réaliser la martingale : indemnités pour licenciement injustifié, assurance chômage et divers préjudice (perte de la possibilité d'utiliser le DIF, etc.). Mais il peut aussi perdre gros. La Cour de cassation, dans une décision du 8 juin 2011 vient de condamner un salarié dont la prise d'acte est qualifiée de démission, à indemniser son employeur pour préavis non effectué. Et ce salarié devra en plus rembourser les indemnités d'assurance chômage qui lui ont été versées par provision. Au final, tout cela lui coûtera bien plus cher qu'une démission. Sans doute les juges ont-ils voulu sanctionner à la fois un salarié qu'ils estimaient de mauvaise foi et donner un signal à tous ceux qui seraient tentés par l'aventure : ce n'est pas à tous les coups que l'on gagne.

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11/02/2011

Société du contrat

Près d'un tiers des familles sont des familles recomposées. Corrélativement, le nombre de mariages et de PACS ne cesse d'augmenter. Et alors ? alors on peut y voir un signe que notre société évolue de la norme de l'institution vers celle du contrat. Tout étudiant en droit apprend que le mariage a une double nature. Celle d'institution, le mariage ayant un régime préétabli auquel on adhère, et celle de contrat, l'adhésion s'effectuant par une double volonté, expresse et commune. Il ne s'agit donc pas d'un contrat dont les termes sont librement définis et dont on pourrait revisiter à loisir le contenu, mais d'une adhésion contractuelle à une institution. Le contrat de mariage ne règle d'ailleurs que les questions financières, il ne définit pas le mode de relations entre époux qui sont déterminées par la loi et non négociables, au moins au plan juridique. Il est dès lors logique que si, entre les conjoints, la dimension contractuelle prend le pas sur l'institution, le nombre de ruptures ne peut qu'augmenter. Et à l'évidence, la dimension institutionnelle du mariage se perd au profit de sa dimension plus contractuelle. Comme Eros et Psyché s'opposèrent à la colère des Dieux pour faire prévaloir leur amour interdit.

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François Picot - Eros et Psyché - 1817

Si ce bouleversement a lieu dans la vie privée, il ne peut être absent de la vie publique et de la vie sociale. Et lorsque l'on parle du déclin des institutions (Eglise, Armée, Ecole, Entreprise, Etat,...) il s'agit sans doute moins d'un rejet global que d'une demande d'évolution de la relation, d'une contestation de l'autorité descendante, de l'organisation pyramidale, de la prescription sans explication, de la vérité hiérarchiquement et institutionnellement établie, bref d'un certain ordre social. Et d'une demande, quel que soit son rang, sa place et sa fonction, a être traité sur un plan égalitaire dont la traduction est la relation contractuelle. Or, l'institution est un repère simple à la pratique aisée, puisque tout est prédéterminé, alors que le contrat suppose de renégocier régulièrement, de partager le pouvoir, de voir redéfinie sa légitimité, de n'avoir comme acquis que sa capacité de persuasion, de considérer que tout compromis n'est pas de la compromission, de ne plus aborder les problèmes en terme de tort/raison mais de solution à construire, etc. Bref, le contrat est d'une pratique plus coriace que l'institution. Le paradoxe est que l'institution contestée est aussi recherchée pour la protection qu'elle offre : étant prédéfinie, elle offre des garanties à qui ne peut ou ne sait négocier et sa stabilité peut rassurer. On aura compris que la question n'est pas d'opposer l'institution au contrat, mais de faire évoluer celle-ci pour laisser plus de place à celui-là.

10/01/2011

Temps partiel peu avenant

Au cours des années 90, le temps partiel était considéré comme un outil de la politique de l'emploi et il convenait de l'encourager. Il fut d'ailleurs assorti d'exonérations de cotisations sociales : tout contrat était un emploi, serait-ce à temps partiel. Depuis le début des années 2000, changement de régime : considérant que le temps partiel était plus souvent subi que choisi, le législateur (en l'occurence la loi Aubry de janvier 2000 pour l'essentiel) fit le choix, jamais remis en cause depuis, de rendre plus strictes les règles relatives au travail à temps partiel pour ne pas en faire un outil de flexibilité du travail à disposition des entreprises. Ce renversement de perspective pris, on s'en doute, un certain temps avant d'entrer dans les moeurs. D'où l'occasion pour le juge de s'associer régulièrement à cette oeuvre de cantonnement du travail à temps partiel, qui pour être valide doit rester...partiel.

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Salvador Dali - Hallucination partielle

Dans une décision du 7 décembre 2010, la Cour de cassation décide que le régime des heures complémentaires doit s'appliquer à des heures de travail effectuées par un salarié à temps partiel en application d'un avenant prévoyant une augmentation temporaire de son temps de travail. On connait la manip : une embauche à temps partiel sur une base réduite et puis en fonction des besoins (surcroît d'activité, absence d'un salarié, ...) conclusion d'un avenant qui pendant quelques jours ou quelques semaines augmente le temps de travail. Ce détournement manifeste a déjà été sanctionné par le juge. En l'espèce, un élément supplémentaire est apporté dans la mesure où cette pratique était prévue par la convention collective (secteur de la propreté). Peu importe dit le juge, les règles du Code du travail sur le travail à temps partiel sont d'ordre public et une convention collective ne peut y déroger. Les heures effectuées dans le cadre de l'avenant constituent des heures complémentaires qui doivent donc être majorées à 25 % et doivent également être comptabilisées sur 12 mois et leur moyenne automatiquement ajoutée à la durée contractuelle de base. Rajoutons un risque supplémentaire, si l'avenant conduit à faire travailler le salarié à temps partiel à temps plein, serait-ce pendant une courte période, la requalification du contrat en contrat à temps plein pourrait également être demandée.

Il est donc désormais acquis que l'avenant qui augmente ponctuellement la durée du travail à temps partiel est illicite, indépendamment de la volonté du salarié ou des dispositions de la convention collective. Nouvelle occasion pour le juge de rappeler que le champ du négociable ne s'étend pas à l'infini mais qu'il est borné par les dispositions légales.

Petite remarque en forme de jeu : cherchez la logique qui veut que l'on encourage les heures supplémentaires et dissuade les heures complémentaires. Cadeau surprise à la clé !

 

19/11/2010

S'ils le veulent bien

C'est un des articles les plus fameux du Code civil, vieux de plus de deux siècles. Il s'agit de l'article 1134 qui affirme solennellement que "Les conventions légalements formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites". Autrement dit, les conventions qui respectent la loi méritent d'être élevées à la dignité de la loi. Sans oublier jamais qui les a faites reines. Cette conception du contrat, individuel ou collectif, n'a guère évolué depuis 1804. La loi toute puissante concède au conventionnel d'occuper le terrain que l'on accepte de lui céder, moyennant la redevance permanente de la déférence. Et gare à qui voudrait s'affranchir des limites du champ dans lequel il convient de brouter avec bonne humeur : la loi veille et elle ne plaisante guère.

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La déférence est souvent présente chez les négociateurs d'accords collectifs de travail soit par recherche du confort de l'abri légal, soit par crainte de la transgression, soit par tactique pour négocier a minima, soit par conception hiérarchique des rapports entre la loi et l'accord. Bref, les bonnes, et surtout les mauvaises, raisons ne manquent pas laisser à la négociation une place seconde. En cette période où vont s'ouvrir des négociations sur la formation professionnelle au niveau des branches, il serait souhaitable que les partenaires sociaux affirment cette autonomie et, pour paraphraser Reine Malouin, qu'ils la prennent et n'attendent pas qu'on la leur donne. La chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF indique comment la négociation de branche pourrait être un espace d'autonomie et d'innovation, si les négociateurs le veulent bien.

La négociation de branche sur la formation professionnelle.pdf

20/11/2009

Conflit non pathologique

La négociation est la mise en scène d'un rapport de force. Elle connaît parfois des moments conflictuels, voire violents. Elle est pourtant très saine. Elle suppose en effet que les deux parties acceptent le cadre fixé pour la négociation : elles sont déjà d'accord sur ce point et pour jouer le jeu. Elle suppose la reconnaissance de la liberté d'autrui comme interlocuteur ayant qualité pour négocier : on ne négocie pas en dictature ou pendant les révolutions. Elle suppose une volonté, mais pas une obligation, d'aboutir. Bref, entrer en négociation c'est reconnaître que le conflit d'intérêt est naturel et qu'il s'agit d'organiser sa résolution dans un cadre pacifié, soit une vision non pathologique du conflit. Comme la lutte avec l'ange, qui n'est pas vraiment un combat, ce qu'a compris Delacroix qui l'a traduit dans l'attitude de l'ange.

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Delacroix - Lutte de Jacob avec l'ange - Eglise Saint-Sulpice
La vision pathologique du conflit est celle qui considère le conflit comme anormal, inadmissible et fait du contradicteur un ennemi. La postulation contradictoire est vécue comme une négation de soi, le conflit est posé en terme de vérité/erreur - tort/raison et sa non résolution suscite un grand sentiment d'injustice. Bref, cette vision conduit à une hystérisation du conflit, génératrice de souffrance laquelle va venir alimenter la vision pathologique. Un cercle peu vertueux on en conviendra.
Sortir du pathologique, c'est accepter que l'autre soit reconnu comme légitime à défendre d'autres intérêts que les notres et reconnaître sa liberté d'agir ainsi. Mais il est parfois difficile d'accepter la liberté d'autrui qui renvoie souvent à ses propres entraves. A cette condition, le conflit peut être générateur de dialectiques, de dynamiques qui permettront de le dépasser. Ainsi vue, la négociation pourrait bien être le symptome du passage d'une société à l'âge adulte.

17/03/2009

Le champ du négociable

Avant de procéder à la recherche de reclassements possibles dans le cadre d'un licenciement économique, l'employeur demande aux salariés de répondre à un questionnaire listant leurs souhaits, notamment les zones géographiques vers lesquelles ils accepteraient une mobilité. Puis il fait des propositions en fonction des souhaits recueillis. Cette procédure, fréquente en pratique, n'est pas juridiquement correcte selon la Cour de cassation car non conforme aux dispositions du Code du travail qui imposent à l'employeur de rechercher tout reclassement possible dans les emplois de même catégorie voire de catégorie inférieure (C. trav., art. L. 1233-4). L'employeur ayant une obligation exhaustive il ne peut ni préjuger du choix des salariés ni réduire la portée de son obligation, serait-ce en accord avec le salarié. L'erreur ici fut de croire que le reclassement pouvait être effectué d'un commun accord alors qu'il s'agit d'une responsabilité exclusive de l'entreprise qu'elle ne peut partager avec le salarié. L'erreur porte donc sur le champ du négociable.

 

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Van Gogh - Champ de blé aux corbeaux - 1890

L'accord des parties ne peut pas tout : inutile de faire signer à un salarié un contrat par lequel il accepte d'être payé moins que la convention collective, de rembourser ses salaires en cas de faute ou de démission, de renoncer à une prime conventionnelle du fait de la situation économique de l'entreprise, d'aller en formation en dehors du temps de travail sans percevoir l'allocation formation, etc. Peu importe que l'accord du salarié soit réel, sincère voire même que le salarié soit demandeur. La première question à se poser pour la validité d'un accord est : l'objet même de l'accord est-il négociable ? à défaut, l'accord n'a pas de valeur, bien que signé par le salarié. Il constituera parfois du "droit psychologique", c'est-à-dire celui qui n'est pas sécurisé mais qui repose sur la méconnaissance du droit par l'une des parties, ou bien un accord légitime, reposant sur la confiance, mais non valide. La différence entre les deux est dans la confiance réciproque. Gageons toutefois que l'on peut conclure un accord basé sur la confiance et néanmoins juridiquement correct. Valide, confiant et légitime en somme.