30/05/2014
Ambivalences
Dans une ville portuaire, on s'attend à un monde horizontal, imbriqué dans la mer comme une main dans un gant. On anticipe également des horizons industrieux, laissant place aux machines et refoulant les hommes dans les cabines, les soutes, les docks, les camions, enfermés dans la tôle, le fer et l'acier. Et l'on découvre à Anvers une horizontalité lascive dans une ville qui s'arrête de travailler tôt le soir, heureuse coutume des pays nordiques, et qui ne se demande pas s'il faudrait travailler les jours fériés. Pas besoin d'aller très loin pour vérifier que le mythe du français qui serait toujours en RTT tandis que ses voisins se tuent au travail est une mystification totale.
Et sur le port, la verticalité qui s'impose n'est pas celle des grues, mantes religieuses qui fouillent les entrailles des bateaux sans relâche, mais celle du MAS, qui rappelle les trois omniprésences de la Flandres : la terre rouge des briques, le ciel blanchi de nuages et la mer qui le reflète.
En ces terres ouvertes sur la mer et le voyage, la diversité semble chose naturelle.
Elle ne l'est pourtant pas, tant il est vrai que la flamboyance des jeunes filles n'en finit plus d'effrayer les hommes.
Les frontières de l'enfermement et de la liberté ont parfois des contours imprécis.
C'est ainsi qu'en tout lieu, se côtoient la grisaille et la couleur.
Le piéton des villes est un éternel amoureux des ambivalences.
11:08 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anvers, ville, port, diversité, travail, photo, week-end
28/05/2014
L'Europe sans socle
Au départ, l'affaire paraissait simple : les partenaires sociaux avaient fait du socle de compétences la priorité du Compte personnel de formation (CPF). Dans ce socle, il y avait les savoirs de base, la maîtrise des outils informatiques et bureautiques, la maîtrise d'une langue étrangère, la capacité à apprendre et la capacité à travailler collectivement. Et puis les députés ont décidé qu'il y aurait un droit à l'absence, salaire maintenu par l'entreprise sans qu'elle soit remboursée, sur les formation relevant du socle de compétences. Ce qui a conduit à se demander si le socle de compétences n'allait pas se réduire aux actions de lutte contre l'illettrisme. Finalement, peut être pas, le socle devrait retrouver de l'ampleur, sauf toutefois les langues, au moment où l'Europe ne sait plus très bien quelle langue elle parle.
Gustave Moreau - Jupiter et Europe
Il n'est pas anodin que les langues ne soient jamais considérées comme une priorité mais comme des formations de confort, de pure consommation et d'intérêt personnel. Pourtant, que ce soit au plan économique ou social, c'est bien par là que l'on devrait commencer. Parler la langue de l'autre, avoir accès à sa culture et à ses pratiques, accéder à l'information diverse, sortir de soi pour s'ouvrir à des mondes nouveaux, tout ce qui a manqué à l'Europe ce week-end, sauf peut être, comme d'habitude, au Sud. Voilà ce que pourrait être un socle sans les langues d'ailleurs, une Europe sans le Sud, c'est à dire pas vraiment l'Europe.
01:41 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : socle, compétence, langue, europe, sud, élection, formation, travail, éducation
21/05/2014
Le droit est arrivéééééé.....
On réclamait Mickey, et voici Zorro. Toujours disponible lorsque l'on a besoin de lui, le juge choisit dans une décision du 7 mai 2014 de venir au secours des responsables formation qui, hier, appelaient le droit à la rescousse. Après avoir sanctionné l'absence de toute formation pendant 16 ans, puis 15 ans, puis 12 ans puis 10 ans, la barre est désormais fixée à 7 ans. On se rapproche de la toise positionnée par la loi du 5 mars 2014 à 6 ans, puisque toute entreprise doit désormais justifier d'un taux d'accès à la formation de 100 % sur 6 ans. Selon les juges, l'absence de formation établit le manquement à l'obligation de maintien de l'employabilité. Et à l'entreprise qui demandait à la salariée d'indiquer en quoi son employabilité s'était dégradée en 7 ans, la Cour de cassation répond que l'absence de formation constitue en elle-même le manquement. Voilà qui a le mérite d'être clair. Zorro est arrivé.
Maurizio Cattelan - Sans titre - 1996
Certes, la décision souffre de deux limites. La première est que la salariée a obtenu une indemnité de 6 000 euros pour le préjudice, soit une prime de 1000 euros par an, ou presque, pour l'absence de formation (ne posons surtout pas la question aux salariés de savoir s'ils préfèrent être formés régulièrement ou percevoir une indemnité compensatrice). Ce qui reste dans la fourchette des indemnisation accordées jusque-là à ce titre (entre 3 000 et 7 000 euros). Mais surtout, et c'est peut être ce qui risque d'être le plus contreproductif, à l'heure où l'on essaie de mettre l'accent sur le résultat plus que sur le moyen, sur l'employabilité plus que sur la formation, le juge persiste à considérer la formation comme l'unique moyen de l'employabilité. Mais il faut bien qu'il assume jusqu'au bout son rôle de Zorro. On dit merci qui les responsables formation ?
21:53 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, DROIT DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : droit, formation, travail, emploi, justice, zorro, art, contemporain
20/05/2014
Au secours le droit !
Mon gamin, quand il doit se tirer d'un mauvais pétrin, il lui arrive d'appeler Mickey à la rescousse. Lequel, avec son tourniquet et son maxi-outil mystère, arrive sans tarder et lui permet inévitablement de retourner la situation. On ne compte plus les Responsables Formation qui souhaiteraient avoir un Mickey, et il m'arrive de faire office de..., à disposition pour expliquer aux dirigeants de l'entreprise qu'il faut maintenir le budget formation. Et pour ce faire, le droit est souvent sommé de fournir les arguments qui feront éclore l'ancestrale peur du gendarme afin que les dirigeants tétanisés ne referment pas trop brutalement le carnet de chèque. Et l'affaire Renault, hein, le défaut d'adaptation qui conduit à la faute inexcusable, on peut pas identifier un risque pénal sur la non adaptation des salariés à leurs activités ? et je suscite invariablement la déception, j'en suis bien conscient, lorsque j'explique que la formation n'est jamais qu'un contentieux très accessoire aux enjeux financiers très faibles et au risque pénal quasi-nul. Dans ce domaine, le gendarme n'est pas très terrifiant.
Jansson Stegner - The Rosebush
Mais plus fondamentalement, si l'on en arrive à l'argument juridique, c'est un constat d'échec qu'il faut dresser. Echec à démontrer que la formation peut accompagner les projets, les individus, les équipes, les changements, qu'elle peut insuffler de l'innovation, générer de la créativité, garantir les processus, créer du confort de travail, développer la performance, passer des messages, créer une culture d'entreprise, distribuer de la reconnaissance, alimenter le dialogue social, être source de profits, et bien d'autres usages encore. Et tout ceci, il ne suffit pas de le dire ou de l'écrire, il faut le faire toucher du doigt par des projets, des actions réussies, des promoteurs internes, de la réussite d'autrui mise en valeur. Bref, il s'agit de faire véritablement son métier de responsable formation, et ce retour (pour ceux qui l'avaient perdu) aux fondamentaux de la profession est sans doute un des plus appréciables impacts de la réforme de la formation.
00:32 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : formation, gendarme, peur, management, travail, emploi, réforme
19/05/2014
Quelle cachette ?
Discussion avec un enseignant-chercheur :
"Pour nous la disparition de la déclaration 2483 ce n'est pas une bonne nouvelle car nous allons manquer de chiffres pour analyser l'effort de formation des entreprises...
- mais cette déclaration est déconnectée des coûts réels et absolument pas fiable tant chaque entreprise déclare de manière différente...
- peut être mais au moins nous avons des séries sur plusieurs années..."
Discussion avec un autre enseignant-chercheur :
"Je suis en train de mener une étude sur l'impact du dialogue social sur la formation et la GRH...
- Très intéressant ! et est-ce que vous allez aborder l'impact du paritarisme de gestion, et des OPCA, sur la négociation ?
- Ah non, nous travaillons avec les données existantes..."
On connaît l'histoire du type qui cherche ses clés sous le lampadaire parce que c'est le seul endroit éclairé. Et bien avec des recherches de ce type, qui seront bien évidemment présentées comme scientifiques et donc établissant des vérités garanties vraies, on est pas sorti du halo du lampadaire. L'hôtel La cachette ne craint donc rien et il a bien raison de s'afficher.
01:14 Publié dans HISTOIRES DE CONSULTANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : enseignant, chercheur, recherche, scientifique, étude, travail, emploi, formation, hôtel, cachette
17/05/2014
Breton en Normandie
L'homme propose et dispose.
Il ne tient qu'à lui de s'appartenir tout entier.
André Breton
22:34 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mer, normandie, breton, surréalisme, liberté, citation, week-end
16/05/2014
A semer le vent...
il est vrai que pour un employeur, cela peut faire beaucoup : entretien avec les salariés en forfait jour, entretien professionnel, analyse individuelle des postes pour la pénibilité, compte personnel de formation, , extension du champ de la modification du contrat de travail, rupture conventionnelle, renonciation individuelle aux 24 h du travail à temps partiel,...la liste est longue des dispositifs juridiques nouveaux qui renvoient à une négociation ou une discussion individuelle avec chaque salarié. Ce qui génère un temps de travail démesuré, et ce qui conduit souvent à ne pas faire, ou à faire formellement, faute de ressources pour cela. De quoi alimenter le ras-le-bol des lois et obligations nouvelles. On pourrait faire cette analyse si l'on ne se posait pas la question de savoir d'où vient le vent...
Car si rarement le droit a autant multiplié les dispositifs individuels ce n'est jamais que par continuité avec l'individualisation des pratiques de gestion des ressources humaines initiée par les entreprises elles-mêmes. C'est parce que les entreprises ont préféré traiter les questions manageriales essentiellement dans un rapport individuel plutôt que dans un rapport collectif que, fatalement, le droit a été amené à se saisir des questions sociales à ce niveau. Si la technique de l'entretien d'appréciation, d'évaluation, d'objectifs ne s'était pas généralisée dans les entreprises, jamais nous n'aurions eu d'entretien professionnel. La frénésie juridique d'individualisation n'est jamais que l'écho du vent qu'ont fait souffler les entreprises sur les méthodes de GRH. A souffler tous ensemble dans le même sens, il ne faut pas s'étonner de se faire un jour emporter par la rafale.
01:01 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grh, ressources humaines, travail, emploi, individualisation, vent, droit, actualité
14/05/2014
Quoi de neuf à l'horizon ?
Séminaire sur l'emploi organisé par Bercy et le Ministère du Travail consacré à la formation professionnelle. L'occasion de dire l'état du droit sur la formation après la réforme du 5 mars 2014. En cinq points :
1. Le droit fait injonction aux entreprises de former tous leurs salariés et de s'occuper de l'employabilité de tous dans le cadre d'une responsabilité sociale d'employeur ;
2. Alors que la loi oriente les financements vers les formations certifiantes, il ne faut pas oublier la valeur sociale des actions d'adaptation en ce qu'elles permettent effectivement aux salariés de faire face à leurs activités et de maîtriser leur situation de travail ;
3. Contrairement à une idée qui se répand à tort, le CPF n'est pas fait pour suivre des formations longues diplomantes mais pour prendre l'habitude d'aller régulièrement en formation, ce qui est le principe même des droits rechargeables et le pourquoi de l'éligibilité de chaque module de formation certifiante au CPF et de l'éligibilité des certifications non diplomantes ;
4. La notion d'investissement formation, à définir par chaque entreprise, nous permettra peut être d'éviter l'empilement de dépenses fiscales de nature différente pour arriver au fameux chiffre de 32 milliards qui n'a aucun sens, pas plus que l'exploitation des déclarations 2483 qui sont très loin d'appréhender la réalité de l'effort de formation des entreprises ;
5. Si l'on veut à tout prix faire évoluer la qualité des prestations de formation, supprimons la règlementation propre aux organismes de formation et appliquons à ce secteur le droit des prestations de services et mettons en place des systèmes de certification, distincts de la règlementation, qui constituent des repères et non des obligations.
Pour plus de détail, voir ci-dessous.
09:08 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, DROIT DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : bercy, emploi, formation, travail, éducation, droit
13/05/2014
Postcards from NY
Allez, encore un petit peu, comme ça, juste pour le plaisir, avec tous les clichés auxquels vous pensiez avoir échappé, style la skyline en plein jour et le vieux brooklyn bridge à qui on ravale encore le fondement.
Et la presque bientôt terminée One World Trade Center, plantée au dessus des deux trous béants du mémorial du 09/11.
Tout autour des bassins noirs, les noms des pompiers ensevelis dans le brasier de l'effondrement des twins.
La grande tour bleue et ses fantômes par millier ne fait pas d'ombre au Flat Iron.
Dans la Grande Pomme, tout est great, pas toujours de bon goût, mais toujours great.
Alors on ne s'étonne pas de voir l'homme araignée jouer à saute mouton par dessus les blocs colorés de la ville downtown. Il y a quelques années sur ce panneau une publicité disait : "Ce sont des hommes en jeans qui ont bâti ce pays".
Et ce sont les mêmes qui mettent des drapeaux partout, même sur le cheval de fer qui traverse le pont de Manhattan en faisant trembler tous les boulons et toute la ferraille dans un bruit de fin du monde. Mais comme dirait Cendrars, le train retombe toujours sur ses roues, le train retombe toujours sur toutes ses roues.
Central Park c'est une autre planète, la lisière de la ville du Nord, froide, hautaine, un peu absente à elle-même. Vous prenez juste le temps de regarder le ciel et puis vous redescendez : downtown !
Parce que la vie elle est là, près des docks, des friches qui s'effacent peu à peu, des traces du 19ème siècle qui s'accrochent à leurs histoires et qui se foutent bien des tours de carbone et de verre qui vont venir fêter leur défaite.
Car ici le passé n'est pas une nostalgie, c'est juste un moment vers le futur, comme l'averse est une promesse de soleil. Sade, qui n'a jamais quitté la vieille Europe, a pourtant forgé ce qui pourrait être la devise de la ville : "Le passé radieux a fait de brillantes promesses à l'avenir : il les tiendra".
Et s'il ne les tient pas, spiderman viendra lui péter la gueule, à condition qu'il ne se prenne pas le poteau.
02:03 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : new-york, voyage, ville, photo
11/05/2014
So long Saul
Il suffit d'un peu de brume, de quelques gouttes de pluie, d'une douce confusion qui s'installe dans le temps, les couleurs, les lieux et les pourquoi, pour que s'impose, dans sa ville d'élection où il est mort le 26 novembre dernier, l'image de Saul Leiter.
Officiellement, Saul Leiter était un photographe travaillant pour des magazines de mode.
En réalité, c'était un clandestin qui aimait la liberté, avait refusé l'ordre social paternel, et s'était emparé d'un appareil photo sans intention particulière, juste parce que c'est un travail qui se fait en marchant et en regardant. Et parce qu'il aimait prendre des photos.
Et que Saul Leiter était bien persuadé qu'en tout lieu on peut trouver des interstices qui ouvrent grand les portes du mystère.
C'est presque par hasard que Saul Leiter exposa ses photos au MoMa et c'est pas tout à fait par hasard qu'il laissa passer d'autres occasions d'y exposer encore.
Saul Leiter avait l'élégance de ceux qui ne sont jamais dans leur bon droit, ceux qui ont l'évidence de la sensation comme philosophie et la disparition comme art de vivre.
Il aurait pu continuer à rôder autour de son bloc d'East Village et à prendre des photos, toujours les mêmes, jamais la même.
Il avait raison de penser que toute porte qui s'ouvre est une promesse d'heureuse surprise, tout en se fichant éperdument de savoir s'il avait raison.
La jubilation est une exubérance intérieure qui ne trouve pas d'autre manifestation extérieure que le clin d'oeil à qui veut bien le voir. Une manière de rendre visite aux amis en quelque sorte.
Saul Leiter avait photographié la belle Audrey, à Paris, en Noir et Blanc, en passante des quais de Seine...elle est installée en couleur, près de chez lui, guettant le flâneur en dérive.
Par jour de brume légère, il n'y a pas de doute, le passant passera, comme un clin d'oeil. So long Saul.
11:45 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0)
08/05/2014
Fashion victim
Il est à croire que toutes les photos de mode sont faites à New-York (sauf s'il y a plus de revues que je ne peux l'imaginer). Pas de jour sans tomber sur une séance de shooting, et inévitablement, en de multiples ricochets, les amatrices, aspirantes, prétendantes, impétrantes et futures covergirls s'essayent à la pose.
On en viendrait à croire que le mariage n'est qu'un prétexte...
...quant aux professionnels on les repère sans problème, eux ils ne s'amusent jamais...
...et les hommes ne sont pas en reste...
...pour les femmes, le mystère demeure : un seul et même modèle fait-il fureur en ce mois de mai ou bien les canons de la beauté sont-ils aussi figés que les mâchoires des belles ?
...et puisqu'il s'agit d'attirer l'oeil, autant faire direct...
...la photo étant par définition un plaisir de voyeur, il ne faut pas négliger, au milieu des corps exposés, le charme des beautés cachées...
...reste un mystère, quelle est donc la nature du plaisir que prennent ces jeunes gens à se faire photographier. Franchement, on a pas idée...
06:42 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mode, fashion, modèle, new-york, usa, photo, shooting
07/05/2014
Périphéries
En France, les penseurs des années 60 ont mauvaise presse : Deleuze, Foucault, Barthes, Lacan...sont renvoyés au rayon des intellectuels verbeux déconnectés, presque par définition, de ce que serait la réalité. Les rhizomes de Deleuze et Guattari ont pourtant gagné en actualité. Ils renversent la vision hiérarchique et postulent que l'organisation rhizomique n'a pas de centre, chaque élément ayant son influence propre sur les autres de manière non subordonnée. Une belle manière d'appréhender la ville.
Car aux Etats-Unis, la French Theory fait toujours recette. Et si le dernier livre de Thomas Piketty est en tête des ventes des livres économiques, les frenchys des années soixante ont toujours un lectorat. Peut être dans ce quartier de Bushwick, à l'écart de l'énergisante Manhattan et à l'abri de la gentrification de Brooklyn (message personnel : Alain, dans quelques mois ton ancien atelier sera un Hôtel 5 étoiles).
Dans ces espaces périphériques, les immeubles bas et les larges avenues accueillent la lumière à bras ouverts et sont un appel à la couleur. Et l'on peut constater que c'est dans les périphéries que la normalisation de l'habitat a pris sa source avant de gagner irrémédiablement les centres villes qui bientôt n'en seront plus.
Comme ailleurs, la religion et la consommation sont les deux piliers de la société et leurs temples saturent l'espace.
Dans les périphéries, il arrive que le temps soit plus long. Que l'attente se fasse plus présente. Sans autre but qu'elle même. Aujourd'hui, demain et pour les siècles...vous connaissez la formule.
Devant chaque maison, chaque fenêtre, chaque carrefour, chaque immeuble coincé entre un expressway et un centre commercial, une voie de métro aérien et des friches qui attendent le promoteur, devant chaque lieu où quelqu'un rentre chez lui le soir, se pose la question : comment vit-on ici ? de quoi est faite la vie en ces lieux ? et l'on voudrait vivre à tout endroit à tout instant pour expérimenter sans fin, pour aller encore un peu plus loin.
Chaque panneau de location est une invitation à la disparition.
Dans les périphéries, comme dans les centres, l'entre-soi est de mise. Répartis par nationalité, par classe sociale, par idiome ou par origine, les groupes humains se rassurent par la grégarité. Car le groupe vous offre en sécurité ce qu'il vous demande d'abandonner en liberté.
Alors on peut choisir de faire de sa vie un long tunnel balisé dans lequel il n'est que peu de place au questionnement. Et le pire, si l'on peut dire, c'est qu'il n'est pas exclu que le tunnel soit rose.
16:04 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : périphérie, centre, ville, voyage, marche, photo, new-york, brooklyn
06/05/2014
Contemporain
L'art contemporain mérite parfois les procès qu'on lui fait, lorsque le discours et le concept tentent vainement de combler la pauvreté de l'oeuvre ou quand la prétention et l'absence d'humour sapent irrémédiablement toute signification. Mais tout ceci n'empêche qu'il faut y retourner, ne serait-ce que parce que c'est un moyen d'être dérangé, de penser contre soi-même.
S'ouvrir à des expériences nouvelles c'est l'attention de cette petite fille dont le regard embrasse la toile pendant que sa maman met des mots sur des motifs.
Et que peuvent penser les deux amies de cette femme, cette autre, au regard fixe qui les fixe et les trouble, peut être malgré elles.
Mais il n'y avait pas que des filles pour la biennale du Whitney Museum, au contraire, l'ambiance était très gay.
L'essentiel lorsque l'on sort d'un musée est de savoir si l'art y est resté enfermé où s'il est sorti avec nous. La réponse à la question est dans ce qui se présente à notre regard.
Car tel est, pour ceux que le non sens effraieraient, le sens de l'art, changer la vue pour changer la vie.
08:16 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art, contemporain, musée, regard, vue, new-york
05/05/2014
En couleurs...et en musique
Technicolor pourrait être le nom du dernier super héros de Stan Lee. Son pouvoir : mettre de la couleur partout afin que la grisaille disparaisse de l'horizon et que paraisse la joie de vivre. Une sorte de Matisse en plus moderne si vous voulez. Technicolor vole, virevolte et d'un coup de pinceau multicolore, comme chez Disney, il envoie la barbouille !
...et sa palette s'accorde à la lumière du ciel. Les jours de voile céleste, elle s'adoucit et s'alanguit, comme le jeune homme faussement endormi qui s'efforce de nous signaler que David Bowie vit dans les parages. Gare à toi l'affiche en noir et blanc, Technicolor va s'occuper de tes états d'âme...
...car Technicolor n'aime pas l'uniformité des couleurs et se refuse à rendre le monde triste pour doper la consommation...
...alors Technicolor, c'est plus fort que lui, se jette sur les murs qu'il repeint, le plus souvent, de rouge. Rouge comme les lèvres. Technicolor il aime bien les lèvres...
...le problème c'est que comme tous les passionnés, il ne sait pas toujours très bien où s'arrêter, ni où se trouve la limite du goût...
...vite, changeons de couleur pour mettre fin à l'obsession. Tiens virons au bleu, à l'outremer, à l'indigo, au bleu prusse ou au pastel, pour retrouver les couleurs du monde d'avant...
...et une figure humaine, car Technicolor aime bien les gens. Il a même la faiblesse de croire que tout le monde est un super héros...
...en même temps, il faut bien reconnaître que les gens sont formidables, inépuisablement créatifs et joyeusement surprenant. Tenez, tombée de l'averse qui a brumisé Central Park, une danseuse sortie de sa boite à poupées...
...dont le geste a tant troublé Technicolor qu'il est allé le déposer chez tous ceux qu'il croisait...
...et pour encourager ces danseurs improvisés, Technicolor eût la bonne idée d'offrir à tous, avec ces supers pouvoirs, un peu de musique que nous livre ce pianiste, tout heureux d'avoir soudain un piano sous doigts au coeur de la rue. Merci Technicolor !
07:35 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : danse, couleur, musique, photo, architecture
04/05/2014
Décor des corps
L'énergie repose, elle galvanise et les corps reviennent dans le décor. Des pulsations parcourent la ville, à tous les rythmes et sur tous les tempos. Il ne faut donc pas s'étonner de voir les corps s'animer.
...et quand risque de surgir l'ennui, alors on danse...
...et le corps assoupli est mieux disposé à l'abandon que réclame la lecture...
...dans laquelle on peut être tout entier absorbé...
...car la ville des migrants, de la finance, du commerce, du nouveau départ, des faiseurs de monde, des faiseurs de rêve, de la puissante frénésie, de la confiante agitation, de l'idée perpétuelle et du désir de faire, est aussi, évidemment, une ville littéraire...
...qui peut vous transporter à l'instant dans un film de Woody Allen...
...ou plus avant dans le temps, lorsque dans les docks coulait le sang de la vie de la ville...
...aujourd'hui, l'énergie est toujours là mais elle est plus douce...
...plus libérée également, moins de prohibition et moins d'inhibitions...
...c'est pourquoi les corps sont plus souples, moins agressifs, plus sensuels...
...et si le corps ne répond pas, ou plus, reste la voix, The Voice...
...car New-York c'est encore, et toujours, définitivement, la ville des Sirènes !
15:44 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : new-york, corps, danse, voice, sirène, ville, rue
03/05/2014
C'est reparti !
Mais qu'est-ce qu'il se passe ? il n'y a plus de chroniques sur ce blog ? il dort maintenant la nuit le consultant ? il faudrait lui rappeler qu'il se passe des choses en ce moment et qu'il faudrait peut être pas abuser des ponts, des week-ends et des congés ?
Ok, Ok, c'est reparti.....mais du côté de chez Hopper.
C'est le printemps, le retour de la couleur...
...de la plongée dans les douceurs des après-midi rougeoyantes, de la vie partout et des mystères de la foule et de la tentation d'y disparaître...
...le temps de la déambulation, des portes ouvertes, des départs et des belles occasions...
....le temps d'être à l'aise avec soi-même, et donc avec les autres...
...le temps de se souvenir qu'à regarder droit devant on en oublie ce que l'on a autour de soi...
....le temps de retrouver le monde ancien, celui des livres et des affinités électives, choisir avec qui on a envie de dialoguer...
...et puis se mettre en route, encore, toujours...
...se repasser sans fin la scène de fin, c'est dans les rues qu'on s'embrasse le mieux...
...les nuits sont chaudes comme les lumières de la ville, et on a toute la nuit. C'est reparti...
15:05 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vacances, new-york, en route, ville, nuit, printemps