05/05/2014
En couleurs...et en musique
Technicolor pourrait être le nom du dernier super héros de Stan Lee. Son pouvoir : mettre de la couleur partout afin que la grisaille disparaisse de l'horizon et que paraisse la joie de vivre. Une sorte de Matisse en plus moderne si vous voulez. Technicolor vole, virevolte et d'un coup de pinceau multicolore, comme chez Disney, il envoie la barbouille !
...et sa palette s'accorde à la lumière du ciel. Les jours de voile céleste, elle s'adoucit et s'alanguit, comme le jeune homme faussement endormi qui s'efforce de nous signaler que David Bowie vit dans les parages. Gare à toi l'affiche en noir et blanc, Technicolor va s'occuper de tes états d'âme...
...car Technicolor n'aime pas l'uniformité des couleurs et se refuse à rendre le monde triste pour doper la consommation...
...alors Technicolor, c'est plus fort que lui, se jette sur les murs qu'il repeint, le plus souvent, de rouge. Rouge comme les lèvres. Technicolor il aime bien les lèvres...
...le problème c'est que comme tous les passionnés, il ne sait pas toujours très bien où s'arrêter, ni où se trouve la limite du goût...
...vite, changeons de couleur pour mettre fin à l'obsession. Tiens virons au bleu, à l'outremer, à l'indigo, au bleu prusse ou au pastel, pour retrouver les couleurs du monde d'avant...
...et une figure humaine, car Technicolor aime bien les gens. Il a même la faiblesse de croire que tout le monde est un super héros...
...en même temps, il faut bien reconnaître que les gens sont formidables, inépuisablement créatifs et joyeusement surprenant. Tenez, tombée de l'averse qui a brumisé Central Park, une danseuse sortie de sa boite à poupées...
...dont le geste a tant troublé Technicolor qu'il est allé le déposer chez tous ceux qu'il croisait...
...et pour encourager ces danseurs improvisés, Technicolor eût la bonne idée d'offrir à tous, avec ces supers pouvoirs, un peu de musique que nous livre ce pianiste, tout heureux d'avoir soudain un piano sous doigts au coeur de la rue. Merci Technicolor !
07:35 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END, EN PHOTOS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : danse, couleur, musique, photo, architecture
01/04/2013
Il est libre Max
Son père était allemand et peintre, et très vite l'Allemagne, son père la peinture devinrent trop peu pour Max Ernst. Il quitta son pays de naissance, pour faire de chaque lieu son pays nouveau : Paris, l'Italie, puis New-York, l'Europe, Paris encore, la Touraine enfin qui nous vaut cet exceptionnel jardin de la France (voir ici).
La peinture aussi, c'était trop peu. Il inventa le frottage, que tous les enfants (au moins ceux du monde d'avant) on reproduit en plaçant une pièce de monnaie sous une feuille de papier, puis le décalcomanie, le grattage, multiplia les collages, entrepris de sculpter, s'essaya à toutes les techniques en bricoleur de l'art et du quotidien.
Max Ernst - Pléiades
Il participa à Dada, au Surréalisme, réalisa des décors de théâtre, illustra des livres, raconta des histoires, créa un personnage, Loplop, mi-homme mi-oiseau, comme Max Ernst était mi-peintre, mi-poète, mi-inventeur et quelques autres mi encore.
Max Ernst - Napoléon dans le désert - 1941
Il assembla et utilisa toutes les techniques, faisant naître des mondes oniriques que d'autres avant lui avaient visités, comme en témoignent les dessins de Bosch et de Bruegel également présentés en ce mois de mars à l'Albertina, dans un de ces hasards objectifs qui enchantent le monde.
Max Ernst - Tentation de Saint-Antoine
Cette capacité créatrice de Max Ernst, suppose de s'affranchir des cadres et catégories, de travailler en tous sens et d'associer sans cesse ce qui ne paraît pas naturellement s'assembler. Hier, lors de la visite de l'exposition d'Hundertwasser, découverte de cette phrase : "Notre illettrisme n'est pas notre difficulté à lire ou à écrire, c'est notre incapacité à créer". Hundertwasser se méfiait de la ligne droite comme de la peste, de ce qui segmente et sépare comme du choléra et il inventa une architecture de la rondeur, de la vie dans et hors des maisons et de la mise en harmonie de l'habitat et de la nature. Il abhorrait les règlements d'urbanisme et invitait chacun à peindre sa maison à son goût et à pouvoir la modifier sans architecte (l'architecture ne sera de l'art que lorsqu'elle sera autorisée à tous et non réservée aux architectes).
Hundertwasser - Village thermal
Hundertwasser - La forêt à spirales
A quoi bon l'art s'il ne nous permet pas de développer un regard neuf sur l'alentour et s'il ne nous conduit pas à déshiniber nos capacités créatrices. Toute l'histoire de l'art ne devrait pas se regarder comme l'histoire d'hommes et de femmes d'exceptions, mais au contraire comme un encouragement à ce que chacun fasse entendre sa voix personnelle. Bien loin du Panthéon des grands hommes, un appel lancé à tous les créateurs anonymes, les bricoleurs du quotidien, les inventeurs du dimanche et de tous les autres jours de la semaine, les enthousiastes de la nouveauté et de l'appropriation du monde par la créativité.
Schmoll - Plan de la machine à faire les crêpes
Et les commissaires de l'exposition avaient bien compris le message qui ont placé quelques occasion de créativité sur le parcours. Comme Max, pour nous encourager.
Big brother is shooting you !
01:09 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ernst, peinture, photographie, architecture, vienne, voyage, art, création, liberté
16/12/2012
Chronique démagogique
Il est rare que les architectes habitent les lieux qu'ils construisent. On aimerait parfois inclure une telle obligation dans le cahier des charges : vous résiderez pendant au moins un an dans les appartements que vous avez conçus. Peut être la conception s'en trouverait-elle modifiée. Bien sur, l'architecte n'est pas seul en cause : celui qui impose le cahier des charges, qui valide les choix, qui économise sur les matériaux ou la façon pourrait se voir demandé le même effort. Lorsque son travail n'a d'effets que sur autrui, il faut une grande exigence personnelle pour agir en étant guidé par l'empathie.
Jordi Colomer - Anarchitekton
Il faudrait peut être imposer aux experts qui formulent conseils et recommandations ayant des effets sur autrui, d'en subir également pendant quelques temps les effets. Peut être leur regard s'en trouverait modifié. On peut le suggérer aux membres du groupe d'experts qui se prononce invariablement pour ne pas revaloriser le SMIC ou pour modifier son calcul afin de limiter sa hausse. Ou aux rédacteurs du rapport de l'Institut Montaigne qui préconisent de réduire de 25 % puis de 50 % les allocations d'assurance chômage en ne garantissant au bout d'un an que 850 euros d'indemnisation. Et qui rêvent au détour d'une page, tout en constatant que bien sur ce n'est pas réalisable, que si on ne versait que 330 euros on économiserait 20 milliards par an. Et d'en conclure que notre système est vraiment généreux. Quant à ceux qui estiment que l'on peut vivre en France exclusivement de l'aide sociale, en général (c'est un euphémisme), ils n'ont jamais eu le bonheur de percevoir des minimas sociaux. Peut être devraient-ils tenter l'expérience. Mais il paraît que vouloir que chacun s'applique ce qu'il préconise, c'est démagogique voire populiste. Ce doit être vrai, ce sont les experts qui le disent.
22:56 Publié dans FRAGMENTS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dépense, impôts, emploi, allocations, social, institut montaigne, smic, architecture
30/07/2012
1 + 1 = 3
Dans une de ces banlieues américaines où les maisons s'alignent à l'identique, avec des drapeaux américains aux fenêtres, des pelouses tondues à l'anglaise, de larges allées, des arbres, des parcs, des églises, quelques magasins, un découpage de l'espace à la règle et à l'équerre, dans cette banlieue de Chicago qui s'appelle Oak Park, se trouve la maison natale d'Ernest Hemingway. Il y passa les premières années de sa vie avant d'emménager dans une maison plus vaste, mieux adaptée à la fratrie de 6 enfants. Ce n'est pas la maison dans laquelle Hemingway vécut jeune qui a été préservée, mais celle dans laquelle il naquit. Peut être parce que, comme il l'écrivit : "Nous naissons avec tout notre avoir et nous ne changeons jamais. Nous n'acquérons jamais rien de nouveau. Nous sommes complets dès le début".
Pourquoi Ernest Hemingway, fils de docteur et de musicienne, membres de la communauté conservatrice d'Oak Park, pourquoi donc est-il devenu Ernest Hemingway ? après 18 années passées dans cette banlieue chic et résidentielle, pourquoi les voyages, les guerres, l'alcool, la littérature, les femmes ? éternelle question : pourquoi devient-on ce que l'on est ? Pourquoi par exemple, Frank Lloyd Wright, considéré par ses pairs comme le plus grand architecte américain du 20ème siècle et dont la maison-atelier jouxte quasiment celle d'Hemingway, a-t-il développé à ce point l'architecture horizontale, dans une ville toute verticale. L'amour du lac Michigan ? ou des prairies qui donnèrent leur nom à son style d'architecture ?
Pour la guide qui assure la visite de la maison d'Hemingway, le jeune homme ne peut être ce qu'il est devenu qu'en s'inscrivant dans une filiation. De son père scientifique et amoureux de la nature il tient sa rigueur, son sens de l'observation et son goût de la pêche, et de sa mère artiste le talent littéraire. Mais tout ceci est un peu court car des jeunes hommes de bonne famille aux parents dotés de talents complémentaires il y en eût des milliers, et à toutes époques, et un seul Ernest Hemingway. Car ce souci biographique de déduire le présent du passé n'est que l'application du principe mathématique selon lequel 1+1 = 2. Or en matière de filiation, 1+1 = 3, et le passage du 2 au 3 demeure un mystère qui permet à tout être, serait-il complet lors de sa naissance, de tracer son propre chemin.
05:25 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, hemingway, architecture, frank lloyd wright, oak park, chicago