05/03/2014
Une circulaire peu inspirée
La loi de sécurisation de l'emploi était porteuse de multiples innovations, depuis la création du compte personnel de formation, jusqu'aux accords sur l'emploi ou la mobilité. Mais la mesure phare était sans conteste la mise en place de la Base de données unique, destinée à l'information des représentants du personnel : la nature des informations était revue dans une logique moins quantitative et plus qualitative, avec, pour la première fois depuis la création des comités d'entreprise en 1945, l'obligation pour l'employeur de donner une information prospective. Bref, la loi était plutôt inspirée. Le problème est que l'administration ne l'est guère.
Tanguy - L'inspiration
Dans un projet (sic) de circulaire publié le 26 février, le Ministère du Travail nous livre deux recommandations qui mettent à mal les objectifs de la loi. La première consiste à préconiser aux entreprises de remplir la base de données avec les informations déjà existantes, notamment celles du bilan social, dont la majeure partie (notamment celle qui concerne la formation) est totalement obsolète et non pertinente. Que l'on en juge sur la partie formation : alors que la loi nouvelle demande à l'entreprise de définir le montant de son investissement formation, ce qui pourrait ouvrir un utile débat sur la définition de cet investissement, la circulaire préconise de reprendre les données du bilan social, moyennant quoi l'investissement sera exprimé par un % de la masse salariale consacré à la formation, pourcentage dans lequel sont inclus les salaires qui n'ont jamais constitué un investissement. La deuxième recommandation est une mise en garde : la circulaire indique que tous les représentants du personnel qui ont accès à la base de données sont tenus à une stricte obligation de discrétion. Rappelons à l'administration que le propre d'un représentant du personnel est de représenter le personnel. Et que dans ce cadre là, il n'est jamais qu'un relais de l'information qu'il doit, c'est sa mission première pour exercer ses fonctions, répercuter auprès des salariés. Et que si les représentants du personnel sont soumis à une obligation de confidentialité pour les informations présentées comme confidentielles, il est hors de question de les empêcher de communiquer avec les salariés sur les informations reçues et les projets qu'elles sous-tendent, sauf à réduire le dialogue social à un échange entre personnes autorisées dont serait exclus les salariés. On peut difficilement avoir une approche plus institutionnelle et plus éloignée du fondement même du droit des salariés à la représentation. Une fois de plus donc, l'administration par une libre interprétation défait ce que la loi avait fait et pose les bases non pas de l'innovation et du développement d'un dialogue social qui ait du sens, mais de la perpétuation de tous les conservatismes. Comme on le sait, il est plus facile de changer les textes que les mentalités.
07:15 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : base de données, irp, ce, comité d'entreprise
Commentaires
Bonjour,
Il ne faudrait pas donner aux circulaires plus d'importance qu'elles n'en ont si elles ne font que présenter et commenter un texte légal ou réglementaire.
Rien n'est plus agaçant qu'une circulaire. On a la plupart du temps l'impression que leur auteur veut dispenser leurs destinataires de la lecture des seuls textes qui vaillent : la loi ou les décrets (ou les arrêtés) comme si seule leur prose était importante et intéressante...C'est souvent à la limite insultant. Je dirais même que c'est souvent perçu comme tel d'ailleurs.
Quant aux interprétations qu'elles donnent...Il faut, je pense, quelquefois savoir hausser les épaules.
Écrit par : bcallens | 05/03/2014
La circulaire est le complément des lois paresseuses ou pleutres. On ne décide rien que des grands principes dans la loi et les circulaires enterrent ensuite les grands principes.
C'est comme cela qu'on fonctionne en France avec la formation et le social, beaucoup de com mais bien peu de courage
Écrit par : cozin | 05/03/2014
Bonjour,
je suis désolé de venir contrarier vos beaux discours humanistes, mais nous sommes bien loin de la réalité du
terrain ...c'est super de signer des ANI, voter des Lois où tout le monde s’aime, et où le "vilain" patron donne le rênes de son entreprise aux "gentils" élus, mais sont-ils aptes à les prendre ?
Tous ces beaux accords sont signé avec le "gratin" du syndicalisme, mais qu'en est-il des élus "de base" avec qui nous, DRH, travaillons tous les jours ?
la mentalité actuelle est une défiance permanente vis à vis des employeur, une non collaboration au sein des instances, et un retour à un syndicalisme "de combat" à l'ancienne ... (retour ? mais avait-il disparu ???). Nous ne sommes pas en Allemagne ou en Suède qui, même si tout n'est pas rose chez eux,, ont une autre approche du monde du travail...
Mais excusez moi de vous avoir réveillé, on est beaucoup mieux dans les bras de Morphée, au pays des songes ... je vous laisse continuer à rêver que nous sommes au pays merveilleux de l'ile enchantée ...
Tiens d'ailleurs, je vais aller me faire un bol de Gloubi Boulgat !!!
Écrit par : Shreck 66 | 06/03/2014
bonjour
notre système de formation repose sur une base totalement schizophrénique qui laisserait penser que les "partenaires" sociaux sont les décideurs des orientations que prend le système (financement, accès, formations éligibles...) mais en vérité quand il y a des salariés syndiqués dans les entreprises ils rencontrent des difficultés avec les employeurs, quand ils ne subissent des comportements de rejet... d'où le manque d'enthousiasme effarant pour l'activité syndicale (on dit 8% de syndiqués) et le turn over peu actif au niveau des cadres des centrales syndicales ... donc oui ils sont un peu loin du terrain parfois. Et si on cherchait pourquoi?
Écrit par : kristine | 06/03/2014
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