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28/02/2014

Un sport de combat

- Well, well, well, Watson, si ne je m'abuse, cet aujourd'hui est bien le demain dont vous parliez hier, il est donc temps de faire valoir l'argument qui doit me donner l'envie, assez lointaine à cet instant il faut bien l'avouer, de rentrer...

- Je ne me déroberai pas Holmes, mais tout d'abord une question : vous êtes bien né dans un lieu de culture rugbystique, ce sport de voyou joué par des gentlemen...

- Et comment Watson, le rugby partage avec la boxe, que je pratique à un niveau décent si j'en crois les visages de mes adversaires, le plaisir d'entrer tout entier dans ces mots de Rimbaud : l'élégance, la science, la violence...

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- Et vous savez bien Holmes, en curieux de tout et amateur d'énigmes que vous êtes, qu'un texte de loi rédigé comme une circulaire, puisque c'est désormais ainsi qu'officie le législateur, est aussi difficile à appréhender que les baleines matinales...

- C'est juste Watson car le propre de l'écrit est de l'être deux fois : une fois par le rédacteur et l'autre par le lecteur...

- Vous en conclurez aisément Holmes qu'après le vote définitif de la loi sur la formation, la grande parade va commencer et que chacun ira de son commentaire...

- je vois bien où vous voulez en venir cher ami, et vous connaissez mon goût pour la joute d'arguments, conçue comme une dialectique formatrice...les débats à venir ne manqueront pas d'exciter ce goût, mais pas au point d'interrompre sans délai la sereine torpeur du moment...

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- Cette retenue toute britannique ne me surprend pas Holmes, mais là n'était pas mon argument...une invitation vient de nous parvenir de Bercy qui, dans le cadre de ses séminaires consacrés à l'emploi, vous invite à débattre de la réforme avec Marc Ferracci...

- Watson les hélicoptères sont de merveilleux fauteuils de cinéma volants, mais ils ont l'inconvénient de n'avoir aucun respect pour les fonctions auditives...pouvez-vous me confirmer ce que j'ai cru entendre ? 

- vous avez parfaitement compris Holmes, et je ne nous ennuierai pas à me répéter...

- pilote s'il vous plaît, pourriez vous avoir l'amabilité d'écourter cette enivrante plongée vers le lagon et de vous poser au plus vite...nous rentrons !

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27/02/2014

Du droit et de la justice

- Holmes, vous êtes bien pensif aujourd'hui, comme si votre corps et votre esprit avaient entièrement absorbé votre environnement pour en épouser le rythme...

- Cher Docteur et ami, votre perspicacité est aussi lumineuse que vos conclusions sont brumeuses...En vérité c'est ce petit panneau qui retient mon attention...

- Vous voulez dire l'inscription apposée sur la maison de la justice et du droit...

- Comme je le disais, Watson, vos fulgurances sont épatantes...si je contemple ce panneau c'est parce s'y trouve exprimées à la fois l'idée que la justice et le droit sont choses distinctes, ce qui est juste, mais également choses de même nature, ce qu'exprime la conjonction "et" qui relie les semblables...

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- Je vous avoue Holmes que si votre ironie me paraît bien facile, vos propos demeurent obscurs. Je ne vois pas en quoi Justice et Droit sont à la fois différents et semblables...

- Excusez ces mouvements d'humeur mon cher Watson, et mettez les sur le compte de la méditation interrompue...mais je vais répondre à votre interrogation...la justice peut s'entendre au sens moral, ce n'est pas de cela qu'il s'agit ici mais de la justice qui se propose de donner solution à tout litige et s'appuie pour ce faire sur le droit...sans faille, et sans vide comme vous le savez...

- De fait Holmes, vous répétez si souvent qu'il n'existe point de vide juridique, sauf dans la tête corsetée de quelques juristes et dans l'esprit approximatif de journalistes pressés, que cela ne m'a guère échappé...

- La justice est donc différente du droit en ce qu'elle est une manière d'en faire usage...mais elle est semblable à lui dans sa finalité...régler les relations entre les individus...car voyez-vous le seul objectif de tout ceci est strictement opérationnel tant il est vrai que ce sont les principes qui guident le mieux l'action...

- Fort beau discours Holmes...et pour abonder en votre sens je vous dirai que je pense avoir enfin trouvé le principe qui nous fera, de manière très opérationnelle, rentrer pour nous occuper de la loi nouvelle...

- Vous m'intriguez Watson, et quel est donc ce moyen ?

- Vous le saurez demain, Holmes, et d'ici là bonne nuit méditative...

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26/02/2014

Un nouveau pari

- Holmes ! Holmes ! cette fois-ci c'est fait ! la commission mixte a statué, la loi va être votée, il faut rentrer et commenter sans attendre...

- Watson, mon ami, je vous remercie pour la délicatesse dont vous témoignez à mon endroit en faisant mine de ne pas constater que le soleil voilé du volcan a totalement empourpré mon visage, généré de petites et ridicules poches d'eaux sous mes yeux et m'a virtuellement transformé en chinois écarlate et boursouflé...

- Puisque vous en parlez, Holmes, je vous avoue à ma grande honte et confusion que je me suis égaré à penser que les leçons que vous m'aviez donné ces jours derniers vous étaient rendues et même, pardonnez-moi, qu'elles n'étaient pas imméritées...

- Holmes, la sincérité est le gage de l'amitié, et vous êtes mon ami...

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Japon

- Merci Holmes, mais si nous ne rentrons pas avant que vous retrouviez de plus ordinaires couleurs, au moins pouvons nous commenter...vous pourriez dire en quelques mots ce que vous pensez de loi nouvelle maintenant que son contenu est fixé...

- Bien, je cède Watson. Vous connaissez mon goût pour la liberté, et conséquemment pour la responsabilité. Mesurée à ces deux critères, nous avons plutôt une bonne loi : moins de contrainte bureaucratique pour l'entreprise et plus de responsabilité d'employeur, plus de liberté pour le salarié avec le CPF et moins de contraintes dans le choix des formations, plus de possibilités de régulation pour les branches et un champ plus ouvert à la négociation...une seule véritable réserve, la même logique n'a pas été retenue pour les prestations de formation et les organismes qui les assurent...au final, à cette réserve près, un pari sur l'intelligence plutôt que sur la contrainte...

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La Réunion

- Mais Holmes, vous aviez dit la même chose il y a dix ans à propos du DIF : un pari sur l'intelligence et il semble bien qu'il ait été perdu...

- La loi nouvelle n'en est que plus méritoire...il aurait été facile de céder à la tentation de la contrainte, de l'obligation, de la prescription...s'adresser de nouveau à la faculté de dialogue, de négociation et à la responsabilité de chacun en ouvrant de nouveaux espaces de liberté, c'est plutôt une bonne surprise...

- Vous êtes bien positif Holmes...et toujours aussi rouge...

- Vous voyez bien qu'il est trop tôt pour rentrer...allons plutôt goûter au Ti punch qui nous attend...

25/02/2014

Fog and smog !

- Holmes, sauf votre respect, vous m'aviez parlé de feu et je note, de manière tout à fait factuelle et dépourvue de la moindre ironie, que nous marchons depuis deux heures dans le brouillard et la bruine  et que la fureur du volcan nous échappe quelque peu dans ces conditions...

- Watson, vous êtes désespérant, qu'un sujet de sa Majesté, que Dieu la préserve, puisse se plaindre du smog est aussi inconcevable que l'idée que les français puissent renoncer à la quête de l'homme providentiel à travers l'élection de leur Président ou bien qu'ils prennent conscience du ridicule de leur déception dès lors qu'ils s'aperçoivent qu'un homme ne peut pas tout...

- Mon cher Holmes, je suis désolé d'être dans l'obligation de vous reprendre, non sur l'incompréhension des comportements du peuple d'infra-manche, que je partage, mais sur l'emploi du mot smog. Nous sommes tout de même ici dans la nature et fog serait plus approprié...

- Prenez garde à vos pas Watson, la roche volcanique a les caprices des coulées qui prennent plaisir à désespérer les sculpteurs, ce qui n'est pas une bonne nouvelle pour votre sécurité, et cessez de me donner des leçons de sémantique. Smog est le mot approprié dès lors que vous vous plaignez. Fog supposerait que vous soyez heureux de marcher ici...Ce à quoi devrait vous incliner cet arc-en-ciel surgit de la brume...

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- Magnifique Holmes, magnifique...Holmes, je ne voudrai pas gâcher votre plaisir, ni le mien, mais ne faudrait-il pas se pencher sur le texte de la commission mixte paritaire pour voir de quoi il retourne précisément ?

- Watson, cher ami, voilà que vous proposez tout à la fois de vous pencher et de vous retourner, votre intégrité physique pourrait s'en trouver mise à mal...Chassez vos préoccupations saugrenues et imaginez un instant que le smog, ou le fog s'il vous plaît, est celui de Londres et que Big Ben sonnera lors de notre arrivée au sommet...on se demande d'ailleurs pourquoi les panneaux indicatifs prennent la silencieuse Tour Eiffel comme échelle alors que le son de Big Ben est seul à la mesure du lieu...

- Holmes, décidément vos propos s'égarent et je me demande comment vous parviendrez à commenter cette loi rationnellement et raisonnablement...

- Mon cher Watson, cette loi n'ayant été conçu ni rationnellement ni raisonnablement ce serait une erreur de vouloir l'analyser à cette aune...c'est pourquoi marcher sur le volcan est un chemin bien plus pertinent que ceux que vous proposez. Et maintenant, Watson, concentrons nous sur le paysage et laissons venir le feu !

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24/02/2014

Elémentaire mon cher Watson !

- Voyez-vous, Watson, j'aime beaucoup cette photographie...

- Elle est plaisante Holmes, mais je n'y distingue toutefois rien qui justifie un tel enthousiasme dans l'expression...

- C'est que voyez-vous, Watson, mais apparemment non, vous ne voyez pas, sur une même image figurent les quatre éléments...

- Le décalage horaire est faible cher Holmes, mais il aura affaibli votre esprit. Ne sont représentés ici que la terre, l'eau et l'air, point de feu à l'horizon à moins que vous ne considériez que le soleil qui nous brûle la nuque est présent par la lumière qu'il apporte à la scène...

- Excusez-moi d'être brutal Watson, mais manquer d'imagination à ce degré relève, pour un détective, de la faute professionnelle...ne sentez-vous point le feu qui habite la roche volcanique sa minérale complice pour sculpter tout entièrement cette côte ? ne voyez-vous dans chaque cavité de la roche la flamme repousser le gazeux qu'elle n'a pas consommé pour se consumer ? 

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- Tout cela mon cher Holmes, est bien tiré par les cheveux...mais si l'imagination ne vous fait pas défaut alors dite moi quand sera adoptée la loi sur la formation professionnelle et quand la Commission mixte paritaire se prononcera-t-elle ?

- Mais elle vient de le faire Watson, l'inattention est donc votre seconde nature...

- Alors nous avons le texte définitif ? Hâtons nous de rentrer Holmes, dès demain il nous faut le commenter...

-Mais Watson, vous n'y pensez pas, nous avons rendez-vous demain matin avec le Volcan, et cette fois-ci mon ami, tâchez d'y déceler le feu sans qu'il ne soit nécessaire de vous le mettre sous le nez, comme le soleil qui fait rougir le ciel...après cela, nous serons dans les meilleures dispositions pour nous occuper de la loi...

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21/02/2014

On va enfin savoir

....encore quelques semaines, ou petits mois, de patience, et nous saurons. Enfin. Nous saurons ce qu'est une formation de qualité dès que sera publié le décret qui doit nous révéler, après tant de vaines recherches, le grand secret. Gai, gai, réjouissons nous. Ou pas. Car il n'est pas impossible, et l'on pourrait même dire sans excès de pessimisme qu'il est probable, que les critères qui nous seront proposés seront de piètre qualité, notamment si l'on se fie au fait que toutes les tentatives, nombreuses, pour faire évoluer la définition de l'action de formation se sont heurtées à des murs d'incompréhension plus infranchissables que la mer rouge. Et il est à craindre que sous couvert de qualité on ne soit guère capable de produire autre chose qu'une bureaucratique normalisation. 

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C'est un vieux fantasme de tous les contrôleurs, centralisateurs, normalisateurs et autres rabougris de l'imagination que de penser qu'ils pourront réguler d'en haut, par décret (mais après consultation de toutes les parties, cela va de soi...), la qualité de la formation. Pourtant, le marché de la formation est un marché de professionnels. Les entreprises, les OPCA, POLE EMPLOI, les conseils régionaux...autant d'acheteurs de formation dont c'est le métier. Et l'achat de formation par les particuliers représente péniblement 6 % du marché, avec un droit protecteur spécifique, ce qui est normal. Faut-il donc qu'ils soient maladroits, incompétents, étourdis, hébétés, drogués ou endormis ces acheteurs professionnels pour acheter n'importe quoi. Mais grâce aux sénateurs qui, hélas, ne se sont pas endormis et ont poursuivi leurs travaux tardivement, ils sauront enfin ce qu'est la qualité et pourront cocher satisfaits les cases de la conformité pour acheter en toute tranquillité. Allez, tous en route vers l'innovation garantie par décret !

20/02/2014

Et de onze !

L'Assemblée nationale vient d'adopter une proposition de loi qui va faire entrer dans le Code du travail le onzième mode de rupture du contrat de travail. Aux licenciement, démission, rupture conventionnelle, mise à la retraite, départ à la retraite, résiliation judiciaire, force majeure, décès, rupture de la période d'essai et fin de CDD, vient donc s'ajouter la prise d'acte de la rupture par le salarié, petite dernière des différentes formes de rupture. 

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Le petit dernier (qui est aussi le premier)

Cette petite dernière sera constituée par la prise d'acte. Il s'agit des cas dans lequel le salarié estime que l'employeur ne respecte pas ses droits et quitte l'entreprise en saisissant le conseil des prud'hommes pour faire requalifier ce qui était jusque-là une démission en licenciement injustifié. La loi prévoit que dans un tel cas, le juge doit statuer dans le délai d'un mois, ce qui permettra au salarié d'avoir une décision rapide et de moins s'exposer au risque de devoir rembourser d'éventuelles allocations d'assurance chômage perçues si jamais le contentieux était perdu. Certes, l'employeur peut faire appel mais le salarié saura plus rapidement à quoi s'en tenir. A tel point qu'avec ce texte 

18/02/2014

Genre !

Vacances d'hiver, et suspension temporaire du plaisir d"accompagner, le matin, le petit bonhomme jusque dans la classe des découvertes. Interruption momentanée des énumérations de camions sur le chemin, des coups d"oeil dans les fournils du boulanger, des traversées de cour par les toboggans et des montées d'escaliers au rythme du matin. Parenthèse dans le plaisir de retrouver les ribambelles qui rient, pleurent, dessinent, sautent, jouent, au milieu des dames qui règnent en maîtresses dans l'école, car ici, dès que les pères ont déposé les bambins, l"homme n"a plus sa place.

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Alors que l"on fantasme sur une hypothétique théorie du genre qui voudrait asexuer les enfants, il suffit de se rendre dans nos maternelles et nos écoles primaires pour constater que la théorie du genre qui est à l"oeuvre, sans que pour le coup cela ne choque personne, c'est bien que l'éducation des enfants est entièrement confiée aux femmes, laquelle si j'en crois les poésies qui composent le cahier que l"on me remet à chaque période de vacances, prend invariablement la forme de la maman. Si les textes sur les mamans chéries abondent, nulle trace du père dans les courts récits. Dans l'école d'où la paranoïa a chassé les hommes, les stéréotypes ont la vie dure. Et comme par hasard, ceux qui défilent pour que les enfants aient un référent masculin et féminin à la maison, ne manifestent guère pour que ce soit aussi le cas à l'école. Un genre d'exclusion auquel on préfèrerait de loin voir se substituer le mélange des genres, dans lesquels n"en doutons pas un seul instant, les enfants se repèreront très bien.

14/02/2014

Reflux

Ce week-end encore, la mer sera haute, la houle soulèvera des vagues puissantes qui viendront chahuter les bords de mer. Le flux d'Ouest comme une corne d'abondance nous envoie inépuisablement des coups de vents, torrents de pluie, coups de tabac. 

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Il est un domaine dans lequel, contrairement aux idées le plus souvent reçues, le flux se retire. Il ne se tarit pas, mais il décroît régulièrement, progressivement, pour s'établir sur des étiages nouveaux. Il s'agit du contentieux prud'homal. Que l'on en juge : 229 000 contentieux nouveaux en 2009, 217 000 en 2010, 205 000 en 2011 et 175 000 en 2012. Aussi inexorablement que les flux d'Ouest charrient leur lot de tempête, le reflux du contentieux judiciaire en matière sociale s'installe dans le paysage. Une matière à réflexion pour ceux qui pensent qu'une crise économique et sociale ravive les tensions. 

13/02/2014

C'est du propre !

Achim d'Arnim a été le premier à formuler la question de manière aussi directe : "Ce que nous créons, est-ce à nous ?".  La question se pose aussi bien à propos des conditions de production de l'oeuvre, toute oeuvre est en partie le produit de l'environnement dans lequel elle a été conçue, que de sa vie postérieure, ainsi tout lecteur réécrit à travers le prisme de sa singularité le livre qu'il lit. Et si l'auteur peut toujours dire où se trouvaient ses motivations conscientes, que sait-il de son inconscient, des imprégnations qui l'habitent et finalement du ressort de chacun de ses actes. Que savait Giorgione de La Tempête, qui demeure une des peintures les plus énigmatiques qui soit et qui peut servir de support à mille interprétations ?

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Giorgione - La Tempête - 1507

Après chaque texte important, cela ne manque pas : les interprétations se multiplient et tout le monde tire à hue et à dia pour trouver justification à sa propre lecture. S'agissant de la réforme de la formation professionnelle, qui n'échappe pas à la course au déchiffrage, il importe de rappeler quelques évidences qui ne paraissent pas l'être pour tout le monde : 

- le texte de l'ANI du 14 décembre ne constituera jamais une norme juridique applicable, tant il est vrai qu'il n'a pas vocation à être étendu et que techniquement il ne pourrait d'ailleurs l'être au regard des importantes différences qu'il comporte avec la loi qui va être adoptée ;

- le fait d'avoir participé, de près ou de loin, à la négociation n'est donc aucunement la garantie que l'on est particulièrement bien placé pour interpréter la loi à venir. Au contraire, cela suppose de s'affranchir du cadre des négociations pour avoir un regard sur un texte différent ;

- quelle que soit les intentions du législateur au moment où il élabore la norme légale, ces intentions sont supposées trouver traduction dans les formulations retenues. L'esprit du texte se déduit donc de sa lettre et non de ses conditions de production. Et si ce qui est écrit devait signifier autre chose que ce que l'on peut en déduire, c'est qu'il fallait l'écrire autrement ;

- et au final, comme toujours, seul le juge est compétent pour nous dire où se trouve la vérité juridique, dans l'hypothèse pas toujours vérifiée où il y aurait contentieux. Rappelons nous par exemple, que les partenaires sociaux pensaient créer une coresponsabilité entre l'employeur et le salarié en matière d'employabilité lorsqu'ils ont créé le DIF, et que le juge n'a jamais voulu suivre un tel raisonnement, considérant que la nature même du contrat de travail s'y opposait. 

Même s'il est parfois difficile pour les partenaires sociaux ou le législateur de l'admettre, dès que les textes qu'ils produisent sont conclus, ils cessent de leur appartenir au profit de tous ceux qui doivent en faire usage. Tel est le propre du droit. 

12/02/2014

Ce n'est pourtant pas le casino...

A ceux qui pensent que les Conseils des prud'hommes c'est la version paritaire du casino avec jackpot à la clé, on conseillera de passer quelques après-midi sur les bancs publics de la juridiction sociale. Ils pourront constater que quelques mois de salaire, très rarement plus de six à huit mois, constituent le maximum de l'indemnisation pour les licenciements les plus évidemment injustifiés. Pourtant, les mêmes pourraient m'opposer la décision rendue en juillet 2012 et que la Cour de cassation vient de confirmer le 29 janvier dernier,  de la Cour d'appel de Paris qui, en attribuant plus de 700 000 euros à un salarié, pourrait susciter quelques vocations et faire naître de beaux, sinon de faux, espoirs. Pour le salarié concerné, par contre, nul doute que le jugement l'aura rendu beaucoup, mais alors beaucoup plus, léger. 

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Oui mais voilà, pour obtenir une telle somme, il faut avoir passé plusieurs années au travail, 24H sur 24 et six jours sur sept. Pas banal on en conviendra, voire difficile à croire. Pourtant le cas n'est pas rare. Il s'agit de responsables d'activités soumis, de fait, à une astreinte quasi-permanente compte tenu de la nature de leurs fonctions; en l'espèce, il s'agissait du responsable d'un service informatique qui devait assurer la continuité de service et répondre à toute sollicitation. On rencontre assez fréquemment ces situations où, de par leur niveau de responsabilité, des responsables d'agences, de sites, d'établissements, d'activités continues...doivent rester joignables à tout moment, lorsqu'il ne s'agit pas tout simplement d'avoir à intervenir parfois en dehors même de tout système d'astreinte. Tant que cela tient, pas d'inquiétude. Mais lorsque le salarié estime qu'il n'y a plus d'équilibre dans la relation et que son niveau de contrainte est sans rapport avec les avantages qu'il tire du contrat, surgissent alors bras-dessus bras-dessous le risque et la menace qui s'empressent de vous saisir à la gorge. Que faire alors , s'assurer que lorsqu'il y a astreinte elle demeure raisonnable, se souvenir que la délégation existe et qu'elle peut aussi s'appeler confiance, ne pas oublier que nul n'est irremplaçable et boire un verre de "brutal" pour ne plus être workalcoholic. Mais entre appliquer ces recette et voir miroiter 700 000 euros, il n'est peut être pas besoin de se perdre en conjectures pour savoir vers quoi se portera prioritairement le choix du salarié. 

11/02/2014

Un petit détail

Le diable s'y niche, c'est bien connu. Mais les détails sont souvent fascinants. Par ce qu'ils cachent et qu'il faut aller chercher, par ce qu'ils révèlent sans vraiment le montrer. Le tableau que vous voyez est un détail. Quelques centimètres carrés d'une toile qui fait plusieurs mètres de surface. Un tableau dans le tableau, une explosion dans la composition, un condensé d'énergie libre dans une peinture maîtrisée. La toile est à Nice, dans le musée Chagall, et dans les détails, Chagall est un merveilleux poète de l'abstraction. 

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Il est un alinéa dans le projet de loi sur la formation professionnelle qui n'attire que peu l'attention. Niché dans un texte qui ne manque pas de nouveautés, il pourrait passer inaperçu, comme un simple amendement rédactionnel. La modification de l'article L. 6231-8 paraît mineure : elle supprime pourtant toute référence à la formation hors-temps de travail et impose aux employeurs de prendre des engagements de reconnaissance des efforts du salarié (mais on ne sait plus lesquels puisqu'il peut s'agir d'une formation pendant le temps de travail) et des compétences acquises par un accès prioritaire aux fonctions correspondantes, lorsque le salarié suit une formation de développement des compétences. Ces formations sont celles qui apportent aux salariés des compétences non utilisables dans le cadre de leur fonctions. Il s'agit donc d'un développement de la qualification personnelle et non contractuelle. Dans le cadre du plan de formation, cela correspond aux formations de catégorie 2. Si dorénavant, à partir du mois prochain en fait dès que la loi est applicable, il faut prendre des engagements particuliers pour tout ce qui ne concerne pas l'emploi occupé, on ne connaît pas meilleur frein au développement de l'employabilité. Ce qui s'appelle se tirer une balle dans le pied.