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12/02/2014

Ce n'est pourtant pas le casino...

A ceux qui pensent que les Conseils des prud'hommes c'est la version paritaire du casino avec jackpot à la clé, on conseillera de passer quelques après-midi sur les bancs publics de la juridiction sociale. Ils pourront constater que quelques mois de salaire, très rarement plus de six à huit mois, constituent le maximum de l'indemnisation pour les licenciements les plus évidemment injustifiés. Pourtant, les mêmes pourraient m'opposer la décision rendue en juillet 2012 et que la Cour de cassation vient de confirmer le 29 janvier dernier,  de la Cour d'appel de Paris qui, en attribuant plus de 700 000 euros à un salarié, pourrait susciter quelques vocations et faire naître de beaux, sinon de faux, espoirs. Pour le salarié concerné, par contre, nul doute que le jugement l'aura rendu beaucoup, mais alors beaucoup plus, léger. 

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Oui mais voilà, pour obtenir une telle somme, il faut avoir passé plusieurs années au travail, 24H sur 24 et six jours sur sept. Pas banal on en conviendra, voire difficile à croire. Pourtant le cas n'est pas rare. Il s'agit de responsables d'activités soumis, de fait, à une astreinte quasi-permanente compte tenu de la nature de leurs fonctions; en l'espèce, il s'agissait du responsable d'un service informatique qui devait assurer la continuité de service et répondre à toute sollicitation. On rencontre assez fréquemment ces situations où, de par leur niveau de responsabilité, des responsables d'agences, de sites, d'établissements, d'activités continues...doivent rester joignables à tout moment, lorsqu'il ne s'agit pas tout simplement d'avoir à intervenir parfois en dehors même de tout système d'astreinte. Tant que cela tient, pas d'inquiétude. Mais lorsque le salarié estime qu'il n'y a plus d'équilibre dans la relation et que son niveau de contrainte est sans rapport avec les avantages qu'il tire du contrat, surgissent alors bras-dessus bras-dessous le risque et la menace qui s'empressent de vous saisir à la gorge. Que faire alors , s'assurer que lorsqu'il y a astreinte elle demeure raisonnable, se souvenir que la délégation existe et qu'elle peut aussi s'appeler confiance, ne pas oublier que nul n'est irremplaçable et boire un verre de "brutal" pour ne plus être workalcoholic. Mais entre appliquer ces recette et voir miroiter 700 000 euros, il n'est peut être pas besoin de se perdre en conjectures pour savoir vers quoi se portera prioritairement le choix du salarié. 

19/05/2010

Forfait mythique

Le Minotaure, fruit des amours de Pasiphaé et d'un taureau blanc, est un mythe grec dont Jorge Luis Borgès donna une version bouleversante dans sa nouvelle La demeure d'Astérion, nom du minotaure. Loin du monstre sanguinaire et violent dont on protège la foule en l'isolant dans un labyrinthe, le Minotaure de Borgès est un être sensible, prisonnier de sa singularité qui lui confère une conscience aigüe de lui-même et des hommes. Prisonnier volontaire il s'évade dans la mort qu'il s'offre comme une libération à laquelle son meurtrier ne comprend que peu de chose. Quel dessin, mieux que celui de Catherine Huppey, peut figurer le Minotaure de Borgès et contribuer à renverser le mythe du monstreux hybride.

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Catherine Huppey - Le grand Minotaure

Mais les mythes ont la peau dure. Ainsi, le mythe, puisqu'il n'y a jamais eu de réalité juridique en ce sens, du cadre n'ayant pas droit aux heures supplémentaires a trouvé un nouveau souffle dans le forfait en jours. Sans doute le mécanisme est-il mal nommé. Forfait signifie en effet que l'affaire est conlue et qu'il n'y a pas lieu d'y revenir. Tel n'est pas le cas pourtant, sur deux points. Tout d'abord, le forfait ne vaut que pour un nombre de jours. Il n'est pas illimité. En cas de dépassement, le salarié au forfait en jours a droit à des jours supplémentaires, rémunérés avec une majoration de 10 % minimum. De même, comme tout salarié, le bénéficiaire d'un forfait en jours a droit a des contreparties, en temps ou en argent, en cas de déplacement exceptionnel, c'est-à-dire en dehors du périmètre habituel d'exercice des fonctions. Le droit du travail pose donc deux bornes à la notion de forfait : le volume de temps convenu et le périmètre géographique d'exercice des fonctions. Et rappelons, même si peu d'entreprises le pratiquent, que la loi du 20 août 2008 a créé un entretien annuel obligatoire spécifique aux salariés au forfait en jours (C. Trav., art. L. 3121-46). Lors de cet entretien, doivent être abordés la charge de travail, l'organisation du travail, l'articulation vie professionnelle/vie personnelle et la rémunération. Faute de réalisation, le juge pourrait prononcer la nullité du forfait, qui deviendrait à son tour un mythe.