25/01/2011
De l'inégalité des diplômes
La Cour de cassation poursuit, en ce début d'année, la saga du diplôme comme élément licite, ou non, de différenciation des salaires. En clair, peut-on payer différemment deux salariés qui font le même travail uniquement parce qu'ils n'ont pas le même diplôme ? La Cour de cassation a déjà répondu positivement à cette question si les diplômes détenus par les salariés sont de niveaux différents. Elle fait aujourd'hui évoluer cette position : une différence de diplôme ne justifie une différence de traitement que s'il est démontré l'utilité particulière des connaissances acquises au regard des fonctions exercées (Cass. soc., 11 janvier 2011). Diplômé en droit, Kandinsky ne peut donc valoriser ses diplômes dans son activité de peintre.
Vassily Kandinsky - Composition IV
Cette décision a le mérite de revenir à une interprétation plus stricte du principe "Travail égal, salaire égal". S'il est possible de valoriser un niveau de diplôme, c'est à condition que celui-ci ait un lien avec l'activité. A défaut, disposer d'un diplôme ne vaut pas brevet général de compétences.
La portée de cette décision n'est pas mineure puisque, si elle est confirmée, elle mettra à mal les politiques de rémunération mais également les conventions collectives, qui font une différence entre les diplômes uniquement en fonction de leur niveau ou de l'école dans laquelle ils ont été préparé alors que les juges nous demandent de vérifier son utilité par rapport au travail exercé.
Si le juge voulait s'auto-alimenter en contentieux, il ne s'y prendrait pas d'une autre manière. Voilà une profession que le chômage ne guette guère.
02:32 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : travail égal, salaire égal, discrimination, diplôme, jurisprudence, droit, droit du travail, ressources humaines, kandinsky, peinture
16/07/2010
La DRH et Olympe, suite
Etre fidèle à soi-même ce n'est pas répéter ad nauseam les mêmes ritournelles. C'est être capable de faire vivre des principes fondateurs en déclinant leur traduction opérationnelle en fonction des évolutions de l'environnement. Comme l'a bien compris la chenille, demeurer c'est évoluer. La Cour de cassation avait, il y quelques mois (Cass. soc., 26 juin 2008), dénié à une DRH membre d'un comité de direction d'accéder aux mêmes avantages que ses collègues masculins du comité de direction au motif que les fonctions exercées n'étaient pas les mêmes. Cette décision, commentée le 4 juillet 2008 sous le titre "La DRH et l'Olympe" (http://willemsconsultants.hautetfort.com/archive/2008/07/03/la-drh-et-l-olympe.html) se trouve désormais dépassée, la Cour de cassation ayant adopté le 6 juillet 2010 une décision exactement inverse. Olympe de Gouges s'en trouve modernisée.
00:05 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : olympe, drh, ressources humaines, travail égal, salaire égal, comité direction, égalité professionnelle, olympe de gouges
09/04/2010
Révolution manquée
L'occasion était belle de rompre avec la logique des statuts et le corporatisme du diplôme. Deux affaires étaient proposées à la Cour de cassation en ce mois de mars printanier : dans la première affaire, un salarié revendiquait le même salaire qu'un salarié plus diplômé et de ce fait mieux rémunéré alors qu'ils effectuaient le même travail ; dans la seconde un ingénieur demandait un salaire équivalent à celui d'un autre ingénieur ayant un diplôme de même niveau. Par deux fois, les juges diplômés de la Cour de cassation ont été incapables de sortir de leurs repères et d'offrir une véritable portée au principe "A travail égal, salaire égal". Pour la révolution, on attendra.
00:28 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : egalité de traitement, travail égal, salaire égal, rémunération, droit du travail, max ernst, révolution, jurisprudence, juges
23/12/2008
A diplôme inégal, salaire égal
La décision était attendue depuis longtemps par l’auteur de ce blog : quand la Cour de cassation allait elle juger que la seule possession d’un diplôme ne justifiait pas un écart de salaire ? la réponse est le 16 décembre 2008. Dans sa décision, la Cour de cassation affirme en effet que "la seule différence de diplômes, alors qu'ils sont d'un niveau équivalent, ne permet pas de fonder une différence de rémunération entre des salariés qui exercent les mêmes fonctions, sauf s'il est démontré par des justifications, dont il appartient au juge de contrôler la réalité et la pertinence, que la possession d'un diplôme spécifique atteste de connaissances particulières utiles à l'exercice de la fonction occupée" (Cass. Soc., 16 décembre 2008, P 07-42.107 / 2261, Mme Nissrim K. c/ Sté Fauchon SAS). On notera bien évidemment la réserve : alors qu’ils sont d’un niveau équivalent, mais on voit mal en quoi le principe d’indiquer le lien entre le diplôme possédé et l’utilisation possible pour l’emploi occupé devrait ne pas concerner des diplômes de niveau différent.
Cette décision fait vaciller la validité des conventions collectives qui prévoient des niveaux de rémunération différents selon que le salarié possède ou non un diplôme. Le principe « travail égal, salaire égal » suppose en effet que ce diplôme ait un impact sur la réalité du travail effectué pour que la différence de salaire soit justifiée.
Il s’agit de rappeler que l’on rémunère un travail et non des personnes, comme l’on évalue un travail et non des personnes. Le contrat de travail n’achète pas les individus mais leur travail, l’objet du contrat n’est pas la personne mais sa qualification, c’est-à-dire le travail que l’on peut lui demander. Et cette objectivation de la prestation ne s’oppose pas à ce que l’on n’oublie pas que le travail est effectué par des hommes et des femmes. Simplement il s’agit de considérer autrui pour ce qu’il fait et non de manière prédéterminée pour ce qu’il est ou paraît être.
00:36 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : diplome, travail égal, salaire égal, jurisprudence, salaire, discrimination