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05/02/2016

I comme...IRM

Identités Rapprochées Multiples

L'expérience se renouvelle sans cesse. Lors des présentations en début de formation, il se trouve toujours une ou un participant pour dire :"Oh vous savez moi j'ai un parcours atypique...". Comme tout le monde, est-on tenté de répondre.

Bernard Lahire (La culture des individus – 2004) en a fait le constat méthodique : les trajectoires individuelles se diversifient au moyen de pratiques sociales multiples en dehors des groupes de référence dont on relève. Bien plus que le repli identitaire ou communautaire, c’est la diversité des appariements qui caractérise notre société. Moins visible peut être, mais bien plus présente.

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Philippe Sollers nomme Identités Rapprochées Multiples ces différents états d'un même individu qui le rendent moins facile à catégoriser, moins aisé à appréhender, plus difficile à comprendre aussi.

Il ne faut pas s'étonner que ce phénomène soit peu visible : le simplisme de l'individu ramené à un essentiel préexistant est une référence mieux partagée que la complexité de l'être aux mille facettes. Le premier est réduit à une image grossière alors que le second se refuse sans cesse et ne vous offre un visage que pour mieux dissimuler l'autre.

Reconnaître les identités rapprochées multiples c'est accepter que l'autre dispose d'une liberté inaliénable et qu’il ne puisse jamais être réduit à la représentation que l’on s’en fait. Accepter la liberté d’autrui, tout un programme.

05/03/2011

Chronique du week-end : l'énigme des women

Pour cette chronique de week-end ensoleillé, un triangle d'or : la Hollande, l'Espagne, New-York.

Car Willem de Kooning est un New-yorkais de Hollande, convaincu que les femmes sont des paysages et se souvenant corporellement que l'Espagne, comme la mer du Nord, s'est répandue dans les terres basses qui furent son premier horizon.

Les Women de Willem De Kooning sont des Vénus, directement issues de la Vénus de Lespugue et de toutes les Vénus ultérieures, mais qui n'aurait pas été taillée dans l'ivoire, plutôt pétrie dans la glaise, dans l'argile, dans la terre primordiale gorgée de mer originelle. Si Courbet dévoilà l'origine du monde, De Kooning nous offre à la fois l'origine et l'avenir. La toile inondée de couleurs, de gestes et d'eau livre une figure dont la rapidité d'exécution ne doit pas tromper sur l'immémoriale élaboration. Réminiscence : dans les plats pays, sur les étendues d'eau, les nuages sont longs à se former mais défilent rapidement car rien ne saurait obstruer l'horizon. Le vent est maître des lieux, que l'on honore en couvrant le paysage de moulins. Le vent, le mouvement, le passage rapide du temps, et l''éternel retour de tout ceci habitent les vénus de De Kooning.

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Willem De Kooning - Woman I - 1950-1952

Solidement installée dans l'herbe grasse des Polders, les pieds dans la mer, telle une momie irriguée de vie et d'énergie, la Woman I révèle brutalement que donner la vie c'est également donner la mort et que l'opposition entre femme-vie-mère et homme-mort-guerrier est un défaut d'imagination, une paresse de l'esprit. Comme le dit Sollers : "Le monde appartient aux femmes. C'est à dire à la mort. Là dessus tout le monde ment". Pas De Kooning dont les doux yeux bleus ont une sauvage lucidité. Imaginez un instant le corps à corps avec la toile qui rendit possible cette Woman. Fermez les yeux et vous verrez la raison des bourgeois commerçants du Nord s'accoupler violemment avec la pasionaria espagnole. Les hollandais et les espagnols furent des marins. Les plus belles villes de ces pays sont des ports. Ici, il faut se souvenir que c'est à  New-York que sont apparues les Women. L'eau venue de toujours et qui s'en ira partout.

28/12/2010

Identités rapprochées multiples

L'expérience se renouvelle sans cesse. Lors des présentations en début de formation, il se trouve toujours une ou un participant pour dire :"Oh vous savez moi j'ai un parcours atypique...". Comme chacun, serait-on tenté de répondre. Les trajectoires individuelles se différencient et loin de l'uniformisation ou du communautarisme caricatural, mais plus souvent encore caricaturé, c'est plutôt l'appartenance à des univers différents, à des communautés multiples, à des mondes qui s'ignorent mais que les mêmes individus traversent qui deviennent monnaie courante. Avoir plusieurs visages n'est plus une utopie.

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Philippe Sollers nomme Identités rapprochées multiples ces différentes facettes d'un même individu qui le rendent moins facile à ranger dans un case, moins aisé à appréhender, plus difficile à catégoriser. Il ne faut pas s'étonner que ce phénomène dérange : le simplisme de l'individu ramené à un essentiel préexistant est une référence mieux partagée que la complexité de l'être aux mille facettes. Le premier est réduit à une image grossière alors que le second se refuse sans cesse et ne vous offre un visage que pour mieux dissimuler l'autre. Reconnaître les identités rapprochées multiples (IRM), c'est accepter que l'autre dispose d'une liberté inaliénable que la plupart trouveront insupportable mais que d'autres considèreront comme le sel même de la vie.

01/01/2009

Grève, rêve, ève

L’année 2009 sera riche, nous dit-on….en conflits sociaux. La grève menace, et le mois de janvier sera musclé en ce domaine avec comme point d'orgue le jeudi 29 janvier déclaré première journée de grande grève interprofessionnelle. Que ne vivons-nous d’ailleurs comme une menace dans une France dépressive avant que d’être récessive ? la mondialisation n’est pas une ouverture vers le monde mais un danger, l’Europe n’est pas un espace agrandi mais une dissolution de l’identité, l’Etat n’est pas celui qui favorise l’autonomie mais celui qui doit agir pour nous et ne le fait pas, l’économie est folle, les valeurs et les institutions aux abonnés absents, la morosité partout, la peur rode…bref dans un tel contexte le désir peut être grand de déclarer, comme Philippe Sollers : « Vive la vie privée et bonne nuit ». Seuls refuges, le rêve et l’amour ?

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Max Ernst - Eve, la seule qui nous reste -  1925

Le repli n'est jamais une bonne réponse, et en même temps les bonnes résolutions ne suffiront pas. Pour les dépasser, revenons à Max Ernst. Tandis qu’il peignait, une nuit, il posa sa feuille sur le plancher et frotta son envers. Ce premier frottage il l’intitula « Eve, la seule qui nous reste ». Retenons que ce qui nous reste n’est pas un point d’arrivée mais un point de départ, que ce premier frottage fut le début d’une longue période d’invention et de créativité et que pour qui sait regarder, il n’est pas contestable qu’Eve porte un oiseau dans ses cheveux. Pour 2009, que souhaiter d’autre que son envol ? Alors au lieu de bonnes résolutions, plutôt un mot d'ordre : VAMOS !

26/05/2008

Vive l'O.O.P.P.

En tant qu'européen de France, selon la formule de Philippe Sollers, on ne peut que se réjouir et se sentir un peu plus européen à la lecture de la définition donnée par la Lituanie à ce qui, dans d'autres pays et au niveau européen s'appelle la flexécurité, la flexicurité, la fléxisécurité ou encore la sécurisation des parcours professionnels. En Lituanie, on parle d'Optimisation des Opportunités Professionnelles et Personnelles (O.O.P.P.).

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Marcel Duchamp - L.H.O.O.Q
 
Il n'est pas anodin que la question des parcours professionnels soit abordée soit sous l'angle défensif, sécuriser, soit sous l'angle offensif, optimiser. Dans le premier cas, l'insécurité rode, menace, l'homme a peur et doit être sécurisé par des assurances, des mécanismes de prises en charge, il doit être rassuré. Dans le second, l'individu aspire à accéder à l'autonomie. Sur la ligne qui va de la sécurité à la liberté, il a placé le curseur plus près de liberté que de sécurité. L'affranchissement et la maîtrise de sa vie constituent ses fins et moyens à la fois.
Si le débat sur les parcours professionnels n'est abordé que du point de vue de la sécurité, et qu'au final il se résume à la question "quels droits en contrepartie d'un licenciement facilité ?", il sera fortement réducteur et binaire. Peut être que s'il était posé de manière dynamique et positive à partir de la question "comment offrir à chacun des opportunités tenant compte de son parcours professionnel et personnel ?" il aurait des chances d'être plus fructueux, plus ouvert, plus riche de potentialités. Alors oui décidément, oubions la sécurisation des parcours et vive l'optimisation des opportunités professionnelles et personnelles.