27/06/2012
Vision globale
Les juges de la Cour d'appel avaient pourtant pris soin d'argumenter sur chacun des documents fournis par la salariée et sur chacune des contestations des décisions prises par l'employeur. Un travail analytique méthodique, pas à pas, de fourmi besogneuse et consciencieuse. Et cette analyse rigoureuse les a conduit à considérer qu'aucun des éléments fournis par la salariée ne permettait de caractériser un harcèlement moral. Déboutée donc. A tort selon la Cour de cassation qui invalide la méthode et le jugement. Un harcèlement global ne doit pas s'apprécier en évaluant la valeur probante de chaque pièce fournie par le demandeur mais par une analyse globale prenant en compte de manière simultanée l'ensemble des éléments produits. Exit l'approche analytique, vive l'art de la synthèse. Foin des loupes pour la vision rapprochée détaillée, vive la vision panoramique.
La Cour de Cassation, dans sa décision du 6 juin 2012 énonce que les juges doivent considérer si l'ensemble des pièces fournies par un salarié, pris dans leur globalité, ne font pas présumer un harcèlement, en conséquence de quoi l'employeur doit prouver la légitimité des décisions qu'il a prises et que son comportement est étranger à tout harcèlement. C'est donc l'employeur qui doit s'expliquer pas à pas et non le salarié.
Ce n'est pas la première fois que la Cour suprême considère que la charge de la preuve pèse sur les deux parties mais pas de manière idtentique. Au salarié de fournir suffisamment d'éléments pour que l'on puisse présumer un comportement fautif et à l'employeur de s'expliquer sur ce comportement.
Ce rappel n'aurait pas du être nécessaire pour les juges du fond qui auraient pu se souvenir que l'opération juridique de base, la qualification des faits, suppose d'avoir une approche globale d'une situation pour déterminer s'il est possible ou non de la faire entrer dans une des catégories prévues par le droit. Que la méthode juridique constitue une sorte de mise en boîte de la réalité et que cette opération se réalise par une vision globale est un des charmes de la matière, pour qui a le goût des paradoxes.
00:58 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : harcèlement, droit, droit du travail, méthode, jurisprudence, venise, panoramique, photo, vision
23/02/2011
Quelle table voyez-vous ?
Si vous regardez une table de bois, un premier niveau de vision permet d'identifier la nature de ce bois qui la compose : chêne, merisier, noyer, cerisier, bouleau...la couleur, la texture, la patine fournissent à votre oeil exercé les informations suffisantes. Vous pouvez aussi voir cette table à l'aide des connaissances du XXème siècle et la considérer comme un ensemble d'atomes agrégés qui constituent une forme solide. Avec un regard plus actuel, la table devient un nuage d'éléments subatomiques dont la substantialité commence à devenir douteuse. Comme le dit Peter Sloterdijk, le savoir le plus récent est souvent le plus déconcertant.
Alberto Giacometti - Table surréaliste - 1933
Vous pouvez également, à l'aide de Giacometti, modifier la destination de la table et en faire un support de votre pensée en mouvement, nourrit d'imaginaire. Peut être alors, verrez-vous apparaître une nouvelle table qui ne sera plus objet mais sujet. A ce stade, vous n'êtes plus seul.
Victor Brauner - Loup-Table - 1939-1947
Toutes ces visions ont leur vérité. Lesquelles ne communiquent pas forcément. Le regard immédiat ou d'habitude, le regard de connaissance, le regard d'expertise, le regard symbolique et le regard poétique vous présentent la table dans toutes ses dimensions ou presque. Presque car il n'est pas sur que la liste des regards possibles soit exhaustive. Mais votre manière de regarder vous en apprend plus sur vous même que sur la table regardée. Pour accéder à cette connaissance, il faut mais il suffit, de savoir quelle table vous voyez et de ne pas oublier que d'autres tables sont possibles.
02:40 Publié dans DES IDEES COMME CA, PEDAGOGIES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : brauner, giacometti, sloterdijk, table, vision, management, ressources humaines, formation
22/12/2009
L'art de voir
En 1859, Ernst Wilhelm Tempel, lithographiste allemand de métier et astronome par passion, découvre la nébuleuse des Pléiades. L'année suivante il découvrira la planète Maximiliana, rebaptisée ensuite Cybèle. Les sociétés d'astronomie contesteront qu'un amateur non diplômé puisse avec une lunette peu perfectionnée découvrir ce qu'eux même ne pouvaient voir avec des instruments bien plus puissants associés à une maîtrise supérieure, et attestée, de l'astronomie. Pourtant, les planètes sont bien là et l'acuité visuelle de Tempel, l'habileté de son observation, la mise au point d'une réflexion corrective mais aussi un certain esprit poétique lui ont permis d'identifier Maximiliana avant que la science officielle ne l'aperçoive. Le musée des Beaux-Arts de Tours rend hommage jusqu'au 18 janvier à E-W Tempel en présentant une exposition de Marx Ernst dans laquelle figurent notamment les eaux-fortes de Maximiliana, ouvrage réalisé en collaboration avec Iliazd.
00:14 Publié dans DES IDEES COMME CA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tempel, max ernst, vision, planètes, maximiliana, breton