04/04/2013
Laissez vous haler
Les tableaux de Max Ernst sont souvent sujets à interprétations multiples, quoi de plus naturel pour un homme qui l'était naturellement. C'est peut être pour cela que les organisateurs ont choisi de faire figurer cette toile sur l'affiche de l'exposition qui lui est consacrée à Vienne.
Max Ernst - Au premier mot limpide - 1923
Au départ cette peinture était une fresque dans la maison d'Eaubonne que Ernst partageait avec Eluard et sa femme Gala, dont il était l'amant. Faut-il voir dans la main féminine qui guide la mante religieuse la cause de la turgescence des grands artichauts qui se montrent au dessus du mur ? une simple illustration du triolisme et de son fragile équilibre ? ou une oeuvre à l'érotisme plus mystérieux, elle figurait sur le mur de la chambre à coucher d'Eluard et de Gala, dont la clé est dans les secrets du trio ?
Une fois encore, le hasard nécessaire fournit sa réponse : la pluie tisse les fils qui feront danser ces doigts qui sont en réalité des jambes. Celui qui tient le fil, n'est peut-être pas celle que l'on croit. Comme toujours, il faut aller voir derrière les apparences. Allez, faites comme Max, laissez vous haler.
01:44 Publié dans TABLEAUX PARLANT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ernst, peinture, vienne, énigme, eluard, gala, poésie, littérature, tableau, voyage
01/04/2013
Il est libre Max
Son père était allemand et peintre, et très vite l'Allemagne, son père la peinture devinrent trop peu pour Max Ernst. Il quitta son pays de naissance, pour faire de chaque lieu son pays nouveau : Paris, l'Italie, puis New-York, l'Europe, Paris encore, la Touraine enfin qui nous vaut cet exceptionnel jardin de la France (voir ici).
La peinture aussi, c'était trop peu. Il inventa le frottage, que tous les enfants (au moins ceux du monde d'avant) on reproduit en plaçant une pièce de monnaie sous une feuille de papier, puis le décalcomanie, le grattage, multiplia les collages, entrepris de sculpter, s'essaya à toutes les techniques en bricoleur de l'art et du quotidien.
Max Ernst - Pléiades
Il participa à Dada, au Surréalisme, réalisa des décors de théâtre, illustra des livres, raconta des histoires, créa un personnage, Loplop, mi-homme mi-oiseau, comme Max Ernst était mi-peintre, mi-poète, mi-inventeur et quelques autres mi encore.
Max Ernst - Napoléon dans le désert - 1941
Il assembla et utilisa toutes les techniques, faisant naître des mondes oniriques que d'autres avant lui avaient visités, comme en témoignent les dessins de Bosch et de Bruegel également présentés en ce mois de mars à l'Albertina, dans un de ces hasards objectifs qui enchantent le monde.
Max Ernst - Tentation de Saint-Antoine
Cette capacité créatrice de Max Ernst, suppose de s'affranchir des cadres et catégories, de travailler en tous sens et d'associer sans cesse ce qui ne paraît pas naturellement s'assembler. Hier, lors de la visite de l'exposition d'Hundertwasser, découverte de cette phrase : "Notre illettrisme n'est pas notre difficulté à lire ou à écrire, c'est notre incapacité à créer". Hundertwasser se méfiait de la ligne droite comme de la peste, de ce qui segmente et sépare comme du choléra et il inventa une architecture de la rondeur, de la vie dans et hors des maisons et de la mise en harmonie de l'habitat et de la nature. Il abhorrait les règlements d'urbanisme et invitait chacun à peindre sa maison à son goût et à pouvoir la modifier sans architecte (l'architecture ne sera de l'art que lorsqu'elle sera autorisée à tous et non réservée aux architectes).
Hundertwasser - Village thermal
Hundertwasser - La forêt à spirales
A quoi bon l'art s'il ne nous permet pas de développer un regard neuf sur l'alentour et s'il ne nous conduit pas à déshiniber nos capacités créatrices. Toute l'histoire de l'art ne devrait pas se regarder comme l'histoire d'hommes et de femmes d'exceptions, mais au contraire comme un encouragement à ce que chacun fasse entendre sa voix personnelle. Bien loin du Panthéon des grands hommes, un appel lancé à tous les créateurs anonymes, les bricoleurs du quotidien, les inventeurs du dimanche et de tous les autres jours de la semaine, les enthousiastes de la nouveauté et de l'appropriation du monde par la créativité.
Schmoll - Plan de la machine à faire les crêpes
Et les commissaires de l'exposition avaient bien compris le message qui ont placé quelques occasion de créativité sur le parcours. Comme Max, pour nous encourager.
Big brother is shooting you !
01:09 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ernst, peinture, photographie, architecture, vienne, voyage, art, création, liberté