03/02/2011
Un transitoire qui dure
La loi du 20 août 2008 sur la démocratie sociale rebat totalement les cartes de la représentativité syndicale. Pour résumer, la représentativité résulte désormais des résultats des élections professionnelles et non d'une reconnaissance étatique ou judiciaire. Retour à la démocratie représentative donc, et enjeux nouveaux pour les élections professionnelles, avec son cortège de tensions et de contentieux. Au fil de ce dernier, les tribunaux construisent le mode d'emploi des règles nouvelles. Dans une décision du 19 janvier 2011, rendue sous présidence toulousaine que je salue, la Cour de cassation prend une décision audacieuse au regard des textes mais soucieuse de la préservation d'une représentation des salariés. La loi du 20 août 2008 prévoit que les organisations syndicales représentatives au niveau national peuvent continuer à désigner des délégués syndicaux dans l'attente des premières élections postérieures à la loi. Ensuite, seules les organisations ayant obtenu au moins 10 % des voix peuvent désigner un délégué syndical, sous réserve qu'il ait lui même obtenu 10 % et donc, par définition, été candidat. Dans le cas d'espèce, l'entreprise avait organisé des élections sans qu'aucune organisation syndicale ne présente de candidat. Elle avait dressé constat de carence et conclu qu'aucune organisation n'était représentative. A tort lui répond la Cour de cassation rebelle. En l'absence de candidature, il est impossible de mesurer l'audience des syndicats et les règles transitoires doivent être prolongées jusqu'à la prochaine élection. Voici donc du transitoire qui dure, de même que Marc Desgranchamps est un peintre du transitoire en mouvement.
Marc Desgrandchamps - Sans titre - 2007
Le résultat pratique de la décision du 19 janvier 2011 est que des organisations syndicales représentatives à la date de publication de la loi du 20 août 2008 peuvent continuer à désigner des délégués syndicaux qui pourront négocier des accords lesquels, faute de représentativité établie par l'élection, devront être ratifiés par référendum. On comprend le souci de la Cour de cassation : en l'absence de syndicats, tous les accords devenaient caducs faute de pouvoir être renégociés (la disparition de tous les syndicats équivaut en effet à une dénonciation des accords) et aucun accord ne pouvait plus être conclu avant les nouvelles élections.
Cet objectif d'intérêt général l'a emporté sur une lecture littérale du texte qui ne prévoit pas que l'on attende la deuxième élection en cas de carence. Saluons donc cette décision ainsi que la présidente toulousaine qui la suscita.
00:00 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : négociation collective, représentativité syndicale, loi du 20 août 2008, démocratie sociale, marie-laure morin, cour de cassation, jurisprudence, marc desgrandchamps, peinture, droit du travail, droit
12/10/2009
Petits malins
En application de l'accord sur le dialogue social conclu par l'UPA et les organisations syndicales de salariés en 2001, mais étendu seulement en 2008 notamment du fait de l'opposition de la CGPME et du MEDEF, une commission paritaire régionale interprofessionnelle de l'artisanat (ouf ! en fait la CPRI, prononcer évidement cépri...) a été créée en Rhônes-Alpes. D'autres devraient suivre dans des départements ou régions. Certains se souviendront que le département du Tarn, en Midi-Pyrénées, avait été pionnier en ce domaine avec la création par l'USAT (union des syndicats artisanaux du Tarn) d'une instance de dialogue social départementale. Objectif de ces instances ? négocier des accords collectifs de travail applicables aux entreprises artisanales et à leurs salariés, dans lesquelles n'existe pas de négociation collective du fait de leur taille. Et mettre à leur disposition des outils conventionnels qui leurs sont inaccessibles individuellement (prévoyance, activités culturelles et sociales, instances d'arbitrage des conflits, etc.). Dans un pays toujours jacobin, où la branche et le national structurent la négociation, voici une approche locale et interprofessionnelle susceptible d'explorer de nouvelles solidarités et de développer de nouvelles problématiques d'emploi. L'innovation sociale n'est donc pas l'apanage des grandes entreprises (quelles innovations ?) mais peut prendre appui sur un réseau de dirigeants de TPE (l'artisanat en Rhônes-Alpes : 100 000 dirigeants, 260 000 salariés). Souvenons nous du Petit Poucet.
23:54 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : négociation collective, rhônes-alpes, petit poucet, décentralisation, droit du travail
28/09/2009
L'égalité c'est pour demain
Le dessin est paru dans le Canard enchaîné du mercredi 23 septembre 2009. Il est signé Lefred-Thouron et rend compte du climat social de la rentrée. Anodin ?
00:05 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : egalité professionnelle, rémunération, femmes, négociation collective, canard enchaîné
08/09/2008
Pyramide inversée
La loi sur la démocratie sociale et le temps de travail du 20 août 2008 procède à une inversion de la hiérarchie des normes. Là où traditionnellement la loi fixe un socle que la convention de branche et l'accord d'entreprise peuvent améliorer, la loi nouvelle promeut l'accord d'entreprise voire l'accord bilatéral entre le salarié et l'employeur pour définir la norme applicable, les textes de portée supérieure ne s'appliquant que par défaut.
Ainsi, il appartient à l'accord d'entreprise de fixer le contingent d'heures supplémentaires, les modalités de prise du repos compensateur, la possibilité de recourir au forfait annuel en heures ou en jours pour les salariés. Quelles que soient dans ce domaine les dispositions de l'accord de branche, priorité est donnée à l'application de l'accord négocié au niveau de l'entreprise qui peut donc s'affranchir librement du niveau supérieur.
Concernant la négociation bilatérale, tout salarié ayant conclu une convention de forfait en jours peut, même en l'absence d'accord collectif le prévoyant, renoncer à des jours de repos par accord avec l'employeur en contrepartie d'une majoration de son salaire.
07:54 Publié dans DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : hiérachie des normes, temps de travail, démocratie sociale, négociation collective
27/05/2008
Chronique de la réforme annoncée (III)
En 1975, Charlotte Calmis demande aux femmes du collectif La Spirale d'écrire sur le corps d'une femme qu'elle a dessiné au fusain sur une toile blanche. Ainsi nait une oeuvre collective : plastiquement imparfaite mais pleine de surprises et de l'énergie du groupe.
La troisième chronique réalisée avec Jean-Marie Luttringer pour l'AEF sur la réforme de la formation professionnelle est un appel à faire oeuvre collective. Les partenaires sociaux disposent de l'opportunité, dans le cadre de la réforme de la formation professionnelle, de faire oeuvre collective en utilisant la négociation collective d'une part pour alléger la tutelle de l'Etat sur le système de formation professionnelle et d'autre part pour utiliser pleinement les techniques de la négociation afin de faire vivre ce système de formation au moyen du dialogue social.
Charlotte Calmis et le collectif La Spirale – Œuvre collective - 1975
Ce n'est qu'en allant jusqu'au bout des logiques de négociation que l'on peut véritablement dynamiser le système de formation professionnelle qui ne peut être piloté par un acteur public car il doit être ancré dans les logiques de relation formation emploi et doit faire l'objet d'une appropriation par les acteurs de terrain.
Negociationcollectiveetformationprofessionnelle-chronique...
06:12 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réforme, formation, négociation collective