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29/01/2016

H comme...HORS TEMPS DE TRAVAIL

Le temps n’attend pas (Lénine)

 La loi Macron sur le travail du dimanche, ce pourrait être la revanche des marchands du temple, expulsant les fidèles de l’Eglise pour les conduire dans les galeries marchandes.

A moins qu’il ne s’agisse plus simplement d’une dilution des frontières qui structuraient la vie sociale : jeunesse, éducation, travail, loisirs, retraite, ces temps autrefois étanches se superposent à profusion et jouent aux quilles avec nos repères.

HORS TEMPS DE TRAVAIL.jpg

Egilse moderne

La porosité de la vie personnelle et professionnelle, du temps travaillé et de celui qui ne l’est pas, trouve un écho dans les temps de formation : quand se forme-t-on ? Dans une salle de formation ? Devant son écran ? En discutant avec des amis ? En lisant ? En travaillant ? Au cours d’une ballade en campagne ou en bord de mer, ou en grimpant sur les cimes, comme Nietzsche ? Et pourquoi pas sur la ligne 14, entre Saint-Lazare et Olympiades (15 mn) avec son Iphone ?

Ces questions nous livrent le début de la réponse : pour qu’il y ait de la formation en dehors du temps de travail, il faut vraiment que la formation prenne d’autres formes que le travail.

Commentaires

Le problème de nombreux Français c'est que sur ou hors temps de travail ils ne se forment guère (et ceci à tous les âges). Le CPF en prônant la formation hors temps de travail n'a pas pris la mesure des blocages qui existent en la matière.
Personnellement je crois que les 35 h devraient disparaître et la différence entre 35 et 40 h exclusivement consacrée à la formation (variée) des travailleurs. Celui qui refuserait de se former repasserait à 40 h.
La réforme de la formation n'a pas eu le courage de ré-interroger tout le travail et sans cette remise à plat les travailleurs ne se formeront pas plus demain qu'hier (peut être même moins du fait de la réforme et de la baisse importante des ressources formation)

Écrit par : cozin | 30/01/2016

Peut-être que le problème vient du modèle d'enseignement très scolaire qui prédomine en France. On va à la formation comme on va à l'église : à reculons. L'enseignant en France doit être un maître - il doit tout savoir sur sa matière, puis savoir le dispenser lors d'un interminable monologue. La pédagogie se réduit souvent à des échanges basés sur le renforcement négatif : on "corrige" les "fautes" (vocabulaire chargé s'il en est), car l'élève, vaisseau vide de connaissance, doit progressivement se remplir du savoir dispensé par le maître.
Les qualités pédagogiques, la capacité à motiver les stagiaires, à rendre l'apprentissage intéressant, vivant, ludique, à valoriser l'apprenant ne sont guère des qualités recherchées pour un enseignant. Ils sont quasi absents de la formation des professeurs, que ce soit au niveau du Capes ou de l'Agrégation (l'exception est le primaire, où les maîtres sont beaucoup plus formés à la pédagogie, d'après ce que j'ai pu constater).
C'est encore plus vrai en fac ou dans les salles de formation des entreprises. J'ai toujours été très surpris des réactions de mes étudiants universitaires ou de mes stagiaires en formation continue. Combien de fois m'ont-ils dit qu'ils appréciaient mes cours car ils étaient très différents de ceux qu'ils avaient connu jusqu'à là. Les mises en situation, la participation active, le travail en petit groupe, les jeux, l'encouragement et le renforcement positifs étaient des activités quasiment inconnues pour eux.
Autre phénomène : un nombre non négligeable de mes stagiaires en cours d'anglais étaient littéralement traumatisés par l'apprentissage scolaire qu'ils avaient subi. Ils n'osaient pas ouvrir la bouche, car l'expérience d'être appelés à s'exprimer devant leur camarades en anglais, avec un professeur qui se moquait de leur accent et les corrigeait avec sévérité, leur avait donné un syndrome de stress post-traumatique.
Mais au-delà de ce modèle négatif (je force le trait bien entendu - il y a des formateurs et des enseignants qui adoptent une toute autre attitude), il faut aussi tenir compte du parcours d'obstacles bureaucratique qu'on a dressé devant le postulant individuel à un CPF. C'est un système apte à rebuter les plus motivés.

Écrit par : andrew wickham | 30/01/2016

Un représentant syndical (ils étaient TRES nombreux, ainsi que les opca, les universitaires, les institutionnels lors des UHFP à Biarritz, de Centre Inffo) m'expliquait que cette loi était une véritable chance pour tous les salariés ; qu'ils pourraient se former, acquérir des diplômes... bref ! changer de vie...) Le pire qu'elle semblait y croire cette enseignante siégeant au RNCP. Et de me demander mon avis ! L'entretien, viril mais correct (c'est elle qui a commencé msieu), s'est soldé par :
Elle, presque naïve et désolée: je ne pensais pas que c'était aussi dramatique
Moi : Et oui, c'est la vraie vie.

Écrit par : sylvain | 30/01/2016

Ma pierre dans ce jardin désolé de la formation :
http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-148946-formation-professionnelle-plus-dure-sera-la-chute-1196442.php

Je pense qu'aujourd'hui les pouvoirs publics ont pris conscience (ou alors ce serait à désespérer de l'intelligence des technocrates) du mal qu'ils avaient fait à la formation en 2013/2014 (il suffit d'aller dans une entreprise pour voir l'état des apprentissages), le problème est que 4 ministres du travail se sont succédés sur un sujet qui ne passionne guère les Français et qu'aujourd'hui il est moins risqué politiquement de maquiller les chiffres et de prétendre que ça va mieux (les statistiques officielles ont fort opportunément disparu avec la 2483) que d'admettre qu'on a pu se tromper sur toute la ligne au niveau économique, social et éducatif.

Le réveil sera difficile en 2017 mais les fossoyeurs de la formation seront loin du terrain sans doute.

Écrit par : cozin | 31/01/2016

@sylvain : il fait peu de doute que l'immense majorité des réformateurs est de totale bonne foi et pense véritablement que la réforme contribue à améliorer le système (je réserve quelques petits malins qui trouvent intérêt à ce qui se passe et font leur business en loucedé). Ce qui démontre d'autant plus la distance entre ceux qui bâtissent un système et ceux qui sont censés l'utiliser. Sinon, 54-3 cela fait bien longtemps qu'on s'était pas fait plaisir de cette manière.
@cozin : même si je partage en partie votre analyse, il me semble qu'elle oublie totalement les quelques innovations (il y en a) et évolutions positives que la réforme créé et plus souvent accompagne, et d'autre part quelques constats sont un peu trop généraux pour être totalement pertinents. Par exemple, lorsqu'on ne supporte pas d'entendre que seul le public doit former et que le privé ce sont des marchands de soupe on évite d'utiliser l'argument inversé en déclarant qu'il n'y aurait aucune innovation dans le public et de la performance que dans le privé. Le choc des caricatures ne mène pas loin. Enfin il faudra d'autres arguments pour me faire regretter la 2483 :-). Je publierai mardi une contribution sur l'impact de la loi du 5 mars 2014 dans le cadre des auditions réalisées par JP Gilles et Gérard Cherpion.

Écrit par : jpw | 31/01/2016

@jpw

Chère Jean Pierre,

JE fais partie de ceux qui dès les prémisses de la réforme (ANI du 11 janvier 2013) ont prédit que les partenaires sociaux comme les pouvoirs publics allaient dans le mur avec une réforme de la formation qui ne voulait pas comprendre pourquoi la formation marchait mal en France (j'ai passé 25 ans à l'EN et je connais un peu la situation de cette centenaire décatie).

Je ne crois pas que les "réformateurs" étaient de bonne foi (je parle de M Sapin, de JP Gilles et de quelques autres). Ils ont agit tout comme les communistes agissaient sous Staline, c'est à dire avec l'idée qu'il valait mieux avoir tort avec le parti (le Président en l'occurrence) que raison sans le parti.
Il faut bien comprendre que l'idéologie socialiste (ou communiste, une de ses variantes) est née au moment du démarrage de la société industrielle, une époque totalement différente de la notre où aussi bien en Amérique qu'en Europe l'important était le nombre de divisions qu'on était capable d'aligner (la qualité importait moins que la quantité).

Le socialisme en France s'est mêlé à l'appareil d'Etat depuis l'après guerre (notamment via l'ENA) pour former un complexe politique et social qui a intérêt à ce que le système perdure pendant encore des dizaines d'années :

- une fonction publique surnuméraire et surpayée (un proche vient de prendre sa retraite de fonctionnaire moyen, 61 ans, des voyages toute sa vie au frais de la princesse et 5 000 euros de retraite qui lui seront payés pendant sans doute une trentaine d'années)

- Une administration qui étouffe le pays, complexifie tous les dossiers et dégoutte les français du travail (lire à ce sujet le Magazine le Point consacré à la bureaucratie en France)

- un eco-système (journalistes, parlementaires, attachés, chargés de mission, fonctionnaires des ministères...) qui vit de la "réforme", des changements de lois et de règlementation sans que ces changements soient utiles au pays

Cette réforme (qui n'est pas une réformette selon la ministre du travail) c'était la réforme de trop, un cocktail délétère d'idéologie (l'Etat peut et fait tout), de mauvaise foi (seuls les OF publics sont honnêtes), de mensonges ((il y a trop d'argent en formation et le DIF ne servait à rien).
Aujourd'hui (comme je l'ai écrit à G Cherpion, rencontrés pour la précédente réforme et JP Gilles, petit soldat du hollandisme qui n'a pas eu l'intelligence et le courage de comprendre ce qu'il faisait voter) la formation est à terre. L'immense majorité des entreprises que nous connaissons n'ont plus de projet de développement de la formation, juste un plan réduit et les affaires courantes (formations obligatoires) . Les salariés eux sont laissés face à un site impensé et inconstruit qui se contente d'égrainer des heures de formation (le signal qui leur est donné est de ne plus se former pour laisser les chômeurs retrouver une formation et du travail).

Pendant ce temps France Stratégie (et d'autres) nous expliquent que l'education nationale va mal (mais on supprime le latin pour l'améliorer) et que le numérique est une chance pour le pays (mais on forme sur de la bureautique ou du Microsoft certifiant).

Bref nous sommes arrivés au bout d'un système qui plante le pays depuis les années 80 (et que la Droite n'a pas eu le courage de remettre en cause)
Les optimistes diront que c'est le début d'un nouveau cycle, les pessimistes que nous prenons le chemin d'un déclassement définitif pour le XXI ème siècle.

Écrit par : cozin | 01/02/2016

Erratum : il fallait lire Cher Jean pierre

Écrit par : cozin | 01/02/2016

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