10/11/2015
Savoir y faire
Comme la langue de l'ami Denimal a fourché pendant son intervention, une petite précision s'impose. Redisons-le donc une nouvelle fois, peut être pas la dernière : le savoir-être est un concept inepte et la trilogie savoir, savoir-faire, savoir-être une impasse opérationnelle. Autrement dit, il n'y a pas plus de savoir-être que d'intelligence situationnelle dans la dernière réforme de la formation.
Reprenons :
1) La compétence est définie comme la capacité à réaliser certaines activités. Elle se traduit donc toujours par du faire. Pas d'activité, pas de compétence. L'existence même de la compétence suppose donc toujours une action de faire.
2) Pour exercer une activité, tout individu mobilise des ressources : elles peuvent être "incorporées", c'est-à-dire internes à l'individu, ou bien "externes"c'est à dire obtenues de l'environnement au moment où on doit les utiliser.
3) La formation n'apporte pas des compétences. Elle apporte des ressources, qui sont autant de promesses de compétence. Elle peut aussi permettre de s'entraîner à combiner des ressources par la mise en situation, la résolution de problèmes, etc.
4) L'être ne relève pas du champ de la formation professionnelle mais au moins depuis Parménide, d'une philosophie de l'existence qui peine encore à en tracer les contours.
5) Et si l'on utilise plus simplement connaissances, capacités et comportements, on a une trilogie plus efficiente. Les connaissances renvoient aux ressources (qu'elles proviennent de la formation, de l'expérience ou de l'environnement), les capacités à ce que l'on est capable de faire et les comportements à la manière dont on s'y prend pour mettre en oeuvre ses capacités. Et ici j'ose penser que l'expert en classifications Denimal appréciera la distinction entre ce que l'on sait faire et la manière dont on le fait. La première partie peut être collective (et donc relever de la définition de l'emploi) alors que la deuxième partie est nécessairement individuelle et relèvera d'un système d'appréciation.
Pour les sceptiques, petite épreuve : essayez le baiser de cinéma avec le savoir-être. Il risque de manquer de saveur sauf à être un adepte du tantrisme. Mieux vaut savoir y faire.
00:54 Publié dans PEDAGOGIES | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : compétence, savoir, être, faire, travail, expérience, éducation, pédagogie, cinéma, baiser
Commentaires
Personnellement entre savoir être et comportement je ne vois pas trop la différence.
Une chose est certaine en tout cas c'est qu'une personne incompétente peut acquérir (avec du travail et de la pratique) des compétences (et même devenir experte) alors qu'une personne incapable de communiquer avec les autres, de collaborer ou de travailler en équipe, cette personne n'a guère d'avenir dans une entreprise.
Fort malencontreusement c'est le genre de compétences (le savoir être) sur lesquelles l'école n'a pas d'avis ni de volonté d'éducation (avoir fait disparaître récemment la note de vie de classe démontre bien qu'on continue à l'école de noter les seules connaissances individuelles).
Écrit par : cozin | 10/11/2015
@cozin : la différence est la même qu'entre évaluer une personne (ce qu'elle est) et évaluer son travail (comportement : ce qu'elle fait). D'où le danger de la notion de savoir être.
Écrit par : Jpw | 10/11/2015
le savoir être c'est la façon de se comporter, d'écouter et de travailler avec les autres, je ne vois pas où se trouve le problème, c'est toujours sur les manifestations extérieures de ces compétences (ou incompétences) sociales que sera jugé le travail de la personne, pas sur sa pensée intime, ses convictions morales ou politiques bien évidemment.
Écrit par : cozin | 10/11/2015
Je lance une pétition pour le rétablissement du DIF
https://secure.avaaz.org/fr/petition/Ministre_du_Travail_Retablir_le_Droit_a_la_Formation/?myWwejb
La comédie a assez duré avec le CPF, les entreprises comme les salariés sont dégoutés par la formation. Plus aucun projet ni avenir ne se dessine en formation et pendant ce temps des commissions syndicales multiplient (en vain) l'attribution d'heures de CPF pour les chômeurs (200 h hier). A quoi bon compter les heures sur ce stupide compteur si les chômeurs peuvent se former sans limites ? (ce qui ne nous gène pas).
A quoi bon avoir retiré le DIF des salariés et tué la formation pour cette bouillie qu'est la réforme et le CPF ?
J'invite tous les professionnels de la formation qui sont atterrés par la réforme et ses conséquences à demander le rétablissement du seul dispositif de formation utile qui a été créé depuis 20 ans en France : le DIF (qui demeure d'une façon totalement illogique pour les 5,5 millions de fonctionnaires et les 600 000 élus locaux)
https://secure.avaaz.org/fr/petition/Ministre_du_Travail_Retablir_le_Droit_a_la_Formation/?myWwejb
Écrit par : cozin | 11/11/2015
Bonjour,
Vous savez les pétitions...
Il y a en déjà eu une initiée par les "hiboux". Elle donne des scores décevants. Il est vrai toutefois qu'elle n'est guère connue.
Il ne faudrait pas faire grand-chose pour transformer le CPF en un DIF amélioré. Supprimer tout lien avec des certifications serait un grand pas. (Il y a d'autres moyens pour éliminer les formations farfelues). J'avais dit d'ailleurs dès le début qu'une logique de listes était problématique. En regardant les archives de ce blog, on pourra facilement le constater.
Pour ce que cela marche, il faut vraiment une mobilisation générale comme celle des avocats en ce moment.
Écrit par : bcallens | 11/11/2015
Les commentaires sont fermés.