30/06/2013
Can you feel the spirit ?
Plus jeune, il ressemblait à Al Pacino. Aujourd'hui il fait penser à De Niro. Il y a pire, vous en conviendrez. Sans doute l'ascendance italo-irlandaise n'a t'elle pas totalement déserté ce visage qui sourit pendant plus de trois heures de spectacles où les titres s'enchaînent en une seule et longue traversée de l'amérique, des sentiments, des rêves et de la vie qui va. Avec Bruce Springsteen, vous êtes sur une route sans fin, le réservoir est toujours plein, le plaisir de bientôt retrouver votre amour et vos amis vous accompagne, ainsi que la nostalgie de ne pas les avoir déjà auprès de vous, et une voix vous lit Whitman et Faulkner tandis que vous roulez toujours. Pas besoin d'effets spéciaux, de sons et lumières, de gadgets technologiques : la technique est au service de l'artisanal.
Dans le froid et pâle Stade de France, on peut à la fois se croire à un concert Rock au milieu des champs, à une session de Jazz dans un Club de Chicago, à une marche musicale à la Nouvelle Orléans ou dans un club Irlandais de New-York. Parce que finalement peu importe le lieu, l'important c'est l'esprit.
Et dans un vieux pays de la vieille Europe, la France, dont le discours est envahi par les souches et les racines, il est particulièrement réjouissant que ce fils de migrants dans ce pays de migrants, l'auteur de Born in the USA, rappelle que l'appartenance à une communauté c'est avant tout un état d'esprit, et que quand on a l'esprit large, la communauté l'est tout autant.
Someday this childish dreams must end
To become a man and grow up to dream again
16:54 Publié dans CHRONIQUE DE WEEK-END | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : springsteen, the boss, paris, stade de france, musique, concert, esprit
30/11/2010
Formation de la mémoire, mémoire de la formation
Les titres avec inversion, autrement dit les chiasmes, fleurent bon les années 70. L'occasion de se replonger dans un article de René Pucheu, paru en Octobre 1974 dans la revue Esprit. Pucheu, décédé en 2008, était un catholique de gauche proche d'Emmanuel Mounier et du personnalisme. C'était surtout un humaniste véritable, c'est à dire dans les actes et les mots qu'il dissociait très peu. Trois ans après la loi de 1971, Pucheu écrit un article qui ouvre un numéro spécial de la revue Esprit consacré à la formation professionnelle. De quoi parle-t-il ? du fait que l'éducation permanente vient de bien plus loin que de Mai 68 et des accords de Grenelle.
Joan Miro - Mai 68
Il parle également de l'enthousiasme patronal pour qui la formation est un outil de la performance économique, et de l'enthousiasme syndical pour qui la formation est un outil de libération et un pas de plus vers, selon les syndicats, la société socialiste ou l'autogestion. Il évoque également ceux qui opposent à tort culture et formation professionnelle, ceux qui posent déjà la question de la place du savoir être ou du positionnement du formateur, il constate que le procès des marchands de soupe a déjà commencé, plus idéologique que fondé, il relaie le fait qu'en trois ans à peine le droit de la formation est devenu un maquis dans lequel seuls quelques spécialistes savent s'orienter, etc. Bref, tous les débats actuels sont quasiment déjà posés, dans des termes qui n'ont pas été vraiment renouvelés si l'on excepte une certaine "marxisation" du vocabulaire, très pregnante à l'époque et oubliée depuis. A propos d'oubli, on est surpris que deux générations plus tard, les termes du débat restent les mêmes. Comme si nulle mémoire n'était à l'oeuvre pour permettre de les dépasser.
Félix Labisse - De mémoire
Deux phénomènes se sont sans doute conjugués pour expliquer ce surplace. Le premier tient à ceux qui auraient pu transmettre les débats et les faire avancer : leur pensée c'est souvent figée dans une hagiographie nostalgique de leur jeunesse perdue mais brandie comme un drapeau qui n'a guère séduit les générations suivantes. Ils ont contribué à faire de pertinentes questions un radotement égotiste. Le second tient à ceux qui auraient pu recevoir. Désireux de reconnaissance personnelle, nés à une période où le meurtre du père n'était plus un tabou mais un rituel, ils ont perdu la mémoire et l'histoire avec. Résultat, nous nous retrouvons 40 ans plus tard avec les mêmes questions et toujours pas de réponses aux questions fondamentales posées par René Pucheu : la formation pour qui ? par qui ? de quoi ? comment ? et pourquoi ?
Une manière comme une autre de rappeler que pour débattre de ces questions, l'histoire et le droit sont toujours les bienvenues.
00:06 Publié dans ACTUALITE DE LA FORMATION, DROIT DE LA FORMATION | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pucheu, formation, mai 68, esprit, mémoire, labisse, miro