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30/11/2010

Formation de la mémoire, mémoire de la formation

Les titres avec inversion, autrement dit les chiasmes,  fleurent bon les années 70. L'occasion de se replonger dans un article de René Pucheu, paru en Octobre 1974 dans la revue Esprit. Pucheu, décédé en 2008, était un catholique de gauche proche d'Emmanuel Mounier et du personnalisme. C'était surtout un humaniste véritable, c'est à dire dans les actes et les mots qu'il dissociait très peu. Trois ans après la loi de 1971, Pucheu écrit un article qui ouvre un numéro spécial de la revue Esprit consacré à la formation professionnelle. De quoi parle-t-il ? du fait que l'éducation permanente vient de bien plus loin que de Mai 68 et des accords de Grenelle.

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Joan Miro - Mai 68

Il parle également de l'enthousiasme patronal pour qui la formation est un outil de la performance économique, et de l'enthousiasme syndical pour qui la formation est un outil de libération et un pas de plus vers, selon les syndicats, la société socialiste ou l'autogestion. Il évoque également ceux qui opposent à tort culture et formation professionnelle, ceux qui posent déjà la question de la place du savoir être ou du positionnement du formateur, il constate que le procès des marchands de soupe a déjà commencé, plus idéologique que fondé, il relaie le fait qu'en trois ans à peine le droit de la formation est devenu un maquis dans lequel seuls quelques spécialistes savent s'orienter, etc. Bref, tous les débats actuels sont quasiment déjà posés, dans des termes qui n'ont pas été vraiment renouvelés si l'on excepte une certaine "marxisation" du vocabulaire, très pregnante à l'époque et oubliée depuis. A propos d'oubli, on est surpris que deux générations plus tard, les termes du débat restent les mêmes. Comme si nulle mémoire n'était à l'oeuvre pour permettre de les dépasser.

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Félix Labisse - De mémoire

Deux phénomènes se sont sans doute conjugués pour expliquer ce surplace. Le premier tient à ceux qui auraient pu transmettre les débats et les faire avancer : leur pensée c'est souvent figée dans une hagiographie nostalgique de leur jeunesse perdue mais brandie comme un drapeau qui n'a guère séduit les générations suivantes. Ils ont contribué à faire de pertinentes questions un radotement égotiste. Le second tient à ceux qui auraient pu recevoir. Désireux de reconnaissance personnelle, nés à une période où le meurtre du père n'était plus un tabou mais un rituel, ils ont perdu la mémoire et l'histoire avec. Résultat, nous nous retrouvons 40 ans plus tard avec les mêmes questions et toujours pas de réponses aux questions fondamentales posées par René Pucheu : la formation pour qui ? par qui ? de quoi ? comment ? et pourquoi ?

Une manière comme une autre de rappeler que pour débattre de ces questions, l'histoire et le droit sont toujours les bienvenues.

Esprit-RenéPucheu.pdf

 

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