Etait-ce du second degré ? décider de l'entrée en vigueur du nouveau code du travail en ce 1er mai de défilés unitaires et d'anniversaire de mai 68 manifeste peut être la volonté du législateur de démontrer ce qui n'est pas une évidence, à savoir qu'il peut avoir de l'humour.
Ne cherchons pas trop loin, la date initiale était plus précoce, et la date du 1er mai tient surtout au retard pris. Toujours est-il qu'en ce premier mai les 16 Millions de salariés du secteur privé sont dotés d'un code tout neuf, entièrement réécrit mais, nous dit-on, à droit constant.
L'édition 2008, la 70ème pour Dalloz, est, comme le printemps et la végétation, en retard.
Dissipons immédiatement un malentendu : le droit étant de la littérature, il ne peut y avoir de réécriture à droit constant. La forme impacte nécessairement le fond. Le nouveau code aura donc des incidences sur l'application du droit et les magistrats ne pourront pas longtemps aller chercher dans le code ancien les dispositions y figurant pour être certains que la nouvelle version est bien du droit constant. Un tel mode de raisonnement reviendrait à appliquer deux codes. Or il n'en existe plus qu'un, réécrit.
Le travail de réécriture, s'il présente sans doute des défauts ou des choix discutables, s'il a fait passer sans autre forme de procès plusieurs dizaines de dispositions de la loi au règlement, ce qui permet au Gouvernement de modifier des règles sans passer par le Parlement, s'il peut susciter le doute sur certaines simplifications n'a manifestement pas été conduit avec une intention maligne dissimulée derrière un prétendu travail de simplification. La bonne foi a largement présidé aux travaux auxquels les syndicats ont été associés même s'ils n'ont pas joué dans la réécriture le premier rôle.
Par contre, la réécriture intégrale, le nouveau découpage du code, le passage à des articles à 4 chiffres, etc. perturbent l'expertise du juriste qui doit remettre l'ouvrage sur le métier, mais on doute que cela lui soit nocif. Et puis, le nouveau code étant plus facile à appréhender pour le néophyte, même s'il ne faut rien exagérer quant à sa lisibilité, il peut contribuer à un meilleur dialogue entre spécialiste et béotien.
De l'avis général toutefois, il faudra de longues années pour que l'on prenne toute la mesure de ces nouvelles tables de la loi, au fur et à mesure que leurs dispositions seront invoquées devant les tribunaux. Faut-il moins de temps pour appréhender totalement les tables de la loi que nous fournit René Magritte ?
Magritte - Les tables de la loi - 1966