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02/07/2015

Une bureaucratie sans qualité

On avait pas besoin d'attendre la publication du décret sur la qualité des prestations de formation pour savoir qu'on allait encore apporter une réponse absurde à la française (des textes, des obligations administratives, de la bureaucratie) à une question pourtant pertinente. Et puisqu'on me demande mon avis, je me fais un plaisir de le donner. 

INTERVIEW PUBLIEE PAR WK-RH 

« Le décret sur la qualité des formations répond peu sur le résultat, pas du tout sur l’efficacité »

Pour ce spécialiste de la formation professionnelle, le décret paru le 1er juillet imposant des critères pour contrôler la qualité des entreprises du secteur est une aberration qui répond bureaucratiquement à un objectif pourtant légitime.

par Manuel Jardinaud 02/07/2015 Liaisons Sociales Magazine

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Les six critères retenus pour contrôler la qualité des actions de formation financées par les OPCA, les régions ou Pôle emploi ont été publiés le 1er juillet par décret. Qu’en pensez-vous ?

On crée une obligation pour les financeurs, dont les OPCA, de regarder que les organismes de formation respectent eux-mêmes une obligation de qualité. De fait, ce texte crée un marché fermé de la formation continue, sous couvert de qualité, en introduisant une règlementation stricte pour l’accès au marché. On dit que la formation est libre et on crée des obligations pour y accéder. Il y a là une forte hypocrisie des acteurs. Il n’est pas exclu que de petits organismes ou des formateurs individuels ne puissent remplir ces critères très bureaucratiques alors qu’ils délivrent une formation de qualité. En fait, le texte se concentre sur des critères de structure, très peu sur le résultat et pas du tout sur l’efficacité.



Les organismes de formation devront être labellisés ou certifiés au plus tard en janvier 2017. N’est-ce pas un gage de qualité pour les salariés et les demandeurs d’emploi ?

Il faudrait prouver qu’un organisme de formation certifié ISO est plus performant qu’un autre sans label ni certification. Cela part d’un a priori non vérifié sur l’évaluation de la formation. C’est une réponse très mauvaise à une question par ailleurs légitime. En outre, cela peut créer un contentieux infini : un refus de financement aura une dimension arbitraire. C’est ce qui se passe déjà pour les bilans de compétences : les Opacif doivent labelliser les prestataires. En fait, ils ouvrent grand leurs listes, qui n’ont pas d’effet de filtre, et déréférencent quand il y a un problème. C’est une sanction a posteriori, pas toujours transparente, qui ne règle rien sur la qualité.



Qu’aurait-il fallu faire pour améliorer la qualité des formations ?

Je pense que l’on aurait très bien pu mettre en place un site de notation par les utilisateurs, salariés et demandeurs d’emploi, comme cela se fait dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie. On aurait ainsi un effet bien plus fort et rapide. En outre, je crois qu’il aurait fallu augmenter les frais de gestion des OPCA pour leur permettre d’envoyer des gens sur le terrain pour vérifier sur place les actions de formation. Quand un OPCA a la capacité de bien connaître les prestataires, c’est le meilleur moyen d’avoir des formations de qualité et d’éviter la fraude. Avec ce décret, cela reste très administratif et centralisé et ne changera rien au final, à part exclure quelles petites structures. La qualité de la formation passe par la professionnalisation et une présence des financeurs auprès des organismes, pas par des textes et des nouveaux dossiers à ficeler.